Le Quotidien du 14 novembre 2022

Le Quotidien

Contrat de travail

[Brèves] Un salarié, désigné expert judiciaire, doit-il reverser à son employeur la rémunération perçue grâce à ses missions d’expertise ?

Réf. : Cass. soc., 26 octobre 2022, n° 20-17.105, FS-B N° Lexbase : A01008R7

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N3212BZY

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par Lisa Poinsot

Le 10 Novembre 2022

Est nulle, la clause d'un contrat de travail par laquelle un salarié s'engage à reverser à son employeur les rémunérations qui lui ont été versées pour des missions pour lesquelles il a été désigné expert personnellement.

Telle est la solution énoncée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 26 octobre 2022.

Faits et procédure. Un expert judiciaire est engagé en qualité de chargé de mission par une entreprise. Selon les termes de l’article 4 bis de son contrat de travail, il est prévu que la rémunération directe ou indirecte des expertises judiciaires qui lui serait versée doit être intégralement reversée à l’employeur.

Les parties signent, par la suite, une convention de rupture conventionnelle. Toutefois, l’employeur saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir le paiement des sommes correspondant aux expertises en cours au moment de la rupture du contrat de travail en vertu de l’article 4 bis du contrat.

La cour d’appel (CA Lyon, 12 mars 2020, n° 18/04405 N° Lexbase : A49743I3) retient, tout d’abord, que le salarié est inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel dans la rubrique incendies.

Ensuite, elle constate que la clause contractuelle litigieuse n'apparaît pas contraire aux dispositions de l'article 233 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1722H4K qui dispose que l'expert doit réaliser sa mission personnellement, dès lors qu'il résulte en effet du contrat de travail que le salarié accomplissant ses missions d'expertises judiciaires pendant le temps de son travail et avec les outils mis à disposition par l'employeur, il devait en reverser la rémunération correspondante au dit employeur.

Enfin, elle affirme que la clause du contrat de travail dont le salarié demande la nullité a été librement consentie entre lui et son employeur en contrepartie de l'exécution pendant le temps de travail et avec le matériel de l'entreprise par le salarié des missions d'expertise judiciaire qui lui ont été confiées par les juges, missions qu'il a exercées personnellement.

Par conséquent, la clause contractuelle litigieuse n’est entachée d’aucune illégalité. Le salarié est ainsi débouté de sa demande de nullité de cette clause. La cour d’appel fait droit à la demande de l’employeur quant au versement d’une somme au titre du remboursement des frais et honoraires que le salarié a perçus pour ses missions d’expertise judiciaires au moment de la rupture du contrat de travail.

Le salarié forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel en application des articles 232 N° Lexbase : L1719H4G et 233 du Code de procédure civile. Pour justifier sa décision, la Haute juridiction affirme que pour qu’une personne morale puisse percevoir la rémunération afférente à l’expertise, il faut qu’elle ait été elle-même désignée. Or, en l’espèce, l’employeur, en qualité de personne morale, n’était pas l’expert inscrit sur la liste de la cour d’appel et habilité à être désigné en qualité d’expert judiciaire et à facturer ses prestations.  

Autrement dit, si l’employeur a été lui-même inscrit sur la liste de la cour d’appel en qualité d’expert judiciaire, son salarié peut être tenu, par son contrat de travail, de lui reverser les sommes perçues lors de ces missions d’expertises judiciaires.

Pour aller plus loin : v. É. Vergès, ÉTUDE : La preuve civile, Les mesures d'instructions ordonnées par le juge durant le procès, in Procédure civile, (dir. É. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E9366B4N.

newsid:483212

Droit des étrangers

[Brèves] Étranger « en fuite » : portée de la demande postérieure à un transfert « Dublin III » tendant à ce que la demande d'asile soit instruite « en procédure normale »

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 27 octobre 2022, n° 465885, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A22508RR

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N3218BZ9

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par Yann Le Foll

Le 10 Novembre 2022

► Lorsque, postérieurement à la décision ordonnant son transfert dans l'État responsable de sa demande sur la base du Règlement « Dublin III », l'intéressé demande à l'autorité compétente que sa demande d'asile soit instruite « en procédure normale », il doit être regardé comme demandant à cette autorité de reconnaître la compétence de la France pour examiner sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de dépôt de cette demande lui permettant de suivre la procédure devant l'OFPRA.

