Le Quotidien du 11 mai 2022

Le Quotidien

Actualité judiciaire

[A la une] Suicides à France Télécom : une décennie plus tard, la cour d’appel se penche sur le dossier

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par Vincent Vantighem

Le 25 Mai 2022

« Je me suicide à cause de France Télécom. C’est la seule cause. » La lettre date de juillet 2009. Elle était signée par Michel Deparis, un technicien marseillais travaillant pour France Télécom. Quelques heures plus tard, Michel Deparis passait à l’acte. Deux mois plus tard, une première plainte était déposée, au pénal, par le syndicat Sud.

 Près de treize ans se sont écoulés. France Télécom est devenu Orange. Mais l’entreprise n’en a pas fini avec la vague de suicides qui lui avait valu les gros titres de la presse à la fin des années 2000. Condamnés pour harcèlement moral en 2019, les anciens dirigeants de l’entreprise vont être rejugés par la cour d’appel de Paris du 11 mai à début juillet. Sept prévenus sont concernés par cette procédure, dont un intimé uniquement sur le plan civil. En première instance, ils faisaient face à cent soixante-treize parties civiles, dont quatorze syndicats, associations et fédérations.

Au fil du temps, la procédure a fini par remplir quatre-vingt-sept tomes, que l’on pourrait résumer en une question simple : France Télécom a-t-elle volontairement dégradé les conditions de travail de ses salariés pour les forcer au départ ? Pour y répondre, lors du procès en première instance, le tribunal avait examiné, en détail, les cas de trente-neuf salariés : dix-neuf avaient mis fin à leurs jours, douze avaient tenté de le faire et huit avaient subi un épisode de dépression ou un arrêt de travail.

Et le 20 décembre 2019, le tribunal avait tranché. Dans un jugement inédit – le premier concernant une entreprise du CAC 40 prévenue de ce chef –, il avait sanctionné un harcèlement moral institutionnel et collectif « ayant eu pour cible plusieurs dizaines de milliers » de personnes. Les juges avaient condamné les trois ex-dirigeants à un an de prison, dont huit mois avec sursis, et 15 000 euros d’amende pour « leur rôle prééminent » dans la mise en place d’une politique de réduction des effectifs « jusqu’au-boutiste » sur la période allant de 2007 à 2008. Quatre autres responsables, condamnés à quatre mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende avaient été condamnés pour « complicité ».

Didier Lombard et son « profond chagrin »

À l’époque, le tribunal avait estimé qu’ils avaient mis « la pression sur l’encadrement », qui « a répercuté cette pression » sur les agents, et mis en place « un plan concerté pour dégrader les conditions de travail […] afin d’accélérer leurs départs ». Une politique qui a créé « un climat anxiogène ».

Des sept prévenus, Didier Lombard est sans nul doute le plus connu. Ancien PDG, il avait succédé à Thierry Breton à la tête de France Télécom. Avant d’être embarqué dans la spirale judiciaire et de devenir le premier patron d’une grande entreprise cotée à être mis en examen et placé sous contrôle judiciaire.

Lors du procès en première instance, il s’était montré incapable d’exprimer des regrets, expliquant qu’avec ou « sans lui », la situation aurait été la même. « Je veux dire à celles et ceux qui ont été mes collègues mon profond chagrin pour ceux qui n’ont pas supporté le changement imposé à l’entreprise […]. Notre maison, en 2005, était en péril. À cause de son surendettement, de l’agressivité de la concurrence, des évolutions technologiques […]. En 2009, France Télécom se portait mieux. Et ces résultats ont été obtenus grâce aux salariés : je veux leur dire mon admiration et ma gratitude… », avait-il lâché lors d’une déclaration liminaire avant son interrogatoire à la barre.

Retraité depuis son départ de l’entreprise de télécommunications, il avait alors indiqué qu’il avait renoncé à toutes ses fonctions depuis la crise et se contentait désormais de vivre de sa retraite de « 16 837 euros virgule 87 par mois ».

Comme les autres prévenus, il va donc devoir replonger une décennie en arrière, dans cette période sombre, pour répondre d’une liste de griefs longue comme le bras : à savoir d’avoir eu recours à des « réorganisations multiples et désordonnées », à « des incitations au départ », à « un contrôle intrusif et excessif », à « l’attribution de missions dévalorisantes » ou encore à « des manœuvres d’intimidation, voire des menaces » pour n’en citer que quelques-uns d’entre eux.

Autant de mots de management qui ont conduit à des maux en série pour les salariés et au suicide pour les plus fragiles d’entre eux. Le procès est audiencé sur deux jours par semaine jusqu’au début du mois de juillet. La décision sera ensuite mise en délibéré.

