La lettre juridique n°427 du 10 février 2011 : Impôts locaux

[Jurisprudence] Vers une clarification des coûts à prendre en compte pour fixer la participation financière des constructeurs dans une zone d'aménagement concerté à usage principal d'habitation (ZAC)

Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 23 décembre 2010, n° 307124, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6970GNH)

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par Guy Quillévéré, Rapporteur public près le tribunal administratif de Nantes

le 15 Février 2011

Le Conseil d'Etat, par un arrêt du 23 décembre 2010, juge que, en application des dispositions combinées des articles 1585 C du CGI (N° Lexbase : L0227IKM) et L. 311-4-1 ancien du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L7405ACA), les coûts qui ne se rattachent pas à la réalisation des équipements publics destinés à satisfaire les besoins des futurs habitants ou des usagers des constructions à édifier dans la zone ne peuvent être mis à la charge des constructeurs.
Les faits dans cette affaire sont les suivants : la commune de Vias (Hérault) a, par une délibération de son conseil municipal du 27 juillet 1987, confié à la société d'équipement du Biterrois et de son littoral (SEBLI), selon des modalités fixées par une convention de concession du même jour, la réalisation d'une zone d'aménagement concerté à usage principal d'habitation dite "ZAC de Vias plage". Par une délibération de son conseil municipal du 29 octobre 1993, la commune a mis à la charge de certains constructeurs une participation financière à la réalisation des équipements publics de la ZAC. La SCI MAM s'est engagée en vertu des stipulations de l'article 5 de la convention de mise en oeuvre du 30 mars 1995 à verser à la commune, à ce titre, une participation d'un montant de 750 francs (114 euros) hors taxes par mètre carré de surface plancher développée hors oeuvre nette majorée de la TVA au taux en vigueur à la date de cette dernière convention. L'article 11 de la même convention stipule qu'une surface commerciale déplacée ne serait exonérée de la participation que si son accès n'était possible que par l'intérieur du terrain de camping où elle se situait. Par un jugement du 20 novembre 2003, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande de la SEBLI et condamné la SCI MAM à verser à celle-ci une somme correspondant au montant de la participation financière au titre de cette surface commerciale dont la SCI MAM avait été initialement exonérée au motif que la condition posée par l'article 11 de la convention de mise en oeuvre n'était pas satisfaite. La cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt du 3 mai 2007 (CAA Marseille, 1ère ch., 3 mai 2007, n° 04MA00326 N° Lexbase : A5339DWN), contre lequel la SCI MAM s'était pourvu en cassation, avait annulé le jugement du tribunal de Montpellier et rejeté la demande présentée par la SEBLI de remettre cette participation à la charge de la SCI MAM.

L'arrêt du Conseil d'Etat, en date du 23 décembre 2010, qui confirme la solution de la cour administrative de Marseille, clarifie les conditions du versement de la participation des constructeurs dans une zone d'aménagement concerté à usage d'habitation. Seuls les coûts, dont il ressort des pièces du dossier qu'ils se rattachent à la réalisation des équipements publics destinés à satisfaire les besoins des futurs habitants ou des usagers des constructions, peuvent être mis à la charge des constructeurs ; il doit donc y avoir un lien direct entre les coûts supportés et les équipements à financer. L'arrêt du Conseil d'Etat précise donc l'articulation des dispositions de l'article L. 311-4-1 du Code de l'urbanisme devenu L. 311-4 du même code (N° Lexbase : L9110IDR) et celles de l'article 1585 C du CGI : lorsque le lien direct prévu par les dispositions de l'article L. 311-4-1 fait défaut entre les équipements publics et les dépenses que doit couvrir la participation, une participation au titre de ces dépenses ne peut être mise à la charge des constructeurs et il n'est, en conséquence, pas nécessaire d'apprécier la proportionnalité des équipements à financer.