Principe (suite). Le refus opposé à une telle demande constitue une décision susceptible de recours.

Principe (toujours). Les conclusions d'annulation dirigées contre cette décision sont toutefois irrecevables s'il apparaît, en l'absence de circonstances de fait ou de considérations de droit nouvelles, pertinentes et postérieures à la décision de transfert, que ce refus se borne à confirmer purement et simplement celui de faire application du paragraphe 2 de l'article 3 et du paragraphe 1 de l'article 17 du Règlement (UE) n° 604/2013, du 26 juin 2013 N° Lexbase : L3872IZG (Règlement « Dublin III »), en particulier de la clause dite « discrétionnaire » de l'article 17 de ce Règlement, implicitement mais nécessairement inclus dans la décision de transfert.

Pour rappel, ces dispositions prévoient respectivement qu'il est « impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeur » et permettent à chaque État de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le Règlement. 

Principe (fin). Une telle irrecevabilité doit, en particulier, être opposée à ces conclusions lorsque le demandeur soutient, sans l'établir, qu'ayant été considéré à tort comme étant en fuite pour l'application du paragraphe 2 de l'article 29 du Règlement « Dublin III », le délai de transfert de six mois prévu au paragraphe 1 de cet article n'a pas été prolongé et que la décision de transfert ne peut plus, dès lors, être exécutée.

Rapporteur Public – Quelles circonstances nouvelles invocables ? Pour Philippe Ranquet, « Une telle circonstance nouvelle peut être l’expiration du délai de transfert, survenue dès le terme de 6 mois dès lors que l’intéressé n’avait en réalité pas "pris la fuite", qui a pour effet que la décision de transfert ne peut plus être légalement exécutée et qu’un litige dirigé contre elle devient sans objet (CE, 27 mai 2019, n° 421276 N° Lexbase : A1442ZDR). Il nous semble aussi qu’elle ne peut plus alors être confirmée par une décision dans le même sens. Constituerait également une circonstance nouvelle un changement dans la situation de l’intéressé, ou du pays de transfert, tel que l’appréciation portée initialement sur l’application des dispositions précitées du Règlement, en particulier la clause "discrétionnaire", devrait être revue ».

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Droit médical

[Brèves] Conformité des dispositions permettant au médecin d’aller à l’encontre de directives anticipées inappropriées à la situation du patient

Réf. : Cons. const., décision n° 2022-1022 QPC du 10 novembre 2022 N° Lexbase : Z489892L

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N3250BZE

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par Laïla Bedja

Le 16 Novembre 2022

► Les mots « lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale » figurant au troisième alinéa de l'article L. 1111-11 du Code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2020-232, du 11 mars 2020, relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d'accompagnement social ou médico-social à l'égard des personnes majeures faisant l'objet d'une mesure de protection juridique, sont conformes à la Constitution.

La saisine. Le Conseil constitutionnel a été saisi de la question de la conformité des dispositions du troisième alinéa de l’article L. 1111-11 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4870LWB (CE référé, 19 août 2022, n° 466082, inédit N° Lexbase : A68868ER, voir notre brève N° Lexbase : N2498BZK) :

« Les directives anticipées s'imposent au médecin pour toute décision d' investigation, d'intervention ou de traitement, sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale ».

