L'article L. 132-8 du Code de commerce (
N° Lexbase : L5640AIQ), conférant au transporteur routier une action en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire institués garants du paiement du prix du transport, n'est pas une loi dont l'observation est nécessaire pour la sauvegarde de l'organisation politique, sociale et économique du pays au point de régir impérativement la situation, quelle que soit la loi applicable, et de constituer une loi de police. Tel est le principe énoncé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation au visa de l'article 3 du Code civil (
N° Lexbase : L2228AB7), ensemble l'article L. 132-8 du Code de commerce et l'article 7, paragraphe 2, de la Convention de Rome du 19 juin 1980 (
N° Lexbase : L6798BHA), dans un arrêt du 13 juillet 2010, soumis à la plus large publicité (Cass. com., 13 juillet 2010, n° 10-12.154, FS-P+B+R+I
N° Lexbase : A3566E4T). En l'espèce, une société (le transporteur) a effectué des transports de jus de fruits d'Espagne vers la France dont elle n'a pas été payée par l'expéditeur. Elle a alors assigné en règlement du prix de ces prestations le destinataire de ces transports, sur le fondement de l'article L. 132-8 du Code de commerce. La cour d'appel a accédé à cette demande et a, en conséquence, condamné le destinataire. Pour ce faire, les juges du fond ont retenu que l'article L. 132-8 du Code de commerce, texte d'ordre public, a vocation à assurer la protection des intérêts économiques des transporteurs auxquels est accordée une garantie de paiement du prix de leurs prestations, dans des conditions concourant ainsi à la sécurité des opérations de transport et que ce texte doit donc être regardé comme une loi de police au sens de l'article 7, paragraphe 2, de la Convention de Rome, lorsque le lieu de livraison des marchandises transportées se situe en France. Mais, énonçant le principe précité, la Cour régulatrice censure la décision des seconds juges. C'est, à notre connaissance, la première fois que la Cour de cassation se prononce sur le sujet, mettant un terme aux divergences jurisprudentielles en la matière (cf. CA Rennes, 5 septembre 2006, pour laquelle l'article L. 132-8 n'est pas une loi de police et CA Montpellier, 8 décembre 2009, jugeant le contraire et cassé par l'arrêt du 13 juillet 2010).
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