Le Quotidien du 22 février 2022

Le Quotidien

Actualité judiciaire

[A la une] La Caisse d’Épargne Île-de-France condamnée à indemniser les victimes de l’escroquerie « Vivalavi »

Réf. : CA Paris, Pôle 2, ch. 13, 16 décembre 2021, n° 21/01619 N° Lexbase : A63137N7

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N0458BZY

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par Vincent Vantighem

Le 23 Février 2022

Les plaquettes de présentation étaient en papier glacé. Dessus, des jolis bungalows, des plages de sable fin, de l’eau transparente et des poissons multicolores. Sauf que le complexe Rening Bay n’a jamais vu le jour sur l’île de Bali qui avait tant fait rêver environ deux-cents « petits » épargnants. Oubliés le restaurant, les vingt-sept villas, la salle de fitness, le bar, la piscine prévus sur huit hectares en bord de mer. Oublié surtout le taux de rentabilité de 8 à 9 % promis par Éric et Franck Girardot dans ce projet immobilier…

Les deux frères ont été respectivement condamnés à cinq ans et trente mois de prison ferme par la cour d’appel de Paris le 16 décembre dernier du chef d’exercice illégal de conseil en investissements financiers, a-t-on appris début février. L’escroquerie du nom de « Vivalavi » était simple : ils faisaient miroiter un investissement de rêve en Indonésie à des particuliers. Les derniers investisseurs alpagués venaient rémunérer les plus anciens qui avaient mordu à l’hameçon. Et ainsi de suite... Une pyramide de Ponzi à la Bernard Madoff. Sauf que le complexe n’a jamais vu le jour. Et le resort s’est effondré le jour où les épargnants ont demandé à récupérer leur argent alors que les deux frères n’avaient plus de liquidités…

L’affaire pourrait paraître « banale » si la cour d’appel n’avait pas, fait rare, décidé de condamner l’une des banques sur lesquelles le projet immobilier était adossé : la Caisse d’Épargne Île-de-France a, en effet, été reconnue coupable de blanchiment aggravé et condamnée à 700 000 euros d’amende, dont 350 000 euros assortis du sursis. Mais surtout, la cour d’appel a ordonné l’affectation des cautionnements judiciaires versés durant la procédure au paiement des condamnations civiles. Les deux frères étant insolvables, c’est donc désormais les 4,05 millions d’euros de caution laissée par la Caisse d’Épargne qui vont servir à payer les dommages et intérêts dus aux épargnants arnaqués.

Deux pourvois en cassation déposés

Car la Caisse d’Épargne était détentrice d’un des comptes du groupe « Vivalavi ». Et, selon la décision de la cour d’appel que nous avons pu consulter, elle « avait pleinement disposé de l’information, sous la forme d’un faisceau d’indices, caractérisant sa conscience de l’origine frauduleuse des fonds ». Au surplus, elle a dénoncé « son manquement à l’obligation de vigilance renforcée et au devoir de procéder à une déclaration de soupçons. » L’escroquerie avait, en effet, été révélée « tardivement », selon la cour d’appel après un signalement Tracfin.

Voilà donc une banque condamnée à rembourser des épargnants escroqués pour avoir validé un projet d’investissement fumeux. Suffisamment rare pour que la banque en question forme un pourvoi en cassation et demande un réexamen du dossier.

Mais elle n’est pas la seule… En effet, Antoine Vey qui défend cinquante et un épargnants dans le dossier a également formé un recours devant la plus haute juridiction française. Parce que dans cette affaire, tous ses clients ne sont pas logés à la même enseigne. En retenant comme période de prévention les années 2012, 2013 et 2014, la cour d’appel a ainsi exclu du dispositif de remboursement tous les épargnants qui s’étaient mobilisés auparavant. Et puis, dans le même état d’esprit, elle n’a retenu comme coupable que la Caisse d’Épargne Île-de-France, estimant que c’était la seule banque qui avait manqué à ses obligations. Les épargnants dont l’investissement a transité par un autre établissement bancaire en sont donc pour leurs frais.