Les requérants reprochent à ces dispositions de permettre à un médecin d’écarter les directives anticipées par lesquelles un patient a exprimé sa volonté que soient poursuivis des traitements le maintenant en vie. Selon ces derniers, ces dispositions ne seraient pas entourées de garanties suffisantes dès lors que ces termes seraient imprécis et conféreraient au médecin une marge d’appréciation trop importante, alors qu’il prend sa décision seul et sans être soumis à un délai de réflexion préalable.         

Il en résulterait une méconnaissance du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, dont découlerait le droit au respect de la vie humaine, ainsi que de la liberté personnelle et de la liberté de conscience.

Pour l’Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés, association intervenante, ces dispositions instaureraient en outre une différence de traitement injustifiée entre les personnes en été d’exprimer leur volonté sur l’arrêt d’un traitement et celles qui n’ont pu l’exprimer que dans des directives anticipées.

La décision. Pour prononcer la conformité des dispositions en cause, le Conseil constitutionnel énonce que :

  • en permettant au médecin d’écarter des directives anticipées qui ont pu être rédigées à un moment où la personne ne se trouvait pas encore confrontée à la situation particulière de la fin de vie, le législateur a entendu garantir le droit de toute personne à recevoir les soins les plus appropriés à son état et assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie ; ces dispositions ne sont pas manifestement inappropriées à l’objectif poursuivi ;
  • les dispositions ne sont ni imprécises ni ambiguës ;
  • la décision du médecin est prise à l’issue d’une procédure collégiale, inscrite au dossier médical et portée à la connaissance de la personne de confiance désignée par le patient ou à défaut, de sa famille ou de ses proches ;
  • la décision du médecin est soumise, le cas échéant, au contrôle du juge.

Au regard de ces énonciations, le législateur n’a méconnu ni le principe de sauvegarde de la dignité humaine ni la liberté personnelle, et, par conséquent, la liberté de conscience ni le principe d’égalité devant la loi.

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Droit rural

[Brèves] Cession intrafamiliale du droit au bail portant sur des terres mises à disposition d’une société : rappel des principes

Réf. : Cass. civ. 3, 26 octobre 2022, n° 21-17.886, F-D N° Lexbase : A56148RD

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N3225BZH

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 10 Novembre 2022

► Le défaut d'information du bailleur quant à la mise des biens loués à la disposition d'une société d'exploitation constitue un manquement du preneur à ses obligations le privant du droit de céder le bail ; le juge ne saurait donc déclarer le preneur de bonne foi et autoriser la cession, tout en constatant un manquement du preneur à son obligation d'informer le bailleur de la mise à disposition des terres louées au profit d’une EARL, lequel fait à lui seul obstacle à la faculté de le céder ;

► l'autorisation administrative d'exploiter doit être justifiée par la société bénéficiaire de la mise à disposition des terres louées, peu important que le candidat à la cession de bail en ait obtenu une à titre personnel.

Le cadre légal et jurisprudentiel. Pour rappel, l’article L. 411-35 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L4458I4U prévoit que « Sous réserve des dispositions particulières aux baux cessibles hors du cadre familial prévues au chapitre VIII du présent titre et nonobstant les dispositions de l'article 1717 du Code civil N° Lexbase : L1839ABQ, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie, avec l'agrément du bailleur, au profit du conjoint ou du partenaire d'un pacte civil de solidarité du preneur participant à l'exploitation ou aux descendants du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipés. À défaut d'agrément du bailleur, la cession peut être autorisée par le tribunal paritaire. »

Pour résumer, le principe est donc celui de l’interdiction de cession du droit au bail, sauf dans un cadre intrafamilial, et sur autorisation du bailleur, ou du tribunal paritaire (à défaut seulement d’agrément du bailleur).

De longue date, la jurisprudence a posé qu’il résulte de ces dispositions que la faculté de céder le bail dans le cercle familial est réservée au preneur de bonne foi, c'est-à-dire à celui qui s'est acquitté de toutes les obligations légales ou conventionnelles résultant de son bail (Cass. civ. 3, 6 novembre 1973, n° 72-14.717, publié au bulletin N° Lexbase : A3739CGL).