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Actualité judiciaire

[A la une] Condamné dans l’affaire « des emplois fictifs de Penelope », François Fillon se pourvoit en cassation

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N1429BZX

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par Vincent Vantighem

Le 24 Mai 2022

Dès la semaine précédente, ils avaient fait savoir qu’ils ne se déplaceraient pas pour écouter la cour d’appel de Paris livrer sa sentence. C’est donc par un communiqué, rédigé et diffusé par leurs avocats, que François et Penelope Fillon ont annoncé, lundi 9 mai, leur intention de se pourvoir en cassation après leur condamnation dans l’affaire dite « des emplois fictifs ». Quelques heures plus tôt, François Reygrobellet, le président de la chambre 2-12 de la cour d’appel de Paris avait acté leur absence du prétoire et décidé, par voie de conséquence, de livrer très rapidement les éléments essentiels de sa décision. Une peine de quatre ans de prison dont trois avec sursis, 375 000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité à l’encontre de l’ancien Premier ministre. Deux ans de prison avec sursis, 375 000 euros d’amende et deux ans d’inéligibilité à l’encontre de son épouse Penelope. Le tout pour « détournement de fonds publics ».

            « Monsieur et madame Fillon ont décidé de se pourvoir en cassation, explique donc le communiqué. La cour n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations sur les preuves apportées de la réalité du travail accompli par madame Fillon. » Pour les anciens barons de la Sarthe, le but n’est pas tant ici de parvenir à prouver leur innocence que de gagner encore un peu de temps. En formant ce pourvoi en cassation et comme le prévoit la procédure en de pareils cas, François Fillon suspend la décision qui vient d’être rendue. Pas besoin de payer l’amende tout de suite. Et surtout pas besoin, dans l’immédiat, de vivre l’infamie d’un passage devant un juge d’application des peines chargé d’exécuter la peine de prison ferme, éventuellement sous la forme d’un placement sous surveillance électronique à domicile comme l’avait réclamé, à l’audience, le parquet général.

Des preuves « évanescentes » voire « vaporeuses »

            Sur le fond, la cour d’appel a simplement acté le fait que Penelope Fillon avait bien été payée indûment par son époux député, puis par le suppléant de ce dernier, comme collaboratrice parlementaire alors qu’elle n’effectuait pas un réel travail. Dans ce dossier, Penelope Fillon était accusée d’avoir occupé un emploi fictif sur trois périodes distinctes : 1998-2002 aux côtés de son époux, 2002-2007 aux côtés de Marc Joulaud, suppléant de François Fillon à l’Assemblée, puis à nouveau de 2012 à 2013 aux côtés de son mari. La cour d’appel a retenu la responsabilité des prévenus pour les deux derniers contrats mais les a relaxés pour le premier « au bénéfice du doute ». Non pas qu’il existe pour celui-là des preuves irréfutables du travail effectué par Penelope. Mais plutôt que les faits sont si anciens qu’il est compréhensible qu’on ne trouve plus aujourd’hui de traces de ce travail…

            Moins cassant en appel qu’en première instance, François et Penelope Fillon n’avaient pourtant pas changé leur ligne de défense d’un iota. L’ancien Premier ministre expliquant que son épouse avait bien œuvré à ses côtés, qu’elle était d’ailleurs sa collaboratrice « la plus importante » et « la plus diplômée », justifiant selon lui les 3 676 euros nets de rémunération octroyés sur la période incriminée. À l’heure de plaider, Antonin Lévy, l’un des avocats de François Fillon avait même produit quarante-et-une attestations prouvant qu’elle ne se tournait pas les pouces dans son manoir de Beaucé à Solesmes (Sarthe) pendant que les salaires tombaient sur son compte. Des explications qualifiées « d’évanescentes » voire de « vaporeuses » par le parquet général à l’audience et qui a donc été suivi, dans son analyse, par la cour d’appel. Si la peine est un peu plus faible que celle requise (et que celle prononcée en première instance), c’est sans doute parce que la cour d’appel a exclu le premier contrat de Penelope du champ de sa saisine.

La sanction au portefeuille

            Mais pour les Fillon, l’autre conséquence de cette décision rendue en appel se situe sur le plan financier. La cour a, en effet, reconnu l’Assemblée nationale dans son statut de partie civile et acté le fait qu’elle avait subi un « préjudice financier » en payant Penelope Fillon alors qu’elle n’exécutait pas de travail. « S’il n’y avait pas travail, il ne devait pas y avoir salaire », avait expliqué à l’audience Yves Claisse, le conseil du Palais-Bourbon.

            Sur ce point, la défense des Fillon et de Marc Joulaud (condamné, lui, à trois ans de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité) avait mis en avant la « jurisprudence Kerviel » pour tenter d’échapper à la sanction au portefeuille. C’est-à-dire qu’elle avait expliqué que l’Assemblée nationale ne pouvait toucher de dommage et intérêts dans la mesure où elle avait, elle-même, une part de responsabilité dans le fric-frac institutionnel, ayant manqué à ses obligations de contrôle. L’histoire réserve parfois des surprises. C’est ainsi que Jean Veil, avocat de la Société Générale dans le dossier Kerviel, aurait pu aujourd’hui bénéficier d’une jurisprudence qui lui a causé du tort, voilà sept ans, devant la cour d’appel de Versailles (Yvelines) quand il était opposé à l’ancien trader.

