La lettre juridique n°345 du 9 avril 2009

La lettre juridique - Édition n°345

Sécurité sociale

[Textes] Loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion du 25 mars 2009 : la réponse du législateur aux critiques du 1 % logement

Réf. : Loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion N° Lexbase : L0743IDU)

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N0155BKX

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la Sécurité sociale"

Le 07 Octobre 2010

Pour mettre un terme à la crise du logement que connaît actuellement la France, la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (1), propose d'orienter les interventions de tous les acteurs (Etat, collectivités territoriales, associations, professionnels publics et privés) autour de priorités fortes : renforcer l'engagement des organismes d'habitations à loyer modéré et du 1 % logement dans la mise en oeuvre de la politique du logement ; mettre les outils d'urbanisme et de planification au service de la construction de logements ; lancer un programme pluriannuel de rénovation des quartiers anciens dégradés, complément indispensable du programme national de rénovation urbaine ; développer l'accession populaire à la propriété ; permettre l'accès des plus défavorisés à l'hébergement et au logement, pour concrétiser la mise en oeuvre du droit au logement opposable. Par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 (art. 8), le législateur s'est attaché à apporter des réponses aux critiques formulées, notamment, par la Cour des comptes (voir, Rapport annuel 2008 (2)). La loi rénove en profondeur la gouvernance du 1 % logement afin d'améliorer le pilotage et le suivi des actions qui seront mises en oeuvre, en fonction d'objectifs conformes aux priorités de la politique du logement. I - L'organisation du 1 % logement

Cette contribution, dont l'appellation juridique est la "Participation des employeurs à l'effort de construction", a conservé le nom de 1 % logement dans le langage commun, alors même que son taux n'est plus que de 0,45 % depuis 1991.

A - Droit positif

  • Une organisation institutionnelle en réseau

Plus de 95 % de la collecte du 1 % logement sont versés à des collecteurs financiers, qui sont associés de l'Union d'économie sociale pour le logement (UESL), chambres de commerce et d'industrie (CCI) ou comités interprofessionnels du logement (CIL). Les CIL sont des associations à but non lucratif et à statut réglementé, administrées par des conseils d'administration composés de représentants des organisations syndicales d'employeurs, de représentants des organisations syndicales de salariés et de représentants des entreprises. Les collecteurs constructeurs, que sont les organismes HLM et les SEM de logement social, peuvent, également, sous certaines conditions, recevoir le versement de la participation des employeurs à l'effort de construction des employeurs pour les opérations locatives dont ils assurent la maîtrise d'ouvrage.

L'Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction (ANPEEC) est un établissement public sous tutelle de l'Etat créé en 1987. Elle a pour objet principal le contrôle des collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction et des opérations réalisées à l'aide de la participation des employeurs à l'effort de construction. L'Union d'économie sociale du logement (UESL), créée par la loi n° 96-1237 du 30 décembre 1996 (N° Lexbase : L4325A3L), joue le rôle de tête de réseau pour l'ensemble des CIL et des CCI. Elle représente les intérêts communs de ses associés, en particulier auprès des pouvoirs publics. Elle conclut avec l'Etat les conventions permettant de définir les politiques nationales d'emplois des fonds issus de la participation des employeurs à l'effort de construction, émet des recommandations qui s'imposent à ses associés collecteurs et rend un avis préalable sur certaines opérations financières relatives aux collecteurs financiers.

Société anonyme coopérative à capital variable, l'UESL a pour associés les CIL et CCI agréés à collecter la Participation des employeurs à l'effort de construction, ainsi que les organisations interprofessionnelles de salariés représentatives au plan national (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, CGT-FO) et les organisations interprofessionnelles d'employeurs représentatives au plan national (MEDEF, CGPME).

  • Des interventions diverses

Dans le prolongement de la création de l'UESL en 1996, la politique nationale d'emploi des fonds du 1 % logement s'est organisée autour de la signature de plusieurs grandes conventions entre l'Etat et cet organisme (3). Il résulte des différentes conventions conclues entre l'Etat et l'UESL une diversité des interventions du 1 % logement. Celles-ci peuvent, néanmoins, être réparties entre financement d'opérations locatives (locatif social, accompagnement de la politique de rénovation urbaine, locatif intermédiaire) et d'aides aux ménages (prêts accession et travaux, aides pour la location ou la mobilité) (4).

B - Critiques du système du 1 % logement

Les travaux parlementaires (5) montrent que ces dernières années ont vu une remise en cause du fonctionnement du 1 %, critiqué pour son opacité et des frais de gestion parfois excessifs, comme pour l'efficacité contestable, notamment, au regard de critères d'urgence sociale, de certains des dispositifs conventionnels. Les dispositions du Code de la construction et de l'habtitation et la pratique suivie n'ont pas permis une différenciation satisfaisante entre les fonctions de gestion et celles de contrôle.

Dans son rapport 2006 (La participation des employeurs à l'effort de construction) la Cour des Comptes a formulé un nombre important de critiques, selon plusieurs axes (V., aussi, rapport public annuel 2008, préc.).

  • Les emplois de la participation des employeurs à l'effort de construction

La Cour a souligné la situation confuse des emplois de la participation des employeurs à l'effort de construction, en raison de l'absence de choix clairs. La Cour a critiqué le système conventionnel, relevant que l'extension du champ conventionnel n'a pas contribué à la qualité des normes de droit : les conventions ne sont pas publiées, ne comportent pas de mécanismes d'abrogation, ne sont pas codifiées et leur empilement a créé un volumineux corpus conventionnel. En l'absence d'actualisation des textes codifiés, nombre de dispositions conventionnelles et de pratiques contredisent les textes législatifs et réglementaires toujours en vigueur.

  • La gouvernance

La Cour a souligné la nécessité de clarifier les règles de la gouvernance, l'Etat s'étant effacé, tandis que les collecteurs ont vu leur pouvoir accru, notamment, du fait qu'ils sont devenus actionnaires de référence d'un nombre important de sociétés d'HLM. Cet accroissement de pouvoir est, également, dû à la création de la Foncière Logement et de comités régionaux dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de cohésion sociale. Or, en dépit de ce pouvoir accru, la Cour a dénoncé les faiblesses de la gouvernance des acteurs de la Participation des employeurs à l'effort de construction. Ainsi, les instances dirigeantes de l'UESL et de l'ANPEEC (organe de contrôle) sont largement communes : des administrateurs appartiennent à la fois aux conseils d'administration et parfois aux bureaux des deux organismes.

  • Le pilotage et la rationalisation du réseau

La Cour des comptes a relevé l'absence de stratégie de réseau, estimant que l'UESL aurait dû définir une stratégie volontariste pour aider les collecteurs à assumer les changements, tout en restructurant le réseau et en maintenant ses activités dans le strict cadre de son objet social. La Cour des comptes a souligné, également, les lacunes du pilotage du réseau, rappelant le nombre excessif de collecteurs, l'opacité des fusions/absorptions de collecteurs, les coûts de gestion excessifs et la difficile fixation des modalités de mutualisation.

Dans le prolongement des travaux de la Cour des comptes, les travaux parlementaires (6) ont conclu à la nécessité d'une réforme du 1 % logement, qui serait, désormais, appelé à financer les aides à la réhabilitation du parc privé distribuées par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Le 1 % logement serait, également, appelé à se substituer à l'Etat pour financer l'ANRU. Enfin, la Participation des employeurs à l'effort de construction serait mobilisée pour le financement du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés. Les discussions qui ont eu lieu entre l'Etat et les partenaires sociaux sur le 1 % logement, prenant en compte les orientations du Protocole national interprofessionnel signé le 17 septembre 2008, ont permis de constater des convergences sur les grands objectifs suivants pour les trois prochaines années : produire plus de logements économiquement accessibles, notamment, pour les salariés des entreprises privées ; faciliter l'accès ou le maintien dans leur logement des ménages présentant des caractéristiques socio-économiques qui risquent de les exclure ; intensifier la lutte contre l'habitat indigne et le renouvellement urbain, y compris dans les quartiers anciens ; amplifier le développement d'une accession populaire à la propriété sécurisée. Ces objectifs impliquent une nouvelle approche de la gouvernance du 1 % afin de clarifier le rôle de chacun des acteurs du 1 % logement et nécessitent de renforcer le pilotage et le suivi des actions qui seront engagées afin de répondre aux enjeux actuels.

II - La réforme du 1 % logement par la loi n° 2009-323

Conformément aux orientations arrêtées par le conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008, la loi n° 2009-323 engage une réforme d'ampleur de la gouvernance du 1 % logement, dont la caractéristique principale est la suppression du mode de gestion conventionnel et partenarial de l'emploi des fonds, auquel se substitue un mécanisme de détermination des emplois par la loi et le règlement. Enfin, la loi réforme substantiellement les modalités de contrôle de l'utilisation de ces fonds, dont la mission incomberait, néanmoins, toujours à l'ANPEEC.

A - Le régime juridique de la participation des employeurs à l'effort de construction

La loi n° 2009-323 (art. 8-I) traite du régime juridique de la participation des employeurs à l'effort de construction, au sein de l'article L. 313-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L9280ID3). Dans le droit en vigueur, l'article L. 313-1 définit le niveau de la participation des employeurs à l'effort de construction, son régime juridique et le champ des entreprises assujetties, ainsi que les grandes catégories d'emplois des fonds.

La loi prévoit que les employeurs, occupant au minimum vingt salariés, à l'exception de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics administratifs, assujettis à la taxe sur les salaires, autres que ceux qui appartiennent à des professions relevant du régime agricole, doivent consacrer des sommes représentant 0,45 % du montant des rémunérations versées par eux au cours de l'exercice écoulé au financement d'actions dans le domaine du logement, en particulier du logement des salariés, et de la politique de la ville. Cette obligation prend la forme d'un versement à un organisme agréé par le ministre chargé du Logement aux fins de collecter la participation des employeurs à l'effort de construction. Les conditions de cet agrément sont définies par décret en Conseil d'Etat. Désormais, un employeur peut se libérer de cette obligation en investissant directement en faveur du logement de ses salariés. La loi n° 2009-323 permet aux entreprises de reporter sur les exercices postérieurs les excédents, par rapport à l'obligation de 0,45 %, qu'elles ont versés sur leurs ressources propres au titre du logement de leurs salariés. L'article L. 313-1 Code de la construction et de l'habitation est applicable aux établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), ainsi qu'aux organismes à caractère industriel et commercial de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs groupements.

B - Lissage des seuils d'effectifs

Afin de lisser l'effet de seuil dû au passage à vingt salariés (pour ne pas pénaliser les entreprises accroissant leurs effectifs), la loi n° 2009-323 prévoit que la participation des employeurs à l'effort de construction n'est pas due pendant les trois premières années. Ensuite, la participation est progressive pendant les trois années suivantes (déduction de 75 %, puis de 50 % et, enfin, de 25 % des sommes dues). Les employeurs ayant dépassé l'effectif avant le 1er septembre 2005 et qui, en 2005, bénéficiaient d'une dispense ou d'une réduction du montant de leur participation continuent à bénéficier de cette dispense ou de cette réduction dans les conditions antérieures. La loi prévoit, néanmoins, que ce lissage n'est pas applicable lorsque l'accroissement de l'effectif résulte de la reprise ou de l'absorption d'une entreprise.

Le régime dérogatoire de non-imposition à la cotisation de 0,45 % au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction évoque celui en vigueur au titre du versement transport, qui prévoit, également, que, dans la région Ile-de-France, les personnes physiques ou morales, publiques ou privées sont assujetties à un versement de transport lorsqu'elles emploient plus de neuf salariés : mais les employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent l'effectif de dix salariés sont dispensés pendant trois ans du paiement du versement. Le montant du versement est réduit de 75 %, 50 % et 25 % respectivement chacune des trois années suivant la dernière année de dispense (CGCT, art. L. 2531-2 N° Lexbase : L2333IBZ). La loi n° 2008-776 du 4 août 2008, de modernisation de l'économie (N° Lexbase : L7358IAR), a modifié ce régime dérogatoire (7).

C - Suppression du système conventionnel

La loi n° 2009-323 (CCH, art. L. 313-3) supprime le mode de gestion conventionnel de l'emploi des fonds du 1 %, auquel se substitue un mécanisme de détermination des emplois par la loi et le règlement. Les ressources de la participation des employeurs à l'effort de construction sont composées des versements des employeurs et des retours des prêts antérieurement consentis à l'aide de ressources issues de la participation des employeurs à l'effort de construction ainsi que, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, de l'affectation du résultat des collecteurs agréés.

Les ressources de la participation des employeurs à l'effort de construction sont consacrées aux catégories d'emploi suivantes : aides à des personnes physiques pour leurs projets d'accession à la propriété, de réhabilitation de leur logement, d'accès au logement locatif, de changement de logement ou de maintien dans celui-ci ; soutien à la construction, à la réhabilitation et à l'acquisition de logements locatifs sociaux, ainsi qu'à la production de logements locatifs intermédiaires ; interventions à caractère très social dans le domaine du logement, notamment, sous la forme d'opérations relatives au logement ou à l'hébergement des personnes défavorisées et de dépenses d'accompagnement social ; mise en oeuvre du PNRU ; participation à des actions de formation, d'information ou de réflexion menées par des associations agréées par l'Etat ; versement de compensations à des organismes d'assurance qui proposent des contrats d'assurance contre les impayés de loyer qui respectent un cahier des charges, fixé par décret en Conseil d'Etat ; mise en oeuvre du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, ainsi que le soutien à l'amélioration du parc privé.

Les grandes catégories d'emplois des ressources du 1 % logement relèvent du domaine législatif, un décret en Conseil d'Etat fixe la nature des emplois correspondant à ces grandes catégories, ainsi que leurs règles générales d'utilisation et un décret simple fixe les enveloppes minimales et maximales consacrées annuellement à chaque catégorie d'emploi.

D - Recentrage de l'ANPEEC sur une mission de contrôle

Dans le droit en vigueur, l'agence exerce une mission générale d'élaboration des règles régissant les conditions d'activité des collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction. En revanche, le droit actuel ne prévoit pas explicitement pour l'ANPEEC une mission de contrôle de l'UESL, ni des filiales des collecteurs, son rôle ayant été, jusqu'ici, limité au contrôle des collecteurs, au contrôle du respect des conventions signées entre l'UESL et l'Etat, et, sur demande de l'UESL, au contrôle du respect de ses recommandations par les associés. La loi n° 2009-323 modifie profondément le dispositif : l'agence voit son rôle recentré sur sa mission d'étude, d'évaluation et de contrôle. Cette mission de contrôle est, en outre, étendue à l'ensemble des acteurs du 1 % logement.

L'article L. 313-7 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L9047IDG) définit les missions de l'agence. Désormais, elle est chargée d'une mission d'étude, d'évaluation et de contrôle relative à la participation des employeurs à l'effort de construction. Le II de cet article L. 313-7 précise son rôle : suivi statistique, comptable et financier de la participation des employeurs à l'effort de construction ; contrôle du respect des conditions d'agrément des organismes collecteurs et de suivi de leur performance en termes de gestion ; de contrôle du respect de la réglementation et des obligations de toute nature incombant aux organismes collecteurs, à l'UESL, aux filiales des collecteurs et de l'UESL et aux organismes bénéficiant de concours financiers des collecteurs ou de l'UESL ; de contrôle de l'emploi de la participation des employeurs à l'effort de construction ; d'évaluation de la contribution de la participation des employeurs à l'effort de construction aux catégories d'emploi mentionnées ci-dessus ; d'assistance à l'administration pour l'élaboration des règles applicables aux organismes collecteurs agréés. Le III de l'article L. 313-7 reprend le droit actuel s'agissant des prérogatives dont dispose l'agence pour remplir ses missions.

Dans le droit en vigueur, le conseil d'administration de l'agence comprend vingt membres, dont un quart de représentants de l'Etat ; de représentants des organisations patronales ; de représentants des organisations syndicales ; de représentants des collecteurs (CCH, art. L. 313-11 N° Lexbase : L8927IDY, composition du conseil d'administration de l'ANPEEC). Partant du principe que l'on ne peut être, à la fois, contrôleur et contrôle, la loi 2009-323 resserre le dispositif : l'agence sera administrée par un conseil d'administration composé de cinq représentants de l'Etat et de trois personnalités désignées par le ministre chargé du Logement en raison de leurs compétences en matière de logement. Les modalités d'organisation et de fonctionnement de l'agence seront déterminées par décret en Conseil d'Etat.

L'agence reste financée par un prélèvement sur les sommes versées aux collecteurs (CCH, art. L. 313-12 N° Lexbase : L9154IDE, modalités de financement de l'ANPEEC). Désormais, l'ANPEEC est financée par un prélèvement, non pas sur les sommes versées au titre de la Participation des employeurs à l'effort de construction, mais sur ses ressources. La fixation de ces ressources a été renvoyée à un arrêté ministériel.

E - Une redéfinition du rôle de l'UESL

La loi n° 2009-323 supprime la mention selon laquelle "l'Union conclut avec l'Etat, après information des associés collecteurs, des conventions définissant des politiques nationales d'emploi des fonds issus de la Participation des employeurs à l'effort de construction et des ressources du fonds d'intervention de l'union, à mettre en oeuvre par les associés collecteurs, et selon laquelle l'union peut, en outre, conclure avec l'Etat des conventions ayant pour objet de favoriser la coopération entre associés, de coordonner les tâches de collecte, d'harmoniser les modalités d'emploi des fonds issus de la participation des employeurs à l'effort de construction, de contribuer, avec les associations départementales d'information sur le logement qui ont signé une convention avec l'Etat, à l'information sur le logement des salariés et d'améliorer la gestion des associés collecteurs" (CCH, art. L. 313-19 N° Lexbase : L9112IDT, missions de l'Union d'économie sociale pour le logement).

La loi procède, également, à une réécriture des articles L. 313-20 (N° Lexbase : L9151IDB, fonds de l'Union d'économie sociale pour le logement), L. 313-21 (N° Lexbase : L8946IDP, fonctions du conseil de surveillance de l'Union d'économie sociale pour le logement), L. 313-22 (N° Lexbase : L9107IDN, budget de l'Union d'économie sociale pour le logement), L. 313-23 (N° Lexbase : L9107IDN, commissaires du Gouvernement auprès de l'Union d'économie sociale pour le logement), L. 313-33 (N° Lexbase : L9096IDA, association pour l'accès aux garanties locatives) et, enfin, L. 313-34 (N° Lexbase : L8984ID4, statut de l'association foncière logement) du Code de la construction et de l'habitation.