Il faut comprendre qu’il s’agit d’une faveur accordée par le législateur au preneur diligent, qui doit donc s’être scrupuleusement et constamment acquitté de ses obligations, et que l’autorisation du tribunal ne peut permettre que d’outrepasser un refus du bailleur qui serait abusif, car opposé à un preneur de bonne foi. En revanche, dès lors que le preneur a manqué à l’une de ses obligations, le tribunal ne saurait accorder l’autorisation que le bailleur était légitimement en droit de refuser.

C’est bien ce que rappelle le présent arrêt rendu le 26 octobre 2022, qui concernait, en l’espèce, un manquement du preneur à son obligation d’information du bailleur relative à la mise à disposition des biens loués à une EARL. La solution n’est pas nouvelle (déjà en ce sens : Cass. civ. 3, 10 septembre 2020, n° 19-14.158, F-D N° Lexbase : A53143TY), mais mérite d’être rappelée en ce qu’elle permet de mettre en relief la marge particulièrement limitée d’appréciation dont disposent les juges du fond quant à la bonne foi du preneur cédant : la constatation d’un manquement doit conduire les juges, sans aucune marge d’appréciation, à établir la mauvaise foi et à refuser la cession.

Il faut encore savoir que si le preneur est tenu d'obtenir une autorisation d'exploiter en application de l'article L. 331-2, la validité de la cession est subordonnée à l'octroi de cette autorisation (C. rur., art. L. 331-6 N° Lexbase : L6546HHW). L’arrêt rappelle également les principes sur la question de l’autorisation d’exploiter dans le cas de la mise à disposition des terres louées à une société.

  • Manquement résultant du défaut d’information relative à la mise à disposition des biens loués à une EARL : privation, de plein droit, du droit de céder le bail

En l’espèce, le bailleur fait grief à l'arrêt rendu par la cour d’appel de Caen d'autoriser la cession des baux consentis aux preneurs, au profit de leur fils.

Pour déclarer les preneurs de bonne foi et autoriser la cession, la cour d’appel de Caen avait retenu que l'information relative à la mise à disposition des biens loués aux deux EARL devait être délivrée aux précédents bailleurs, que, si les intimés ne justifiaient pas de la réalité de cette information, la sanction d'un manquement supposait que celui-ci soit de nature à porter préjudice au bailleur, ce qui n'était pas établi, et qu'un tel manquement ne pouvait caractériser la mauvaise foi des preneurs et faire obstacle à la cession du bail.

À tort, selon la Cour régulatrice qui rappelle, comme indiqué supra, qu’il résulte de l’article L. 411-35 du code précité N° Lexbase : L4458I4U que la faculté de céder le bail dans le cercle familial est réservée au preneur de bonne foi, c'est-à-dire à celui qui s'est acquitté de toutes les obligations légales ou conventionnelles résultant de son bail, et que, selon l’article L. 411-37 du même code N° Lexbase : L4462I4Z, le preneur associé d'une société à objet principalement agricole peut mettre à la disposition de celle-ci, tout ou partie des biens dont il est locataire, à la condition d'en aviser au préalable le bailleur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Elle en déduit qu’il résulte de ces textes que le défaut d'information du bailleur quant à la mise des biens loués à la disposition d'une société d'exploitation constitue un manquement du preneur à ses obligations le privant du droit de céder le bail (déjà en ce sens : Cass. civ. 3, 10 septembre 2020, n° 19-14.158, F-D N° Lexbase : A53143TY).

Dès lors, selon la Cour suprême, en autorisant la cession, tout en constatant un manquement des preneurs à leur obligation d'informer les bailleurs de la mise à disposition des terres louées au profit de leurs EARL, lequel faisait à lui seul obstacle à la faculté de le céder, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

  • Autorisation d’exploiter de la société bénéficiaire de la mise à disposition des terres louées  

En l’espèce, pour autoriser la cession, la cour d’appel avait également retenu que le candidat à la cession était titulaire d'une autorisation tacite d'exploiter au jour de la cession projetée, et qu'en outre, il avait obtenu une nouvelle autorisation d'exploiter le 21 décembre 2020.