Ils devront donc attendre l’examen des deux pourvois pour savoir comment toute cette histoire va se terminer. Avec sans doute une certitude : il ne faut jamais envisager de construire des châteaux. Que ce soit en Espagne ou à Bali…

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Copropriété

[Brèves] Irrecevabilité de l’action en contestation d’AG exercée par un seul co-indivisaire : régularisation automatique par l’effet rétroactif du partage !

Réf. : Cass. civ. 3, 9 février 2022, n° 20-22.159, FS-B N° Lexbase : A68127MA

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N0434BZ4

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 21 Février 2022

► Par l'effet rétroactif du partage, un co-indivisaire est censé être seul propriétaire des lots de copropriété depuis le décès de son auteur et agir seul en annulation de l'assemblée générale sans qu'il y ait lieu à régularisation de l'acte introductif d'instance.

En l’espèce, par acte du 29 août 2014, un frère et une sœur, propriétaires en indivision de lots de copropriété, avaient assigné le syndicat des copropriétaires et le syndic en annulation de l'assemblée générale des copropriétaires du 23 juin 2014. Mais la sœur avait par la suite indiqué qu'elle n'avait pas eu connaissance de cette action à laquelle elle ne souhaitait pas participer.

Or, pour rappel, le propriétaire indivis d'un lot de copropriété est irrecevable à introduire seul une action en annulation d'une assemblée générale de cette copropriété, sauf à justifier qu’il est le mandataire commun de l’ensemble des indivisaires (Cass. civ. 3, 12 mars 1997, n° 94-16.766 N° Lexbase : A9932ABH ; Cass. civ. 3, 3 février 2004, n° 02-19.084, F-D N° Lexbase : A2384DBW).

Pour déclarer le frère irrecevable en son action, la cour d’appel de Paris (CA Paris, 4, 2, 23 septembre 2020, n° 17/13718 N° Lexbase : A38503YA), avait retenu que l'acte de partage du 6 juin 2016 n'avait pas eu pour conséquence de régulariser rétroactivement la situation de ce dernier au regard de la procédure de contestation de l'assemblée générale, les dispositions spéciales de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 N° Lexbase : L4849AH3, qui imposent que l'action soit introduite par un copropriétaire dans les deux mois de la notification du procès-verbal d'assemblée générale, primant sur les dispositions générales de l'article 126 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1423H4H. Elle en avait déduit que le demandeur, qui n'avait pas régularisé sa situation dans le délai de l'article 42 précité, ne pouvait se prévaloir du bénéfice des dispositions de l'article 126 du Code de procédure civile.

Le frère avait alors formé un pourvoi en cassation, faisant valoir, sur le fondement de l’article 883 du Code civil N° Lexbase : L0023HPK (aux termes duquel « chaque cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot, ou à lui échus sur licitation, et n'avoir jamais eu la propriété des autres effets de la succession »), que l'acte de partage ayant un effet rétroactif, le co-indivisaire est réputé avoir été propriétaire depuis le décès du de cujus du bien qui lui a été attribué, et l'indivision n'avoir jamais existé.

L’argument est accueilli par la Haute juridiction, qui confirme que, par l'effet rétroactif du partage, le demandeur était censé être seul propriétaire des lots de copropriété depuis le décès de son auteur et agir seul en annulation de l'assemblée générale sans qu'il y ait lieu à régularisation de l'acte introductif d'instance.

Pour aller plus loin : cf. ÉTUDE : L’assemblée générale des copropriétaires, Les copropriétaires ayant qualité pour agir en contestation des décisions d'assemblées générales, in Droit de la copropriété (dir. P.-E. Lagraulet), Lexbase N° Lexbase : E7750ET9.