            Mais la cour d’appel a balayé cet argument, et a donc condamné les prévenus à verser solidairement un peu plus de 800 000 euros à l’Assemblée nationale, soit le total des salaires de Penelope auquel s’ajoutent les cotisations sociales (salariales et patronales). Dans le détail, Marc Joulaud et Penelope Fillon doivent payer 679 989,32 euros à l’Assemblée pour la période 2002-2012 et François et Penelope, 126 167,10 euros pour la période 2012-2017, le premier contrat ayant donc été exclu de ces comptes d’apothicaire.

Un nouveau signal envoyé à Nicolas Sarkozy

            Si le pourvoi en cassation suspend la condamnation pénale prononcée à l’encontre des trois prévenus, il n’en est pas de même pour leur condamnation civile dont ils doivent s’acquitter désormais. Reste à savoir si la partie civile, l’Assemblée nationale, fera les démarches dès aujourd’hui pour récupérer son dû ou si elle attendra que l’ancien Premier ministre épuise toutes les voies de recours pour lui envoyer une mise en recouvrement… Il sera intéressant de voir quelle attitude elle adopte.

            En attendant, après les époux Balkany, après Jérôme Cahuzac, après Claude Guéant : la justice a envoyé un nouveau signal à la classe politique. Le signal qu’elle entendait désormais solder l’impunité qui a régné pendant des années sans avoir la main qui tremble. Un signal qui a dû être reçu par Nicolas Sarkozy, lui-même condamné à deux peines de prison ferme dans deux dossiers distincts et qui doit attendre, avec un peu de fébrilité, son passage à venir devant la même cour d’appel.

Pour aller plus loin : V. Vantighem, « PenelopeGate » : François et Penelope Fillon jugés en appel dans l’affaire des emplois fictifs, Lexbase Pénal, novembre 2021 N° Lexbase : N9376BYW.

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Consommation

[Brèves] E-commerce : obligation pour le vendeur professionnel d’informer le consommateur de la garantie du producteur s’il en fait un élément central ou décisif de son offre

Réf. : CJUE, 5 mai 2022, aff. C-179/21 N° Lexbase : A11717WB

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par Vincent Téchené

Le 11 Mai 2022

► Un commerçant qui propose, sur des plateformes de commerce en ligne comme Amazon, un bien qu’il n’a pas lui-même produit doit informer le consommateur de la garantie du producteur s’il en fait un élément central ou décisif de son offre.

Faits et procédure. Une société proposait à la vente, sur la plateforme de commerce en ligne Amazon, le produit d’un fabricant suisse. La page du site Amazon présentant cette offre ne contenait aucune information sur une quelconque garantie offerte par le vendeur ou un tiers, mais comportait, dans une rubrique intitulée « Autres informations techniques », un lien au moyen duquel l’utilisateur pouvait accéder à une fiche d’information rédigée par le producteur. Estimant que le vendeur ne fournissait pas suffisamment d’informations sur la garantie offerte par le producteur, une société concurrente a introduit, sur le fondement de la réglementation allemande relative à la concurrence déloyale, une action visant à ce que le vendeur cesse de proposer de telles offres.

C’est dans ces conditions que le juge allemand, éprouvant des doutes quant au fait de savoir si, en vertu de la Directive sur les droits des consommateurs (Directive n° 2011/83/UE du 25 octobre 2011 N° Lexbase : L2807IRE), un professionnel se trouvant dans la situation du vendeur en l’espèce est tenu d’informer le consommateur de l’existence de la garantie commerciale proposée par le producteur, a posé une question préjudicielle à la CJUE. Cette juridiction s’est également interrogée sur la portée d’une telle obligation et sur les conditions dans lesquelles elle prend naissance.

Décision. En premier lieu, s’agissant de la question de savoir si le professionnel est tenu d’informer le consommateur de l’existence d’une garantie commerciale du producteur, la CJUE précise que, lorsque l’objet du contrat porte sur un bien fabriqué par une personne autre que le professionnel, cette obligation doit couvrir l’ensemble des informations essentielles relatives à ce bien afin que le consommateur puisse décider s’il souhaite se lier contractuellement avec le professionnel. Selon la Cour, ces informations englobent les principales caractéristiques du bien ainsi que, en principe, l’ensemble des garanties intrinsèquement liées à celui-ci, dont la garantie commerciale proposée par le producteur.

Toutefois, la Cour relève que, si la communication d’informations sur la garantie commerciale du producteur assure au consommateur un niveau élevé de protection, une obligation inconditionnelle de fournir de telles informations, en toute circonstance, paraît disproportionnée. Partant, la Cour considère que le professionnel n’est tenu de fournir au consommateur des informations précontractuelles sur la garantie commerciale du producteur que si le consommateur a un intérêt légitime à obtenir ces informations afin de prendre la décision de se lier contractuellement avec le professionnel.

Cette obligation du professionnel prend donc naissance non pas du simple fait de l’existence de cette garantie, mais du fait de la présence d’un tel intérêt légitime du consommateur. À cet égard, la CJUE précise que cet intérêt est établi dès lors que le professionnel fait de la garantie commerciale du producteur un élément central ou décisif de son offre, notamment lorsqu’il en fait un argument de vente de manière à améliorer ainsi la compétitivité et l’attractivité de son offre par rapport aux offres de ses concurrents.