Sur ce point encore, la décision est censurée par la Cour suprême qui rappelle qu’il résulte des articles L. 411-58 N° Lexbase : L4470I4C, L. 331-2 N° Lexbase : L4559I4M et L. 411-35 N° Lexbase : L4458I4U du Code rural et de la pêche maritime que l'autorisation administrative d'exploiter doit être justifiée par la société bénéficiaire de la mise à disposition des terres louées, peu important que le candidat à la cession de bail en ait obtenu une à titre personnel.

Il appartenait alors aux juges de rechercher, au besoin d'office, si les EARL étaient titulaires d'une autorisation d'exploiter, alors qu'elle avait relevé que les terres louées étaient mises à leur disposition depuis l'origine des baux et, retenu, pour l'appréciation des moyens matériels dont disposait le cessionnaire, que les EARL possédaient des bâtiments d'élevage, du matériel de cultures et de tractions, un cheptel de vaches allaitantes, de taureaux et de génisses, ce qui impliquait que ces sociétés continueraient à exploiter les parcelles.

La décision sur ce point s’inscrit également dans la lignée de la jurisprudence de la Cour de cassation qui, a contrario, retient que « l'autorisation dont bénéficie une EARL pour exploiter les terres qui doivent être mises à sa disposition par l'un de ses membres, candidat à la cession du bail rural portant sur ces terres, dispense ce candidat d'obtenir lui-même cette autorisation » (v. Cass. civ. 3, 27 mai 2009, n° 08-14.982, FS-P+B N° Lexbase : A3879EH7).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Cession du bail rural, sous-location et cotitularité du bail, et spéc. L'autorisation du TPBR à la cession de bail rural, Bonne foi du preneur cédant et Obligation pour le preneur d'obtenir une autorisation d'exploiter, in Droit rural, (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E9048E9Y et N° Lexbase : E9057E9C.

newsid:483225

Élections professionnelles

[Brèves] Application des règles de représentation équilibrée femmes-hommes aux élections partielles des membres du CSE en cours de mandat

Réf. : Cass. soc., 9 novembre 2022, n° 21-60.183, F-B N° Lexbase : A12888SI

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N3247BZB

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par Charlotte Moronval

Le 16 Novembre 2022

► Les règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes sont applicables en cas d’élections partielles des membres du comité social et économique en cours de mandat.

Faits et procédure. Un protocole d'accord préélectoral est signé entre une société et trois organisations syndicales en vue de la mise en place du comité social et économique au sein de la société, prévoyant un collège unique, les proportions de femmes et d'hommes dans ce collège étant respectivement de 28,1 % et de 71,9 %, douze postes étant à pourvoir. Les élections se sont tenues courant 2019.

Le nombre de membres titulaires ayant été réduit de moitié, la société a organisé en 2021 des élections partielles afin de pourvoir six postes de titulaires et douze de suppléants.

Pour rappel. Des élections partielles sont organisées à l'initiative de l'employeur si un collège électoral n'est plus représenté ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique est réduit de moitié ou plus, sauf si ces événements interviennent moins de six mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du comité social et économique (C. trav., art. L. 2314-10 N° Lexbase : L8500LGW).

Un syndicat a déposé une liste de quatre candidats tant pour les titulaires que pour les suppléants, composée uniquement d'hommes. À l'issue du second tour, ont été élus sur ces listes un titulaire et trois suppléants.

La société a saisi le tribunal judiciaire en annulation de l'élection de M. X et M. Y, au motif que les listes sur lesquelles ils ont été élus ne respectent pas les règles de la représentation proportionnée entre les femmes et les hommes.