Dans son rapport annuel 2009, rendu public en février 2009 (c'est-à-dire, à une période où la le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion était en discussion), la Cour des comptes prenait déjà acte des avancées du projet de loi (devenu, depuis, la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009). La Cour se félicitait que le législateur entende corriger les défauts qui affectaient la gouvernance du 1 % logement et qui ont permis de graves dérives et d'importants gaspillages de ressources issues de ce prélèvement obligatoire. La présentation des flux de la participation des employeurs à l'effort de construction dans les documents budgétaires annuels, instituée par la même loi, constitue une avancée pour le débat démocratique, selon la Cour des comptes. La reprise de l'initiative par l'Etat dans l'orientation des emplois des fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction, dont les caractéristiques et les masses seront, désormais, fixées par décret, après consultation des partenaires sociaux, constitue une autre étape essentielle dans la nécessaire insertion de la participation des employeurs à l'effort de construction dans la politique nationale du logement. Mais, une fois les institutions de la participation des employeurs à l'effort de construction rénovées, une autre phase de réforme devra être engagée, selon la Cour des comptes : celle relative au réseau des collecteurs, à sa réorganisation en cohérence avec le mouvement de décentralisation de la politique du logement et au sort à donner à leur patrimoine constitué à partir des excédents de la collecte et du résultat économique des emplois des fonds, afin qu'il serve le mieux possible à la collectivité.


(1) Sénat, Rapport n° 8 (2008-2009) de D. Braye, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 8 octobre 2008 ; Sénat, Avis n° 11 (2008-2009) de P. Dallier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 14 octobre 2008, p. 9 ; F. Scellier, Avis Assemblée nationale n° 1402, 21 janvier 2009 ; M. Piron, Rapport Assemblée nationale n° 1357, 18 décembre 2008, p. 118.
Concernant les mesures fiscales de la loi, lire les obs. de Anne-Lise Lonné, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale, La loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion : présentation des dispositions fiscales, Lexbase Hebdo n° 345 du 8 avril 2009 - édition fiscale (N° Lexbase : N0139BKD).
(2) Nos obs., Dispositions sociales du rapport de la Cour des comptes 2009, Lexbase Hebdo n° 338 du 19 février 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N5673BIX). V., aussi, Cour des comptes, Rapport public 2006.
(3) Les plus importantes sont la convention du 3 août 1998, qui crée les aides "loca-pass", "pass-travaux" et "securi-pass" ; les conventions des 11 octobre et 11 décembre 2001, qui créent l'Association foncière logement (AFL) ; la convention du 10 septembre 2003, prévoyant la participation du 1 % logement au programme national de rénovation urbaine (PNRU) ; les conventions du 15 juillet et du 27 octobre 2004, qui prévoient l'accompagnement par le "1 % logement" du volet logement du plan de cohésion sociale ; cinq conventions signées en 2006, créant, notamment, le Pass-GRL et le Pass-foncier.
(4) Les emplois se ventilent, en 2006, en aides aux personnes physiques pour 1,8 millions d'euros. Cette catégorie d'emploi augmente constamment depuis 2002, en particulier sous l'effet de la progression du "pass-travaux" (871 millions d'euros), du "loca-pass" (404 millions d'euros) et d'autres nouveaux emplois pour un montant plus limité ("mobili-pass" en particulier). En revanche, les prêts à l'accession traditionnels diminuent (339 millions d'euros contre plus de 800 millions d'euros en 2000) ; financements de long terme aux bailleurs sociaux pour 596 millions d'euros en 2007 ; financement de l'association "Foncière Logement" (726 millions d'euros en 2006, après 453 millions d'euros en 2005) et de l'ANRU (279 millions d'euros en 200, après 679 millions d'euros en 2005).
(5) M. Piron, Rapport Assemblée Nationale n° 1357, 18 décembre 2008, p. 118, préc..
(6) Ibid..
(7) A l'instar du régime du versement transport en province, la loi n° 2008-776 (art. 48-VII, 1°) supprime le dernier alinéa de l'article L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L2240IBL), qui prévoyait que les employeurs qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent l'effectif de dix salariés sont dispensés pendant trois ans du paiement du versement (le montant du versement est réduit de 75 %, 50 % et 25 %, respectivement chacune des trois années suivant la dernière année de dispense) : ces dispositions n'étaient pas applicables lorsque l'accroissement de l'effectif résulte de la reprise ou de l'absorption d'une entreprise ayant employé dix salariés ou plus au cours de l'une des trois années précédentes. C'est précisément cette dérogation qui est abrogée par la loi de modernisation de l'économie. Lire nos obs., Neutralisation de l'impact financier du franchissement du seuil de dix et vingt salariés par les entreprises : retour sur l'ordonnance n° 2005-892 du 2 août 2005 ?, Lexbase Hebdo n° 319 du 25 septembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N1959BHZ).

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Éditorial

Arbitrage et efficacité des clauses compromissoires : "on juge l'arbre à ses fruits" !

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

Le 27 Mars 2014


"Ne jugez point, afin de n'être point jugés, car on vous jugera comme vous avez jugé, et l'on se servira pour vous de la mesure dont vous mesurez les autres".

A lire Saint Matthieu, il faudrait être inconscient pour accepter d'être juge, risquant par là-même le salut de son âme. Heureusement, "la mesure dont vous mesurez les autres" permet d'imposer la Justice, avec toute la sacralisation des principes d'impartialité, d'autonomie et, parfois même, d'équité nécessaire à son administration

Chacun se souvient de Saint Louis rendant la Justice sous un chêne ; l'image d'Epinal est lourde de sens : la Justice est l'apanage de l'Etat, elle doit être la plus accessible possible, et elle doit être marquée du sceau de la stabilité. Pour autant, qui se souvient que ce même Louis IX fut interpellé à plusieurs reprises afin d'arbitrer des conflits internationaux ? Il arbitra, ainsi, la succession du comté de Hainaut, par le Dit de Péronne du 24 septembre 1256, comme il arbitra le différend opposant le roi Henri III d'Angleterre à ses barons révoltés, par le Dit d'Amiens du 23 janvier 1264. Ainsi, au plus haut niveau de la liturgie juridique, il serait permis de faire appel à un tiers dont les qualités sont éminemment reconnues pour régler un différend juridique ? C'est tout le sens de l'arbitrage, de choisir un collège de juges aux fins de régler, tantôt en toute confidentialité, tantôt en toute autonomie, tantôt en toute équité, les différends de nature juridique.

Et, les quelques affaires décriées, comme dernièrement l'affaire "Tapie", ne doivent pas laisser penser à une justice privée de fondement juridique. Même l'amiable composition pour la recherche de l'équité requiert, le plus souvent, une motivation toute juridique. Les articles 1442 et suivants du Code de procédure civile, siège de la matière, marquent, d'ailleurs, l'intégration de l'arbitrage aux différents modes de règlement des litiges. Alternative juridictionnelle, et non judiciaire, l'arbitrage s'inscrit pleinement dans la Justice de chaque Etat, avec cette particularité de revêtir, peu ou prou, les mêmes traits quels que soient les Etats. "Le droit international est, pour le Etats, non seulement, un ensemble normatif, mais aussi un langage commun" écrivait Boutros Boutros-Ghali dans son Introduction du Livre de l'année - 1994. Une langue commune, ou communément choisie, des principes communs voire universels, tels sont les avantages majeurs d'un arbitrage, de naissance internationale, qui tend à se développer à titre de règlement interne des litiges, via une consécration progressive par les Cours suprêmes.

Et, Emmanuel Gaillard, Professeur de droit à l'Université Paris XII et Avocat responsable du département d'arbitrage international du cabinet Shearman & Sterling de revenir, cette semaine, sur l'ensemble de ces caractères majeurs de la procédure d'arbitrage.

"Qui juge lentement juge sûrement" écrivait Sophocle dans son Oedipe Roi. Malheureusement, le monde des affaires, puisque c'est celui qui est concerné au premier chef par l'arbitrage, exige un mode de règlement des différends rapide -les parties pouvant s'interdire d'interjeter appel en réformation-, autonome, et à forte compétence technique. Et cette rapidité est loin d'être incompatible avec le discernement "[...] principale fonction du juge, et [...] qualité nécessaire du jugement" comme nous l'enseigne Bossuet dans son Sermon sur la providence.

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Fiscalité immobilière

[Textes] La loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion : présentation des dispositions fiscales

Réf. : Loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (N° Lexbase : L0743IDU)

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N0139BKD

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par Anne-Lise Lonné, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

Le 07 Octobre 2010

A été publiée au Journal officiel du 27 mars 2009, la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion. Ce texte a pour objectif de "libérer l'offre de logements et de rétablir le bon fonctionnement de la chaîne du logement, en concentrant les interventions de tous les acteurs -Etat, collectivités territoriales, associations, professionnels publics et privés- autour d'axes prioritaires en nombre limité, permettant de parvenir à un niveau de construction tendant vers 500 000 logements par an et à une production de 120 000 logements locatifs sociaux, de faire du logement un chantier national prioritaire et d'augmenter le nombre de ménages propriétaires". La loi s'articule ainsi autour de six chapitres : la mobilisation des acteurs ; l'amélioration du fonctionnement des copropriétés ; le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, le développement d'une offre nouvelle de logements ; la mobilité dans le parc de logements ; la lutte contre l'exclusion, l'hébergement et l'accès au logement ; et enfin les dispositions diverses. Elle est accompagnée d'un certain nombre de mesures fiscales incitatives qu'il convient de détailler. Par souci de clarté, nous vous proposons une présentation de ces dispositions par catégorie d'impôt, soit en matière d'impôt sur le revenu, d'impôts locaux, de TVA et également en matière de procédures fiscales (1). 1. Impôt sur le revenu : revenus fonciers
  • Dispositif "Malraux" : application aux quartiers retenus au titre du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 27)

Le chapitre II de la loi du 25 mars 2009 prévoit la création d'un programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). L'objet du PNRQAD est de requalifier les quartiers anciens les plus dégradés tout en contribuant à la mixité sociale et au développement des activités et en améliorant la performance énergétique des bâtiments. Il s'agit d'instaurer une dynamique de requalification globale de ces quartiers sur les plans de l'habitat, du commerce, des services publics, de la voirie ou des espaces publics, afin de mettre un terme aux situations d'habitat indigne, d'améliorer la qualité de vie des habitants et de renforcer ainsi l'attractivité des quartiers concernés.

C'est dans ce cadre que l'article 27 de la loi du 25 mars 2009 vient étendre la réduction d'impôt prévue dans le cadre du dispositif "Malraux réformé" aux quartiers anciens dégradés créés par l'article 25 du même texte (pour rappel, l'article 84 de la loi de finances pour 2009 N° Lexbase : L3783IC4 a transformé l'ancien dispositif "Malraux" d'imputation sur le revenu global des déficits provenant de la restauration complète d'un immeuble bâti situé dans les secteurs sauvegardés, en réduction d'impôt sur le revenu à raison des dépenses supportées en vue de la restauration complète d'un immeuble bâti). Cette extension du nouveau dispositif "Malraux" aux quartiers anciens dégradés est prévue pour une période limitée dans le temps, jusqu'au 31 décembre 2015, afin de mobiliser l'investissement privé dans ces quartiers, en accompagnement de l'effort public très important mis en place. En effet, les opérations d'investissements n'apparaissent pas immédiatement rentables dans ces quartiers dont le marché se désintéresse et il apparaît donc indispensable d'attirer les capitaux privés par des avantages fiscaux limités et encadrés de manière à optimiser leur impact économique et social.

L'avantage fiscal accordé pour ces quartiers est ainsi aligné sur celui des secteurs sauvegardés.

  • Dispositifs "Robien recentré" et "Borloo recentré" : recentrage des dispositifs d'investissement locatif sur les zones tendues (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 48)

Depuis la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006, portant engagement national pour le logement, dite ENL (N° Lexbase : L2466HKK), le dispositif "Robien" autorise les redevables de l'impôt sur le revenu qui réalisent un investissement locatif à amortir 6 % du prix d'acquisition du logement pendant les sept premières années, et 4 % du prix, pendant les deux années suivantes. En contrepartie, le propriétaire s'engage à louer le logement pendant neuf ans au moins à usage de résidence principale à une personne n'étant pas membre de son foyer fiscal. Le loyer ne doit pas excéder un plafond fixé par décret.

Mis en place dans le cadre de la loi "ENL", le dispositif "Borloo" consiste en une déduction forfaitaire de 30 % que les redevables de l'impôt sur le revenu peuvent imputer sur leurs revenus fonciers, en plus du bénéfice de l'avantage "Robien" pendant neuf ans. Ainsi, juridiquement, le "Borloo neuf" est une option au dispositif "Robien recentré" : les contraintes et les avantages applicables au dispositif "Robien recentré" (nature des opérations éligibles, affectation à la location, amortissement pendant la première année...) le sont également au dispositif "Borloo neuf". En contrepartie de cette déduction, le propriétaire s'engage à louer son bien à des locataires ne dépassant pas des plafonds de ressources fixés par décret.

Au total, le bailleur est donc en mesure d'amortir jusqu'à 65 % du coût d'acquisition du logement. En cas d'acquisition de locaux affectés à un autre usage que l'habitation et transformés en logements ou de logements qui ne satisfont pas aux conditions de décence et qui font l'objet de travaux de réhabilitation, la déduction au titre de l'amortissement est calculée sur le prix d'acquisition des locaux augmenté du montant des travaux de transformation ou de réhabilitation.

A la suite du vote de la loi du 2 juillet 2003, relative à l'urbanisme et l'habitat (loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 N° Lexbase : L6770BH9), l'arrêté du 19 décembre 2003 (N° Lexbase : L9718DLI) a procédé au classement des communes françaises en trois zones (A, B et C), en fonction des tensions locatives observées sur les marchés de l'habitat. Les plafonds de loyer dépendent alors de la localisation de l'investissement locatif au regard de ces trois zones, puisqu'ils sont plus élevés dans les zones tendues. Schématiquement, la zone A regroupe l'agglomération parisienne, la Côte-d'Azur et le Genevois français, la zone B les agglomérations de plus de 50 000 habitants et la zone C le reste du territoire. A l'occasion des modifications introduites par la loi "ENL" et la création du "Borloo populaire", l'arrêté du 10 août 2006 (N° Lexbase : L5015HKX) a procédé à la division de la zone B en deux zones distinctes, B1 et B2, afin de mieux prendre en compte la réalité des différents marchés de l'habitat. De manière schématique, la zone B1 regroupe 23 agglomérations de plus de 250 000 habitants, la "grande couronne" parisienne, quelques agglomérations où le marché est tendu (Annecy, Bayonne, etc.), le pourtour de la Côte-d'Azur, les départements d'outre-mer et la Corse. La zone B2 inclut, quant à elle, les autres agglomérations de plus de 50 000 habitants, les autres zones frontalières ou littorales tendues et les limites de l'Ile-de-France.

Afin de lutter contre une tendance à la construction de logements dans des zones où les besoins ne se font pas sentir, l'article 48 de la loi du 25 mars 2009 a pour objet de recentrer les dispositifs d'investissement locatif "Robien" et "Borloo" sur les zones tendues du territoire.

Cet article prévoit ainsi que, pour les acquisitions et constructions de logements ayant fait l'objet d'un dépôt de demande du permis de construire après la publication par arrêté du nouveau zonage, les dispositions relatives au "Robien" et au "Borloo" ne s'appliqueront qu'aux "communes classées dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre entre l'offre et la demande de logements". Il est précisé que l'arrêté interministériel reclassant les communes sera révisé au moins tous les trois ans, afin d'assurer une adaptation régulière de l'intervention de l'Etat aux conditions de marché.

D'après les rapports parlementaires, le nouveau zonage devrait reprendre dans la définition des zones tendues les zones A, B1 et B2. La zone C ne sera pas supprimée car elle est également utilisée pour le zonage d'autres dispositifs, notamment les dispositifs d'accession sociale à la propriété, ainsi que pour le prêt locatif intermédiaire. En revanche, le contribuable ne pourrait plus bénéficier des régimes "Robien" et "Borloo" pour faire construire et acquérir un logement dans cette zone. En outre, le rapporteur au Sénat a indiqué que "certaines agglomérations devraient être déclassées, en totalité, de la zone B2 à la zone C, notamment celles qui présentent à la fois un faible niveau de tension du marché immobilier et un excès d'offre locative privée neuve. [...] Entre 20 et 40 agglomérations devraient être concernées. Certaines agglomérations de zone B1 pourraient également être partiellement ou totalement déclassées en zone B2. Dans les bassins d'emploi présentant un niveau de tension du marché immobilier élevé [...], certaines communes -en bordure d'agglomérations situées en zone A ou B1 ou en zone littorale et frontalière- seront reclassées de la zone C à la zone B2".

  • Dispositif "Borloo ancien" : augmentation du taux de déduction en cas de location à un ménage très modeste (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 49)

Le dispositif "Borloo ancien", prévu à l'article 31-I-1°-m du CGI (N° Lexbase : L3907IAX), autorise une déduction fixée à 30 % des revenus bruts des logements donnés en location dans le cadre d'une convention avec l'Agence nationale de l'habitat, pendant la durée d'application de cette convention. Cette déduction est portée à 45 % des revenus bruts des logements donnés en location dans le cadre d'une convention mentionnée à l'article L. 321-8 du CCH (N° Lexbase : L2000HPR), pendant la durée d'application de cette convention.

L'article 49 de la loi du 25 mars 2009 vient porter ce taux de 45 % à 60 %. En effet, les travaux de la mission d'information commune à la commission des Finances et la commission des Affaires économiques sur l'efficacité des dispositifs d'investissement locatif ont montré le caractère insuffisamment attractif du dispositif "Borloo ancien". Une des raisons invoquées est le caractère insuffisant du dispositif de déduction, qui ne compense que partiellement le fait de louer son logement à un loyer inférieur aux prix du marché. C'est pourquoi il est prévu de renforcer l'attractivité de ce dispositif "Borloo ancien" en prévoyant un abattement sur les recettes tirées de la location de 60 % si le propriétaire pratique un loyer très social.

  • Dispositif "Borloo ancien" : application temporelle de l'avantage fiscal au regard de la convention ANAH (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 50)

En vertu de l'article 31 du CGI, le propriétaire d'un logement ne peut bénéficier de l'avantage fiscal "Borloo dans l'ancien" consenti en contrepartie du conventionnement de son logement avec l'ANAH qu'à la condition qu'il ait signé la convention prévue aux articles L. 321-4 (N° Lexbase : L7443IDZ) et L. 321-8 (N° Lexbase : L2000HPR) du Code de la construction et de l'habitation avant la conclusion du bail. Cette disposition introduit une procédure lourde de vérification préalable au cas par cas des conditions du conventionnement. Un fonctionnement fluide du marché locatif conduit à privilégier une signature du bail aussi rapide que possible. L'avantage fiscal serait applicable à compter de la prise d'effet de la convention qui serait ainsi déconnectée de la signature du bail.