En second lieu, s’agissant de la question de savoir quelles informations doivent être fournies au consommateur au sujet des « conditions [...] afférentes » à la garantie commerciale du producteur, la CJUE juge que le professionnel est tenu de fournir au consommateur tout élément d’information relatif aux conditions d’application et de mise en œuvre de la garantie commerciale concernée. Outre la durée et l’étendue territoriale de la garantie, ces éléments peuvent inclure non seulement le lieu de réparation en cas de dommage ou les éventuelles restrictions de garantie, mais également, en fonction des circonstances, le nom et l’adresse du garant.

newsid:481412

Construction

[Brèves] Une entreprise qui a indemnisé le maître d’ouvrage peut agir contre le fabricant mais sur le fondement du droit commun

Réf. : Cass. civ. 3, 20 avril 2022, n° 21-14.182, FS-B N° Lexbase : A08957UP

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N1349BZY

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 10 Mai 2022

► Les constructeurs responsables de plein droit de la responsabilité décennale des constructeurs ne peuvent exercer leur recours contre le fabricant que sur le fondement du droit commun ;
► même s’ils ont indemnisé le maître d’ouvrage dès lors qu’ils ne sont pas subrogés dans ses droits.

La Haute juridiction poursuit la clarification des délais de recours de l’action tendant à l’obligation à la dette, d’une part, de l’action tendant à la contribution à la dette, d’autre part, entre les intervenants à l’opération de construire ainsi qu’en atteste l’arrêt rapporté.

En l’espèce, la ville de Paris a confié à une entreprise le lot électricité comprenant le remplacement des projecteurs et leur maintenance d’un chantier de rénovation et de mise en conformité des installations techniques d’une fontaine.

L’entreprise commande ces projecteurs à un fabricant. Des dysfonctionnements apparaissent après la réception. Le maître d’ouvrage assigne l’entreprise et son assureur devant le juge administratif, lesquels saisissent le juge judiciaire d’un recours contre le fabricant et son assureur.

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 28 mars 2019 (CA Paris, 28 mars 2019, n° 16/22177 N° Lexbase : A2975Y7C) fait droit à cette demande en garantie, sur le fondement des dispositions de l’article 1792-4 du Code civil N° Lexbase : L5934LTX, relatif aux EPERS.

Partant de cette qualification, les conseillers font application du délai de prescription de dix ans à compter de la réception. C’est sur ce point que l’action se complique. Il faut, en effet, bien distinguer l’action exercée par le maître d’ouvrage contre le constructeur, qui se prescrit, en effet, dans le délai de dix ans à compter de la réception, du recours exercé par les constructeurs et/ou fabricants entre eux, qui relève du droit commun de la prescription.

Aux termes de deux arrêts rendus le 16 janvier 2020 (Cass. civ. 3, 16 janvier 2020, n° 18-25.915, FS-P N° Lexbase : A17433B8 ; Cass. civ. 3, 16 janvier 2020, n° 18-21-895 N° Lexbase : A17343BT), destinés à la plus large publication et mis en ligne sur le site de la Cour de cassation, la troisième chambre civile a, en effet, posé un véritable vade mecum des délais des recours exercés contre le constructeur puis par les constructeurs entre eux, après avoir été mis en cause par le maître d’ouvrage ou l’acquéreur dans le cadre d’une action fondée sur la responsabilité décennale des constructeurs prévue aux articles 1792 et suivants du Code civil. Le maître d’ouvrage bénéficie d’un délai de dix ans qui court à compter de la réception pour exercer son recours contre le constructeur et son sous-traitant. Le constructeur et leur sous-traitant ont un délai de cinq ans pour exercer leur action en contribution à la dette.

La solution est depuis constante devant le juge judiciaire et devant le juge administratif (CE, 12 avril 2022, n° 448946 N° Lexbase : A41457TP).

La solution rapportée est, à cet égard, confirmative.

Mais ce qui est supplémentairement intéressant dans cet article c’est que la Haute juridiction rappelle que le constructeur, dans le cadre de son action en contribution à la dette, ne peut pas, non plus se fonder sur l’article 1792-4 sur les EPERS.

Ces dispositions ne s’appliquent qu’à l’action exercée par le maître d’ouvrage contre le fabricant. Sauf subrogation, le constructeur n’a donc pas qualité à agir sur ce fondement.

La solution n’est pas nouvelle mais méritait d’être rappelée (pour exemple, Cass. civ. 3, 8 juin 2011, n° 09-69.894, FS-P+B N° Lexbase : A4974HTE).

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Contrat de travail

[Brèves] Transfert d’entreprise : dérogation au maintien des droits de travailleurs lors de la conclusion d’un « pre-pack » précédant une faillite

Réf. : CJUE, 28 avril 2022, aff. C-237/20 N° Lexbase : A66277UY

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N1327BZ8

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par Lisa Poinsot

Le 10 Mai 2022

► En cas de transfert d’actifs préparé dans le cadre d’une procédure de pre-pack et sous réserve que cette procédure soit encadrée par des dispositions législatives ou réglementaires, le cessionnaire a, en principe, le droit de déroger au maintien des droits des travailleurs prévus par les articles 3 et 4 de la directive n° 2001/23 du 12 mars 2001.