Le tribunal judiciaire accède à la demande de la société et annule l'élection de M. X en tant qu'élu titulaire et celle de M. Y en tant qu'élu suppléant, intervenue lors des élections partielles. Le syndicat forme un pourvoi en cassation.

La solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation rejette ce pourvoi.

Le tribunal judiciaire, qui a relevé que le syndicat avait présenté, en vue des élections partielles des membres du comité social et économique de la société, des listes incomplètes composées de quatre hommes et constaté que ces listes comportaient un homme en surnombre au regard de la proportion de femmes et d'hommes figurant dans le protocole d'accord préélectoral établi pour les élections initiales, en a déduit qu'il convenait d'annuler l'élection du dernier élu du sexe surreprésenté, soit M. X sur la liste des titulaires et M. Y sur la liste des suppléants.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’organisation des élections des membres de la délégation du personnel au comité social et économique, L'organisation d'élections partielles, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E1922GAG.

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Entreprises en difficulté

[Brèves] Modalités de la revendication d'un droit de propriété né postérieurement à l’ouverture de la procédure collective

Réf. : Cass. com., 26 octobre 2022, n° 20-23.150, F-B N° Lexbase : A01178RR

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N3191BZ9

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par Vincent Téchené

Le 10 Novembre 2022

► Il résulte de la combinaison des articles L. 624-9, L. 624-16 du Code de commerce, rendus applicables à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-14 et R. 662-3 du Code de commerce que le juge-commissaire n'est compétent pour connaître de la revendication des biens mobiliers que lorsque le demandeur se prévaut d'un droit de propriété né antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ; dès lors, la revendication d'un droit de propriété né postérieurement à celle-ci relève de l'application des dispositions du Code civil.

Faits et procédure. Une société a été mise en redressement judiciaire le 31 mai 2017. Pendant la période d'observation du redressement judiciaire, en septembre et décembre 2017, la débitrice a commandé des outillages, ces marchandises ayant alors été vendues avec une clause de réserve de propriété, acceptée par le dirigeant de la débitrice le 9 février 2018. La livraison des biens vendus a eu lieu fin février 2018.

Le 1er juin 2018, un jugement a arrêté le plan de cession et prononcé la liquidation judiciaire.

Le 21 juin 2018, la venderesse réservataire a revendiqué les matériels auprès du liquidateur qui a refusé d'acquiescer, puis, le 30 juillet 2019, elle a saisi le juge-commissaire qui s'est déclaré incompétent.

Arrêt d’appel. Toutefois, la cour d’appel de Lyon (CA Lyon, 8 octobre 2020, n° 19/07738 N° Lexbase : A13793XD) a retenu la compétence du juge-commissaire puis, sur opposition, du tribunal. Pour les juges d’appel, les dispositions relatives à la revendication des biens meubles n'excluent pas l'hypothèse d'une revendication dont la cause est née durant la période d'observation et la créancière réservataire n'entend pas exercer le recours de droit commun du Code civil, la marchandise n'étant ni perdue ni volée.

Ils ajoutent, en outre, que les effets de la clause de réserve de propriété relèvent de la juridiction de la procédure collective, qui connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, en application de l'article R. 662-3 du Code de commerce N° Lexbase : L4178LTW.

Le liquidateur a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation, énonçant la solution précitée, censure en conséquence l’arrêt d’appel au visa des articles L. 624-9 N° Lexbase : L3492ICC et L. 624-16 N° Lexbase : L3509ICX rendus applicables à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-14 N° Lexbase : L9199L7T, et R. 662-3 du Code de commerce : en statuant comme elle l’a fait, « alors que la liquidation judiciaire de la société débitrice prononcée par le jugement du 1er juin 2018 ne constituait pas une procédure collective nouvelle, la cour d'appel a violé [ces textes] ».

