La lettre juridique n°423 du 13 janvier 2011 : Social général

[Textes] Santé, protection sociale, travail et emploi : les réformes issues de la loi de finances pour 2011 et de la loi de finances rectificative pour 2010 (première partie)

Réf. : Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 (N° Lexbase : L9901INZ) et loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 (N° Lexbase : L9902IN3)

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N1459BRH

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[Textes] Santé, protection sociale, travail et emploi : les réformes issues de la loi de finances pour 2011 et de la loi de finances rectificative pour 2010 (première partie). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3555097-textes-sante-protection-sociale-travail-et-emploi-les-reformes-issues-de-la-loi-de-finances-pour-201
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Protection sociale"

le 07 Février 2011

La loi de finances pour 2011, n° 2010-1657 du 29 décembre 2010, comprend des mesures fiscales et sociales inspirées par le souci des pouvoirs publics de supprimer certaines "niches fiscales ou sociales", c'est-à-dire, optimiser les recettes fiscales dues par les entreprises ou les particuliers. On en citera les principales : suppression de l'exonération de taxe sur les conventions d'assurance (TSCA) pour les contrats d'assurance maladie dits "solidaires et responsables" et application d'une taxe au taux réduit de 3,5 % (art. 7) ; imposition au taux de 12,1 %, dès leur inscription, du compartiment euro des contrats d'assurance vie multi-supports, au profit de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) (art. 8) ; suppression du taux réduit forfaitaire de TVA sur les offres composites de services de télévisions et électroniques (art. 11) ; instauration d'une taxe de risque systémique sur les banques, au taux de 0,25 % (art. 16)...
De nombreuses dispositions intéressent plus particulièrement le champ des rapports de travail et de la protection sociale : en droit de la Sécurité sociale, la contribution supplémentaire versée au titre du Fonds national d'aide au logement, la décristallisation des pensions civiles et militaires de retraite, la fiscalisation des prestations de retraite versées sous forme de capital ; en droit de la santé, l'aide médicale de l'Etat ; l'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures sanitaires graves ; en droit de l'aide sociale, le financement du RSA en faveur des jeunes actifs et du revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA) ; dans le champ des politiques de l'emploi, le régime fiscal des entreprises implantées en ZRR, la suppression de l'exonération applicable aux indemnités de rupture versées dans le cadre d'un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la suppression d'exonérations de cotisations sociales en matière de services à la personne, la suppression de l'exonération de cotisation sur l'avantage en nature dans les hôtels, cafés et restaurants...
Enfin, la loi de finances rectificative pour 2010, n° 2010-1658 du 29 décembre 2010, prévoit quelques mesures relatives au droit du travail : elle réorganise le zonage départemental des communes franciliennes en modifiant ainsi la fixation du taux de versement de transport. La loi met en place un prélèvement de l'impôt sur le revenu à la source des avantages ou gains résultant de la levée de stock-options pour les personnes non fiscalement domiciliées en France, sur la base et le taux d'imposition applicables en France. Enfin, quelques dispositions touchent le régime de l'auto-entrepreneur, notamment, la suppression de la règle de proratisation annuelle du chiffre d'affaires en fonction du temps d'activité pour les créations intervenues en 2009 et 2010. La loi de finances pour 2011 intervient dans un contexte économique particulier. Après la récession de 2009 (croissance de - 2,6 %), la plus marquée depuis la Seconde guerre mondiale, l'économie française a connu en 2010 une croissance de 1,5 %. Le déficit de 2010 est prévu à 7,7 points de PIB (1). Le taux de couverture des dépenses par les recettes s'établit à 70 % en 2011, après de faibles niveaux en 2009 (55,3 %) et 2010 (57,6 %) sous l'effet de la crise. Le solde budgétaire atteint 92 milliards d'euros, soit une amélioration par rapport à 2010 (152 milliards d'euros).