 

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Cotisations sociales

[Brèves] Rappel des conditions d’application de la déduction forfaitaire spécifique et de la méthode d’échantillonnage et extrapolation

Réf. : Cass. civ. 2, 17 février 2022, n° 20-18.104, F-B N° Lexbase : A40697NZ

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N0461BZ4

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par Laïla Bedja

Le 23 Février 2022

► Selon l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de Sécurité sociale modifié, pour les professions, prévues à l'article 5 de l'annexe IV du Code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, l'employeur peut opter pour la déduction forfaitaire spécifique, dans la limite de 7 600 euros par année civile, lorsqu'une convention ou un accord collectif du travail l'a explicitement prévu ou lorsque le comité d'entreprise ou les délégués du personnel ont donné leur accord ; l'option s'applique à l'ensemble des salariés entrant dans le champ d'application de cette déduction spécifique quel que soit le montant des frais réels engagés (second moyen) ;

Dans le cadre de la procédure contradictoire, l’employeur est associé à chacune des phases de la méthode d’échantillonnage et extrapolation et doit être informé à l’issue de l’examen exhaustif des pièces justificatives, correspondant à la troisième phase (vérification exhaustive de l’échantillon), des résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant l’échantillonnage et des régularisations envisagées et être invité à faire part de ses remarques afin que les régularisations soient, le cas échéant, rectifiées (premier moyen).

Les faits et procédure. À la suite d’un contrôle, l’URSSAF a notifié à une société un redressement portant notamment sur les frais professionnels des chauffeurs-routiers et sur le dépassement de la déduction forfaitaire spécifique. Contestant plusieurs chefs du redressement, la société saisit la juridiction de Sécurité sociale.

Sur le dépassement de la déduction forfaitaire spécifique

La cour d’appel (CA Colmar, 28 mai 2020, n° 17/04910 N° Lexbase : A51463MK) ayant validé le redressement relatif au dépassement de la limite de la déduction forfaitaire spécifique, la société a formé un pourvoi en cassation selon le moyen que « les dispositions impératives à caractère général d'une circulaire ou d'une instruction ne peuvent être opposées au contribuable si l'interprétation qu'elles prescrivent soit méconnaît le sens ou la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu'elles entendent expliciter, soit réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure ». Pour contester l’analyse de l’administration selon laquelle, lorsqu’un accord collectif prévoit l’application de la DFS, les salariés entrant dans son champ d’application ne peuvent s'y soustraire et l'employeur doit l'appliquer pour tous les salariés éligibles, quel que soit le montant des frais réels engagés, l'exposante faisait valoir que le juge n'était pas tenu par les circulaires sur lesquelles l'administration fondait son analyse et qu'en particulier celle du 19 août 2005 devait être écartée en ce qu'elle ajoutait aux dispositions réglementaires des conditions qu'elles ne prévoyaient pas.

Rejet. Énonçant la première solution précitée, la Haute juridiction rejette le moyen rappelant les dispositions relatives aux frais professionnels déductibles prévues à l’article 9 de l’arrêté du 20 décembre 2002 N° Lexbase : L0307A9A. La cour d’appel ayant constaté que la société avait opté en faveur de la déduction forfaitaire spécifique, conformément à l’accord collectif autorisant ce choix, en a exactement déduit que l’option s’appliquait obligatoirement à l’ensemble des salariés éligibles. L’URSSAF pouvait alors procéder à la réintégration dans l’assiette des cotisations de la fraction excédant le plafond de 7 600 euros par année civile et par salarié.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels, Le choix de l'employeur entre les déductions pour abattement forfaitaire et pour frais professionnels, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E3737AUX.

Sur les frais professionnels des chauffeurs-routiers et l’application de la méthode d'échantillonnage et d'extrapolation

La cour d’appel. Pour rejeter le recours de la société, l'arrêt relève que cette procédure n'excluait pas que cette phase d'analyse se déroule sur une seule journée et que dès le début de l'opération, l'URSSAF avait convenu avec la société que les ratios de réintégration obtenus sur 2013 seraient retenus pour le chiffrage 2011 et 2012 avant de transmettre le résultat à l'employeur par mail du même jour.

Cassation. Rappelant la règle précitée (seconde), la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond au visa de l’article R. 243-59-2 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L2868K94, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, applicable au litige, et de l'arrêté du 11 avril 2007 N° Lexbase : L9702HUU définissant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation pris en application de cet article. En effet, il ne ressort pas des constatations effectuées par la cour d’appel que la société avait été informée des résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant l'échantillon et des régularisations envisagées après une analyse exhaustive des pièces justificatives ni qu'elle avait été invitée à faire part de ses remarques pour la rectification éventuelle des régularisations envisagées.