L'article L. 321-1 du CCH (N° Lexbase : L4930IDX) prévoit que l'Agence nationale de l'habitat peut conclure avec tout bailleur, avec ou sans subvention pour la réalisation de travaux, des conventions par lesquelles celui-ci s'engage à louer son logement sous certaines conditions de loyers et de ressources pour le locataire en contrepartie d'un abattement sur les revenus fonciers. Or, le bénéfice de l'avantage fiscal est calé sur la durée de la convention qui, le plus souvent, ne coïncide pas avec la durée du bail, dans ce cas, le bailleur ne bénéficie plus de l'avantage fiscal alors même que le loyer ne peut être augmenté qu'à l'issue du bail en cours et ce progressivement dans les conditions de l'article 17 c de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, tendant à améliorer les rapports locatifs (N° Lexbase : L8461AGH).

L'article 50 de la loi du 25 mars 2009 a ainsi pour objet d'aligner la durée de l'avantage fiscal après la date d'échéance de la convention ANAH et au plus tard jusqu'à la date prévue pour le renouvellement du bail.

Par ailleurs, l'article 96 de la loi vise à capter des logements du parc privé disponibles afin de développer, par le biais d'une intermédiation, une offre locative adaptée et de transition. Le 4° de l'article 50 de la loi vise alors à encourager les propriétaires à louer leur logement à un organisme en vue de leur sous-location à des personnes défavorisées ou afin de les héberger. Il est prévu, dans ce cas, de porter à 70 % la déduction forfaitaire pour le calcul du revenu foncier imposable prévue à l'article 31 du CGI.

2. Impôts locaux

  • TFPB : prolongation jusqu'en 2014 de l'extension de 15 à 25 ans d'exonération de taxe foncière pour la construction de logements sociaux (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 6)

Le plan de cohésion sociale a permis aux logements sociaux de bénéficier d'une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée 25 ans. Toutefois, il est prévu que cette durée soit ramenée à 15 ans après le 31 décembre 2009.

L'article 6 de la loi du 25 mars 2009 vise à proroger de 5 ans cette mesure, soit jusqu'au 31 décembre 2014. Cette prolongation, qui aurait pu attendre la fin de l'année 2009, a été adoptée dans le cadre de la loi du 25 mars 2009, dans la mesure où il est apparu important que les organismes concernés aient connaissance de cette prorogation dès maintenant, afin de ne pas freiner l'action de certains d'entre eux.

  • TFPB : possibilité pour les organismes HLM de faire porter le droit à dégrèvement dont ils bénéficient au titre des travaux d'économie d'énergie réalisés dans un immeuble sur l'ensemble du parc (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 47)

L'article 1391 E du CGI (N° Lexbase : L8067ID7) prévoit un dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés bâties sur les cotisations afférentes aux immeubles appartenant aux organismes d'HLM ou aux SEM égal au quart des dépenses payées à raison des travaux d'économie d'énergie. Toutefois, alors que le Grenelle de l'environnement a décrété la réalisation de tels travaux prioritaires, la portée de ce dégrèvement a été singulièrement affaiblie par l'instruction fiscale du 9 avril 2008 (BOI 6 C-2-08 N° Lexbase : X2694AEI) qui limite l'imputabilité au seul immeuble où ont été effectués les travaux contrairement à d'autres dispositions de même nature (dépenses d'accessibilité ou d'adaptation des immeubles l'accessibilité et l'adaptation des logements aux personnes en situation de handicap, par exemple).

L'article 47 de la loi du 25 mars 2009 a pour objet d'étendre l'imputabilité aux cotisations afférentes à des immeubles imposés dans la même commune ou dans d'autres communes relevant du même service des impôts au nom du même bailleur et au titre de la même année.

  • Taxe spéciale d'équipement : répartition du produit de la taxe entre établissement public foncier d'Etat et établissement public foncier local (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 37)

La loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale (N° Lexbase : L6384G49) a rénové le régime des établissements publics fonciers d'Etat (EPFE) et a fixé à 20 euros par habitant le plafond de la taxe spéciale d'équipement (TSE) que ceux-ci peuvent percevoir. Cependant, la loi du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales (N° Lexbase : L0835GT4), avait déjà fixé une limite de 20 euros par habitant applicable au produit de la taxe spéciale d'équipement perçu par les établissements publics fonciers locaux (EPFL) créés en vertu de l'article L. 324-1 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L9599G8Z). En cas de superposition du périmètre d'un EPFE et d'un EPFL, le cumul des deux plafonds aboutit donc de fait à un plafond de 40 euros par habitant.

C'est dans ce contexte que l'article 37 de la loi du 25 mars 2009 vient alléger les conséquences fiscales pour le contribuable résultant de la superposition des périmètres d'intervention d'un établissement public foncier d'Etat et d'un établissement public foncier local. L'article 1607 bis du CGI (N° Lexbase : L8959ID8) instituant une taxe spéciale d'équipement au profit des établissements publics fonciers mentionnés aux articles L. 324-1 et suivants du Code de l'urbanisme (EPFL) est ainsi modifié. Il est précisé que, lorsque le périmètre de l'établissement public foncier local coïncide avec le périmètre d'un établissement public foncier d'Etat, le plafond est fixé à 10 euros par habitant pour chaque établissement sauf stipulation contraire d'une convention conclue entre ces deux établissements pour répartir différemment le produit de la taxe, dans la limite d'un plafond global de 20 euros par habitant.

Par ailleurs, l'article 37 prévoit la mise en oeuvre effective de l'exonération de la taxe spéciale d'équipement pour les organismes HLM et les sociétés d'économie mixte, à l'instar de ce qui est prévu à l'article 1607 ter du CGI, en matière de taxe spéciale d'équipement perçue par les établissements publics fonciers d'Etat.

  • Taxe sur les cessions de terrains rendus constructibles : modification de l'assiette (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 38)

L'article 1529 du CGI (N° Lexbase : L9182IDG), issu de l'article 26 de la loi du 13 juillet 2006, portant engagement national pour le logement (N° Lexbase : L2466HKK), prévoit la possibilité pour les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d'urbanisme d'instituer une taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains nus qui ont été rendus constructibles du fait de leur classement par un PLU, un document d'urbanisme en tenant lieu ou une carte communale dans une zone urbaine, une zone à urbaniser ou une zone constructible. L'objectif de cette taxe est de restituer aux communes une partie de la plus-value engendrée par l'ouverture des terrains agricoles à l'urbanisation. La taxe instaurée à l'article 1529 du CGI n'est toutefois pas calculée en fonction de la plus-value réalisée mais simplement en fonction du prix de vente du terrain. En effet, la taxe est assise sur un montant égal aux deux tiers du prix de cession du terrain et est égale à 10 % de ce montant. Or, selon ce mode de calcul, il apparaît que plus la plus-value est importante, moins elle est taxée relativement, et inversement.

L'article 38 de la loi du 25 mars 2009 modifie l'assiette de cette taxe qui est désormais assise sur le prix de cession diminué du prix d'acquisition stipulé dans les actes, actualisé en fonction du dernier indice des prix à la consommation hors tabac publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques. Il est précisé que, en l'absence d'éléments de référence, la taxe reste assise sur les deux tiers du prix de cession.

3. Taxe sur la valeur ajoutée

  • TVA : application du taux réduit aux logements collectifs en accession sociale éligibles au "Pass-foncier" (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 52)

Le dispositif du "Pass-foncier" permet le portage foncier, sans coût immédiat significatif pour les ménages, durant toute la phase de remboursement des prêts souscrits pour la construction du logement, dans la limite de 25 ans. Les ménages se voient offrir la possibilité d'acquérir leur logement en deux temps en différant l'acquisition du foncier après celle du bâti. Pour les opérations de construction individuelles, le mécanisme repose sur un système de bail à construction puisque le collecteur financier du 1 % logement instruisant le dossier du ménage se rend acquéreur du terrain et conclut, au bénéfice des accédants, un bail à construction assorti d'une promesse de cession du terrain au plus tard avant la date d'expiration du bail. La durée minimale du bail est de 18 ans et ne peut être inférieur à la durée du prêt le plus long souscrit pour le financement du bâti.

Limité dans un premier temps aux seules opérations de constructions individuelles, le dispositif des prêts "Pass-foncier" a ensuite été élargi aux opérations de logements collectifs. Pour de telles acquisitions, en raison de l'impossibilité de distinguer, pour chaque copropriétaire, la part du foncier attachée à son lot, le collecteur se porte acquéreur de la nue-propriété du lot de copropriété, l'usufruit étant acquis par l'accédant, celui-ci bénéficiant, en outre, d'une option d'achat sur la nue-propriété à toute date de sa convenance.

Le "Pass-foncier" est attribué à trois conditions : la primo-accession de la résidence principale (le ménage ne doit pas avoir été propriétaire au cours des deux dernières années) ; l'attribution d'une aide à l'accession sociale par une collectivité territoriale ; et le niveau des revenus du ménage qui doit se trouver en dessous des plafonds de ressources du prêt social de location-accession.

La loi de finances rectificative pour 2007 (loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 N° Lexbase : L5490H3Q), modifiant l'article 278 sexies du CGI (N° Lexbase : L8895IDS), ouvre droit à la TVA à 5,5 % aux opérations d'acquisition bénéficiant du "Pass-foncier" engagées du 1er janvier 2008 jusqu'au 31 décembre 2009. Le champ en est limité aux opérations d'accession individuelles.

Afin de rétablir une égalité de traitement fiscal entre les opérations individuelles et collectives, l'article 52 de la loi du 25 mars 2009 étend le bénéfice de la TVA à 5,5 % aux logements collectifs acquis au moyen d'un "Pass-foncier".

Le 3 octies du I de l'article 278 sexies est ainsi complété afin d'étendre le bénéfice du taux réduit aux ventes ou à la construction de logements neufs destinés à être affectées à l'habitation de personnes physiques répondant aux critères du "Pass-foncier" (primo-accession, aide d'une collectivité et plafonds de ressources PSLA) et si ces personnes bénéficient d'un prêt à remboursement différé octroyé par un associé collecteur de l'UESL. Le dispositif ne s'appuie désormais plus, pour les opérations collectives, sur une dissociation de l'usufruit et de la nue-propriété, mais sur un mécanisme de prêt à remboursement différé. Ce nouveau mécanisme, beaucoup plus simple que celui du portage foncier, et initialement réservé aux opérations collectives, s'applique également, après adoption d'un amendement pas l'Assemblée nationale, aux personnes qui souhaitent faire construire une maison individuelle en secteur diffus.

Par ailleurs, à la suite de l'adoption d'un amendement par le Sénat, il est précisé que, dans un même programme de construction et pour des caractéristiques équivalentes, le prix de vente hors taxe des logements neufs ne peut excéder celui des logements pour lesquels le taux réduit de 5,5 % ne s'applique pas aux ventes. Cette précision importante devrait permettre d'éviter la captation par les promoteurs ou les constructeurs de l'avantage de TVA accordé aux primo-accédants.

Les modalités de remise en cause de l'application du taux réduit de la TVA pour certaines opérations d'accession sociale à la propriété sont, également, modifiées, prévoyant une diminution du complément d'impôt dû. Cette diminution est d'un dixième par année de détention au-delà de la cinquième année.

Le bénéfice de ces nouvelles dispositions est limité au 31 décembre 2010. Pour éviter une différence de traitement entre la durée de l'avantage fiscal dans le secteur collectif et dans le secteur individuel, le bénéfice du taux réduit de TVA pour les opérations de "Pass-foncier" réalisées pour la construction de logements individuels, qui était limité à fin 2009, est étendu à l'année 2010.

L'article 52 de la loi du 25 mars 2009 prévoit, également, de plafonner le prix de vente des logements en accession sociale à la propriété bénéficiant d'un taux réduit de TVA, soit, outre les logements acquis à l'aide d'un PSLA, les logements acquis en zone ANRU, ou jusqu'à 500 mètres de ces zones, ainsi que les logements acquis à l'aide d'un "Pass-foncier". Le plafonnement retenu est celui en vigueur pour l'acquisition d'un logement à l'aide d'un prêt social de location-accession. Ces dispositions ne sont applicables que pour les logements ayant fait l'objet d'un dépôt de permis de construire à compter de la date de publication de la loi. Il s'agit de ne pas déstabiliser l'équilibre économique des opérations de construction engagées avant que le Gouvernement ne fasse part de ses intentions d'instaurer un tel système de plafonnement.

  • TVA : taux réduit applicable aux ventes et livraisons à soi-même de logements neufs situés en zone ANRU (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 53)

L'article 278 sexies I, 6 du CGI permet l'application du taux réduit de TVA aux ventes et livraisons à soi-même de logements neufs situés en zone ANRU (ou dans un périmètre de 500 mètres autour des ces zones) dès lors qu'ils sont destinés à des personnes physiques dont les ressources ne dépassent pas les plafonds PLS (prêt locatif social).

Une difficulté se pose à propos du moment où l'on doit se situer pour apprécier cette condition de ressources. En effet, dans la plupart des cas, la vente de logements neufs est précédée d'un contrat préliminaire de réservation, la vente proprement dite n'intervenant qu'à l'achèvement de la construction. C'est donc au moment de la signature de ce contrat préliminaire que le prix total de l'opération doit être déterminé afin de permettre aux futurs acquéreurs de s'engager en toute sécurité. En différant l'appréciation de ces ressources, et donc la détermination du prix TTC, au moment de l'acte de vente ou à l'achèvement de la construction alors que les futurs acquéreurs sont déjà engagés depuis plusieurs mois, on risque de rendre ces opérations trop incertaines. L'article 53 de la loi du 25 mars 2009 a donc pour objet de permettre, comme c'est le cas pour les opérations de location-accession agréées ou pour les opérations réalisés dans le cadre d'un "Pass-foncier", une prise en compte des revenus au moment du contrat préliminaire.

4. Procédures fiscales

  • Communication entre l'ANAH et l'administration fiscale (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, art. 10)

Les articles L. 321-4 (N° Lexbase : L7443IDZ) et R. 321-30 (N° Lexbase : L3314HTW) du Code de la construction et de l'habitation instituent un contrôle a priori systématique exercé par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Ce contrôle systématique, selon les déclarations des Directions départementales de l'équipement, mobilise de 50 à 80 ETP (équivalents temps plein) et se focalise sur les conditions initiales de conclusion du bail. Or, le suivi dans le temps du respect des obligations est tout aussi important et serait facilité par l'échange de données entre l'administration fiscale et l'ANAH.

C'est ainsi que l'article 10 de la loi du 25 mars 2009 prévoit que l'ANAH peut communiquer à l'administration fiscale, spontanément ou à sa demande, sans que puisse être opposée l'obligation au secret professionnel, tous les renseignements et documents recueillis dans le cadre de sa mission et notamment les informations relatives aux conventions signées en application de l'article L. 321-4 du Code de la construction et de l'habitation en précisant l'identifiant unique des logements auxquels se rapportent ces conventions et le nom de leur propriétaire. Celles-ci permettent, en effet, aux bailleurs de bénéficier d'une déduction d'impôt sur le revenu dans le cadre du "Borloo ancien" sous réserve du respect du plafond de loyers et de ressources.

A noter qu'il était également prévu, initialement, d'instaurer la transmission gratuite par l'administration fiscale à l'ANAH des informations relatives à la vacance des logements. Ces dispositions ont été supprimées par la commission mixte paritaire.


(1) Sur le 1 % logement, cf. Christophe Willmann, Loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 : la réponse du législateur aux critiques du 1 % logement, paru dans Lexbase Hebdo n° 345 du 9 avril 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N0155BKX)

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Arbitrage

[Questions à...] L'arbitrage international, un droit dynamique en quête d'identité - Questions à Emmanuel Gaillard, Professeur de droit à l'Université Paris XII et Avocat responsable du département d'arbitrage international du cabinet Shearman & Sterling

Lecture: 9 min

N0051BK4

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par Anne Lebescond - Journaliste juridique

Le 07 Octobre 2010

Le premier trimestre 2009, avec pas moins de trois arrêts essentiels -dont deux publiés au Bulletin- de la Cour de cassation relatifs à l'arbitrage international, témoigne du dynamisme de la matière. Les deux premiers arrêts, rendus par la première chambre civile, le 11 février 2009 (Cass. civ. 1, 11 février 2009, deux arrêts, n° 06-18.746, FS-P+B+I N° Lexbase : A1187EDC et n° 08-10.341, F-D N° Lexbase : A1314EDZ), ont trait au régime du recours en annulation ou en nullité de la convention d'arbitrage ou de la clause compromissoire. Le troisième arrêt (Cass. civ. 1, 11 mars 2009, n° 08-12.149, F+P+B N° Lexbase : A7197EDW), outre la précision qu'il donne sur les attributions de la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI) (purement organisationnelles et non juridictionnelles), traite du recours en annulation de la sentence.
Qu'il s'agisse du recours en annulation ou en nullité de la convention d'arbitrage ou de la sentence arbitrale, le contrôle exercé par les juges nationaux sur l'arbitrage est reporté à l'issue de la procédure arbitrale, en vertu, notamment du principe de "compétence-compétence", selon lequel l'arbitre doit, le premier, connaître des contestations concernant l'existence et la validité de la convention d'arbitrage ou, plus généralement, de toute question concernant sa propre compétence. La particularité de cette procédure de règlement privé des conflits, très répandue en matière de commerce international, faute de juridiction supranationale, ne se limite pas à cet aspect. L'arbitrage est, en effet, un droit "original" (qualifié d'hybride, en ce qu'il mêle la volonté des parties, quant à la désignation de l'arbitre et aux modalités de la procédure, à la force exécutoire que revêt la sentence), qui ne trouve son pareil dans aucune autre procédure française ou relevant d'un droit étranger. C'est également un droit en quête d'identité, en l'absence d'un régime juridique commun à tous les Etats, tant à la lumière des décisions juridictionnelles rendues, qu'à celle de la philosophie sous l'angle de laquelle il est appréhendé.

Pour faire un point sur cette actualité jurisprudentielle et, plus généralement, sur l'arbitrage international, Lexbase Hebdo - édition privée générale a rencontré Maître Emmanuel Gaillard, Professeur de droit à l'Université Paris XII et Avocat associé du cabinet Shearman & Sterling, reconnu comme l'un des plus grands spécialistes de cette discipline.

Lexbase : La confidentialité est l'une des motivations du recours par les parties à l'arbitrage. Alors qu'elle était considérée comme inhérente à celui-ci, certaines décisions ont rejeté son automaticité. Quelle est la place exacte faite à la confidentialité au sein de cette procédure ? Quelles sont les autres motivations du recours à ce type de règlement des conflits ?

Emmanuel Gaillard : La confidentialité n'est, effectivement, plus vue comme un élément consubstantiel à l'arbitrage (1), mais comme une caractéristique qui dépend essentiellement de la volonté des parties (2).