I - Santé et protection sociale

A - Droit de la Sécurité sociale, cotisations sociales

La loi de finances pour 2011 et la loi de finances rectificative pour 2010 réforment trois aspects importants du droit de la Sécurité sociale : la contribution supplémentaire versée au titre du Fonds national d'aide au logement ; la décristallisation des pensions civiles et militaires de retraite. Il faut, enfin, citer (même si l'on ne se trouve plus, à proprement parler, dans le champ du droit de la Sécurité sociale, mais celui du droit fiscal) la fiscalisation des prestations de retraite versées sous forme de capital.

1 - Contribution supplémentaire versée au titre du Fonds national d'aide au logement

Depuis le 1er janvier 2011, le taux de la contribution supplémentaire versée au titre du Fonds national d'aide au logement (FNAL) due par les employeurs d'au moins 20 salariés est modifié (article 209 de la loi de finances pour 2011). Le taux de 0,40 % s'applique désormais sur la part de rémunération limitée au plafond de la Sécurité sociale (auparavant il s'appliquait sur la totalité de la rémunération). Pour la part de rémunération excédant le plafond, la contribution FNAL supplémentaire est portée à 0,50 %.

2 - Décristallisation des pensions civiles et militaires de retraite

L'article 211 de la loi de finances 2011 aligne, à compter du 1er janvier 2011, les modalités de calcul des pensions civiles et militaires des retraites des anciens combattants ressortissants de pays ou territoires ayant été placés sous la souveraineté de la France sur les mêmes valeurs de points et d'indices que celles prises en compte pour les ressortissants français, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 (Cons. const., 28 mai 2010, n° 2010-1 QPC N° Lexbase : A6283EXY) (2).

L'article 211, I définit le champ d'application de la "décristallisation", les nouvelles modalités de calcul concernant les pensions militaires d'invalidité, les pensions civiles et militaires de retraite et les retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous les protectorat ou sous la tutelle de la France.

L'article 211, II et III aligne la valeur du point de pension et des indices servant au calcul des pensions sur les mêmes critères et valeurs que ceux applicables aux ressortissants français. L'article 211, IV étend le principe d'égalité de la valeur du point et des indices au calcul des pensions attribuées au conjoint survivant et aux orphelins.

L'article 211, V, VI, VII et VIII prévoit les modalités d'application de l'alignement des pensions des anciens combattants : les demandes sont instruites dans les conditions prévues par le Code des pensions d'invalidité et des victimes de la guerre et par le Code des pensions civiles et militaires de retraite ; la "décristallisation" est applicable aux instances en cours au 28 mai 2010, date du prononcé de la décision du Conseil constitutionnel. Avant la concession des nouvelles pensions résultant de la "décristallisation", les pensions existantes sont maintenues car l'administration doit, pour reconstituer les carrières et déterminer les nouveaux indices qui serviront au calcul et à la liquidation des pensions décristallisées, instruire les éléments nouveaux (enfants à charge, invalidité) qui seront communiqués par les bénéficiaires. Enfin, un décret fixera notamment les mesures d'information des bénéficiaires ainsi que les modalités de présentation et d'instruction des demandes.

3 - Fiscalisation des prestations de retraite versées sous forme de capital

Des travaux parlementaires ont montré que des résidents français peuvent percevoir des pensions versées sous forme de capital en provenance de pays étrangers. Il est ainsi apparu (3) que certaines pensions, correspondant aux prestations de retraite complémentaire, peuvent être versées en Suisse sous forme de capital, option qui n'existe pas en droit français pour ce type de pension. Lorsque des personnes résidant en France percevaient de telles pensions (par exemple, des anciens travailleurs frontaliers), elles n'étaient imposées, à ce titre, ni en France (le droit interne ne prévoyant pas de mécanisme d'imposition pour les pensions versées en capital), ni en Suisse.

La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010, portant réforme des retraites (N° Lexbase : L3048IN9), a tenté d'atténuer l'effet "tunnel" des contrats qui relèvent du régime de retraite complémentaire institué par la Caisse nationale de prévoyance de la fonction publique (Préfon) et du plan d'épargne retraite populaire (PERP). Elle prévoit, en effet, en lieu et place d'une sortie en rente viagère, une possibilité de rachat dans la limite de 20 % des droits individuels résultant de ces contrats ou de la valeur de rachat du contrat, selon le cas.