Pour aller plus loin : F. Taquet, ÉTUDE : Le contentieux du recouvrement, Le contrôle par échantillonnage et extrapolation, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E55043N8.

Pour vous former : voir Le contrôle Urssaf  (6 heures ; code formation : LXBEL102) : cliquez-ici

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Droit financier

[Brèves] Modernisation du cadre applicable au financement participatif : publication des dispositions réglementaires

Réf. : Décret n° 2022-110, du 1er février 2022, modernisant le cadre applicable au financement participatif

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par Vincent Téchené

Le 21 Février 2022

► Un décret, publié au Journal officiel du 3 février 2022, procède aux modifications de la partie réglementaire du Code monétaire et financier pour rendre le droit national conforme aux dispositions du Règlement (UE) n° 2020/1503 N° Lexbase : L4871LY3 et la Directive n° 2020/1504 du 7 octobre 2020 N° Lexbase : L4870LYZ. Il complète ainsi les modifications apportées à la partie législative de ce code par l'ordonnance n° 2021-1735, du 22 décembre 2021, modernisant le cadre relatif au financement participatif N° Lexbase : Z462571T (V. Téchené, Financement participatif : modernisation du cadre juridique, Lexbase Affaires, janvier 2022, n° 700 N° Lexbase : N9909BYN).

L’une des nouveautés introduites par le Règlement est la création du statut de prestataire de services de financement participatif (PSFP). Le décret remplace donc l’actuel chapitre VII du titre IV du livre V du Code monétaire et financier, désormais dédié à ces nouveaux prestataires.

Le nouvel article R. 547-1 N° Lexbase : L1704MBQ précise les modalités d’octroi de l’agrément par l’AMF. Il prévoit notamment que cette dernière évalue la complétude du dossier dans un délai de vingt-cinq jours ouvrables à partir de la réception d'une demande d'agrément. Elle doit notifier sa décision au demandeur dans un délai de trois mois à compter de la réception du dossier complet, le silence gardé à l'expiration de ce délai valant rejet de la demande. En outre, lorsque le programme d'activité du demandeur comprend la facilitation de l'octroi de prêts, l’AMF transmet le dossier dans un délai de cinq jours ouvrés à partir de la réception du dossier complet à l’ACPR pour avis conforme.

L’article D. 547-2 N° Lexbase : L1705MBR est consacré à la demande de retrait d’agrément par le PSFP. Il est notamment prévu qu’il doit transférer les contrats existants à un autre PSFP autorisé à fournir de tels services en France, sous réserve de l'accord de ses clients et du prestataire destinataire.

Par ailleurs, le Règlement et avec lui l’ordonnance ayant restreint l'activité des IFP aux prêts à titre gratuit et au don, le décret adapte les textes à cette terminologie en remplaçant les termes « sans intérêt » par les mots « à titre gratuit », dans les articles encadrant l’activité de ces intermédiaires en financement participatif.

newsid:480406

Droit rural

[Brèves] Délai de forclusion de l’action en nullité de la vente conclue au mépris du droit de préemption du preneur : incidence de la perte de la qualité du preneur au cours du délai ?

Réf. : Cass. civ. 3, 26 janvier 2022, n° 20-22.266, F-D N° Lexbase : A87117KT

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N0409BZ8

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 21 Février 2022

► L'action en nullité d'une vente consentie au mépris de son droit de préemption est réservée au seul preneur et doit être intentée, à peine de forclusion, dans le délai de six mois à compter de la connaissance de la date de la vente ;
lorsque, dans ce délai qui n'est pas susceptible de suspension ni d’interruption, la perte de sa qualité de preneur fait obstacle à l'exercice par ce dernier, de son action en nullité, le juge doit rechercher, au regard de l’article 6 de la CESDH, si l'expiration du délai de forclusion, et l'impossibilité qui en résulte pour le titulaire du droit au bail de contester en justice, une fois recouvrée sa qualité de preneur, d’une vente précédemment intervenue en méconnaissance de son droit de préemption, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de ses biens au regard du but légitime poursuivi.

