Ne peuvent bénéficier de l'immunité de la défense, au sens de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, sur la liberté de la presse (
N° Lexbase : L7589AIW), les discours ou écrits outrageants étrangers à la cause, et excédant les limites des droits de la défense. Par ailleurs, en retenant le délit d'outrage à magistrat, sans rechercher en quoi les propos litigieux, s'ils ne leur avaient pas été directement adressés, seraient nécessairement rapportés aux deux magistrats concernés, alors que le délit prévu par l'article 434-24 du Code pénal (
N° Lexbase : L1937AMP) n'est constitué que lorsqu'il est établi que l'auteur des propos a voulu que ceux-ci soient rapportés à la personne visée, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. Tels sont les enseignements d'un arrêt rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, le 8 septembre 2015 (Cass. crim., 8 septembre 2015, n° 14-84.380, F-P+B
N° Lexbase : A3722NPK). En l'espèce, M. H., convoqué devant le tribunal correctionnel pour y répondre de plusieurs infractions au Code rural, a déposé au greffe de la juridiction des conclusions écrites, dans lesquelles il accusait l'ancien procureur de la République, et la présidente de la chambre correctionnelle de la cour d'appel "
d'agissements mafieux", et "
d'appartenance à une association de malfaiteurs pervers et corrompus". M. H. a été poursuivi, à raison de ces propos, du chef d'outrages à magistrats, au visa des articles 434-24 et 434-25 (
N° Lexbase : L1849AMG) du Code pénal, et condamné à trois mois d'emprisonnement. Il a relevé appel de ce jugement, ainsi que le ministère public. Pour rejeter l'argument du prévenu soutenant l'immunité de la défense, les juges d'appel ont retenu que ces accusations d'une extrême gravité, en ce qu'elles font référence à l'appartenance de deux magistrats à une organisation criminelle, sont totalement étrangères à la cause soumise au tribunal, et sont inutiles à la défense du prévenu pour les faits reprochés, s'agissant uniquement d'exprimer une profonde rancoeur et un mépris à l'égard de personnes à l'origine de précédentes condamnations. Aussi, la cour d'appel, adoptant les motifs du jugement, a jugé que les expressions litigieuses caractérisent sans conteste l'élément matériel du délit d'outrage à magistrat en ce qu'elles constituent des propos outranciers, irrespectueux et injurieux portant atteinte à la dignité et à l'honneur des deux magistrats visés, agissant dans l'exercice de leurs fonctions. Confirmant l'exclusion de l'immunité de la défense, la Cour de cassation, casse, en revanche, l'arrêt sur la qualification retenue, après avoir énoncé les règles susvisées (cf. l’Ouvrage "Droit pénal spécial"
N° Lexbase : E9999EWA).
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