Aussi, la loi de finances rectificative pour 2010 pose le principe de l'imposition aux revenus des pensions versées en tout ou partie sous forme de capital. L'article 58-I 2° de la loi n° 2010-1658 vise à insérer un 6° bis au sein de l'article 120 du Code général des impôts (N° Lexbase : L2125HLB), aux termes duquel seraient considérés comme des revenus de capitaux mobiliers les produits attachés aux prestations de retraite versées sous forme de capital et perçues en exécution d'un contrat souscrit auprès d'une entreprise établie hors de France, lorsque le bénéficiaire justifie que les sommes versées durant la phase de constitution des droits, y compris par l'employeur, n'étaient pas déductibles du revenu imposable et n'étaient pas afférentes à un revenu exonéré dans l'Etat auquel était attribué le droit d'imposer celui-ci. Il s'agit de permettre la taxation en France des retraites complémentaires suisses susmentionnées, versées sous forme de capital.

4 - Aide médicale de l'Etat

a - Panier de soins des bénéficiaires de l'aide médicale de l'Etat

La loi de finances pour 2011 (art. 185) recentre le panier de soins des bénéficiaires de l'AME sur les actes, les produits et les prestations dont le service médical rendu a été qualifié de moyen ou d'important ou lorsqu'il n'est pas destiné directement au traitement ou à la prévention d'une maladie (4).

A côté de la couverture maladie universelle (CMU), a été mis en place par la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 (N° Lexbase : L1364AID), un dispositif particulier destiné à assurer la protection de la santé des personnes étrangères résidant en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois, mais ne remplissant pas la condition de régularité de séjour exigée pour l'admission à la CMU et dont les ressources sont inférieures au plafond de ressources de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c).

L'AME offre une couverture sociale avec dispense d'avance de frais à près de 215 000 personnes. Elle comprend trois dispositifs : le dispositif de droit commun, géré par la Caisse nationale d'assurance maladie pour le compte de l'Etat ; les soins urgents des personnes françaises ou étrangères qui ne résident pas en France (l'AME "humanitaire") ; les évacuations sanitaires d'étrangers résidant à Mayotte vers des hôpitaux de la Réunion et éventuellement vers la métropole, ainsi que les soins des personnes retenues dans les locaux de rétention administrative. Le nombre de bénéficiaires de l'AME a rapidement augmenté, le législateur ayant été conduit à engager un resserrement des conditions d'accès à ce dispositif.

Les bénéficiaires de l'AME bénéficient de la prise en charge à 100 %, dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale, des soins médicaux et hospitaliers en cas de maladie ou de maternité, soit :

- la couverture des frais de médecine générale et spéciale, des frais de soins et de prothèses dentaires, des frais pharmaceutiques et d'appareils, des frais d'examens de biologie médicale, des frais d'hospitalisation et de traitement dans des établissements de soins, de réadaptation fonctionnelle et de rééducation ou d'éducation professionnelle, ainsi que des frais d'interventions chirurgicales nécessaires pour l'assuré et la couverture des médicaments, produits et objets contraceptifs et des frais d'examens de biologie médicale ordonnés en vue de prescriptions contraceptives (CSS, art. L. 321-1, 1° N° Lexbase : L3953IGI) ;

- la couverture des frais de transport de l'assuré se trouvant dans l'obligation de se déplacer pour recevoir les soins ou subir les examens appropriés à leur état de santé (CSS, art. L. 321-1, 2°) ;

- la couverture des frais de soins et d'hospitalisation afférents à l'interruption volontaire de grossesse (CSS, art. L. 321-1-4°) ;

- la couverture des frais relatifs aux actes et traitements à visée préventive réalisés dans le cadre des programmes de santé destinés à éviter l'apparition, le développement ou l'aggravation de maladies ou incapacités (CSS, art. L. 321-1, 6°) ;

- les frais médicaux, pharmaceutiques, d'analyse et d'examens de laboratoires, d'appareils et d'hospitalisation relatifs ou non à la grossesse, à l'accouchement et à ses suites (CSS, art. L. 331-2 N° Lexbase : L5316DYK) ;

- enfin, le forfait journalier hospitalier pour les mineurs et, dans des conditions particulières, pour les autres bénéficiaires de l'AME (CSS, art. L. 174-4 N° Lexbase : L4566H9Y).