Faits et procédure. Un groupe de société a accumulé d’importantes pertes financières au cours des années 2011 et 2012. Quatre sociétés de ce groupe sont sanctionnées par la Commission européenne par une amende de 27 millions d’euros pour avoir participé à une entente.

En raison de cette amende et de l’absence de financement par les banques, le recours à un pre-pack a été examiné. En droit néerlandais, le pre-pack est une pratique d’origine jurisprudentielle qui a pour objectif de permettre, durant la procédure de faillite, une liquidation de l’entreprise en exploitation désintéressant au mieux les créanciers et maintenant l’emploi autant que possible.

En 2014, ont été désignés deux curateurs pressentis et un juge commissaire pour organiser les transactions de vente des actifs du groupe qui a été déclaré en faillite. Deux sociétés néerlandaises ont repris la majeure partie des activités commerciales du groupe et les contrats de travail d’environ deux tiers des salariés afin qu’ils exercent le même travail dans des conditions toutefois moins favorables.

En appel, les juges ont considéré que la faillite du groupe de sociétés était inévitable emportant, de ce fait, dérogation au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprise.

La fédération du mouvement syndical néerlandais forme un pourvoi en cassation devant la Cour suprême des Pays-Bas en soutenant que la dérogation au maintien des droits des salariés n’était pas applicable dans le cas d’une procédure de pre-pack et que, de ce fait, les conditions de travail du personnel repris devraient être conservées.

La CJUE est saisie à titre préjudiciel par la Cour suprême des Pays-Bas pour savoir, notamment, « si l’article 5, § 1, de la directive n° 2001/23 N° Lexbase : L8084AUX doit être interprété en ce sens que la condition qu’il prévoit, selon laquelle les articles 3 et 4 de cette directive ne s’appliquent pas au transfert d’une entreprise lorsque le cédant fait l’objet d’une procédure de faillite ou d’une procédure d’insolvabilité analogue ‘‘ouverte en vue de la liquidation des biens du cédant’’, est remplie lorsque le transfert de tout ou partie d’une entreprise est préparé, antérieurement à l’ouverture d’une procédure de faillite visant la liquidation des biens du cédant et au cours de laquelle ledit transfert est réalisé, dans le cadre d’une procédure de pre-pack ayant pour objectif de permettre, durant la procédure de faillite, une liquidation de l’entreprise en exploitation désintéressant au mieux l’ensemble des créanciers et maintenant l’emploi autant que possible ».

La solution. Énonçant la solution susvisée, la CJUE soutient, tout d’abord, que lorsque la finalité d’une procédure de pre-pack suivie d’une procédure de faillite est d’obtenir le remboursement le plus élevé possible pour l’ensemble des créanciers et de maintenir l’emploi autant que possible, alors ces procédures entrent dans le champ d’application de l’article 5, § 1, de la directive n° 2001/23. Ensuite, sur ce fondement européen, la Cour rappelle que la dérogation au maintien des droits de travailleurs en cas de transfert d’entreprise vise uniquement à écarter le risque sérieux d’une détérioration, au plan global, de la valeur de l’entreprise cédée ou des conditions de vie et de travail de la main d’œuvre. Enfin, elle met en évidence que cette dérogation n’est possible que si la procédure de pre-pack et la procédure de faillite en cause tendent à la liquidation de l’entreprise en raison de l’insolvabilité avérée du cédant et non pas à une simple réorganisation de celui-ci.

Pour aller plus loin :

  • ⚠️ la CJUE change sa position sur l’interprétation de l’article 5, §1 de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 puisque dans un arrêt du 22 juin 2017 N° Lexbase : A1276WKH, elle considérait que la protection des travailleurs doit être maintenue lorsque le transfert d'une entreprise intervient à la suite d'une déclaration de faillite dans le contexte d'un pre-pack, préparé antérieurement à celle-ci et mis en œuvre immédiatement après le prononcé de la faillite, dans le cadre duquel, un « curateur pressenti », désigné par un tribunal, examine les possibilités d'une éventuelle poursuite des activités de cette entreprise par un tiers et se prépare à passer des actes juste après le prononcé de la faillite afin de réaliser cette poursuite et, par ailleurs, qu'il n'est pas pertinent, à cet égard, que l'objectif poursuivi par cette opération de pre-pack vise également la maximalisation du produit de la cession pour l'ensemble des créanciers de l'entreprise en cause ;
  • v. aussi : ÉTUDE : La modification dans la situation juridique de l’employeur, Le maintien des droits et des obligations des salariés transférés, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E8851ESM.

 

newsid:481327

Droit médical

[Brèves] La cryothérapie : un acte à réserver aux professionnels de santé !