I - La participation en zone d'aménagement concerté suppose une articulation des dispositions de l'article 1585 C du CGI et L. 311-4-1 (devenu L. 311-4) du Code de l'urbanisme

La participation financière des constructeurs aux équipements de la zone d'aménagement concerté est définie dans un cadre contractuel et suppose que l'aménageur assure un financement minimal des équipements publics afférents.

A - Lorsqu'un minimum d'équipements publics d'une ZAC est mis à la charge des constructeurs ces derniers supportent une participation financière

Aux termes de l'article L. 311-1 du Code de l'urbanisme, une zone d'aménagement concerté constitue un périmètre d'aménagement à l'intérieur duquel une collectivité publique décide que les terrains seront aménagés et équipés. Les dispositions de l'article 1585 C du CGI prévoient de leur côté que, dans la mesure où les terrains compris dans cette zone ont vocation à être "aménagés" et "équipés" et, lorsque l'aménageur assure un financement minimal des équipements nécessaires, les constructions ne sont pas assujetties au paiement de la taxe locale d'équipement (TLE). En application de ces dispositions combinées, trois catégories de constructions sont exonérées de la TLE : les constructions destinées à être affectées à un service public ou d'utilité publique, les constructions édifiées dans les zones d'aménagement concerté lorsque le coût des équipements a été mis à la charge des constructeurs et les constructions réalisées dans certains lotissements.

Se sont les dispositions de l'article 317 bis de l'annexe II du CGI (N° Lexbase : L2718IEE) que fixent la liste des équipements visés par l'article 1585 C du même code, la disposition règlementaire précisant que ces équipements doivent correspondre aux seuls besoins des habitants ou usagers de la zone. Le plus souvent le constructeur contribuera à l'aménagement de la zone par le biais de travaux. Le contrôle du juge sur la fixation des dépenses mises à la charge des constructeurs est un contrôle restreint (CE Contentieux, 4 novembre 1994, n° 129531 N° Lexbase : A3600AS7) et porte sur la fixation des besoins futurs et actuels du secteur (CAA Lyon, 2ème ch., 24 février 1994, n° 93LY00313 N° Lexbase : A2828BGT).

B - Le régime juridique des participations en zone d'aménagement concerté est défini dans un cadre contractuel

La loi "SRU" du 13 décembre 2000 (loi n° 2000-1208, 13 décembre 2000 N° Lexbase : L9087ARY) a clairement posé le caractère impératif de la participation des constructeurs au financement des équipements publics réalisés dans la ZAC, les modalités de cette participation étant définies dans un cadre contractuel ainsi que le prévoient, d'ailleurs, les dispositions de l'article L. 332-9 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L7540ACA). Les dispositionsde cet article ont pour objet de prévoir la réalisation d'un programme d'équipements et de permettre que soit mis à la charge des constructeurs tout ou partie du coût de ceux-ci pour répondre aux besoins des habitants futurs ou des usagers des constructions à édifier dans le périmètre (CE Contentieux, 17 janvier 1997, n° 183072 N° Lexbase : A8251ADX). Une ZAC peut, alors, être incluse dans un programme d'aménagement d'ensemble (PAE) (TA Nice, 7 avril 1994, n° 921606).

En l'espèce, la commune de Vias (Hérault) avait, par une première délibération de son conseil municipal du 27 juillet 1987 confié à la société d'équipement du Birrerois et de son littoral (SEBLI), selon les modalités d'une convention de concession la réalisation de la ZAC, puis par une seconde délibération mis à la charge des constructeurs une participation financière à la réalisation des équipements publics de la zone. Le conseil municipal n'a pas l'obligation de moduler les participations entre les diverses catégories de constructions (CE Contentieux, 11 décembre 1996, n° 150175 N° Lexbase : A2210APK), une fixation forfaitaire est donc régulière. En présence d'un programme d'aménagement d'ensemble la délibération approuvant la mise en oeuvre du PAE détermine le périmètre, la nature, de délai de réalisation du programme des équipements publics et fixe la part de dépenses mises à la charge des constructeurs (TA Rennes, 2 juin 1994).