La question de la confidentialité est extrêmement délicate. La première interrogation qu'elle soulève est de savoir sur quoi elle porte. S'agit-il de la confidentialité de l'existence de la procédure, de la confidentialité des documents de la procédure ou de la confidentialité de la sentence ? La question se pose, également, en termes différents, selon qu'il existe ou non un accord des parties à ce sujet (3). Une question distincte, mais liée à la précédente, est celle de savoir si des tiers peuvent intervenir dans une procédure arbitrale pour y faire connaître leur point de vue. En application du règlement de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), pourtant fort peu explicite à ce sujet, certains tribunaux arbitraux admettent, aujourd'hui, que des ONG puissent déposer des observations dans la procédure en qualité d'amicus curiae.

La distinction principale qui doit être opérée en la matière est celle de l'arbitrage commercial de droit commun et de l'arbitrage qui oppose investisseurs et Etats en matière d'investissements. Alors que, dans le premier cas, la confidentialité de l'arbitrage reste importante aux yeux des parties, dans le second, le souci de transparence et d'information du public sur des procédures concernant les deniers publics est dominant et a entraîné un renversement du principe. En l'absence d'engagement exprès en sens contraire, le principe est, en matière d'investissements, celui de la liberté des parties de s'exprimer sur la procédure arbitrale (4). Le règlement du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), par exemple, n'impose d'obligation de confidentialité qu'aux arbitres et au CIRDI, les parties restant libres de communiquer sur la procédure qui les oppose. Ce n'est que si le tribunal y voyait une source inopportune d'aggravation du différend qu'il pourrait inviter les parties à se réfréner, ce qu'il fait rarement.

Il faut, enfin, garder à l'esprit que la sanction du non-respect de la confidentialité n'est pas évidente. La Cour suprême de Suède, dans sa décision du 27 octobre 2000 (5), a opté pour une réparation financière du préjudice, écartant l'annulation de la sentence. Pour autant, il est très difficile de prouver un tel préjudice, et encore plus de l'apprécier. En définitive, pour le praticien qui demeure attaché à la confidentialité de l'arbitrage, le plus sûr est de faire figurer expressément le principe dans la convention d'arbitrage. A défaut, il n'existe aucune garantie que la confidentialité sera reconnue par les arbitres, et, moins encore qu'elle sera sanctionnée efficacement.

Dans l'ensemble des motivations du recours à l'arbitrage, la confidentialité ne vient pas en bonne position. Les parties recourent à l'arbitrage, car il s'agit, en matière internationale, d'un mode de règlement des différends neutre par rapport aux parties, parce qu'il permet la participation des parties à l'élaboration de la procédure et en raison des facilités d'exécution de la sentence résultant, notamment, de la Convention de New York du 10 juin 1958, pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères (N° Lexbase : L6808BHM). La confidentialité n'est qu'une motivation très secondaire.

Lexbase : En vue d'assurer la confidentialité de l'arbitrage, il est, donc, recommandé de la prévoir expressément. Existe-t-il d'autres réflexes essentiels que le rédacteur de la convention se doit d'adopter, pour renforcer l'efficacité de l'accord et, par là, la protection de la volonté des parties ?

Emmanuel Gaillard : La convention d'arbitrage doit, à mon sens, prévoir le siège de l'arbitrage car d'importantes conséquences juridiques en découlent, comme le recours en annulation contre la sentence à intervenir. D'autres éléments ont une importance pratique. C'est le cas, par exemple, de la langue dans laquelle l'arbitrage sera conduit. Lorsque plusieurs langues sont choisies, ce qui est possible, il faut avoir à l'esprit le coût susceptible de résulter des traductions. Une formule indiquant que chaque partie peut, à son choix, s'exprimer dans une langue ou dans une autre sans traduction est préférable, mais n'est pas toujours possible.

En revanche, il n'est pas nécessaire de choisir une procédure d'arbitrage, les arbitres étant à même de régler les questions procédurales qui se posent à eux, en choisissant ou non une loi de procédure déterminée.

Lexbase : Quels sont les principes propres au droit de l'arbitrage permettant d'assurer son efficacité ?

Emmanuel Gaillard : L'efficacité de l'arbitrage repose essentiellement sur la combinaison de deux principes, le principe d'autonomie de la convention d'arbitrage par rapport au contrat sur lequel il porte (dit "contrat de fond" ou "contrat principal") et le principe de "compétence-compétence". Sans eux, il serait très aisé pour une partie d'alléguer l'incompétence du tribunal arbitral pour faire "dérailler" la procédure arbitrale ou la retarder considérablement.

En vertu du principe d'autonomie de la convention d'arbitrage, l'éventuelle annulation de la convention principale n'atteint pas la validité de la convention d'arbitrage, que celle-ci soit insérée dans le contrat en cause (clause compromissoire) ou convenue dans un acte séparé (compromis d'arbitrage). La solution est excellente puisque, si tel n'était pas le cas, il suffirait de contester la validité de la convention de fond pour faire arrêter l'arbitrage, au motif que, si le contrat est nul, la clause compromissoire l'est aussi et que, par voie de conséquence, l'arbitre est incompétent.

Le principe de "compétence-compétence", quant à lui, permet aux arbitres de connaître des contestations relatives à la validité de la convention d'arbitrage ou au champ de leur compétence. Ainsi que l'a encore rappelé récemment la première chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt du 11 février 2009 (6), "il appartient à l'arbitre de statuer en priorité sur sa propre compétence". Cela ne signifie pas qu'il n'existe aucun contrôle des juridictions à ce sujet, mais simplement que ce contrôle est exercé par le juge en charge d'examiner la validité de la sentence arbitrale, une fois celle-ci rendue par les arbitres.

Lexbase : Ces principes sont-ils unanimement reconnus par les Etats ? Existe-t-il une harmonisation internationale de la matière ?

Emmanuel Gaillard : Le principe d'autonomie de la convention d'arbitrage et celui de "compétence-compétence" sont très largement reconnus en droit comparé.

Le principe d'autonomie de la convention d'arbitrage assure une étanchéité entre la convention de fond et la convention d'arbitrage et évite que des vices affectant la convention principale puissent infecter la convention d'arbitrage. Ce principe est très généralement admis. Il est reconnu par tous les règlements d'arbitrage modernes (règlements de la CCI, de la Cour Internationale d'Arbitrage à Londres (LCIA), de la Procédure de Résolution des Différends Internationaux (ICDR)...) et par la loi-type de la CNUDCI sur l'arbitrage. C'est, aujourd'hui, l'un des principes le plus communément admis en matière d'arbitrage. Le droit français a joué un rôle pionnier en la matière, puisqu'il a été l'un des premiers à poser le principe, avec l'arrêt "Gosset" du 7 mai 1963 (7).

La jurisprudence française est constante en ce sens. Récemment encore, il a été jugé que "la clause d'arbitrage international s'impose à toutes parties venant aux droits de l'un des cocontractants" (8), en cas de cession du contrat principal, sauf à démontrer le caractère intuitu personae de la convention d'arbitrage (9) ou "l'ignorance raisonnable de l'existence de cette clause" (10). La Cour de cassation a poussé le raisonnement plus loin encore, puisqu'elle admet la transmission de la clause compromissoire, alors même que le contrat initial n'a pas été valablement transmis (11).

L'acceptation du principe de "compétence-compétence" en droit comparé appelle quelques nuances. L'effet positif du principe selon lequel les arbitres peuvent continuer à exercer leur mission lorsque leur compétence est contestée et peuvent se prononcer eux-mêmes sur leur compétence sans que l'on puisse les accuser d'illogisme est très généralement admis. Là encore, le principe est reconnu par la loi-type de la CNUDCI et par la plupart des droits modernes de l'arbitrage.

La nuance concerne l'effet négatif de la "compétence-compétence". Il s'agit de la règle, pleinement reconnue en droit français, selon laquelle lorsqu'une partie saisit une juridiction étatique en dépit de l'existence d'une convention d'arbitrage, le juge saisi doit renvoyer les parties à l'arbitrage, dès lors qu'un examen prima facie lui permet de constater l'existence d'une convention d'arbitrage. C'est devant les arbitres que les parties doivent s'expliquer d'abord de manière complète sur l'éventuelle nullité de la convention d'arbitrage ou sur le fait qu'elle ne couvre pas la matière litigieuse. Cette priorité donnée aux arbitres permet de respecter, en pratique, l'effet positif du principe de "compétence-compétence". Si cette règle n'existait pas, il suffirait, en effet, de saisir la juridiction qui aurait été compétente en l'absence de convention d'arbitrage pour doubler les arbitres et rendre sans grand effet pratique l'autorisation qui leur est donnée de poursuivre leur travail, lorsque leur compétence est contestée.

Le droit français et, pour l'essentiel, le droit suisse reconnaissent pleinement cette règle. D'autres juridictions, comme celles des Etats-Unis d'Amérique, sont plus réticentes. C'est, en réalité, aujourd'hui, un indicateur essentiel de la faveur que les droits accordent à l'arbitrage.

Lexbase : Dans votre ouvrage Aspects philosophiques du droit de l'arbitrage international (12), vous expliquez ces divergences par la pluralité des conceptions philosophiques de l'arbitrage international adoptées par les Etats. Ce débat n'est-il pas très théorique ?

Emmanuel Gaillard : Ce débat pourrait, de prime abord, paraître très théorique. Il révèle, en réalité, des enjeux pratiques considérables. Des solutions très divergentes à des questions pratiques majeures dépendront, en effet, du parti philosophique, de la conception de l'arbitrage retenue par les arbitres. L'ouvrage s'attache à montrer ces enjeux et à les rattacher aux différentes visions de l'arbitrage international qui existent dans le monde. Il existe trois grandes conceptions de l'arbitrage.

La première réduit l'arbitrage international à une composante de l'ordre juridique interne du siège de l'arbitrage. L'arbitre est, ici, assimilé à une juridiction appartenant à un seul ordre juridique, celui de l'Etat du siège de l'arbitrage, conçu comme un for. Adopter une telle conception revient à considérer que l'arbitre siégeant en Angleterre, par exemple, ne se comporte pas différemment d'un juge anglais. Ainsi, dans cette hypothèse, si une décision juridictionnelle de l'Etat du siège annule la convention d'arbitrage ou la sentence, celles-ci ne peuvent être reconnues nulle part ailleurs.

La deuxième conception tend à considérer que la "juridicité" de l'arbitrage puise, en réalité, sa source non seulement dans l'ordre juridique de l'Etat du siège, mais également, dans tous les ordres juridiques dans lesquels la sentence est susceptible d'être exécutée ou qui sont prêts à reconnaître son efficacité. Dans ce cas, tous les droits concernés de près ou de loin par l'arbitrage ont une égale légitimité à se prononcer sur le sort de la sentence. Cette conception permet la reconnaissance par un Etat d'une sentence annulée au siège de l'arbitrage. Elle invite chaque Etat à raisonner sur la convention d'arbitrage ou sur la sentence arbitrale, indépendamment de toute décision étatique susceptible d'intervenir à leur sujet dans un autre Etat.

Enfin, la troisième conception envisage l'arbitrage international comme un ordre juridique autonome, l'arbitre devenant, en réalité, une "juridiction internationale". Cette conception donne à l'arbitre une pleine autonomie à l'égard des ordres juridiques étatiques pris isolément. C'est, en réalité, la convergence des droits en ce sens qui donne à la convention d'arbitrage, puis à la sentence, leur "juridicité". D'importantes conséquences juridiques en découlent, comme la possibilité pour les arbitres d'appliquer des règles transnationales ou de faire prévaloir les conceptions d'un ordre public réellement international sur les particularismes locaux.


(1) V. en sens contraire, English Court of Appeal, 1990, March 15, Dolling Baker c/ Merret et English Court of Appeal, Civil Division, 1997, December, 19, Ali Shipping Corporation v. Shipyard Trogir.
(2) Cf. Cour suprême de Suède, 27 octobre 2000, affaire "Bubank". Les juges ont refusé, dans cette affaire, de consacrer un principe général de confidentialité de l'arbitrage, en l'absence d'accord des parties en ce sens.
(3) T. com. Paris, ord. 22 février 1999, Publicis c/ True North.
(4) V., not., Supreme Court of British Columbia, 2001, February, 16, dans laquelle une ONG a été autorisée à filmer les débats et à les diffuser en intégralité sur internet.
(5) Cour suprême de Suède, 27 octobre 2000, affaire "Bubank", préc..
(6) Cass. civ. 1, 11 février 2009, n° 08-10.341, Société Laviosa Chimica Mineraria, F-D, préc..
(7) Cass. civ. 1, 7 mai 1963, JCP, 1963, II, 13405.
(8) Cass. civ. 1, 8 février 2000, n° 95-14.330, Société Taurus Films et autres c/ Société Films du Jeudi (N° Lexbase : A0032AUQ).
(9) Cass. civ. 1, 28 mai 2002, n° 00-12.144, Société Burkinabe des ciments et matériaux (CIMAT) c/ Société des ciments d'Abidjan (SCA), FS-P (N° Lexbase : A7985AYE).
(10) Cass. civ. 1, 6 février 2001, n° 98-20776, Peavey Company c/ Organisme général pour les fourrages et autres, publié au bulletin (N° Lexbase : A2882CGT).
(11) Cass. civ. 1, 28 mai 2002, n° 00-12.144, Société Burkinabe des ciments et matériaux (CIMAT) c/ Société des ciments d'Abidjan (SCA), FS-P, préc..
(12) E. Gaillard, Aspects philosophiques du droit de l'arbitrage international, éd. Les livres de poche de l'Académie de droit international de La Haye, juillet 2008.

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Fonction publique

[Jurisprudence] L'obligation de donner un emploi à tout fonctionnaire en activité et ses conséquences indemnitaires

Réf. : CE 1° et 6° s-s-r., 4 mars 2009, n° 311122, M. Brunel (N° Lexbase : A5777EDC)

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par Christophe De Bernardinis, Maître de conférences à l'Université de Metz

Le 07 Octobre 2010

L'article 15 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 (N° Lexbase : L4748AQW) a posé un principe qui n'est pas contesté aujourd'hui, et qui se trouve en filigrane des problématiques de gestion de la fonction publique : "La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration". Il a, ainsi, été reproché à la gestion des ressources humaines dans la fonction publique certains défauts généraux. On évoque volontiers son caractère bureaucratique, son insuffisance d'anticipation, voire encore son égalitarisme acharné (1). Les ministères, les collectivités territoriales et les hôpitaux ont, ces dernières années, accompli des progrès manifestes dans la gestion de leurs agents. Cette gestion est, d'ailleurs, au coeur des projets engagés dans le cadre de la modernisation de la fonction publique (2). Cependant, ces progrès peuvent paraître, en certains cas, encore insuffisants au regard de la persistance de certaines pratiques ou moeurs administratives. Le contentieux relatif aux actions en responsabilité exercées par des fonctionnaires sans affectation pendant des années et qui se plaignent d'avoir vu leur carrière mise entre parenthèses connaît, en effet, un certain essor qui peut paraître, eu égard au constat précédemment dressé, pour le moins surprenant. Il ressort des faits de l'espèce de l'arrêt "Brunel" du 4 mars 2009, qu'à la date du 1er avril 2000, le requérant a été nommé dans le corps des administrateurs civils, corps interministériel qui représente la majorité des postes offerts à la sortie de l'ENA, et qui correspond, notamment, à la fonction de concevoir, mettre en oeuvre, et évaluer les politiques publiques dans les différents ministères et les établissements publics administratifs. Affecté au ministère de l'Emploi et de la Solidarité, le requérant a occupé les fonctions de secrétaire général adjoint à la Délégation interministérielle à la Ville, puis celles de chargé de mission à la Direction de l'administration générale, du personnel et du budget. Au titre de la mobilité statutaire, il a, par la suite, été affecté au ministère de la Défense pour une durée de deux ans en qualité de responsable du pôle commercial de l'établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense. Ayant été relevé de ses fonctions le 1er juillet 2002 et remis à la disposition de son administration d'origine, il est resté sans fonction pendant près de deux ans entre le 1er juillet 2002 et le 30 septembre 2004.

Estimant, alors, que l'administration aurait commis des fautes dans la gestion de sa carrière durant toute cette période, il demande réparation du préjudice matériel et moral ainsi causé par la diminution progressive de ses attributions et responsabilités au sein de la Délégation interministérielle à la ville, par la décharge de responsabilité de chef du pôle économique, et par son absence d'affectation pendant plus de deux ans. Le requérant est débouté quant aux deux premiers chefs de préjudice. La Haute juridiction administrative énonce que la diminution progressive de ces activités au ministère de l'Emploi est liée à sa manière de servir et n'est pas étrangère à l'intérêt du service, le requérant ayant bénéficié, en tout les cas, d'une nouvelle affectation dans un délai raisonnable. En outre, la décharge de responsabilité au ministère de la Défense est, selon les Sages du Palais Royal, elle aussi justifiée par l'intérêt du service en raison, notamment, des difficultés relationnelles rencontrées par le requérant dans l'exercice de ses fonctions. Les conséquences du retrait de responsabilité ont été, de surcroît, rapidement tirées par la mise à disposition de son administration d'origine, toujours dans un délai raisonnable.

En revanche, le troisième chef de préjudice lié à l'absence d'affectation est retenu par le Conseil d'Etat, dans la mesure où "tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade". Le fait d'avoir maintenu le requérant en activité avec traitement, mais sans affectation, méconnaît cette règle et constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Il appartenait, en effet, "au ministre compétent, soit de lui proposer une affectation, soit, s'il l'estimait inapte aux fonctions correspondant à son grade, d'engager une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle".

Le principe de la responsabilité de l'administration étant établi, il convenait d'évaluer le préjudice subi par le fonctionnaire. Logiquement, l'intéressé ne pouvait prétendre, pendant la période au cours de laquelle il n'avait reçu aucune affectation, au bénéfice d'indemnités nécessairement liées à l'exercice effectif des fonctions. Mais bien que ce dernier n'ait pas fait acte de candidature au premier mouvement de mutation interne auquel il pouvait se présenter, il avait ensuite effectué plusieurs démarches dans le but de retrouver de nouvelles fonctions. Il n'y avait donc, dans le cas présent, pas lieu d'exonérer l'Etat, à ce titre, d'une partie de sa responsabilité. Enfin, le préjudice moral et l'atteinte à la réputation professionnelle subis par l'intéressé sont évalués à la somme globale de 10 000 euros, tous intérêts compris.

En faisant partiellement droit à la demande de l'intéressé, le Conseil d'Etat rappelle, une nouvelle fois, une des règles fondamentales du statut des fonctionnaires : le droit de tout fonctionnaire d'être affecté dans un emploi correspondant à son grade (I). L'inertie de l'administration à choisir entre l'affectation et le licenciement constitue une faute de nature à engager sa responsabilité et donne lieu à octroi de dommages et intérêts (II).