Réf. : Cass. crim., 10 mai 2022, n° 21-83.522, N° Lexbase : A45307WP et n° 21-84.951 N° Lexbase : A45317WQ, FS-B

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N1436BZ9

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par Laïla Bedja

Le 24 Mai 2022

► La cryothérapie à des fins médicales est un acte de physiothérapie dont la pratique est réservée, d'une part, lorsqu'elle aboutit à la destruction, si limitée soit-elle, des téguments, aux docteurs en médecine, d'autre part, à la condition qu'elle ne puisse aboutir à une lésion des téguments, aux personnes titulaires d'un diplôme de masseur-kinésithérapeute intervenant pour la mise en œuvre de traitements sur prescription médicale ; le conseil départemental de l’Ordre des médecins et celui des masseurs-kinésithérapeutes sont recevables à se constituer partie civile (pourvoi n° 21-84.951) ;

La restriction apportée par l’article 2, 4° de l’arrêté du 6 janvier 1962 à la liberté d’établissement et au principe de libre prestation de services garantis par les dispositions du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne est justifiée par la prévention des risques que le procédé en cause comporte au regard de la santé publique ;

Doit être déclaré coupable d’exercice illégal de la médecine, le prévenu qui s’est livré de manière habituelle, par l'intermédiaire de la société dont il était le gérant, au traitement de maladies, congénitales ou acquises, réelles ou supposées par des actes de cryothérapie « à corps entier » (pourvoi n° 21-83.522).

Les faits et procédure. Deux affaires sont en cause. La première (pourvoi n° 21-83.522) fait suite aux blessures qui ont été occasionnées à un client d’un institut d’esthétique au cours d’une séance de cryothérapie. Après une enquête, il a été établi que la cryothérapie était pratiquée par la société en dehors de toute supervision médicale, par des esthéticiennes ayant seulement suivi une formation assurée par l'installateur du matériel. La société et le gérant ont alors été poursuivis respectivement des chefs de blessures involontaires et d’exercice illégal de la médecine.

Déclaré coupable par la cour d’appel de Paris, le gérant a formé un pourvoi en cassation arguant notamment, que la prestation accomplie dans un but esthétique et de confort, sans visée thérapeutique n'est pas soumise à prescription médicale de sorte que son accomplissement ne saurait constituer un exercice illégal de la médecine et invoquant la liberté d’établissement et la libre prestation de services.

La seconde concerne le signalement du conseil départemental de l’Ordre des médecins et de celui des masseurs-kinésithérapeutes d’un institut pratiquant la cryothérapie (pourvoi n° 21-84.951). La plaquette de présentation de l’institut indiquait que les « actes de cryothérapie “corps entier” pratiqués dans le centre C. pouvaient soulager des douleurs chroniques et des états post-traumatiques par des effets antalgiques et anti-inflammatoires, aider à la rééducation de patients présentant une plasticité musculaire et apporter des bienfaits notamment pour certaines pathologies comme l'eczéma, le psoriasis, les œdèmes et les inflammations ».

La cour d’appel de Nancy avait déclaré irrecevable la constitution de partie civile des deux conseils. Pour justifier leur décision, les juges du fond ont énoncé que les dispositions des articles 2 de l'arrêté du 6 janvier 1962 et R. 4321-5 du Code de la santé publique N° Lexbase : L9823GTY signifient que tout acte aboutissant à la destruction des téguments, c'est-à-dire des tissus du corps humain, par l'emploi de la cryothérapie, relève du monopole des médecins avec une exception pour les masseurs-kinésithérapeutes, mais à condition qu'ils agissent sur prescription médicale et qu'ils participent à des traitements de rééducation spécifiques et limitativement énumérés. Ils ont ajouté qu'à l'exception des cas visés à l'article R. 4321-5 du Code précité, aucun texte n'interdit expressément la pratique de la cryothérapie « corps entier » à d'autres professions que celles de médecin ou de masseur-kinésithérapeute et que la cryothérapie « corps entier » pratiquée par les prévenus n'entraîne pas d'altération ou destruction des tissus et qu'il n'a été démontré ni par les parties civiles ni par le ministère public que les actes effectivement pratiqués avaient une visée thérapeutique et constituaient des actes médicaux réservés aux médecins ou aux masseurs-kinésithérapeutes.

Les décisions. La Chambre criminelle, dans ses deux décisions, considère que les actes de cryothérapie sont des actes qui doivent être réservés aux professionnels de santé. Le pourvoi du gérant contre sa condamnation fondée sur l’exercice illégal de la médecine est alors rejeté et la décision déclarant irrecevables les deux conseils de l’Ordre est cassée. Dans cette dernière, la Cour de cassation reproche aux juges du fond de ne pas avoir justifié leur décision.

newsid:481436

Fiscalité immobilière

[Brèves] Taxe sur les bureaux dans la région IDF : le juge précise la notion de « réserves attenantes »

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 19 avril 2022, n° 443039, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A05097UE

Lecture: 2 min

N1310BZK

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mai 2022

Le Conseil d’État a précisé, dans le cadre d’un litige portant sur la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, que pour être qualifiés de réserves attenantes à des locaux destinés à l’exercice d’une activité de commerce de détail ou de gros et de prestations de services à caractère commercial ou artisanal au sens de l’article 231 ter du CGI, les locaux concernés doivent à la fois se situer à proximité immédiate des locaux où est exercée l’activité de commerce ou de prestations de services et contribuer directement à cette activité.