La loi de finances pour 2011 exclut ces soins médicaux et hospitaliers de la prise en charge par l'assurance maladie, lorsqu'ils résultent d'actes, de produits et de prestations dont le service médical rendu n'a pas été qualifié de moyen ou d'important ou lorsqu'ils ne sont pas destinés directement au traitement ou à la prévention d'une maladie.

b - Contrôle systématique de la condition de résidence

La loi de finances pour 2011 (art. 186) soumet à un agrément préalable la prise en charge de certains soins des bénéficiaires de l'AME (CASF, art. L. 251-2 N° Lexbase : L4982H9E) (5). Sauf pour les soins délivrés aux mineurs et pour les soins inopinés, la prise en charge des bénéficiaires de l'AME est subordonnée, pour les soins hospitaliers dont le coût dépasse un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat, à l'agrément préalable du représentant de l'Etat dans le département ou du directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des travailleurs salariés.

Cet agrément sera accordé dès lors que la condition de stabilité de la résidence (résidence ininterrompue depuis plus de trois mois) est respectée et que la condition de ressources (7 611,36 euros par an pour une personne seule) est remplie. La procédure de demande d'agrément est fixée par décret en Conseil d'Etat.

c - Récupération des sommes indûment versées aux bénéficiaires de l'AME

L'article 187 de la loi de finances pour 2011 donne aux caisses d'assurance maladie la possibilité de récupérer les sommes indûment versées aux bénéficiaires de l'AME (CASF, art. L. 251-3 N° Lexbase : L5175DKU) (6). Les caisses générales de Sécurité sociale et les caisses primaires d'assurance maladie pourront obtenir le remboursement des prestations qu'elles ont versées à tort dans le cadre de l'AME.

En cas de précarité de la situation du demandeur, la dette peut être remise ou réduite. Le public concerné par cette mesure est une population souvent très précaire ne disposant pas toujours d'une adresse fixe et dont la solvabilité est faible. Le risque que les sommes indues ne puissent être récupérées est donc important.

d - Droit de timbre annuel de 30 euros et limitation des ayants droit

L'article 188 de la loi de finances 2011 crée un droit de timbre annuel de 30 euros pour les bénéficiaires de l'AME (7). L'introduction d'un ticket modérateur a été prévue par la loi finances rectificative pour 2002 (loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 N° Lexbase : L9372A8M) afin de permettre de limiter la consommation de soins des bénéficiaires de l'AME. Mais le décret d'application de ce dispositif n'a cependant jamais vu le jour. L'instauration du ticket modérateur se heurte à des obstacles politiques, compte tenu de l'opposition des associations et de certains professionnels de santé, mais aussi techniques.

Le nouvel article 968 E du CGI (N° Lexbase : L0629IPY) prévoit le conditionnement de la prise en charge des soins des bénéficiaires de l'AME à l'acquittement d'un droit de timbre annuel de 30 euros par bénéficiaire majeur. Ce versement prendrait la forme d'un timbre fiscal acquitté lors de la remise de l'attestation d'admission au dispositif.

B - Droit de la santé

1 - Indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures sanitaires graves

L'article 189 de la loi de finances pour 2011 aligne le financement de l'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures sanitaires graves sur le régime de l'indemnisation des vaccinations obligatoires (C.santé publ., art. L. 1142-23 N° Lexbase : L9739INZ).

La réparation des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales est confiée à l'ONIAM (Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales). Celui-ci est financé, pour ce volet de son activité, par le biais du fonds prévu par l'article L. 3131-5 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L9617HZ9), qui finance l'ensemble des actions nécessaires à la préservation de la santé de la population en cas de menace sanitaire grave ou d'alerte épidémique. La loi de finances pour 2011 substitue, à la dotation versée par le fonds, un financement direct de l'Etat.