I - Le droit pour tout fonctionnaire de recevoir une affectation correspondant à son grade

Le Conseil d'Etat rappelle, en l'espèce, cette règle classique du droit de la fonction publique, mais aussi de gestion publique (A). Si son rappel peut paraître, en ce sens, surprenant dans l'optique de l'application depuis peu des principes nouveaux de modernisation de la gestion publique, il n'en reste pas moins qu'il existe certaines limites à l'application de cette règle (B).

A - Le rappel d'une règle fondamentale du droit de la fonction publique

La particularité de la fonction publique française est d'être organisée sur le système de la carrière. Initialement réservé à la fonction publique d'Etat, le système est désormais commun à toutes les branches de la fonction publique. Les agents administratifs sont, ainsi, recrutés à titre permanent et placés dans une situation statutaire qui leur permet de progresser dans la fonction publique et d'y demeurer, en principe, jusqu'à la fin de leur vie professionnelle. Cette carrière marque la différence à l'égard des agents non titulaires, qui n'ont pas droit à la carrière, et des agents de droit privé, salariés des entreprises, qui sont recrutés pour un emploi précis spécifié par leur contrat de travail.

Dans la logique ainsi décrite, les fonctionnaires d'Etat, des collectivités, ou des établissements hospitaliers sont recrutés dans des corps et des cadres d'emploi qui donnent à leur membre vocation à occuper plusieurs types d'emplois, c'est-à-dire de fonctions correspondant à leur grade. L'appartenance du fonctionnaire au corps dans la fonction publique d'Etat ou hospitalière, et au cadre d'emploi, lui confère donc la propriété d'un grade mais n'implique pas son affectation sur une fonction précise, ce qui permet, à la fois, de faciliter la mobilité des agents dans des fonctions correspondant à leur grade, l'adaptation permanente aux besoins du service, et la stabilité professionnelle par la continuité de la carrière.

Le fonctionnaire n'est pas recruté en vue d'occuper un emploi précis, c'est par l'effet de son intégration au sein d'un corps qu'il peut, compte tenu de l'évolution de sa carrière au sein de celui-ci, occuper tel emploi. On perçoit, ainsi, que la relation entre le grade et l'emploi procède de ce qu'il existe pour chaque corps des emplois qui lui correspondent, et que ceux-ci sont pourvus en considération du grade du fonctionnaire. Le statut général précise que "le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper des emplois qui lui correspondent" (3). Dès lors, le Conseil d'Etat n'a pas hésité à hisser au rang des règles fondamentales du statut des fonctionnaires la règle selon laquelle "tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade" (4). Le juge vérifie si l'emploi d'affectation correspond au grade détenu par le fonctionnaire. Il a, ainsi, pu juger à propos d'un sous directeur d'administration centrale, "qu'il ressort des pièces du dossier qu'après affectation dans cet emploi, [l'intéressé] ne s'est vu confier qu'une mission temporaire sans réelle portée, a été progressivement privé de toutes attributions et de tous moyens, et finalement prié de demeurer chez lui" (5). Un fonctionnaire a droit à une affectation, et n'a pas ce caractère la décision de maintenir onze ans un agent sans affectation avec traitement (6), ni la mission de proposition et de réflexion confié à un directeur des hospices civils de Lyon après qu'il ait été procédé à la fin de ses fonctions, aucun travail effectif ne lui ayant été confié (7).

B - Un rappel des limites de l'application de la règle

Si le fonctionnaire a le droit d'être affecté dans un emploi correspondant à son grade, cela ne signifie pas que le fonctionnaire ne peut recevoir qu'une affectation correspondant à celui-ci. A titre exceptionnel, et dans l'intérêt du service, il est possible de conférer aux titulaires d'un grade déterminé des fonctions normalement remplies par des agents d'un grade supérieur (8) ou par des agents d'un grade inférieur. Aucune disposition ni aucun principe général applicable aux fonctionnaires civils n'interdit, ainsi, à l'administration de prévoir qu'un fonctionnaire puisse être placé sous les ordres d'un agent de grade inférieur au sien (9). Le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales du Val-d'Oise a donc légalement pu prévoir que les psychologues de l'aide sociale à l'enfance, agents de catégorie A, seraient placés sous l'autorité hiérarchique directe des responsables de circonscriptions, agents de catégorie B, auxquels il appartiendrait de viser leurs demandes de congés, de formation et de remboursement de frais de déplacement (10). En outre, il est admis que, sous réserve de détournement de pouvoirs, l'autorité administrative a toujours la possibilité de procéder à la modification d'un statut d'emploi afin de permettre la nomination d'un agent public qui ne satisfait pas aux conditions de nomination exigées par ce statut (11). Dans l'arrêt d'espèce, la décharge de responsabilité découlait, notamment, des difficultés relationnelles rencontrées dans l'exercice de ses fonctions et était donc justifiée par l'intérêt du service. La diminution progressive des activités au ministère de l'Emploi étant, également, liée à la manière de servir, elle n'était pas non plus étrangère à l'intérêt du service. Ceci n'est, en revanche, pas le cas de l'absence d'affectation pendant plus de deux ans.

Il faut rappeler, à cet égard, que le fonctionnaire est seul titulaire de son grade puisque la conséquence de la titularisation des fonctionnaires est de prononcer leur intégration définitive dans un grade. L'autorité administrative, quant à elle, conserve la libre disposition de l'emploi. Le fonctionnaire n'a donc aucun droit à conserver son emploi ni à en changer, car les affectations n'ont aucune incidence sur sa situation statutaire telle que déterminée par le grade. Cela permet à l'administration de pourvoir aux affectations des fonctionnaires en tenant compte de leur grade, de leur aptitude, ainsi que de leur capacité et, ceci, dans l'intérêt du service. A l'inverse, l'idée qui prévaut est qu'un fonctionnaire qui ne reçoit pas d'affectation est celui qui ne donne pas satisfaction et qui ne répond pas aux exigences du service. L'autorité administrative doit alors avoir le courage d'aller jusqu'au bout de son raisonnement, et entamer une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle à l'encontre de son agent. Dès lors qu'elle ne considère pas que le cas de l'intéressé relève de cette procédure extrême, il lui appartient de procéder à une affectation dans un emploi de son grade.

Si elle ne le fait pas, son inertie à choisir entre l'affectation et le licenciement constitue une faute de nature à engager sa responsabilité, et doit donner lieu à l'octroi de dommages et intérêts au requérant (II).

II - Le caractère fautif de l'inertie de l'administration à choisir entre l'affectation et le licenciement

L'administration ne peut pas se fonder sur un comportement fautif de l'agent ou sur une insuffisance professionnelle pour prendre une demi-mesure consistant à ne pas engager de procédure de licenciement, tout en refusant à l'intéressé les fonctions correspondant à son grade. La jurisprudence tient, néanmoins, compte de l'existence d'un délai raisonnable dans l'établissement de la nouvelle affectation, même si ce délai doit s'entendre dans les limites de la règle du service fait (A). Elle tient, également, compte de l'éventuelle passivité de l'agent pour réduire ou supprimer l'obligation indemnitaire à la charge de l'administration (B).

A - L'illégalité liée à la non-affectation et l'application d'un délai raisonnable

L'illégalité qui résulte, pour l'Etat, de ne pas avoir prononcé l'affectation de son agent est constitutive d'une faute de nature à engager sa responsabilité, mais uniquement lorsque l'affectation n'a pas eu lieu dans un délai raisonnable. En l'espèce, le requérant n'a pas eu d'affectation pendant plus de deux ans. Que faut-il entendre par "délai raisonnable" ? La notion doit être entendue en dehors de toute référence à la Convention européenne des droits de l'Homme et doit procéder, en réalité, de chaque cas d'espèce. Puisqu'il s'agit des propres agents de l'Etat et de pourvoir aux emplois dont il a la seule maîtrise de la gestion, le délai raisonnable, en la matière, est forcément très court, de l'ordre de quelques mois. Une telle approche est d'autant plus justifiée que l'absence d'affectation peut constituer une sanction déguisée, et l'arrêt rapporté en offre une belle illustration. Il peut arriver que, voulant sanctionner un fonctionnaire, l'Etat employeur ne lui assure aucune affectation tout en lui servant un traitement. En pareille occurrence, le défaut d'affectation permet à l'Etat de contourner les garanties statutaires offertes aux fonctionnaires en cas de sanction. En témoigne le rappel et le contrôle, en l'espèce, par la Haute cour, des garanties traditionnellement requises en matière de droits de la défense (motivation de la décision, communication préalable du dossier). La notion de délai raisonnable, assure, ainsi l'agent contre toute tentative déguisée de sanction.

Il faut aussi rappeler que normalement, pendant la période de non-affectation, l'agent ne perçoit pas son traitement en l'absence de service fait. Peu importe les raisons qui justifient cette absence d'affectation ou de service fait, et peu importe qu'elle soit le fait de l'administration elle-même ou consécutive à la force majeure (12). Applicable à toutes les dépenses des collectivités publiques, la règle du service fait subordonne le paiement des dépenses publiques à la condition, pour le bénéficiaire, d'avoir un droit acquis à ce paiement et d'avoir réalisé le service (13). S'agissant des agents de l'Etat, le Conseil d'Etat a eu l'occasion de rappeler que "les fonctionnaires n'ont, sauf dispositions législatives expresses, droit à leur traitement que pour les périodes pendant lesquelles ils ont effectivement accompli leur service" (14). Il en résulte que, même en présence d'une décision illégale, le fonctionnaire est tenu de rejoindre le lieu de son affectation et d'y accomplir son service. Autrement, toute suspension de traitement serait justifiée car il n'existe aucune relation de causalité entre l'illégalité de la décision d'affectation et le refus d'assurer le service. Par exemple, il a été jugé qu'un professeur d'université n'ayant pas rejoint le poste auquel il était affecté, sa rémunération devait être suspendue en l'absence de service fait. En effet, cette suspension était entièrement imputable à son propre comportement, dès lors que la décision d'affectation n'ayant pas le caractère d'une décision manifestement illégale et de nature à compromettre gravement un intérêt public, il était tenu de rejoindre son nouveau poste, alors même qu'il contestait cette affectation devant le juge de l'excès de pouvoir (15). En ne procédant pas à l'affectation du fonctionnaire ainsi que l'impose le statut de celui-ci, l'Etat expose donc l'agent qui continue à percevoir son traitement à la règle du service fait. Or, en l'absence de service fait, le fonctionnaire n'a aucun droit acquis à son traitement.

B - L'évaluation du préjudice subi et l'éventuelle passivité de l'agent

Il n'est pas facile d'évaluer, dans un tel cas, le préjudice soumis à réparation puisque c'est celui réellement subi par le fonctionnaire, à savoir la perte de ressources liées à la mauvaise gestion de sa carrière et à l'absence d'emploi pendant la période de non-affectation. En l'espèce, les prétentions du requérant se chiffraient à la somme de 184 300 euros, augmentée des intérêts au taux légal et des intérêts capitalisés, en réparation du préjudice matériel et moral subi du fait des décisions prises par l'administration dans la gestion de sa carrière administrative. Le juge n'a pas suivi les conclusions de l'agent concernant l'ensemble de la gestion proprement dite de sa carrière, mais a retenu le grief formulé au titre de la non-affectation pendant plus de deux ans. Il ne retient pas non plus le préjudice matériel mais seulement le préjudice moral, ainsi que celui lié à l'atteinte à la réputation professionnelle, pour l'évaluer à la somme globale de 10 000 euros.

De manière générale, la jurisprudence tient compte de l'éventuelle passivité de l'agent pour supprimer, ou réduire, l'obligation indemnitaire à la charge de l'administration. On aurait pu songer à écarter par principe, en cette matière, toute forme d'atténuation de responsabilité liée à la situation du fonctionnaire dépourvu d'affectation, en considérant que c'est à l'administration qu'il appartient, d'office, et dans les meilleurs délais possibles, de prendre les décisions adéquates, sans qu'elle ait besoin d'être spécialement incitée par les démarches de l'agent. Toutefois, une telle approche n'a pas été retenue par la jurisprudence.

Ainsi, dans la décision "Guisset", le Conseil d'Etat, s'il fait droit à la demande d'annulation de la décision refusant d'attribuer des fonctions à l'intéressé, tient compte, en revanche, pour réduire des deux tiers l'indemnité à la charge de la personne publique, du comportement du requérant, à qui "il incombait également, compte tenu, tant de son niveau dans la hiérarchie administrative, que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d'un traitement sans exercer aucune fonction, d'entreprendre des démarches auprès de son administration" (16).

De la même façon, dans la décision "Laville Saint-Martin", le Conseil d'Etat, pour réduire là encore d'un tiers l'obligation indemnitaire de l'université, retient que, "si le requérant était en droit de se voir attribuer un service pour chacune des années universitaires concernées, il lui appartenait, également, compte tenu, tant de son niveau dans les cadres de l'université, que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d'un traitement sans accomplir de service, d'entreprendre des démarches en vue d'obtenir un poste administratif, de réaliser un programme de recherche, ou d'obtenir un service d'enseignement auprès des instances de l'université" (17).

Il y a donc un point d'équilibre, concernant les fonctionnaires de haut niveau, entre une obligation pour l'administration d'attribution d'une affectation dans un délai raisonnable, et le fait pour les intéressés de ne pas se résigner à rester sans affectation avant d'entreprendre une action contentieuse, notamment indemnitaire, contre leur administration. Le Conseil d'Etat se livre, ainsi, à une appréciation poussée du comportement du requérant et sanctionne toute passivité de ce dernier. Tel n'est pas le cas en l'espèce, le juge n'exonérant pas l'Etat d'une partie de sa responsabilité, dans la mesure où le requérant n'est pas resté passif face à l'inertie de l'administration, celui-ci ayant, même s'il n'a pas fait acte de candidature au premier mouvement de mutation interne, effectué plusieurs démarches dans le but de retrouver de nouvelles fonctions. Cette solution est logique sur le fond car il n'y a pas, dans l'absolu, d'obligation pour le fonctionnaire de solliciter une affectation, obligation qui viendrait, en quelque sorte, justifier l'oubli dans lequel son administration le tiendrait. Il appartient, en effet, à l'administration d'affecter d'office ses agents dans l'intérêt du service et au nom d'une bonne gestion des deniers publics, sans que les agents n'aient à rappeler à leur administration ses obligations.


(1) Cf. Rapport du Conseil d'Etat, Perspectives pour la fonction publique, Etudes et documents du Conseil d'Etat, n° 54, La documentation française, 2003.
(2) Cf. Brochure diffusée par la Direction générale de l'administration et de la Fonction publique, LOLF et GRH : les nouvelles règles de gestion des ressources humaines dans la fonction publique, La Documentation française, 2006.
(3) Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, article 12, alinéa 2 (N° Lexbase : L5205AHA), JO, 14 juillet 1983, p. 2174.
(4) CE Contentieux, 11 juillet 1975, n° 95293, Ministre de l'Education nationale c/ Dame Saïd (N° Lexbase : A8075B79), Rec. CE, p. 424, concl. Denoix de Saint Marc.
(5) CE, 16 mai 2003, n° 242010, Frehel (N° Lexbase : A1657B9A).
(6) CE, Sect., 6 novembre 2002, n° 227147, Guisset (N° Lexbase : A7481A3H), AJDA, 2002, p. 1434, chron. F. Donnat et D. Casas, JCP éd. A, 2002, n° 1257, note D. Jean-Pierre, RFDA, 2003, p. 984, concl. J.-H. Stahl ; dans le même sens, à propos d'un haut fonctionnaire du ministère de l'Intérieur : CE, 23 avril 2003, n° 215356, Rieutord (N° Lexbase : A7752C8M), JCP éd. A, 2003, n° 1657, obs. A. Taillefait ; à propos d'un professeur d'université : CE, 23 juillet 2003, n° 241816, Laville Saint-Martin (N° Lexbase : A2501C9I), JCP éd. A, 2003, n° 1892, note D. Jean-Pierre.
(7) CE, 9 avril 1999, n° 155304, Rochaix (N° Lexbase : A4412AXP), Rec. CE, Mentionné aux Tables, p. 864.
(8) CE, 10 janvier 1958, Portes, Rec. CE, p. 928.
(9) CE, 24 novembre 1971, n° 80354, Département de la Savoie c/ Dlle Guillaume (N° Lexbase : A6862B8N), Rec. CE, p. 716.
(10) CE, 11 décembre 1996, n° 152106, Département du Val-d'Oise c/ Mme Lacombe (N° Lexbase : A2221APX), Rec. CE, p. 482.
(11) CE, 13 novembre 2002, n° 239064, Mme Distel et autres (N° Lexbase : A0766A47), DA, 2003, n° 16.
(12) CE, 22 avril 1921, Association générale des percepteurs de France, Rec. CE, p. 406 ; CE, 7 juin 1961, Algérie c/ Oudia Hocine, Rec. CE, p. 1075.
(13) L'article 33, alinéa 2, du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, portant règlement général de la comptabilité publique (N° Lexbase : L5348AG8), précise, à cet égard, que "sous réserve des exceptions prévues par les lois ou règlements, les paiements ne peuvent intervenir avant, soit l'échéance de la dette, soit l'exécution du service, soit la décision individuelle d'attribution de subventions ou d'allocations", JO, 30 décembre 1962, p. 12828.
(14) CE, sect., 20 juin 1952, Bastide, Rec. CE, p. 327.
(15) CE 4° et 6° s-s-r., 10 avril 2002, n° 226720, M. Noble (N° Lexbase : A5747AYI), Cahiers de la fonction publique, 2002, n° 215, p. 41.
(16) CE, 6 novembre 2001, n° 227147, Guisset, précité.
(17) CE, 23 juilllet 2003, n° 214816, M. Laville Saint-Martin, précité.

