Réf. : Cass. civ. 3, 19 octobre 2023, n° 22-18.825, F-D N° Lexbase : A29281QI
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 14 Novembre 2023
► L’action des professionnels pour les biens ou les services fournis aux consommateurs se prescrivent par deux ans ; le point de départ est la date à laquelle le constructeur a cessé d’intervenir sur le chantier.
Les différentes branches du droit s’entremêlent, se chevauchent et se combinent par conciliation. Tel est très précisément le cas du droit de la responsabilité du constructeur et du droit de la consommation lorsque le constructeur professionnel contracte avec un maître d’ouvrage consommateur et qu’il souhaite obtenir le paiement d’une de ses factures. L’arrêt rapporté en est une illustration relative au délai de prescription biennal prévu par l’article L. 218-2 du Code de la consommation N° Lexbase : L1585K7T.
En l’espèce, des particuliers confient à une entreprise la réalisation de travaux de remplacement des menuiseries extérieures en bois de certaines façades de leur maison. Se plaignant de défauts de conformité et de finition apparus en cours de chantier, ils ont sollicité, après expertise, la responsabilité du constructeur lequel à formé une demande reconventionnelle aux fins de paiement de ses factures.
La cour d’appel de Rennes, dans un arrêt rendu le 7 avril 2022, condamne les maîtres d’ouvrage à payer une des factures du constructeur. Ils forment un pourvoi aux termes duquel ils articulent que l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans. Ce délai de deux ans court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Cette date peut être l’achèvement des travaux ou l’exécution des prestations. La difficulté est, qu’en l’espèce, les travaux n’ont jamais été terminés. Pour autant, il n’est pas possible de considérer que le délai de forclusion n’a pas commencé à courir.
La Cour de cassation censure. Elle rappelle tout de même que les conseillers ont tenté d’appliquer sa jurisprudence. Aux termes d’une solution désormais bien établie (Cass. civ. 3, 1er mars 2023, n° 21-23.176, FS-B N° Lexbase : A18009GR), la Haute juridiction a considéré que, dans le domaine de la construction, ce point de départ est l’achèvement des travaux ou l’exécution des prestations. C’est cette circonstance qui rend sa créance exigible.
Lorsque la prestation n’est pas finie, cela ne signifie pas, non plus, que le délai n’a pas commencé à courir. Ainsi la créance en paiement devient exigible à la date à laquelle le professionnel a cessé définitivement d’intervenir sur le chantier.
La solution mérite d’être approuvée. L’abandon de chantier rendrait la poursuite imprescriptible. Pis, cela reviendrait à primer la médiocrité de celui qui réalise mal ou pas.
C’est donc toujours la question du point de départ du délai qui revient (Cass. civ. 3, 13 février 2020, n° 18-26.194, FS-P+B+I N° Lexbase : A37593EX).
Il faut s’en féliciter, la jurisprudence continue son travail d’harmonisation et, par-là même de simplification des délais de prescription en ce compris leur point de départ.
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