Pour apprécier la disproportion d'un cautionnement par rapport aux biens et revenus des cautions à cette date, les juges doivent prendre en compte leurs cautionnements antérieurement souscrits, quand bien même ils les ont déclarés disproportionnés. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 29 septembre 2015 (Cass. com., 29 septembre 2015, n° 13-24.568, FS-P+B
N° Lexbase : A5564NSU). En l'espèce, une banque a consenti à une société un prêt de 480 000 euros (prêt n° 2047790) et à une autre société trois prêts d'un montant respectif de 39 470 euros (n° 2047332), 60 000 euros (n° 2047299) et 30 000 euros (n° 2047301). Le 6 juillet 2007, deux personnes se sont rendues cautions solidaires du remboursement du prêt de 480 000 euros à concurrence, chacun, de 312 000 euros et, le 2 décembre 2007, elles se sont rendues cautions solidaires à concurrence de 23 447,29 euros pour le deuxième prêt et de 54 296,48 euros pour chacun des deux autres. Les deux sociétés créancières principales ayant été mises en redressement judiciaire les 20 juillet et 20 novembre 2008 puis en liquidation judiciaire le 30 mars 2010, la banque a assigné les cautions en exécution de leurs engagements, lesquelles ont invoqué la disproportion de ceux-ci. L'arrêt d'appel (CA Paris, Pôle 5, 1ère ch., 14 juin 2013, n° 11/13799
N° Lexbase : A0444KKN) a, tout d'abord, rejeté la demande en paiement au titre des cautionnements du prêt n° 2047790. Sur pourvoi incident de la banque, la Cour de cassation rejette celui-ci : d'une part, pour apprécier si les cautionnements du 6 juillet 2007 étaient disproportionnés aux biens et revenus des cautions, la cour d'appel n'a tenu compte que du montant total de leurs engagements à cette date, sans prendre en considération ceux résultant de leurs cautionnements, postérieurs, du 2 décembre 2007 et, d'autre part, s'étant elle-même placée, par des conclusions ambiguës, dans l'hypothèse où chaque caution garantirait, indépendamment de l'autre, la somme de 312 000 euros, la banque ne peut utilement reprocher à l'arrêt d'avoir, en retenant un cumul possible des engagements, dénaturé les actes de cautionnement du 6 juillet 2007. Mais surtout, la Cour de cassation, énonçant la solution précitée, censure, au visa de l'article L. 341-4 du Code de la consommation (
N° Lexbase : L8753A7C) l'arrêt d'appel, sur le pourvoi principal de cautions, lesquelles lui reprochait, pour les condamner solidairement à payer certaines sommes au titre des autres prêts, d'avoir retenu que, pris individuellement, les cautionnements consentis le 2 décembre 2007 n'étaient pas disproportionnés aux biens et revenus des cautions à cette date (cf. l’Ouvrage "Droit des sûretés"
N° Lexbase : E8923BXR).
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