Réf. : Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008, de finances pour 2009, art. 87 et art. 91 (N° Lexbase : L3783IC4)
Lecture: 7 min
N5625BI8
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Valérie Le Quintrec, Avocat à la cour, Cabinet Bancel Zuin Lefort - Paris
le 07 Octobre 2010
1.1. Champ d'application du plafonnement
Par principe, seuls les avantages fiscaux octroyés en contrepartie d'un investissement ou d'une prestation sont visés.
Il s'agit principalement des "crédits et réductions d'impôt incitatifs" suivants :
- les investissements dans l'immobilier de loisir ;
- les investissements dans les résidences hôtelières à vocation sociale ;
- les investissements outre-mer ;
- la souscription au capital d'une PME ;
- le crédit d'impôt par télé-déclaration ;
- les Sofica - Sofipêche ;
- la loi "Malraux" ;
- les intérêts d'emprunt pour l'acquisition de la résidence principale ;
- l'aide fiscale pour l'emploi à domicile ;
- le crédit d'impôt pour frais de gardes de jeunes enfants.
Ne sont pas visés les avantages fiscaux liés à la situation personnelle du contribuable (pension alimentaire, handicap...) ou à la poursuite d'un objectif d'intérêt général sans contrepartie (dons aux associations).
Enfin, sont exclus du plafonnement les crédits d'impôt bénéficiant aux entrepreneurs individuels (BIC/BNC/BA) dès lors que ces avantages sont applicables en matière d'impôt sur les sociétés (ex : crédit d'impôt recherche).
De même, les crédits d'impôt correspondant à un impôt payé à l'étranger (sous forme de retenue à la source) sont exclus du dispositif de plafonnement.
1.2. Modalités d'application
Le montant du plafond est uniformément fixé à la somme de 25 000 euros + 10 % du revenu imposable du foyer fiscal (après déduction des charges déductibles du revenu global et des abattements spéciaux).
Exemple : si un contribuable a un revenu imposable proche de 100 000 euros, le plafond des niches fiscales est de : 25 000 + 10 000 = 35 000 euros.
Le revenu imposable à prendre en compte est le revenu net global imposable soumis au barème progressif (à l'exclusion, par conséquent, des plus-values mobilières ou immobilières imposables selon un taux forfaitaire).
En pratique, il y a lieu de procéder à un double calcul :
- montant de l'IR sans crédit d'impôt ;
- montant de l'IR avec crédit d'impôt,
l'écart entre les deux calculs devant être plafonné à 25 000 euros + 10 % du revenu global.
Si ce montant est supérieur au plafond, alors l'excédent est ajouté à l'impôt sur le revenu qui aurait dû être versé en l'absence de plafonnement. La fraction des réductions d'impôt ou des crédits d'impôt dépassant ce plafond est, par conséquent, définitivement perdue.
2. Investissements outre-mer et plafonnement de l'avantage fiscal
Un plafond spécifique de l'avantage fiscal lié aux investissements outre-mer (engagés à compter du 1er janvier 2009) a été instauré par la loi de finances pour 2009.
Au préalable, il convient de rappeler que, dans le cadre des schémas locatifs (1) :
a) le montant du crédit d'impôt est de 50 % ou 60 %, voire même de 70 %, selon différents critères (nature de l'investissement et/ou localisation de l'investissement) (2).
b) les investisseurs, de fait et par impératif législatif, accordent un avantage financier aux exploitants outre-mer puisqu'une quote-part (de 50 % ou 60 %) de l'avantage fiscal doit être extourné au profit de l'utilisateur, sous forme de loyers bonifiés ou de prix de cession faible.
Ne sera abordé, ici, que le plafonnement des avantages fiscaux afférant aux schémas dits locatifs et/ou dans le cadre des investissements immobiliers.