Cette mesure a été justifiée par plusieurs motifs : préciser le rôle de l'Etat pour l'indemnisation des préjudices résultant des mesures de santé publique qu'il met en place en cas de menace sanitaire grave ; homogénéiser les modes de financement de l'ONIAM (par ailleurs financé directement par l'Etat pour l'indemnisation des préjudices résultant de vaccinations obligatoires) ; enfin, raccourcir les circuits de financement et permettre de limiter le nombre d'acteurs sollicités (8).

2 - Transformation de la contribution CMU en taxe

L'article 190 de la loi de finances pour 2011 transforme la contribution CMU acquittée par les organismes complémentaires d'assurance santé en une taxe assise sur les cotisations payées par les assurés ayant souscrit un contrat d'assurance santé complémentaire.

Le Fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie ("Fonds CMU") finance le volet complémentaire de la couverture maladie universelle (CMU-c) et assure la gestion de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS). Les recettes du Fonds sont constituées par le produit d'une contribution, dite "contribution CMU", et d'une dotation budgétaire de l'Etat destinée à assurer son équilibre. Les mutuelles, les institutions de prévoyance et les entreprises d'assurance y sont assujetties au titre de leur activité réalisée en France. La contribution est assise sur le montant hors taxes des primes ou cotisations émises au cours d'un trimestre civil, déduction faite des annulations ou remboursements, ou, à défaut d'émission, recouvrées, afférentes à la protection complémentaire en matière de frais de soins de santé, à l'exclusion des réassurances.

La contribution frappe donc les organismes d'assurance complémentaire intervenant dans le domaine des soins de santé (en 2009, 781 organismes) sur leur chiffre d'affaires santé. L'article 12 de la loi n° 2008-1330 du 18 décembre 2008 de financement de la Sécurité sociale pour 2009 (N° Lexbase : L2678IC8) a fixé le taux de la contribution à 5,9 % (contre 2,5 % auparavant). En 2009, d'après les données du rapport d'activité du Fonds CMU, l'assiette de la contribution représentait environ 30,5 milliards d'euros. Son produit s'est élevé à près de 1,8 milliards d'euros, soit l'intégralité des ressources du Fonds.

La loi de finances pour 2011 transforme la contribution CMU en une taxe assise sur les cotisations payées par les assurés ayant souscrit un contrat d'assurance santé complémentaire. Cette transformation est, selon les travaux parlementaires (9), indolore tant pour le Fonds CMU, qui percevra un niveau de recettes identique, que pour les assurés qui acquitteront un montant global au titre de leur complémentaire santé analogue. L'objectif est de neutraliser les effets des augmentations ou diminutions de la contribution sur le chiffre d'affaires des organismes complémentaires et, corrélativement, sur le niveau de fonds propres qu'ils doivent posséder.

3 - Prorogation de quatre ans de la taxe assurant le financement du centre national de gestion des essais de produits de santé (CeNGEPS)

L'article 192 de la loi de finances pour 2011 du 29 décembre 2010 proroge de quatre ans la taxe additionnelle à la taxe sur les médicaments et les produits bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché, destinée à financer le centre national de gestion des essais de produits de santé (CeNGEPS).

L'article 23 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 (N° Lexbase : L6430HEU) a créé une taxe additionnelle à la taxe sur les médicaments et les produits bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché. Les médicaments et les produits bénéficiaires d'une autorisation de mise sur le marché ou d'une autorisation d'importation parallèle délivrée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) ou par la Communauté européenne sont frappés d'une taxe annuelle perçue au profit de l'AFSSAPS et des comités de protection des personnes.

La taxe additionnelle créée par la loi de finances rectificative pour 2005 correspond à une majoration de 50 % de la taxe annuelle. Le produit de cette taxe est réparti entre les centres de gestion des essais de produits de santé. Cette taxe est provisoire : elle doit être perçue au titre des ventes réalisées au cours des années 2005 à 2008. Cette nouvelle taxe servira à financer des centres de gestion des essais de produits de santé (CEGEPS). Un centre national de gestion des essais de produits de santé (CeNGEPS) a ainsi été mis en place en mars 2007. Le CeNGEPS est essentiellement financé par le produit de la taxe additionnelle à la taxe sur les médicaments et les produits bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché. Pour 2009, le CeNGEPS a ainsi reçu, à ce titre, près de 10 millions d'euros. La loi de finances 2011 propose de proroger de quatre ans la perception de la taxe additionnelle mise en place par la loi de finances rectificative pour 2005 (10).