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Sociétés

[Le point sur...] Limitation des indemnités versées aux dirigeants : l'épineux problème de la rétroactivité des décisions

Réf. : Décret n° 2009-348 du 30 mars 2009 (N° Lexbase : L0747IDZ) ; Cass. com., 10 février 2009, n° 08-12.564, M. Jean-Charles Mathey, F-P+B (N° Lexbase : A1362EDS)

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par Jean-Baptiste Lenhof, Maître de conférences à l'ENS - Cachan Antenne de Bretagne, Membre du centre de droit financier de l'Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne)

Le 07 Octobre 2010

"La valeur d'un collaborateur est fonction du temps qui peut s'écouler sans inconvénient, entre un effort exceptionnel de sa part, et la rémunération de cet effort" (1). Cette phrase, Camille Cavallier, l'un des plus grands industriels français de la fin du XIXème siècle, pourrait replacer dans son contexte une partie du débat qui anime l'actualité juridique, s'agissant des indemnités de départ versées aux dirigeants.
Elle prend, en effet, un relief particulier quant au problème de la rétroactivité des décisions ou des mesures prises aux fins de diminuer ces rémunérations. Cette question, dont vient de connaître le juge de cassation dans un arrêt du 10 février 2009, le Gouvernement l'a, également, indirectement posée en édictant le décret du 30 mars 2009, relatif aux conditions de rémunération des dirigeants des entreprises aidées par l'Etat.
L'affaire soumise à la Cour de cassation soulevait, ainsi, le point de savoir dans quelle mesure l'annulation d'une prime de résultat, attribuée, mais non versée, au profit d'un président de directoire, pouvait être décidée par le conseil de surveillance. La réponse du juge, rendue au visa de l'article L. 225-63 du Code de commerce (2), pose le principe de l'impossibilité de donner un effet rétroactif à la délibération sans l'accord du dirigeant. Elle mérite, donc, d'être comparée avec les solutions du décret du 30 mars qui prévoit, dans son article 1er, une modification par avenant des conventions conclues avec la Société de prise de participation de l'Etat, afin d'assurer leur conformité aux nouvelles règles d'encadrement des rémunérations des dirigeants des sociétés soutenues par l'Etat. Les solutions retenues, dans les deux cas posent le problème de l'accord des intéressés aux modifications concernant leur rémunération, dont la Cour de cassation a rappelé le caractère obligatoire en cas de rétroactivité (I), alors que le décret est demeuré silencieux quant à l'éventualité d'un tel accord (II).

I - La rétroactivité des décisions : une jurisprudence complexe

La Chambre commerciale de la Cour de cassation, en rendant son arrêt du 10 février 2009 (A), résout partiellement (B) une jurisprudence rendue complexe par l'imprécision du jeu de la rétroactivité des décisions de modification ou d'annulation des rémunérations des dirigeants.

A - Le pouvoir de modification des rémunérations dans l'arrêt du 10 février 2009

Le 2 décembre 2005, le conseil de surveillance de la société NRJ Group révoque le président du directoire, M. M., et attribue à ce dernier une prime de résultat au titre des deux mois précédents. Cette prime, qui ne sera pas versée, fera ultérieurement l'objet d'une annulation par le conseil de surveillance, par une décision du 26 avril 2006. M. M. introduit, alors, un recours afin de voir condamner la société NRJ Group au paiement de la prime litigieuse, demande qui sera rejetée, en appel, par la cour d'appel de Paris le 11 décembre 2007 (3).

Le juge d'appel, pour refuser l'attribution de la prime, rappelle, d'abord, que, selon les motifs rapportés par la Cour de cassation, "la décision d'octroi comme d'annulation d'une prime de résultat, partie de la rémunération des membres du directoire, relève du pouvoir propre du conseil de surveillance et ne nécessite pas l'accord du bénéficiaire". En ce sens, la cour d'appel de Paris renvoie implicitement aux pouvoirs déterminés par l'article L. 225-63 du Code de commerce qui établit que la rémunération de chacun des membres du directoire est fixée par le conseil de surveillance. Cette position de principe s'inscrit, de la sorte, dans le fil d'une jurisprudence ancienne, bâtie dès 1985, qui reconnaissait le pouvoir, audit conseil, de revenir sur les délibérations fixant les rémunérations du dirigeant. C'est, en effet, par un arrêt de la Chambre commerciale du 16 juillet 1985 (4) que le juge du droit a pu décider qu'un conseil de surveillance avait valablement pu, quatre jours après avoir décidé d'une augmentation, revenir sur cette dernière et supprimer l'avantage salarial ainsi consenti (5).

Il demeure que, à la suite de la décision de la Cour régulatrice, la position des juges du fond a été marquée par une certaine ambiguïté. D'abord, parce que sur ce point, la cour d'appel de Paris avait, en 1982 (6) traité ce problème de la suppression des avantages salariaux sous l'angle de la rétroactivité, pour déclarer inopposable la décision du conseil d'administration d'un société anonyme privant un président du conseil d'administration du bénéfice d'une rémunération proportionnelle, six mois après son attribution. Cette notion de rétroactivité était-elle devenue inopérante à la suite de la décision de la Cour de cassation de 1985 ? On aurait pu le penser, à la réserve près que la même cour d'appel devait, en 2006, faire ressurgir cette notion et reprendre le raisonnement suivi en 1982 (7) en décidant que la modification ou la suppression de la rémunération ne pouvait "sauf accord de l'intéressé" avoir un effet rétroactif (arrêt, à notre connaissance, non soumis à la Cour de cassation).

L'arrêt rendu par la même cour, le 11 décembre 2007 -celui qui était soumis à la censure de la Chambre commerciale dans l'espèce commentée- devait ajouter un nouveau degré de complexité dans l'appréciation de la réduction de la rémunération des dirigeants. Ce dernier, en effet, laissait supposer, tout en reprenant la motivation de l'arrêt de 2006, que, lorsque la prime n'avait pas été versée, la décision d'annulation de l'augmentation n'était pas rétroactive. En effet, dans l'arrêt attaqué, la cour d'appel précisait, pour étayer sa motivation, que "la décision d'annulation peut être prise, sans qu'elle ait d'effet rétroactif, tant que la prime n'a pas été payée" (8).

B - La résolution, par la Cour de cassation d'une jurisprudence complexe

Les contours de cette jurisprudence, source évidente d'insécurité juridique, méritent, ainsi d'être résumés :
- la Cour de cassation permet au conseil de surveillance (la solution est transposable, selon les auteurs à la société anonyme classique) de revenir sur les augmentations de rémunération consenties dans un court délai (4 jours dans l'arrêt de principe) ;
- la cour d'appel de Paris subordonne, en revanche, l'opposabilité de cette réduction à l'accord de l'intéressé lorsque la décision est "rétroactive", c'est-à-dire, sans doute, à l'analyse des décisions précitées, lorsque le délai est plus long ;
- la même cour d'appel estimait, dans l'arrêt cassé, qu'il n'y avait pas rétroactivité lorsque la prime n'avait pas été versée.

La rétroactivité serait-elle appréciable, ainsi, ratione temporis et ratione materiae ? On comprend que la Cour régulatrice ait souhaité limiter la nouvelle distinction introduite par le juge du fond. Eut-il été possible, en l'espèce, de ramener la problématique à la recherche d'un équilibre entre la force de l'ordre public sociétaire et la force obligatoire des contrats ? Les règles du droit positif ne sont pas si simples : les rémunérations font, en fait, l'objet de négociations -on peut y voir une coloration contractuelle-, mais leur attribution est, en droit, le résultat d'une décision dans laquelle le bénéficiaire n'a pas à donner son accord.

L'arrêt de la Cour de cassation semble, ainsi, s'attacher à limiter les effets de cette interprétation de la notion de rétroactivité, tout en reprenant, par certains aspects, les motivations du juge du fond. En effet, elle décide "que le conseil de surveillance ne peut réduire rétroactivement la rémunération des membres du directoire sans l'accord de ceux-ci et qu'il importe peu à cet égard que les sommes dues au titre de cette rémunération n'aient pas encore été payées".

Sur ce dernier point, le juge du droit semble fixer une limite d'importance à l'interprétation factuelle : la rétroactivité s'apprécie en fonction de la décision, et non en vertu du constat, en fait, de la réalité des versements. Dans le même temps, il adopte, implicitement, la notion de rétroactivité, ce qui donne lieu à de nouveaux doutes. S'agit-il d'une évolution de la jurisprudence qui permettrait de considérer que toutes les décisions de réduction sont rétroactives (auquel cas l'accord de l'intéressé serait nécessaire), ou cette notion de rétroactivité relève-t-elle d'un constat matériel laissé à l'appréciation du juge du fond, variable selon les circonstances, et qui serait fonction du délai écoulé entre les deux décisions contradictoires ?

La décision commentée ne permet pas de répondre à la question. On pourrait y voir, comme à l'accoutumée, la marque d'une évolution prudente, susceptible de déboucher sur une construction juridique plus cohérente qu'auparavant. C'est, sans doute, le sens à donner, dans l'absolu, à cet arrêt, qui ne saurait qu'être approuvé. Cette prudence, en revanche, risque de susciter des interrogations d'envergure, dans un contexte où le Gouvernement impose, aujourd'hui, à certaines sociétés, de limiter les rémunérations de leurs dirigeants.

II - La question de la limitation des rémunérations après le décret du 30 mars 2009

Le décret du 30 mars 2009, en posant le principe de la limitation des rémunérations des dirigeants dans les entreprises aidées par l'Etat, renvoie, indirectement au pouvoir de décision aux organes des sociétés concernées (A). La question de la rétroactivité de ces décisions n'ayant pas été évoquée dans le texte, sa mise en oeuvre risque de rencontrer certains obstacles que pourraient éventuellement lever une intervention du Parlement (B).

A - Limitation des rémunérations des sociétés aidées et rétroactivité

L'article 1er du décret établit que, s'agissant des entreprises aidées par l'Etat dans le cadre de la crise financière, l'aide étant subordonnée à la conclusion d'une convention avec l'entreprise bénéficiaire, lesdites conventions, conclues "avant l'entrée en vigueur du présent décret [seront] modifiées par avenant afin d'assurer leur conformité" au droit positif. En pratique, donc, les entreprises aidées devront, par avenant, s'engager à mettre en oeuvre les principes de limitation des rémunérations prévues dans l'article 2 du décret.

Ce dernier établit, ainsi, que l'entreprise s'interdit d'accorder à ses président du conseil d'administration, directeur général, directeurs généraux délégués, membres du directoire, président du conseil de surveillance ou gérants :
- des options de souscription ou d'achat d'actions dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 (N° Lexbase : L2678HW4) à L. 225-186-1 du Code de commerce ;
- des actions gratuites dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 (N° Lexbase : L0798ICK) à L. 225-197-6 du Code de commerce.

Enfin, d'autres restrictions sont imposées, aux termes de l'alinéa 2 de ce même article 2 qui prévoit que : les éléments variables de la rémunération, sont autorisés pour une période déterminée qui ne peut excéder une année, en fonction de critères de performance quantitatifs et qualitatifs, préétablis et qui ne sont pas liés au cours de bourse. Les conventions prévoiront, également, que les éléments variables de la rémunération ne seront pas attribués ou versés si la situation de l'entreprise la conduit à procéder à des licenciements de forte ampleur.

On relèvera, d'emblée, que la mise en oeuvre de ces dispositions se fera par les organes des sociétés concernées. D'une part, elles s'engageront par convention envers l'organisme financeur (la Société de prise de participation de l'Etat) et, d'autre part, leurs organes compétents devront prendre les décisions de limitation des rémunérations. Ce double mécanisme laisse supposer que ces décisions risquent d'être soumises aux solutions dégagées par la jurisprudence. Dans le cas où des rémunérations interdites ou limitables en vertu du décret auraient déjà été décidées avant son édiction, et si des décisions les annulant devaient être analysées comme étant rétroactives, elles pourraient, alors, être inopposables aux intéressés à défaut de leur accord.

B - La solution au problème de la rétroactivité : l'intervention du Parlement

Différentes voies de raisonnement pourraient, cependant, être envisagées pour conclure à l'opposabilité des décisions de limitation ou de suppression des revenus intervenues après leur attribution.

La première voie tendrait à conclure à une interprétation restrictive des effets du texte : un décret ne pouvant être rétroactif, à la différence d'une loi, le texte du Gouvernement ne saurait disposer que pour l'avenir. Dès lors, il faudrait considérer que, seules les attributions de revenus postérieures au décret pourraient faire l'objet d'une limitation ou d'une annulation.

La deuxième voie s'appuierait sur le rejet de toute notion de rétroactivité en raison de la spécificité des décisions en cause. En effet, les incertitudes que la jurisprudence entretient quant à ce mécanisme peuvent être adroitement utilisées puisque, ce point a été souligné, la Cour de cassation a déjà reconnu la validité d'une annulation sans recourir à cette notion de rétroactivité. Il suffirait alors de considérer que les organes compétents exercent simplement les pouvoirs qui leur sont reconnus par le Code de commerce.

La troisième voie tendrait, enfin, à conclure que, le texte n'étant pas supplétif, les intéressés voyant leur liberté contractuelle limitée par une norme, ils seraient, en cas de rétroactivité, contraints par la norme d'accepter la limitation de leur rémunération en vertu d'une disposition qui est d'ordre public.

Envisagés cumulativement, ces arguments pourraient emporter la conviction selon laquelle, dans le cas des entreprises aidées par l'Etat, les restrictions aux rémunérations des dirigeants pourraient échapper à l'application de la jurisprudence de la Cour de cassation. Pris isolément, toutefois, aucun des points soulevés n'est susceptible d'emporter la conviction.

L'édiction d'une loi, expressément rétroactive, permettrait sans doute de lever les incertitudes qui viennent d'être soulignées. A l'heure où nous écrivons ces lignes, le Sénat vient d'adopter un amendement, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2009, dans la nuit du mercredi 1er avril, tendant à élever les dispositions du décret (en les élargissant) au rang de dispositions législatives et le lendemain, cet amendement était adopté par la Commission mixte paritaire. Le sommet du G 20 par ailleurs, a établi, le 2 avril 2009, dans son communiqué (document disponible uniquement en anglais), le principe de l'adoption de normes limitant les rémunérations des dirigeants des organismes financiers. Ainsi, l'hypothèse de l'adoption d'un texte législatif, en remplacement du décret, n'est pas à écarter, ce qui permettrait, éventuellement de résoudre l'épineux problème de la rétroactivité, à tout le moins, si le législateur accepte de le prendre en considération.


(1) C. Cavallier, Sagesse du Chef, Paris 1926.
(2) C. com., art. L. 225-63 (N° Lexbase : L5934AIM) : "L'acte de nomination fixe le mode et le montant de la rémunération de chacun des membres du directoire".
(3) CA Paris, 3ème ch., sect. A, 11 décembre 2007, n° 06/20511, SA NRJ Group c/ M. Jean-Charles Mathey (N° Lexbase : A8615D3H).
(4) Cass. com., 16 juillet 1985, n° 83-17.416, SA de Conditionnement et de Distribution de Produits c/ Epoux Hudry, publié (N° Lexbase : A4412AAN), Bull. civ. IV, n° 217.
(5) La cassation partielle est ainsi prononcée aux termes de l'attendu suivant : "Attendu qu'en statuant ainsi alors que le conseil de surveillance a une compétence exclusive pour fixer le mode et le montant de la rémunération de chacun des membres du directoire par un pouvoir propre de décision, la cour d'appel a violé le texte susvisé".
(6) CA Paris, 28 juillet 1982, BRDA, 1982/20, p.19.
(7) CA Paris, 3ème ch., sect. B, 12 janvier 2006, n° 04/21881, SA Immobilière Gabriel Wattelez c/ Mme Gabrielle Roberte Wattelez (N° Lexbase : A9450DMX ; lire N° Lexbase : N4781AKB), RJDA, 5/06, n° 549.
(8) Elle ajoutera, enfin, ce qui se situe en dehors de la problématique traitée que "sauf abus du droit non invoqué en l'espèce, la décision unilatérale du conseil de surveillance est fondée sur les dispositions de l'article L. 225-63 du Code de commerce et n'a pas à être spécialement motivée".

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Rémunération

[Jurisprudence] Reprise du paiement du salaire du salarié inapte : un mois, sinon rien !

Réf. : Cass. soc., 25 mars 2009, n° 07-44.748, M. Daniel Nerzic, F-P+B second moyen du pourvoi incident (N° Lexbase : A2017EEG)

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010


Le Code du travail laisse à l'employeur un mois pour reclasser un salarié inapte ou le licencier, à défaut de quoi il devra reprendre le paiement des salaires suspendu par l'arrêt maladie. Ce délai d'un mois ne saurait être prolongé sous prétexte que le médecin du travail a été saisi pour préciser la portée de son deuxième avis. C'est cette solution qui ressort d'un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 25 mars 2009 (II). L'arrêt rappelle, également, de manière incidente, que les partenaires sociaux ont la possibilité de stipuler expressément que le non-respect des dispositions relatives au pouvoir de licencier de l'employeur sera sanctionné par la nullité (II).
Résumé

Si les conventions et accords collectifs de travail peuvent limiter les possibilités de licenciement de l'employeur à des causes qu'ils déterminent, le licenciement prononcé pour un motif autre que ceux conventionnellement prévus n'est pas nul, mais seulement dépourvu de cause réelle et sérieuse, en l'absence de dispositions conventionnelles prévoyant expressément la nullité dans une telle hypothèse.

Le délai d'un mois fixé par l'article L. 122-24-4 (N° Lexbase : L1401G9R), devenu L. 1226-4 (N° Lexbase : L1011H9C) du Code du travail, qui court à compter du second examen du médecin du travail, avant que l'employeur ne soit tenu de reprendre le paiement du salaire au salarié ni licencié, ni reclassé, ne peut être ni prorogé, ni suspendu, peu important que le médecin du travail soit conduit à préciser son avis après la seconde visite.

Commentaire

I - La stipulation conventionnelle d'une cause de nullité de licenciement

  • Le sort des dispositions conventionnelles relatives au licenciement

La jurisprudence admet que le licenciement prononcé en violation de dispositions conventionnelles est dépourvu de cause réelle et sérieuse (1). Le juge n'est, toutefois, tenu que des dispositions qui restreignent la liberté de licencier de l'employeur, et non par celles qui seraient moins favorables au salarié (2). Mais qu'en est-il lorsque la convention collective prévoit la nullité d'un licenciement ? C'est à cette question que vient indirectement répondre cet arrêt en date du 25 mars 2009.

  • L'affaire

Cette affaire mettait en cause l'application de la Convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs du 11 avril 1986 et, singulièrement, son article 17. Prétendant que ces dispositions excluaient le licenciement d'un agent pour cause d'inaptitude médicale, l'un d'entre eux avait tenté d'obtenir, en vain, l'annulation de son licenciement devant les juges du fond. Le pourvoi contre l'arrêt entrepris est rejeté, la Chambre sociale de la Cour de cassation considérant que, "si les conventions et accords collectifs de travail peuvent limiter les possibilités de licenciement de l'employeur à des causes qu'ils déterminent, le licenciement prononcé pour un motif autre que ceux conventionnellement prévus n'est pas nul, mais seulement dépourvu de cause réelle et sérieuse, en l'absence de dispositions conventionnelles prévoyant expressément la nullité dans une telle hypothèse", avant de considérer que "la cour d'appel a exactement décidé que la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs avait envisagé que l'invalidité et l'inaptitude à la conduite puissent aboutir à la rupture du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé".