Les faits :

  • une société a obtenu un permis de construire portant sur la restructuration de plusieurs niveaux du Centre des nouvelles industries et technologies, situé dans les Hauts-de-Seine ;
  • elle a demandé au TA de Cergy-Pontoise de prononcer une réduction de la redevance, mise à sa charge au titre de locaux situés au quatrième sous-sol de cet immeuble ;
  • le TA a rejeté sa demande.

Principes :

  • en région d'Île-de-France, une redevance est perçue à l'occasion de la construction, de la reconstruction ou de l'agrandissement des locaux commerciaux et des locaux de stockage (C. urb., art. L. 520-1 N° Lexbase : L3906KWL) ;
  • la taxe est due pour les locaux commerciaux, qui s'entendent des locaux destinés à l'exercice d'une activité de commerce de détail ou de gros et de prestations de services à caractère commercial ou artisanal ainsi que de leurs réserves attenantes couvertes ou non et des emplacements attenants affectés à la vente ; pour les locaux de stockage, qui s'entendent des locaux ou aires couvertes destinés à l'entreposage de produits, de marchandises ou de biens et qui ne sont pas intégrés topographiquement à un établissement de production (CGI, art. 231 ter N° Lexbase : L8679L49).

Solution du CE. Le TA de Cergy-Pontoise n'a pas commis d'erreur de droit et n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce en jugeant que les réserves litigieuses, d'une surface de 685 m², constituent, au sens de l'article 231 ter du CGI précité, des réserves attenantes à des locaux où est exercée une activité de restauration, après avoir relevé que ces réserves, où sont entreposés des denrées et des matériels nécessaires à l'exploitation des restaurants, sont situées à quelques étages au-dessous de ceux-ci et reliées à eux par des ascenseurs et qu'elles se trouvent ainsi à proximité immédiate des salles de restauration.

Le pourvoi de la société est rejeté.

newsid:481310

Marchés publics

[Brèves] Une évaluation des offres « flèche verte – flèche rouge » permet-t-elle une égalité de traitement entre candidats à l’attribution d’une concession ?

Réf. : CE 2°-7° ch. réunies, 3 mai 2022, n° 459678, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A94167UB

Lecture: 3 min

N1434BZ7

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par Yann Le Foll

Le 10 Mai 2022

► Une appréciation composée d'une évaluation littérale décrivant les qualités des offres pour chaque critère, suivie d'une flèche qui la résumait, n’entache pas d'irrégularité la procédure d’attribution d’une concession.

Rappel. L'autorité concédante définit librement la méthode d'évaluation des offres au regard de chacun des critères d'attribution qu'elle a définis et rendus publics. Elle peut ainsi déterminer tant les éléments d'appréciation pris en compte pour son évaluation des offres que les modalités de leur combinaison.

Une méthode d'évaluation est toutefois entachée d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, les éléments d'appréciation pris en compte pour évaluer les offres au titre de chaque critère d'attribution sont dépourvus de tout lien avec les critères dont ils permettent l'évaluation ou si les modalités d'évaluation des critères d'attribution par combinaison de ces éléments sont, par elles-mêmes, de nature à priver de leur portée ces critères ou à neutraliser leur hiérarchisation et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure offre ne soit pas la mieux classée, ou, au regard de l'ensemble des critères, à ce que l'offre présentant le meilleur avantage économique global ne soit pas choisie (CE 2°-7° s-s-r., 3 novembre 2014, n° 373362, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9417MZS).

Il en va ainsi alors même que l'autorité concédante, qui n'y est pas tenue, aurait rendu publique, dans l'avis d'appel à concurrence ou les documents de la consultation, une telle méthode d'évaluation.

Application. Le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a considéré que la méthode d'évaluation de l'offre litigieuse dans la procédure de mise en concurrence de la sous-concession d’une plage, dans le cadre de laquelle l'appréciation de l'autorité concédante sur les différents critères d'attribution était matérialisée par des flèches de couleur, était irrégulière faute pour ces signes d'être convertis en note chiffrée, ce qui laissait « une trop grande part à l'arbitraire ».

En jugeant ainsi, alors qu'il résulte des principes précités qu'il lui incombait seulement de rechercher si la méthode d'évaluation retenue n'était pas, par elle-même, de nature à priver de leur portée les critères ou à neutraliser la hiérarchisation qu'avait retenue l'autorité concédante, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a commis une erreur de droit.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE, Les marchés publics : définitions et champ d'application, Les contrats de concession, in Droit de la commande publique (dir. N. Lafay, E. Grzelczyk), Lexbase N° Lexbase : E9091ZMN.

newsid:481434

Sociétés

[Brèves] Prescription de l’action en remboursement de rémunérations indûment perçues par les membres du conseil de surveillance

Réf. : Cass. com., 21 avril 2022, n° 20-13.637, F-D N° Lexbase : A47617UU

Lecture: 4 min

N1341BZP

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par Vincent Téchené

Le 10 Mai 2022

► L'obligation pour les membres du conseil de surveillance de rembourser à la société des sommes indûment perçues au titre des rémunérations qui leur ont été versées est née à l'occasion du commerce de cette société et est ainsi soumise à la prescription prévue à l'article L. 110-4 du Code de commerce.