4 - Indemnisation des personnes vaccinées contre l'hépatite B exerçant ou ayant exercé une activité professionnelle ou volontaire au sein de services d'incendie et de secours

L'article 193 de la loi n° 2010-1657 permet l'indemnisation des personnes, exerçant ou ayant exercé une activité professionnelle ou volontaire au sein de services d'incendie et de secours, vaccinées contre l'hépatite B (C. santé publ., art. L. 3111-9 N° Lexbase : L2910ICR) (11). L'article L. 3111-9 du Code de la santé publique prévoit que, sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), au titre de la solidarité nationale.

La loi de finances pour 2011 vise à étendre ce dispositif d'indemnisation aux personnes exerçant ou ayant exercé une activité professionnelle ou volontaire au sein de services d'incendie et de secours et qui ont été vaccinées contre l'hépatite B depuis la date d'entrée en vigueur de l'arrêté du 6 mai 2000 fixant les conditions d'aptitude médicale des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires et les conditions d'exercice de la médecine professionnelle et préventive au sein des services d'incendie et de secours.

5 - Adaptation au droit communautaire et simplification du système de taxes affectées à l'Afssaps

L'article 191 de la loi de finances pour 2011 a pour objet de renforcer la conformité du système de taxes affectées à l'Afssaps au droit communautaire et de simplifier leur recouvrement. La loi de finances pour 2011 modifie la rédaction du premier alinéa de l'article L. 5121-16 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L4143ICG) pour :

- insérer les demandes de reconnaissance, par au moins un autre Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par le directeur général de l'Afssaps (CSP, art. L. 5121-8 N° Lexbase : L6409IGH). Cette insertion permettra de soumettre au droit progressif ces demandes qui ne font pas actuellement l'objet d'une taxation, alors qu'elles exigent un travail d'évaluation et de coordination important qui justifie l'application de taux spécifiques ;

- porter le plafond des droits progressifs de 25 400 euros à 45 000 euros, sachant que, selon l'Afssaps, le montant applicable pour l'autorisation de mise sur le marché décentralisée (lorsque la France est désignée par le demandeur comme Etat membre de référence) sera d'environ 40 000 euros ;

- supprimer le mot "demande", en ce qui concerne les modifications d'autorisation de mise sur le marché, afin de permettre la perception du droit progressif, que la modification soit déclarée ou demandée. Le Règlement n° 1234/2008/CE du 24 novembre 2008 (N° Lexbase : L1380IPS) concernant l'examen des modifications des termes d'une autorisation de mise sur le marché de médicaments à usage humain et de médicaments vétérinaires, applicable au 1er janvier 2010, prévoit que certaines modifications, principalement des modifications administratives, auront un caractère déclaratoire (12).

C - Solidarité

1 - Financement du revenu de solidarité active (RSA) en faveur des jeunes actifs et du revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA)

La loi de finances pour 2011 (art. 195) tend à faire financer le "RSA jeunes" pour l'année 2011 et le revenu supplémentaire temporaire d'activité, pour les années 2011 et 2012, par le Fonds national des solidarités actives (FNSA). L'article 135 de la loi de finances pour 2010 n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 (N° Lexbase : L1816IGD) a instauré le "RSA jeunes" qui permet à des jeunes de moins de 25 ans d'être éligibles au RSA. Pour l'année 2010, par dérogation à l'article L. 262-24 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L0992ICQ), le "RSA jeunes" est entièrement pris en charge par le Fonds national des solidarités actives (FNSA) alors même qu'une partie de son coût aurait dû revenir aux conseils généraux.