  • L'intérêt de l'affirmation

A première vue, il ne pourrait s'agir, ici, que d'un simple problème d'interprétation d'une disposition conventionnelle et la lecture de l'article 17 en cause suffira pour se convaincre que les partenaires sociaux n'avaient pas souhaité écarté la possibilité de licencier un salarié pour inaptitude, mais seulement restreindre le pouvoir disciplinaire de l'employeur aux seuls cas de faute grave. A bien y regarder, la première partie de la justification ne semblait pas indispensable au rejet du pourvoi et présente donc un intérêt particulier, d'autant qu'elle reprend une formule qu'on n'avait pas trouvé sous la plume de la Haute juridiction depuis 1997 (3). Ainsi, une convention collective pourrait prévoir "expressément la nullité du licenciement" prononcé en violation des dispositions restreignant le pouvoir de licenciement de l'employeur. Et quand on sait que, depuis 2003, toute nullité du licenciement doit entraîner la réintégration du salarié (4), on comprend tout l'intérêt de ce rappel.

  • Une solution juridiquement exacte

La solution nous semble juridiquement exacte.

En premier lieu, elle est conforme au principe de faveur, qui permet aux partenaires sociaux d'adopter des dispositions plus favorables aux salariés que les lois et règlements (5). Dans la mesure où la loi ne prévoit que la faculté reconnue au juge de proposer à l'employeur la réintégration du salarié licencié sans cause réelle et sérieuse (6), le fait de prévoir l'annulation du licenciement, dans des hypothèses précises ignorées par le législateur, est incontestablement plus favorable aux salariés.

En second lieu, la solution est conforme au principe "pas de nullité sans texte", principe consacré par le Conseil constitutionnel (7) et dont la Cour de cassation fait une application presque littérale (8).

II - Le caractère préfix du délai d'un mois laissé à l'employeur pour reprendre le paiement du salaire après l'avis du médecin du travail

  • Etat du droit applicable

L'article L. 1226-4, alinéa 1er, du Code du travail (N° Lexbase : L1011H9C), dispose que, "lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail". Ce texte laisse donc à l'employeur peu de temps pour examiner les possibilités de reclassement du salarié, sur la base de l'avis du médecin du travail, avant d'être contraint de reprendre le paiement du salaire et ce, même si le salarié n'ayant pas été reclassé, il ne pourra lui fournir aucune prestation de travail.

La question de la nature de ce délai a été posée et, notamment, de son caractère ou non préfix.

Dans une précédente décision en date du 4 mai 1999, la Chambre sociale de la Cour de cassation avait eu l'occasion d'affirmer que "l'obligation pour l'employeur de reprendre le paiement du salaire à compter du délai d'un mois suivant le second examen du médecin du travail, n'était pas sérieusement contestable, ce délai n'étant pas suspendu par le recours exercé devant l'inspecteur du travail" (9).

C'est ce caractère préfix qui se trouve, ici, confirmé, dans un cas de figure inédit.

  • La confirmation du caractère préfix du délai d'un mois

Cette fois-ci, l'employeur avait demandé au médecin du travail de préciser le sens de son second avis, qui disposait que le salarié était "inapte à la reprise de son poste. Peut occuper tout poste à temps partiel ne nécessitant pas un contact avec le public de façon permanente". A la suite de cet avis, l'employeur avait proposé au salarié un poste à temps partiel d'agent d'entretien polyvalent. Celui-ci avait alors saisi le médecin du travail qui avait précisé qu'il "n'était apte qu'à un poste sans aucune conduite y compris d'un véhicule léger".

La cour d'appel avait fait partir le délai d'un mois du second avis, alors que l'employeur prétendait qu'il fallait le faire partir du troisième, à tout le moins considérer le délai d'un mois comme suspendu dans l'attente de l'avis interprétatif du médecin du travail explicitant les termes de son deuxième avis. Telle n'avait pas été l'interprétation retenue par la cour d'appel, et tel n'est pas non plus l'avis de la Haute juridiction qui affirme, pour motiver le rejet du pourvoi, que "le délai d'un mois fixé par l'article L. 122-24-4, devenu L. 1226-4 du Code du travail, qui court à compter du second examen du médecin du travail, avant que l'employeur ne soit tenu de reprendre le paiement du salaire au salarié ni licencié ni reclassé ne peut être ni prorogé ni suspendu peu important que le médecin du travail soit conduit à préciser son avis après la seconde visite".

  • Une solution sévère pour l'employeur

La solution peut sembler sévère, surtout si on l'ajoute à une précédente qui avait fait obligation à l'employeur, en cas de désaccord avec le salarié sur la compatibilité de l'emploi proposé avec l'avis du médecin du travail, de saisir le médecin du travail pour recueillir son opinion (10). Cette saisine, qui est donc obligatoire si l'employeur ne veut pas être condamné pour violation de son obligation de reclassement, ne le dispense donc pas de la reprise du paiement des salaires si le délai d'un mois a expiré.

  • Une sévérité justifiée par la finalité de la règle imposant la reprise rapide du paiement du salaire

Cette sévérité est justifiée du point de vue du salarié et de la finalité de la règle introduite dans le Code du travail en 1992 et visant à accélérer le traitement de l'inaptitude. Le salarié inapte a, en effet, tout intérêt à ce que sa situation soit rapidement éclaircie dans l'entreprise, ne serait-ce que pour pouvoir, si son employeur ne peut plus lui fournir d'emploi compte tenu de son aptitude actuelle, se mettre à la recherche d'un autre emploi tout en percevant les indemnités versées par l'assurance-chômage. Par ailleurs, il convient de rappeler que, tant que le salarié n'a pas effectivement repris le travail, il ne perçoit aucune rémunération ; tout au plus l'employeur peut-il être contraint de lui verser des indemnités maladies qui viendront en complément des indemnités versées par la Sécurité sociale. La reprise du paiement des salaires peut donc s'avérer salutaire, pour le salarié, et vise à contraindre l'employeur à ne pas gagner la montre pour inciter le salarié à prendre l'initiative de la rupture du contrat et perdre, ainsi, ses droits.


(1) Cass. soc., 3 février 1993, n° 91-42.409, Société Lyonnaise des Eaux c/ M. Cottin (N° Lexbase : A3826AAX), Bull. civ. V, n° 33, JCP éd. G, 1994, II, 22254, note F. Duquesne ; Cass. soc., 24 octobre 1995, n° 93-45.926, Caisse d'épargne du Mont-Blanc c/ Mme Lefèvre (N° Lexbase : A1349ABL), Bull. civ. V, n° 282 ; Cass. soc., 25 octobre 2005, n° 02-45.158, M. Michel Coudert, FS-P+B (N° Lexbase : A1451DLC), Dr. soc., 2006, p. 110, obs. J. Savatier.
(2) Cass. soc., 6 mai 1998, n° 96-40.951, Société Guépard c/ Mme Van Sorge (N° Lexbase : A2879ACM), Bull. civ. V, n° 229. Dans le même sens, Cass. soc., 13 octobre 2004, n° 02-45.285, Société de secours minière de l'Aveyron et du Tarn c/ M. Pascal Soudan, FS-P+B (N° Lexbase : A6097DD8), Bull. civ. V, n° 256 et les obs. de G. Auzero, Inopposabilité au juge des clauses conventionnelles déterminant une cause de licenciement, Lexbase Hebdo n° 140 du 27 octobre 2004 - édition sociale (N° Lexbase : N3253AB4).
(3) Cass. soc., 14 octobre 1997, n° 97-40.033, M. Jeanjean c/ Association familiale de gestion du lycée Anne-de-Bretagne et autre (N° Lexbase : A2315ACQ), Bull. civ. V, n° 310 : "mais attendu que la cour d'appel a énoncé, à bon droit, que si les conventions et accords collectifs de travail peuvent limiter les possibilités de licenciement de l'employeur à des causes qu'ils déterminent, le licenciement prononcé pour un motif autre que ceux conventionnellement prévus n'est pas nul, mais, seulement, dépourvu de cause réelle et sérieuse en l'absence de disposition conventionnelle prévoyant expressément la nullité du licenciement dans une telle hypothèse ; qu'ayant constaté qu'une telle disposition n'existait pas dans la convention collective du travail du personnel enseignant laïc, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que la réintégration ne pouvait être ordonnée par le juge, a pu décider qu'il n'existait pas de trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé".
(4) Cass. soc., 30 avril 2003, n° 00-44.811, Mme Gabrielle Velmon c/ Association Groupe Promotrans, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A7501BSM) et les obs. de S. Koleck-Desautel, La Cour de cassation consacre le droit à réintégration de la femme enceinte illégalement licenciée, Lexbase Hebdo n° 71 du 14 mai 2003 - édition sociale (N° Lexbase : N7288AA8) ; Dr. soc., 2003, p. 831, chron. B. Gauriau.
(5) C. trav., art. L. 2251-1 (N° Lexbase : L2406H9Y).
(6) C. trav., art. L. 1235-3 (N° Lexbase : L1342H9L).
(7) Cons. const., décision n° 2001-455 du 12 janvier 2002, Loi de modernisation sociale (N° Lexbase : A7588AXC), § 12.
(8) En matière de licenciement, la Haute juridiction admet, également, l'annulation du licenciement en cas de violation d'une liberté fondamentale, ainsi que lorsque la loi suggère par une formule autre que le licenciement serait nul (à propos de la nullité du licenciement du salarié qui exerce valablement son droit de retrait, Cass. soc., 28 janvier 2009, n° 07-44.556, FS-P+B (N° Lexbase : A7036ECL) et nos obs., Nullité du licenciement et exercice du droit de retrait : le revirement qu'on attendait, Lexbase Hebdo n° 337 du 12 février 2009 - édition sociale ([LXB=N4913B]).
(9) Cass. soc., 4 mai 1999, n° 98-40.959, M. Carmouse c/ M. Alguacil (N° Lexbase : A4808AG8), Dr. soc., 1999, p. 743, obs. Ch. Radé. Solution confirmée par Cass. soc., 28 janvier 2004, n° 01-46.913, M. Antonio De Sousa Pires c/ Société Signaux Girod, F-P (N° Lexbase : A0430DBK), Bull. civ. V, n° 3 ; Cass. soc., 16 novembre 2005, n° 03-47.395, Etablissements P. Claux et fils et compagnie c/ M. Daniel Soulet, FS-P+B (N° Lexbase : A5535DLL) ; Cass. soc., 22 mars 2006, n° 04-46.025, M. Jean-Michel Napierala c/ Société CIS Amrein, F-D (N° Lexbase : A8037DNY) ; Cass. soc., 9 avril 2008, n° 07-41.141, M. François Ranson, F-P+B (N° Lexbase : A9773D74) et les obs. de S. Martin-Cuenot, Recours contre l'avis d'aptitude : obligation de reprendre le versement de salaires, Lexbase Hebdo n° 303 du 8 mai 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N8862BEX).
(10) Cass. soc., 6 févr. 2008, n° 06-44.413, M. Alaoua Bounouar, FS-P+B+R (N° Lexbase : A7266D4U) et les obs. de S. Martin-Cuenot, Avis du médecin du travail et reclassement : question de compatibilité, Lexbase Hebdo n° 293 du 20 février 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N1937BEH).

Décision

Cass. soc., 25 mars 2009, n° 07-44.748, M. Daniel Nerzic, F-P+B second moyen du pourvoi incident (N° Lexbase : A2017EEG)

Cassation partielle, CA Grenoble, ch. soc., 10 septembre 2007

Texte visé : C. trav., art. L. 411-11 (N° Lexbase : L6313ACS, art. L. 2132-3, recod. N° Lexbase : L2122H9H)

Mots clef : inaptitude ; régime conventionnel ; avis d'inaptitude ; délai d'un mois pour reclasser ou licenciement ; caractère préfix

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Contrats et obligations

[Chronique] La Chronique de droit des contrats de David Bakouche, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université Paris-Sud (Paris XI) - Avril 2009

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Le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition privée générale vous propose, cette semaine, la Chronique de droit des contrats de David Bakouche, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université Paris-Sud (Paris XI). Seront abordés, dans cette nouvelle chronique, un arrêt du 19 février 2009, rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, qui revient sur l'anéantissement du contrat arrivé à son terme, ainsi qu'un arrêt du 19 mars 2009, aux termes duquel la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle l'appréciation in concreto de la "destination normale" de la chose dans la garantie légale des vices cachés.


  • L'anéantissement d'un contrat arrivé à son terme (Cass. civ. 2, 19 février 2009, n° 08-12.280, FS-P+B N° Lexbase : A4025EDG)

La question de savoir s'il est possible de demander l'anéantissement d'un contrat arrivé à son terme, qui ne paraît pas avoir beaucoup intéressé la doctrine, suscite, en revanche, un intérêt pratique indiscutable. Un arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 19 février dernier, à paraître au Bulletin, qui certes règle une question propre au droit des assurances, et dont on laissera aux spécialistes le soin de l'examiner, sous cet angle, mieux que nous, peut servir de point de départ à la réflexion (1). En l'espèce, les juges du fond, pour déclarer l'assuré fondé à exercer sa faculté de renonciation et condamner l'assureur à restituer les sommes versées, avaient retenu que le rachat du contrat d'assurance sur la vie, même total, n'entraîne pas l'inexistence de ce contrat, que son exécution ne peut purger le vice résultant du fait que le délai de réflexion n'a pas couru en l'absence de remise des documents prescrits, et que l'exercice de la faculté de renonciation, d'ordre public, est discrétionnaire pour l'assuré et indépendante de l'exécution du contrat. Cette décision est cassée, sous le visa des articles L. 132-5 (N° Lexbase : L6242DIZ), dans sa rédaction alors applicable, et L. 132-21 du Code des assurances (N° Lexbase : L6240DIX), au motif "qu'en statuant ainsi, tout en constatant que [l'assuré] avait exercé la faculté de renonciation au contrat postérieurement à son rachat total, la cour d'appel a violé les textes susvisés".

On signalera qu'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 23 septembre 2008 a décidé, dans le même sens, que "les rachats totaux opérés par [les assurés] ont mis fin aux contrats de sorte qu'ils ne peuvent plus maintenant exercer une faculté de renonciation pour des contrats qui n'ont plus d'existence, les réserves qu'ils ont émises sur leurs demandes de rachat étant inopérantes" (CA Paris, 7ème ch., sect. A, 23 septembre 2008, n° 05/12363, SA La Mondiale c/ M. Olivier C. N° Lexbase : A6666EA7).

Il faut rappeler ici, même brièvement, que la faculté de rachat permet au souscripteur d'interrompre son contrat avant le terme initialement prévu, l'assureur procédant alors au versement de la provision mathématique constituée au jour dudit rachat. L'exercice de cette faculté, qui a pour conséquence majeure de mettre fin à l'opération d'assurance, peut être intéressante pour le souscripteur dans le cas où le contrat a perdu de son intérêt en raison, par exemple, du prédécès du bénéficiaire, ou encore s'il a un besoin urgent de disposer de liquidités. Le rachat peut toutefois n'être que partiel, auquel cas le contrat se poursuit mais la provision mathématique se trouve amputée à due concurrence. On peut, sous cet aspect, comprendre que la Cour ait décidé que, le rachat du contrat ayant été effectué, il n'était plus possible, postérieurement, pour les parties d'exercer une faculté de renonciation, le droit de renoncer au contrat n'ayant, du fait même du rachat, plus d'objet.

L'hypothèse, particulière à l'assurance vie, ne saurait cependant être confondue avec la question de savoir s'il est possible de demander la nullité ou la résolution d'un contrat dont l'exécution est achevée, autrement dit d'un contrat qui a pris fin et dont les effets sont déjà réalisés. Sur le terrain de la résolution du contrat qui, comme la nullité, a un caractère rétroactif, un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 19 septembre 2006 a, en effet, admis qu'il était possible de demander judiciairement la résolution d'un contrat alors même que, au jour où le juge a à connaître de la demande, le contrat est arrivé à son terme. En l'espèce, la Cour de cassation casse, sous le visa de l'article 1184 du Code civil (N° Lexbase : L1286ABA), un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui avait considéré, pour rejeter la demande, que celle-ci "était devenue sans objet dès lors que le contrat est arrivé à son terme au jour où la cour d'appel statue". La Haute juridiction affirme, en effet, pour exercer sa censure en des termes ayant valeur de principe, "qu'en statuant ainsi, alors que la partie envers laquelle un engagement contractuel n'a pas été exécuté, ou ne l'a été que partiellement, peut demander la résolution judiciaire du contrat avec dommages-intérêts, sans qu'il importe que celui-ci soit arrivé à son terme au jour où il est statué sur la demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé" (2). La solution se justifie par le fait qu'une partie peut avoir intérêt à demander la résolution d'un contrat qui, certes, est éteint par l'arrivée de son terme, non pas tellement en raison des dommages et intérêts qui peuvent accompagner cette décision -qui pourraient être obtenus, indépendamment de la résolution, au moyen d'une action en responsabilité-, mais bien plutôt en raison des restitutions consécutives à la résolution dont les effets remontent à une date antérieure au prononcé de la décision (3). Or, la solution peut évidemment être transposée et étendue au cas de l'action en nullité qui, du fait de la rétroactivité de la nullité, peut permettre à une partie à un contrat, fût-il déjà éteint par l'arrivée de son terme, d'obtenir la restitution des prestations fournies. Les arrêts qui, en cas de ventes successives, admettent la nullité de la vente initiale, alors par hypothèse que le bien a été revendu et se trouve entre les mains d'un sous-acquéreur, sont eux aussi à cet égard révélateurs (4). Ainsi, dans une affaire dans laquelle, après la cession à une société civile immobilière de divers lots d'un immeuble et la revente de ces lots à un sous-acquéreur, l'acquéreur avait demandé la nullité de la vente initiale, il a été jugé que la nullité de la vente initiale emportait nullité des ventes subséquentes (5). Un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 3 février 1998 a même décidé que la bonne foi du sous-acquéreur n'était pas de nature à faire obstacle aux conséquences, à son égard, de la nullité (6).

Dans le cas d'une action en nullité, la question pourrait en réalité se poser de savoir, dans l'hypothèse dans laquelle celui qui a exécuté le contrat jusqu'à son terme connaissait la cause de nullité l'affectant, si l'exécution peut valoir confirmation au sens de l'article 1338 du Code civil (N° Lexbase : L1448ABA). On n'ignore pas, en effet, que la confirmation est l'acte par lequel une personne qui peut demander la nullité d'un acte renonce à se prévaloir des vices dont celui-ci est entaché (7). A cet égard, la confirmation doit être distinguée de la régularisation de l'acte, qui consiste à valider un acte initialement nul en lui apportant l'élément qui lui fait défaut (8). En somme, alors que la régularisation se limite au cas où l'acte est validé par l'apport de l'élément objectif qui lui manquait, la confirmation consiste dans un renoncement au droit de critique de l'acte et suppose un élément subjectif, en l'occurrence l'intention de l'auteur de la confirmation de renoncer à invoquer la nullité. Tel est ce qu'exprime, d'ailleurs imparfaitement, l'article 1338 du Code civil qui exige, pour qu'il y ait confirmation, "l'intention de réparer le vice sur lequel cette action [l'action en nullité] est fondée". Toujours est-il que, les liens entre la confirmation et la théorie des nullités ayant largement été démontrés (9), on admet que la confirmation ne se conçoit qu'en présence de cas de nullités relatives puisque, précisément, la nullité relative suppose que la règle transgressée ait eu pour finalité la protection d'un intérêt particulier. Au contraire, protectrice de l'intérêt général, la nullité absolue n'est pas édictée dans l'intérêt de telle ou telle personne, mais dans celui de la société. Il faut donc, en ce cas, renforcer les chances d'anéantissement effectif de l'acte et non les diminuer, ce à quoi conduirait précisément l'admission de la renonciation (10).