En l’espèce, l’auteur du pourvoi faisait valoir qu'en jugeant, pour refuser d'écarter la forclusion encourue, que cette sanction ne créait pas une disproportion dans la considération des intérêts en présence, quand il n'existait pas de rapport raisonnable entre le délai de six mois imparti pour agir en nullité des ventes, expiré le 29 juin 2016, et le temps qu'il avait fallu aux demandeurs pour faire définitivement reconnaître leur qualité de preneurs à la date des ventes litigieuses, ce qui n'était advenu que par l'arrêt de renvoi de la cour d'appel de Besançon du 19 décembre 2017 ayant annulé le congé délivré par le bailleur à effet du 23 avril 2012, la cour d'appel de Dijon avait violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 1 du premier protocole additionnel à la Convention (CA Dijon, 24 septembre 2020, n° 19/00552 N° Lexbase : A84383U3).

Il est intéressant de relever que l’argument est accueilli par la Haute juridiction, qui censure la décision, au visa de l’article 6 de la CESDH N° Lexbase : L7558AIR, reprochant aux juges d’appel de ne pas avoir recherché concrètement comme il le leur était demandé, s’il n’en résultait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens des demandeurs, au regard du but légitime poursuivi.

Pour aller plus loin : cf. ÉTUDE : Droit de préemption et droit de priorité du preneur à bail rural, Actions en nullité exercées par le preneur et demande de dommages et intérêts en cas d'inexécution par le bailleur de ses obligations, in Droit rural, (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E9321E94.

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Fiscalité internationale

[Brèves] Convention fiscale franco-tunisienne, notion de résident et société exonérée de ses bénéfices réalisés à l’export

Réf. : CE, 9° et 10° ch.-r., 2 février 2022, n° 443018, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A32277L4

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N0350BZY

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par Marie-Claire Sgarra

Le 21 Février 2022

► Le Conseil d’État a jugé, dans un arrêt du 2 février 2022, qu’une société tunisienne bénéficiant d’une exonération temporaire d’impôt sur les sociétés, en application de la loi tunisienne, est considérée comme résidente au sens de la convention fiscale franco-tunisienne.

Les faits :

  • une SA, dont le siège est situé à Paris, a été assujettie à des retenues à la source au titre des exercices clos en 2013 et 2014, à raison des sommes qu'elle a versées, en paiement de prestations de services, à la société I., société de droit tunisien, ayant son siège à Tunis ;
  • le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces retenues à la source ;
  • sur appel de la société, la cour administrative d'appel de Paris a prononcé la décharge des impositions litigieuses en se fondant sur les stipulations, invoquées par la société requérante, de l'article 11 de la convention fiscale conclue entre la France et la Tunisie du 28 mai 1973 ;
  •  le ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris.

Les dispositions applicables au litige

Un mécanisme d’imposition des sommes payées par des entreprises françaises à des entreprises situées à l’étranger, par le biais d’une retenue à la source, est prévu par l’article 182 B du CGI N° Lexbase : L6957LZP. Cette imposition suppose que les sommes et produits concernés soient payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des bénéficiaires qui n'ont pas en France d'installation professionnelle permanente.

Ces dispositions ne sont applicables que sous réserve et dans la limite des dispositions figurant dans les conventions fiscales internationales.

Aux termes de la convention fiscale entre la France et la Tunisie du 28 mai 1973 N° Lexbase : E1881EU9 :

  • l'expression « résident d'un État contractant » désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit État, est assujettie à l'impôt dans cet État, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue (art. 3) ;
  • les bénéfices d'une entreprise d'un État contractant ne sont imposables que dans cet État, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre État contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé ; si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre État mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable (art. 11).

Sur l’arrêt de la CAA de Paris (CAA Paris, 30 juin 2020, n° 18PA02724 N° Lexbase : A60583QG)

L’arrêt de la CAA nous apprend que la société tunisienne I. en cause bénéficiait, en application de la loi fiscale tunisienne, d’une déduction de la totalité de ses bénéfices provenant de l’exportation de l’assiette de l’IS, durant les dix années suivant la première opération d’exportation. La CAA de Paris décide que cette exonération est octroyée sur présentation d’une demande annuelle et qu’elle ne porte pas sur la totalité des bénéfices, mais seulement sur les bénéfices provenant de l’exportation.