Le revenu supplémentaire temporaire d'activité (RSTA) a été créé par le décret n° 2009-602 en date du 27 mai 2009 (N° Lexbase : L2932IEC) à la suite des troubles sociaux survenus dans certains départements d'outre-mer. En Guadeloupe, Guyane, Martinique et à la Réunion, ainsi que dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, le RSTA apporte un complément de rémunération de 100 euros au maximum pour tous les salariés de droit privé et les agents non titulaires de droit public percevant un salaire inférieur ou égal à 1,4 SMIC brut. Il est financé par l'Etat (pour un coût de 204 milliards d'euros en 2009 et 160 milliards d'euros en 2010). Ce dispositif a pris fin au 31 décembre 2010 mais les bénéficiaires actuels pourront continuer de percevoir le RSTA jusqu'au 31 décembre 2012.

La loi de finances pour 2011 prolonge, pour l'année 2011, le financement du "RSA jeunes" par le FNSA et prévoit que le FNSA finance les sommes versées et les frais de gestion dus au titre du RSTA servi en 2011 et 2012 (13).

2 - Dispositions censurées

L'article 196 de la loi n° 2010-1657 entendait modifier la loi du 5 mars 2007 pour proroger le délai dans lequel les mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent se conformer aux nouvelles dispositions relatives à leur habilitation. De même, l'article 197 de la loi de finances pour 2010 prévoyait un rapport au Parlement sur l'état des lieux de l'offre et des besoins d'accompagnement et d'hébergement assurés dans les établissements et services médico-sociaux accueillant les personnes handicapées de plus de quarante ans.

Mais ces articles 196 et 197 ont été déclarés non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-622 DC du 28 décembre 2010 (N° Lexbase : A6964GNA). En effet, ces dispositions ne concernent ni les ressources, ni les charges, ni la trésorerie, ni les emprunts, ni la dette, ni les garanties ou la comptabilité de l'Etat ; elles n'ont pas trait à des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l'Etat ; elles n'ont pas pour objet de répartir des dotations aux collectivités territoriales ou d'approuver des conventions financières ; elles ne sont pas relatives au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics ou à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques. Ainsi, elles sont étrangères au domaine des lois de finances tel qu'il résulte de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 (N° Lexbase : L1295AXA).

La seconde partie de ce commentaire sera diffusée dans Lexbase Hebdo n° 424 - édition sociale du 20 janvier 2011.


(1) P. Marini, Rapport général n° 111, Sénat (2010-2011), fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2010.
(2) Voir nos obs., Le Conseil constitutionnel met fin à la 'cristallisation' des pensions de retraite des ressortissants des anciennes colonies françaises, Lexbase Hebdo n° 397 du 3 juin 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N2970BPP) ; P. Marini, Rapport général n° 111, Sénat (2010-2011), 18 novembre 2010, préc., B. Auban, Rapporteur spécial, Tome III, seconde partie de la loi de finances, Annexe n° 23, Régimes sociaux et de retraite Compte d'affectation spéciale : pensions, p. 31. Selon le parlementaire, l'impact financier de la revalorisation des quelque 32 000 bénéficiaires de la mesure est estimé à 150 millions d'euros par an sur la base d'un montant moyen de pension de 4 687,5 d'euros par an.
(3) P. Marini, Rapport n° 166, Sénat (2010-2011), au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances rectificative pour 2010, 13 décembre 2010, Tome I, Rapport, p. 337.
(4) J.-J. Jégou, Rapport général n° 111, Sénat (2010-2011), fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2010, p. 53.
(5) Ibid.,p. 59.
(6) Ibid., p. 61.
(7) Ibid., p. 62.
(8) Ibid., p. 65.
(9) Ibid., p. 67.
(10) Ibid., p. 72.
(11) Ibid., p. 77.
(12) A. Milon, Avis n° 113, Sénat (2010-2011), 18 novembre 2010, au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de finances pour 2011, Tome V - Santé, p. 43.
(13) A. Cazalet et A. de Montgolfier, Rapport général n° 111, Sénat (2010-2011), fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2010 ; P. Blanc, Avis n° 113, Sénat (2010-2011), fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 18 novembre 2010 ; C. Sirugue, Avis Assemblée nationale n° 2864, tome 3, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2010.

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