2.1. Plafonnement des réductions d'impôt
Pour une même année d'imposition, le montant des réductions d'IR lié à un investissement outre-mer est, en principe, limité à la somme de 40 000 euros. Toutefois, ce plafond est fixé à 100 000 euros ou 80 000 euros selon que le taux de rétrocession (extourné au profit de l'exploitant local) est égal à 60 % ou 50 % de la réduction d'impôt. En d'autres termes, l'avantage fiscal "facial" extourné au profit de l'exploitant n'est pas pris en compte pour le calcul du plafond de 40 000 euros, seule la réduction d'impôt revenant réellement à l'investisseur (et donc non rétrocédée à l'exploitant) étant retenue pour ce plafond.
Par ailleurs, les contribuables peuvent opter pour un plafonnement égal à 15 % du revenu du foyer. Toutefois, compte tenu de la rédaction de la loi, il n'est pas sûr que la part de la réduction d'IR rétrocédée à l'exploitant soit prise en compte pour le plafond (lorsqu'il est fixé, sur option, à 15 % du revenu imposable).
2.2. Opérations concernées par le plafonnement
Le plafond s'applique aux réductions d'impôt suivantes :
- réductions d'impôt visées à l'article 199 undecies A (N° Lexbase : L3781IAB) (secteur du logement ou sous forme de souscription au capital de certaines sociétés) ;
- réductions d'impôt visées à l'article 199 undecies B (N° Lexbase : L4054IC7) (investissements productifs neufs réalisés dans le cadre d'une entreprise relevant de l'IR, c'est-à-dire "schémas locatifs").
A la différence du plafonnement global des niches fiscales, le montant de la réduction d'impôt dépassant le plafond (propre aux investissements DOM-TOM) est reportable au titre de l'année suivante, mais ces reports sont inclus dans le plafonnement (propres aux investissements DOM-TOM) des années suivantes (3).
2.3. Montant du plafond
2.3.1. Investissements immobiliers
La réduction d'impôt afférente aux investissements immobiliers (art. 199 undecies A) est étalée sur 5 (ou 10) ans. La base de la réduction d'impôt est donc égale à 20 % (ou 10 %) des sommes effectivement payées.
C'est sur la réduction annuelle que s'applique le plafond de 40 000 euros (et non sur le montant total de la réduction d'impôt obtenue).
Exemple : si un contribuable acquiert un immeuble pour 200 000 euros (base défiscalisable), dans le cadre du logement intermédiaire, la base annuelle de la réduction d'IR est de 40 000 euros (200 000 x 20 %).
La réduction annuelle d'IR pour les 5 années est de 50 %, soit 20 000 euros (40 000 x 50 %). Ainsi, cette réduction d'IR est sous le plafond annuel de 40 000 euros.
En pratique, la mesure de plafonnement ne s'applique pas :
a) aux investissements réalisés dans le secteur du logement intermédiaire pour un montant inférieur (ou égal) à 400 000 euros TTC.
NB : le contribuable réalisant un tel investissement ne sera soumis au plafonnement global que s'il bénéficie d'autres réductions d'IR et si son revenu est inférieur à 150 000 euros (25 000 euros + 150 000 x 10 % = 40 000).
b) aux investissements réalisés dans le secteur du logement "libre" pour un montant maximum égal à 500 000 euros (sous réserve, bien entendu, de l'absence d'autres investissements outre-mer et/ou du plafond global).
2.3.2. Schémas locatifs (industriels - art. 199 undecies B)
Dans le cadre des schémas locatifs "industriels", le plafond de 40 000 euros est apprécié en tenant compte de la rétrocession d'une partie de la réduction d'impôt à l'entreprise exploitante (locataire). Ainsi, le plafond de 40 000 euros est applicable à 40 % du montant de la réduction d'impôt lorsque le taux de rétrocession minimal est fixé à 60 %. Il est applicable à la moitié de leur montant lorsque le taux est de 50 %.