Observations. On rappellera que la Cour de cassation a récemment rappelé qu'il résulte de la combinaison des articles L. 624-9 et L. 622-23 N° Lexbase : L3488IC8 du Code de commerce que la demande de restitution de meubles présentée avant l’ouverture de la procédure collective de leur détenteur précaire n’est pas soumise aux dispositions du premier relatives à la revendication et se poursuit selon celles du second relatives aux instances qui ne tendent pas au paiement d’une somme d’argent (Cass. com., 9 juin 2022, n° 21-10.309, F-B N° Lexbase : A790774M ; V. Téchené, Modalités procédurales de la demande de restitution de meubles présentée avant l'ouverture de la procédure collective de leur détenteur précaire, Lexbase Affaires, juin 2022, n° 721 N° Lexbase : N1830BZS).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les vendeurs de meubles, les revendications et restitution, Les conditions temporelles entourant la revendication, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E8769B4K.

 

newsid:483191

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Une association entretenant des relations privilégiées avec un organisme à but lucratif en retirant un avantage concurrentiel n’est pas exonérée de TVA

Réf. : CE, 9°-10° ch. réunies, 17 octobre 2022, n° 453019, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A68138PZ

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N3174BZL

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Novembre 2022

Une association qui entretient des relations privilégiées avec des organismes à but lucratif ou des professionnels qui en retirent un avantage concurrentiel leur permettant notamment de réaliser, de manière directe, un surcroît de recettes, ne saurait être regardée comme ayant une gestion désintéressée et bénéficier ainsi d’une exonération de TVA.

Les faits :

  • à l'issue d'une vérification de comptabilité dont une association, l'administration lui a notifié des rappels de TVA pour la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014 ;
  • le TA de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;
  • la CAA de Lyon a annulé ce jugement et déchargé l'association des impositions en litige (CAA Lyon, 1er avril 2021, n° 20LY00346 N° Lexbase : A20554PS).

Principe. Les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient (CGI, art. 261 N° Lexbase : L8934MCU).

Il résulte de l'instruction que l'association exerce une activité de halte-garderie pour les enfants de dix-huit mois à trois ans et d'initiation au ski pour les enfants à partir de trois ans. Pour l'exercice de cette dernière activité, qui représente environ 70 % de ses recettes et constitue donc la principale activité de l'association, celle-ci fait appel à des moniteurs de ski dont il n'est pas contesté qu'ils exercent une activité commerciale pour laquelle ils sont soumis, notamment, à la taxe sur la valeur ajoutée, et qui sont membres de l'association.

Solution du CE. Dans ces conditions, dès lors qu'ils retirent un avantage concurrentiel des activités de l'association, celle-ci doit être regardée comme entretenant des relations privilégiées avec ses membres, moniteurs de ski exerçant à titre commercial, alors même que les cours de ski dispensés aux enfants dans le cadre de celle-ci seraient moins rémunérateurs en moyenne pour les moniteurs que leurs cours particuliers. C'est dès lors, à bon droit que l'administration a estimé que son activité devait être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée.

L’arrêt de la CAA de Lyon est annulé.

Précisions. Le Conseil d’État s’est prononcé dans le cas d’une association dont l'activité constituait le prolongement de celle d'une société dont le gérant était également le président de l'association et qui exerçait, outre une activité principale de commercialisation de produits phytopharmaceutiques, une activité de prestations d'assistance et de conseil juridique et administratif. Les prestations de conseil fournies par l'association étaient facturées en plus des cotisations des membres, selon un tarif établi en fonction des prestations fournies et des heures consacrées à la défense des clients. Une partie des recettes correspondantes étaient encaissées par la société, qui émettait les factures correspondantes. Cette société prenait en charge le salaire d'une secrétaire qui consacrait la quasi-totalité de son temps de travail à l'association. Enfin, un nombre important de clients de la société étaient également membres de l'association. La gestion d'une telle association ne présentait pas un caractère désintéressé (CE, 9°-10° ch. réunies, 7 décembre 2016, n° 389299, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1567SPQ).

 

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