II - Les coûts supportés par les constructeurs d'une ZAC ne peuvent être mis à leur charge que s'ils sont en lien direct avec la réalisation d'équipements publics destinés aux usagers ou futurs habitants

La participation mise à la charge de l'aménageur doit être en lien direct avec les équipements à réaliser et, dans ce cas, proportionnée aux coûts des équipements à réaliser.

A - L'existence d'un lien direct est une condition nécessaire à l'assujettissement des constructeurs à la participation financière

L'exclusion du champ d'application de la taxe locale d'équipement implique qu'un équipement public minimum soit mis à la charge notamment des constructeurs de la ZAC, mais l'article L. 311-4-1, devenu L. 311-4, du Code de l'urbanisme impose parallèlement de respecter les principes de lien direct et de proportionnalité des équipements publics à financier. Le Conseil d'Etat vient préciser, sous son arrêt du 23 décembre 2010, que les coûts qui ne se rattachent pas à la réalisation des équipements publics destinés à satisfaire les besoins des futurs habitants ou des usagers des constructions à édifier dans la zone ne peuvent être mis à la charge des constructeurs. Cette jurisprudence rejoint la doctrine administrative qui rappelle la nécessité de fixer le montant de la participation sans excéder le coût réel du financement donc, par exemple, en déduisant les subventions reçues par le maître d'ouvrage.

L'arrêt du 23 décembre 2010 décline, alors, un ensemble de dépenses exposées par la société d'équipement du biterrois et de son littoral (SEBLI) dont il n'est pas établi qu'elles auraient été supportées seulement pour la construction des équipements publics destinés aux usagers de la zone et qui recouvraient des frais d'études générales pré-opérationnelles, des frais financiers, des frais de commercialisation et des frais généraux. La cour administrative d'appel de Paris avait jugé, le 8 juillet 2004, que les dépenses à retenir pour fixer le taux pouvaient également comprendre, les honoraires de géomètre, les frais d'actes pour l'acquisition des terrains nécessaires aux équipements publics et les dépenses supportées par la commune au titre de la TVA (CAA Paris, 1ère ch., 8 juillet 2004, n° 03PA03996 N° Lexbase : A2348DDC).

B - Le critère tiré de la proportionnalité est inopérant si les dépenses que couvre la participation ne se rattachent pas à un équipement public

Les dispositions de l'article L. 311-4 du Code de l'urbanisme posent un principe de proportionnalité des équipements publics à financer. Cette proportionnalité a été, dans un premier temps, appréciée par le juge (CE Contentieux, 28 juillet 1989, n° 73779 N° Lexbase : A0657AQE et CE Contentieux, 4 mai 1990, n° 71707 N° Lexbase : A5574AQI) qui a souligné que les seules participation légalement exigibles correspondent à des équipements publics localisés à l'intérieur du périmètre de la zone d'aménagement concerté ou s'ils sont situés à l'extérieur de la zone utilisés de façon prépondérante par les usagers de la zone d'aménagement. Cette règle a été élevée à la dignité législative par la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 (N° Lexbase : L8653AGL), dite loi "Sapin". Toutefois, la loi "Bosson" du 9 février 1994 (loi n° 94-112, du 9 février 1994 N° Lexbase : L8040HHA) est venue assouplir les exigences de la loi "Sapin", en précisant le caractère proportionnel des équipements publics à l'intérêt des usagers de la zone.

Reste qu'il n'est pas nécessaire de rechercher si la proportionnalité est respectée lorsque les dépenses que doit couvrir la participation ne correspondent pas à des équipements publics répondant aux besoins des habitants ou usagers de ladite zone, ce qui est le cas pour les dépenses mentionnées par l'arrêt du 23 décembre 2010.

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