Dans ces conditions, cette société tunisienne ne peut être regardée comme n'étant pas soumise à l'impôt sur les sociétés en Tunisie à raison de son activité, alors même qu'elle n'a pas réalisé de chiffre d'affaires sur le marché local au cours des années d'imposition en litige. La société I. est par suite résidente en Tunisie, au sens de l'article 3 de la convention fiscale entre la France et la Tunisie et les rémunérations en litige ne sont imposables qu'en Tunisie en application de l'article 11 de cette convention, dès lors qu'il est constant que cette société n'exerçait pas son activité en France par l'intermédiaire d'un établissement stable.

Solution du Conseil d’État

La qualité de résident d’un État contractant est subordonnée à la seule condition que la personne qui s’en prévaut soit assujettie à l’impôt dans cet État en raison de son domicile, de sa résidence ou d’un lien personnel analogue et non en raison de la seule existence de revenus y trouvant leur source.

En l’espèce, la société de droit tunisien I. dont le siège est situé à Tunis n’est exonérée, en tant qu’entreprise dite totalement exportatrice qu’à raison de bénéfices provenant de l’exportation mais non de ceux susceptibles de provenir d’une activité réalisée en Tunisie. Alors même que la société n’a pas réalisé de chiffre d’affaires sur le marché local pendant la période en litige, elle est soumise à l’impôt sur les sociétés en Tunisie à raison de son activité.

Par suite, pour l’application de l’article 3 de la convention fiscale entre la France et la Tunisie, la société doit être regardée comme résidente de ce dernier État.

Le pourvoi du ministre est rejeté.

 

newsid:480350

Marchés publics

[Brèves] Prise en compte de l’obligation professionnelle de confidentialité de l’AMO dans l’appréciation du risque d’atteinte imminente au secret des affaires

Réf. : CE, 2° et 7° ch.-r., 10 février 2022, n° 456503, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A09757NG

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N0468BZD

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par Yann Le Foll

Le 02 Mars 2022

► Est obligatoire, dans le cadre de la passation d’un marché public, la prise en compte de l’obligation professionnelle de confidentialité de l’assistant à maître d'ouvrage (AMO) pour apprécier un risque d’atteinte imminente au secret des affaires.

Faits. Un centre hospitalier universitaire (CHU) a confié à la société X une mission d'audit et d'assistance à maîtrise d'ouvrage pour la passation des marchés d'assurance du groupement hospitalier territorial de la Guadeloupe. Le 10 mai 2021, le CHU a, avec l'assistance de la société X, lancé une consultation ayant pour objet des services d'assurance (pôles sanitaires et médico-social) pour le centre hospitalier Sainte-Marie de Marie-Galante. 

Rappel. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2132-1 du Code de la commande publique N° Lexbase : L4115LRT : « L'acheteur ne peut communiquer les informations confidentielles dont il a eu connaissance lors de la procédure de passation, telles que celles dont la divulgation violerait le secret des affaires, ou celles dont la communication pourrait nuire à une concurrence loyale entre les opérateurs économiques, telle que la communication en cours de consultation du montant total ou du prix détaillé des offres ».

Rappel bis. La circonstance que le juge du référé précontractuel s'est fondé sur des pièces communiquées en violation du secret des affaires n'est pas de nature à entacher d'irrégularité, ni d'erreur de droit son ordonnance, dès lors que ces pièces ont pu être discutées contradictoirement par les parties (CE, 2° et 7° ch.-r., 9 juin 2021, n° 449643, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A94474UG).

Application. Le CHU de Pointe-à-Pitre / Abymes a conclu avec la société X un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage pour la passation de ses marchés d'assurance. À ce titre, il n'a pas été contesté devant le juge du fond que la société X intervient pour le compte de la personne publique et que son dirigeant et ses personnels sont tenus, dans le cadre de l'exécution de ce marché, à une obligation professionnelle de confidentialité.