De plus, le montant maximal imputable correspondant à la partie rétrocédée de la réduction d'IR est lui-même soumis à un plafonnement spécifique :
- de 60 000 euros dans les cas où l'avantage fiscal obtenu est rétrocédé à hauteur de 60 % à l'exploitant ;
- de 40 000 euros dans les cas où cette rétrocession est de 50 %.
Ainsi, au titre d'une même année d'imposition, le contribuable réalisant des investissements industriels (schémas locatifs) peut au total bénéficier d'un plafond global de 100 000 euros (60 000 + 40 000) si le taux de rétrocession est fixé à 60 % ou 80 000 euros (40 000 + 40 000) si ce taux est fixé à 50 %.
Exemple : un contribuable réalise en 2009 un investissement de 600 000 euros dans le cadre d'un schéma locatif.
Le montant du crédit d'impôt "théorique" est donc de 300 000 euros (600 000 x 50 %). Si 60 % de l'avantage fiscal doit être rétrocédé à l'exploitant, une somme de 180 000 euros (60 % x 300 000 euros) sera (indirectement) versée à l'entreprise locataire.
La partie nette de rétrocession de la réduction d'impôt est donc de 120 000 euros (300 000 - 180 000).
En application de la nouvelle loi, cette partie nette de rétrocession (120 000 euros) ne peut être imputée sur l'IR qu'à hauteur maximum de 40 000 euros pour 2009.
La partie non rétrocédée ne peut être imputée qu'à hauteur de 60 000 euros.
Ainsi, au total, le contribuable peut imputer 100 000 euros (40 000 + 60 000).
Le surplus (200 000 = 300 000 - 100 000) étant reportable sur les 5 années suivantes.
Cependant, le "plafonnement global - article 91" est bien entendu applicable.
Par exception, et sur option, le contribuable peut opter pour un plafonnement fixé à 15 % de son revenu net global imposable (du foyer fiscal). Cette option ne peut être optimale, pour les opérations de défiscalisation hors schémas locatifs, que si le montant du revenu imposable est supérieur à 266 668 euros car 15 % x 266 668 > 40 000 euros.
2.4. Ordre d'imputation
Aucun ordre d'imputation des réductions d'IR n'est prévu par la loi lorsque le contribuable réalise plusieurs investissements outre-mer. La solution la plus favorable consiste à imputer prioritairement les réductions d'IR prévues par l'article 199 undecies A (immobilier principalement) puisque cette réduction d'IR non imputée ne peut être reportée sur les années suivantes (contrairement aux réductions d'IR visées à l'article 199 undecies B du CGI).
2.5. Combinaison avec le plafonnement global
L'article 91 de la loi de finances pour 2009 prévoit un plafond global des réductions d'impôt et crédit d'impôt de 25 000 euros + 10 % du revenu imposable.
Bien entendu, les avantages fiscaux liés aux investissements outre-mer sont visés par le plafonnement global des "niches fiscales".
Il convient donc d'effectuer un double calcul :
- plafonnement propre aux investissements outre-mer ;
- puis le plafonnement global.
Conclusion
Au vu de ce qui précède, il apparaît que la loi sur le plafonnement des niches fiscales cherche à démocratiser la loi "Girardin" et vise à limiter les possibilités de défiscalisation des contribuables les plus fortement imposés. Quelques interrogations techniques restent, cependant, en suspens et seuls les décrets (éventuels) et/ou les commentaires administratifs viendront éclaircir ces éléments.
(1) Sur la notion d'investissements outre-mer et de schémas locatifs externalisés, lire nos obs., La notion d'investissements outre-mer au regard de l'impôt sur le revenu et leur valorisation au regard de l'ISF, Lexbase Hebdo n° 319 du 25 septembre 2008 - édition fiscale (N° Lexbase : N1953BHS).
(2) 60 % pour la Guyane, 60 % pour la rénovation hôtelière, 70 % pour la navigation de plaisance.
(3) Pour des raisons financières, a priori, un investisseur n'a pas d'intérêt à acquérir la réduction d'impôt future (principe du "one shot" des secteurs locatifs industriels).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:345625