Sans doute faut-il ici redire que si la confirmation, du point de vue de la forme, peut bien entendu être expresse et résulter d'une volonté manifestée en termes exprimant formellement l'intention de confirmer, elle peut aussi bien n'être que tacite et résulter d'actes émanant du titulaire de l'action en nullité qui révèlent son intention non équivoque de renoncer à celle-ci. Elle est d'ailleurs expressément admise par l'article 1338, alinéa 2, du Code civil, qui donne pour exemple l'exécution volontaire de l'obligation après l'époque où celle-ci pouvait être valablement confirmée. Encore convient-il de signaler que, pour que l'acte litigieux puisse constituer une confirmation tacite, il faut toujours qu'il exprime sans équivoque la volonté de son auteur de renoncer à agir en nullité. La jurisprudence le répète fréquemment, énonçant ainsi que "pour valoir confirmation et emporter renonciation aux moyens et exceptions opposables contre l'acte litigieux, les actes d'exécution doivent être réalisés en pleine connaissance du vice affectant ledit acte et avec l'intention de le réparer" (11). Ainsi a-t-on pu considérer, précisément, que cette intention ne pouvait être induite du seul paiement (12), et décidé, à propos d'un contrat de crédit bail, que le paiement des loyers, antérieurement au jeu de la clause résolutoire, ne constitue pas l'exécution volontaire de la clause arguée de nullité (13).

  • L'appréciation in concreto de la "destination normale" de la chose dans la garantie légale des vices cachés (Cass. civ. 1, 19 mars 2009, n° 08-12.657, F-P+B N° Lexbase : A0892EER)

L'occasion a déjà largement été donnée, à plusieurs reprises, d'insister sur l'une des difficultés essentielles du droit de la vente tenant à la distinction de l'obligation de délivrance du vendeur, d'une part, définie par l'article 1604 du Code civil (N° Lexbase : L1704ABQ) comme "le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur", et qui suppose, précisément, que le vendeur lui délivre une chose conforme à ce à quoi il s'est engagé, et, d'autre part, de l'obligation de garantie des vices cachés de l'article 1641 du même code (N° Lexbase : L1743AB8), aux termes duquel "le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus". Et nul n'ignore que les enjeux pratiques attachés à la distinction sont considérables, ne serait-ce que parce que, s'agissant du délai de prescription de l'action, l'action en garantie des vices cachés, qui, autrefois, devait être engagée à "bref délai", doit, depuis une ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005, relative à la garantie de la conformité du bien au contrat due par le vendeur au consommateur (N° Lexbase : L9672G7D), être exercée dans les "deux ans à compter de la découverte du vice" (C. civ., art. 1648 N° Lexbase : L9212IDK), délai distinct du délai de droit commun applicable à l'action en défaut de conformité. Au reste, les différences ne s'arrêtent pas là : ainsi la première chambre civile de la Cour de cassation a-t-elle décidé que, "en matière de garantie des vices cachés, lorsque l'acquéreur exerce l'action rédhibitoire, le vendeur, tenu de restituer le prix qu'il a reçu, n'est pas fondé à obtenir une indemnité liée à l'utilisation de la chose vendue ou à l'usure résultant de cette utilisation" (14), alors qu'il a été jugé que "l'effet rétroactif de la résolution d'une vente pour défaut de conformité permet au vendeur de réclamer à l'acquéreur une indemnité correspondant à la dépréciation subie par la chose en raison de l'utilisation que ce dernier en a faite", étant entendu qu'"il incombe au vendeur de rapporter la preuve de l'existence et de l'étendue de cette dépréciation" (15), solution assez récemment confirmée par un arrêt de la Chambre commerciale en date du 30 octobre 2007 (16). Tout cela est suffisamment connu pour qu'il ne soit pas utile, ici, d'y revenir. Encore importe-t-il tout de même de bien distinguer, d'un point de vue conceptuel, le défaut de conformité du vice caché. Or, à examiner le droit positif, la distinction des deux notions, hors le cas de la vente de meubles aux consommateurs où elles ont été unifiées (C. consom., art. L. 211-1 N° Lexbase : L9679G8Y à L. 211-18), continue de susciter quelques difficultés (17). Pour preuve, une nouvelle fois, un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 19 mars 2009, à paraître au Bulletin.

En l'espèce, l'acquéreur de deux anciens véhicules militaires légers réformés de l'armée allemande datant de 1979, le premier hors d'usage, le second roulant, avait, peu de temps après la vente, constaté que ce dernier véhicule présentait des bruits suspects de transmission et avait, en conséquence, assigné le vendeur en résolution de la vente sur le fondement de la garantie légale des vices cachés. Les juges du fond, pour accueillir la demande, avait, après l'expert, constaté que la boîte de vitesse faisait l'objet d'un processus de destruction interne dû à l'usure de ses éléments, aggravée par un défaut d'entretien, et précisé que ce défaut n'était pas apparent lors de la vente. Surtout, ils avaient considéré qu'importaient peu dès lors les circonstances selon lesquelles l'acquéreur, qui a pu être qualifié "d'amateur éclairé de ce type de véhicule", ne pouvait ignorer l'âge du bien, son état d'usure et son défaut d'entretien sérieux et avaient ajouté que ses intentions à l'égard de l'autre véhicule non roulant étaient sans incidence. Cette décision est cassée, sous le visa de l'article 1641 du Code civil. La Haute juridiction décide, en effet, "qu'en se déterminant par de tels motifs, alors que les circonstances relevées ne pouvaient être écartées pour établir si au vu des spécificités de la vente et de la nature de la chose vendue, que l'expert judiciaire qualifiait 'sans potentiel réel d'utilisation sauf rénovation complète', le vice dont elle relevait l'existence suffisait à rendre celle-ci impropre à l'usage auquel l'acquéreur pouvait sérieusement s'attendre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé".

L'arrêt est intéressant à un double titre.

D'abord, il permet de rappeler, de façon générale, que la non-conformité de la chose vendue aux spécifications convenues par les parties est une inexécution de l'obligation de délivrance ; en revanche, la non-conformité de la chose à sa destination normale ressortit à la garantie des vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil (18). Si, donc, ce qui est discuté tient à la conformité de la chose aux spécifications convenues par les parties, c'est-à-dire au contrat, c'est bien l'obligation de délivrance qui est en cause, le vendeur devant délivrer la chose contractuellement convenue, avec ses caractéristiques, de telle sorte que la délivrance d'une chose différente constitue un manquement à cette obligation (19). Si, au contraire, ce qui est discuté tient à la conformité de la chose à sa destination normale, c'est alors la garantie des vices qui est en cause, les vices étant, précisément, des défauts de la chose qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine (20).

Ensuite, plus particulièrement, l'arrêt fait bien apparaître que l'appréciation du vice caché n'est pas purement abstraite mais suppose une prise en compte des circonstances concrètes de la cause : ce n'est donc pas l'usage normal de la chose apprécié purement in abstracto qui est pris en compte, mais l'usage auquel pouvait légitimement s'attendre le vendeur "au vu des spécificités de la vente et de la nature de la chose vendue". Dans ces conditions, on peut comprendre que la Cour de cassation ait pu reprocher aux juges du fond d'avoir considéré qu'il y avait en l'espèce vice caché sans s'être réellement expliqués sur l'existence dudit vice : en clair, la Cour leur reproche d'avoir déduit l'existence d'un vice caché de la seule constatation d'un désordre empêchant le fonctionnement normal de la chose, sans avoir tenu compte de l'état du véhicule et du fait qu'elle était "sans potentiel réel d'utilisation". Par où l'on voit bien que les éléments de fait qui impriment à la vente sa spécificité sont capitaux pour apprécier l'usage auquel est normalement destiné la chose et, corrélativement, la gravité du vice (21).

David Bakouche, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université Paris-Sud (Paris XI)


(1) Sur cet arrêt, lire Chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences - Avril 2009, Lexbase Hebdo n° 344 du 2 avril 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N9973BI9).
(2) Cass. com., 19 septembre 2006, n° 03-19.132, Société Route 66, F-D (N° Lexbase : A2936DR8), Contrats, conc., consom., 2007, n° 2, obs. L. Leveneur.
(3) J. Ghestin, L'effet rétroactif de la résolution des contrats à exécution successive, Mélanges Raynaud, p. 203.
(4) Voir not. Cass. civ. 3, 6 juin 2007, n° 06-12.795, M. Gervais Poulet, FS-P+B (N° Lexbase : A5562DWW).
(5) Cass. civ. 3, 11 mai 2006, n° 05-10.261, M. Thierry Assant-Lechevallier c/ Société civile immobilière (SCI) Montim'immo, FS-D (N° Lexbase : A3761DPY).
(6) Cass. com., 3 février 1998, n° 95-18.597, Mme Anna Poggi née Fadda c/ Mme Jeannine Guelfucci et autres, inédit (N° Lexbase : A5924CLY), D., 1999, p. 185, note A. Bénabent.
(7) G. Couturier, La confirmation des actes nuls, LGDJ, 1972, préf. J. Flour.
(8) C. Dupeyron, La régularisation des actes nuls, LGDJ, 1973, préf. P. Hébraud.
(9) G. Couturier, op. cit..
(10) Cass. civ. 1, 4 mai 1966, D., 1966, p. 553, note Ph. Malaurie ; Cass. civ. 2, 5 mai 1982, n° 81-10.544 (N° Lexbase : A0718A4D), Bull. civ. II, n° 69 ; Cass. com., 30 novembre 1983, n° 82-13322, Entreprise Jean Le Masne c/ Entreprise Guillore (N° Lexbase : A6042CKY), Bull. civ. IV, n° 332.
(11) CA Aix-en-Provence, 3 juin 1998 ; CA Paris, 18 décembre 2008, 2ème ch., sect. A, 17 décembre 2008, n° 08/01373, SCI RGMA et autres c/ M. André René louis L. (N° Lexbase : A9727EBU) ; Cass. civ. 3, 2 juillet 2008, n° 07-15.509, Société Bordeaux International School Scop, FS-P+B (N° Lexbase : A4899D9C).
(12) CA Aix-en-Provence, 3 juin 1998, préc..
(13) CA Aix-en-Provence, 5 avril 2005, n° 2005/233, jugeant ainsi que le crédit bailleur ne peut invoquer par application de l'article 1338 du Code civil une exécution volontaire par la débitrice (le crédit preneur) de la clause litigieuse rendant irrecevable la demande en nullité.
(14) Cass. civ. 1, 21 mars 2006, 2 arrêts, n° 03-16.075, Société Automobiles Citroën c/ M. Gauthier Carles (N° Lexbase : A6389DNX) et n° 03-16.307, M. Eric Gérard c/ Société Roxcime, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A6390DNY).
(15) Cass. civ. 1, 21 mars 2006, n° 02-19.236, Safirauto c/ Société Sonauto-Hyundaï, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A6388DNW).
(16) Cass. com., 30 octobre 2007, n° 05-17.882, Société Anciens Etablissements Branger (AEB), FS-P+B (N° Lexbase : A2281DZI).
(17) Voir not., récemment encore : Cass. civ. 1, 30 septembre 2008, n° 07-16.876, M. Antoine Van Loon, F-P+B (N° Lexbase : A5910EA7) et Cass. com., 14 octobre 2008, n° 07-17.977, Société Toujas et Coll, matériaux de construction, FS-P+B (N° Lexbase : A8093EAY) ; Cass. civ. 1, 7 mai 2008, n° 06-20.408, Société Sagem communication, F-P+B (N° Lexbase : A4373D8H) ; Cass. civ. 3, 25 avril 2007, n° 06-11.482, M. Nicolas Vella, FS-P+B (N° Lexbase : A0626DW4) ; Cass. civ. 3, 28 mars 2007, n° 06-12.461, M. Georges Porcher, FS-P+B (N° Lexbase : A8053DUS). Comp., sur l'appréciation du caractère apparent ou caché du vice : Cass. civ. 3, 17 décembre 2008, n° 07-20.450, M. Jean-Pierre Fouet, FS-P+B (N° Lexbase : A9081EBX).
(18) Cass. civ. 1, 27 octobre 1993, n° 91-21.416, Compagnie La Concorde c/ Société MTS et autre (N° Lexbase : A8458AXK), Bull. civ. I, n° 305 ; Cass. civ. 1, 8 décembre 1993, n° 91-19.627, M. Prario c/ M. Hennequin de Villermont (N° Lexbase : A5323ABR), Bull. civ. I, n° 362.
(19) Voir, not., Cass. civ. 1, 5 novembre 1996, n° 94-15.898, Mlle Badiou c/ M. Faure et autres (N° Lexbase : A8550ABB), JCP éd. G, 1997, II, 22872, note Ch. Radé ; Cass. civ. 1, 17 juin 1997, deux arrêts, n° 95-18.981, Société Plâtres Lambert production c/ M. Poux (N° Lexbase : A0677AC3) et n° 95-13.389, Société Garage Saurel c/ M. Hercher et autres (N° Lexbase : A0414ACC), Bull. civ. I, n° 205 et n° 206.
(20) Cass. civ. 3, 1er octobre 1997, n° 95-22.263, Société Empain Graham et Cie et autres c/ Epoux Journe (N° Lexbase : A0802ACP), Bull. civ. III, n° 181 ; Cass. civ. 3, 15 mars 2000, n° 97-19.959, Société Empain Graham et Cie et autres c/ Société Thoretim et autres (N° Lexbase : A3495AUY), Bull. civ. III, n° 61 ; Cass. com., 28 mai 2002, n° 00-16.749, Société Wartsila NSD corporation c/ Société Méca Stamp international, F-D (N° Lexbase : A7838AYX), Contrats, conc., consom., 2002, n° 139, obs. Leveneur.
(21) Voir déjà, dans le même sens, Cass. civ. 1, 24 novembre 1993, n° 92-11.085, M. Gaumont c/ Compagnie Assurances générales de France (AGF) et autre (N° Lexbase : A6073AHE), Bull. civ. I, n° 347 (à propos de l'achat d'un véhicule de collection, au seul usage de collection, décidant que l'acheteur doit démontrer que les défauts invoqués rendent le véhicule impropre à l'usage auquel il était spécialement destiné, et pas seulement que les défauts rendent le véhicule impropre à une circulation normale). Comp. Cass. civ. 1, 22 avril 1997, n° 95-12.152, M. Squeli c/ Société X et Y et autres (N° Lexbase : A0358ACA), Bull. civ. I, n° 129 (appréciation souveraine par les juges du fond de l'absence de vice d'un véhicule acheté comme véhicule de collection par un collectionneur averti).

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Responsabilité médicale

[Manifestations à venir] Actualité du droit de la responsabilité médicale

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Le 07 Octobre 2010

L'actualité du droit de la responsabilité médicale est, depuis sept ans, dominée par la mise en oeuvre progressive du dispositif d'indemnisation des accidents médicaux, instauré par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (N° Lexbase : L1457AXA), et la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, relative à la responsabilité civile médicale (N° Lexbase : L9375A8Q). Les difficultés posées par le fonctionnement du dispositif sont, aujourd'hui, clairement identifiées et commencent à être résolues, bien que beaucoup d'incertitudes demeurent encore. Ces lois ne doivent, toutefois, pas occulter le rôle déterminant joué par la jurisprudence dans l'évolution du droit de la responsabilité médicale, du fait de l'absence d'exclusivité de la procédure amiable d'indemnisation mise en place par la loi du 4 mars 2002, mais aussi, de l'imprécision des concepts qu'elle utilise. Pour effectuer un bilan sur la mise en place du système d'indemnisation des accidents médicaux issu de ces deux lois et étudier les récentes évolutions des jurisprudences judiciaire et administrative relatives à la responsabilité des professionnels de santé, Comundi, organisme de formation professionnelle, organise, le 28 mai 2009, sous la direction scientifique de Stéphanie Porchy-Simon, Professeur à l'Université Jean Moulin (Lyon III), une journée de formation dédiée à l'actualité de la responsabilité médicale.
  • Programme :

- 9h00 : accueil des participants

- 9h30 : début des travaux

1 - Bilan sommaire sur l'activité des Commissions régionales de conciliation et d'indemnisation (CRCI) et de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM)

2 - Etude du dispositif légal d'indemnisation des accidents médicaux
- application de la loi dans le temps ;
- notion d'accident médical ;
- difficultés de mise en oeuvre du dispositif : nature de l'avis des CRCI, recours contre les décisions des CRCI, sursis à statuer en cas de saisine des CRCI, lien entre l'expertise CRCI et l'expertise sollicitée devant le juge judiciaire ou administratif, refus d'offre de l'ONIAM, difficultés d'interprétation (chose jugée, parties à l'instance), difficultés posées par l'assistance des parties, etc..

- 12h45 - 14h00 : déjeuner d'échanges

3 - Etude de la jurisprudence récente dans le domaine de la responsabilité médicale
- information et consentement ;
- application de l'article 1er de la loi du 4 mars 2002 (dispositif "anti-Perruche") ;
- actualité de la responsabilité pour faute ;
- actualité de la responsabilité sans faute ;
- responsabilité du fait d'autrui ;
- responsabilité du fait des produits de santé : défaut du produit, lien de causalité, obligation de vigilance et recours.

- 18h00 : fin des travaux

  • Intervenants :

- Stéphanie Porchy-Simon, Professeur à l'Université Jean Moulin (Lyon III)
- Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu, Bordeaux IV, Directeur scientifique de l’Ouvrage Lexbase de Droit médical
- Benoît Apollis, Maître de conférences à l'Université Paris X - Nanterre
- Nathalie Albert, Professeur agrégé de Droit public à l'Université François Rabelais de Tours

  • Date :

Jeudi 28 mai 2009
9h00 - 18h00

  • Lieu :

Paris (à déterminer).

  • Tarifs :

870 euros H.T. - 1 040,52 euros T.T.C.
Les frais de participation comprennent la journée d'étude, le dossier scientifique, le petit déjeuner d'accueil, les pauses, le déjeuner.

  • Renseignements et inscriptions :

Inscription :
- par fax au 01.46.29.68.29, à l'attention du Service Clients ;
- ou par téléphone au 01.46.29.23.79 ;
- ou par courrier à Comundi - Service Clients - 2, rue Maurice Hartmann, BP 62 - 92133 Issy-les-Moulineaux cedex.

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