Faits et procédure. Les mandats de deux membres du conseil de surveillance d’une société ont pris fin pour l’un en juin 2002 et pour l’autre en juin 2005, en application des statuts de la société, lesquels prévoient que le mandat de tout membre du conseil de surveillance personne physique prend fin de plein droit, sans possibilité de renouvellement, à l'issue de l'assemblée générale ordinaire des actionnaires ayant statué sur les comptes de l'exercice écoulé et tenue dans l'année au cours de laquelle l'intéressé atteint l'âge de 75 ans. Après la fin de leurs mandats, les intéressés ont continué de percevoir les rémunérations versées par la société aux membres du conseil de surveillance, du 1er juillet 2002 au 17 juin 2012, date de son décès, pour l’un, et du 1er juillet 2005 au 30 juin 2012 pour l’autre.

Par actes des 5 et 7 juin 2013, la société a assigné l’ex-dirigeant encore en vie et les héritiers de l’autre. L’un des héritiers du dirigeant décédé a alors opposé à la société la prescription de son action en répétition de l'indu.

Arrêt d’appel. La cour d’appel de Nîmes (CA Nîmes, 20 juin 2019, n° 17/00914 N° Lexbase : A9762ZEB) va alors écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription commerciale et condamner solidairement les héritiers au paiement de certaines sommes. Les juges du fond constatent alors que la société a engagé son action les 5 et 7 juin 2013 et que les paiements en litige étaient intervenus sur une période allant du 1er juillet 2002 au 30 juin 2012. Ils retiennent que l'action en répétition de l'indu de rémunérations de mandataires sociaux d'une société commerciale a une nature civile. Ainsi, il y a lieu, dès lors, d'appliquer, dans les conditions prévues à l'article 2222 du Code civil N° Lexbase : L7186IAE, la prescription civile trentenaire de droit commun avant la réforme issue de la loi du 17 juin 2008 (loi n° 2008-561 N° Lexbase : L9102H3I) et, depuis l'entrée en vigueur de cette loi le 19 juin 2008, la prescription de cinq ans édictée par l'article 2224 de ce Code N° Lexbase : L7184IAC. En conséquence, la cour d’appel retient que l'ensemble des demandes de restitution est recevable.

Les héritiers ont donc formé un pourvoi en cassation, avec succès

Décision. La Cour de cassation censure, en effet, l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 110-4 du Code de commerce N° Lexbase : L4314IX3, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. Selon ce texte, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Or, la Cour de cassation rappelle que conformément à l'article 26, II, de la loi du 17 juin 2008, les dispositions de cette loi qui réduisent la durée de la prescription, telle celle prévue à l'article L. 110-4 du Code de commerce, passée de dix à cinq ans, s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Elle précise ensuite que l'obligation pour les héritiers de l’ancien dirigeant de rembourser à la société des sommes indûment perçues au titre des rémunérations versées aux membres de son conseil de surveillance est née à l'occasion du commerce de cette société et est ainsi soumise à la prescription prévue à l'article L. 110-4 du Code de commerce dans les conditions fixées à l'article 26, II, de la loi du 17 juin 2008. Il en résulte que les demandes de la société étaient prescrites en tant qu'elles tendaient au remboursement des sommes versées aux membres du conseil de surveillance avant le 5 juin 2003. La cour d'appel a donc violé le texte visé.

newsid:481341

Universités

[Brèves] Refus d'autoriser un étudiant en PASS à redoubler : une décision à motiver !

Réf. : CE 1°-4° ch. réunies, 27 avril 2022, n° 457838, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A62987US

Lecture: 2 min

N1374BZW

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par Yann Le Foll

Le 10 Mai 2022

► Le refus d'autoriser un étudiant en parcours accès santé spécifique (PASS) n'ayant pas été admis en deuxième année des études de santé à redoubler lors de l'année universitaire 2021-2022 doit être motivé.

Rappel. Selon l'article L. 211-2 du Code des relations entre le public et l'administration N° Lexbase : L1815KNK, « les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : [...] 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 [...] ».

Il résulte de l'article 6 bis du décret n° 2019-1125, du 4 novembre 2019 N° Lexbase : L3441LTM, dans sa rédaction issue du décret n° 2021-934, du 13 juillet 2021 N° Lexbase : L1637L7R que, pour la seule année universitaire 2020-2021, le président de l'université peut, sur proposition de la commission d'examen des situations individuelles exceptionnelles instituée dans chaque université, autoriser, à titre dérogatoire, un étudiant en parcours accès santé spécifique (PASS) n'ayant pas été admis en deuxième année des études de santé à redoubler l'année de PASS lors de l'année universitaire 2021-2022.

Décision. La décision refusant une telle autorisation doit donc être motivée en application du 7° de l'article L. 211-2 du Code des relations entre le public et l'administration (voir, pour une solution inverse s'agissant du refus d'admission d'un étudiant en master 1 ou en master 2, CE, avis, 21 janvier 2021, n° 442788 N° Lexbase : A50094DU).

newsid:481374

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