Par suite, en jugeant qu'il n'y avait pas lieu de prendre en compte cette obligation de confidentialité dans l'appréciation du risque d'une atteinte imminente au secret des affaires susceptible d'être imputable au centre hospitalier, contre lequel la société requérante a engagé son action, à raison de l'intervention de la société X dans la procédure de passation du marché d'assurance auquel la requérante a candidaté, le juge des référés a commis une erreur de droit (TA Guadeloupe, 9 juin 2021, n° 2100560 N° Lexbase : A721943R). 

Décision. La société initialement candidate à l’attribution de deux lots du marché était tenue de communiquer, dans le cadre de la consultation en cause, des informations relatives au prix de son offre, lesquelles doivent être regardées, à ce stade de la procédure de passation, comme couvertes par le secret des affaires.

Si elle fait valoir qu'elle s'est expressément opposée à ce que son offre soit communiquée à un dirigeant de la société X, et à l'ensemble des préposés de cette société, dont elle a sollicité l'exclusion de l'analyse des offres, en raison de relations étroites alléguées de celui-ci avec une société concurrente, cette seule circonstance ne suffit pas, par elle-même, à caractériser un risque d'atteinte imminente au secret des affaires dès lors que la société X, ainsi que son dirigeant et ses personnels sont tenus à une obligation contractuelle de confidentialité dans le cadre de leur mission d'assistance au maître de l'ouvrage.

Pour aller plus loin : 

  • Étude : La passation du marché public, L'engagement de la procédure de passation du marché public, in Droit de la commande publique, (dir. N. Lafay, E. Grzelczyk), Lexbase N° Lexbase : E7108ZKH.

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Urbanisme - Intérêt à agir

[Brèves] Renvoi d’une QPC relative à l’article L. 600-1-1 du Code de l’urbanisme (intérêt à agir d’une association contre une autorisation d’urbanisme)

Réf. : CE, 1° et 4° ch.-r., 31 janvier 2022, n° 455122, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A97707K3

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par Yann Le Foll

Le 21 Février 2022

► Font l’objet d’un renvoi aux Sages les dispositions de l’article L. 600-1-1 du Code de l’urbanisme, lequel prévoit qu’une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu au moins un an avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire.

Contestation d'un refus de transmission d’une QPC devant le CE. Le Conseil d'État apprécie la régularité d'un refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité au regard des critères de l'article 23-5 de l'ordonnance organique n° 58-1067 du 7 novembre 1958 N° Lexbase : L0276AI3, qui prévoit un renvoi en cas de question « nouvelle ou sérieuse ». Dès lors, si le Conseil d'État estime la question sérieuse, il la renvoie au Conseil constitutionnel et annule la décision de refus de transmission.

Il estime, en l’espèce, que la question de l'atteinte que les dispositions de l'article L. 600-1-1 du Code de l'urbanisme N° Lexbase : L0038LNQ issues de la loi « ELAN » (loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique N° Lexbase : L8700LM8) aux termes duquel « une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu au moins un an avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire », portent aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au droit au recours garanti par l'article 16 de la DDHC N° Lexbase : L1363A9D, présente un caractère sérieux.

Position rapporteur public. Dans ses conclusions ayant orienté la décision du CE visant à interroger le Conseil constitutionnel, le rapporteur public Arnaud Skzryerbak avait ainsi justifié sa position : « la loi "ELAN" a exclu du prétoire des associations qui ont pu se constituer pour porter la voix de leurs membres, riverains ou autres, à un stade où le projet immobilier peut encore évoluer et où il fait parfois l’objet de discussions publiques. Il est difficile d’affirmer que ces associations auraient toutes pour unique objet l’exercice d’un recours contre le permis de construire en créant artificiellement un intérêt pour agir à des personnes qui en sont dépourvues à titre individuel ».

Pour aller plus loin : voir ÉTUDE : La limitation de l’intérêt pour agir, Le recours des associations, in Droit de l’urbanisme, (dir. A. Le Gall), Lexbase N° Lexbase : E4907E7U.

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