Le Quotidien du 6 avril 2021

Le Quotidien

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Préjudice d’anxiété : application du revirement de jurisprudence de 2019 aux salariés déboutés en application de l’ancienne jurisprudence

Réf. : Ass. plén., 2 avril 2021, n° 19-18.814, P+R (N° Lexbase : A17864NH)

Lecture: 4 min

N7077BYR

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par Laïla Bedja

Le 07 Avril 2021

► La prise en considération d’un changement de norme, tel un revirement de jurisprudence, tant qu’une décision irrévocable n’a pas mis un terme au litige, relève de l’office du juge auquel il incombe alors de réexaminer la situation à l’occasion de l’exercice d’une voie de recours ; L’exigence de sécurité juridique ne consacre au demeurant pas un droit acquis à une jurisprudence figée, et un revirement de jurisprudence, dès lors qu’il donne lieu à une motivation renforcée, satisfait à l’impératif de prévisibilité de la norme ;

Cette prise en considération de la norme nouvelle ou modifiée participe de l’effectivité de l’accès au juge et assure une égalité de traitement entre des justiciables placés dans une situation équivalente en permettant à une partie à un litige qui n’a pas été tranché par une décision irrévocable de bénéficier de ce changement ;

Partant, un moyen de cassation qui reproche à la juridiction de renvoi d’avoir statué conformément à l’arrêt de cassation l’ayant saisi est recevable lorsqu’un changement de norme est intervenu postérieurement à cet arrêt de cassation ;

En application de ce changement de position de la Cour de cassation, des salariés déboutés de leur demande en réparation de leur préjudice d’anxiété en application de l’ancienne « jurisprudence amiante » pourront se voir appliquer les effets du revirement de jurisprudence opéré le 5 avril 2019 par l’Assemblée plénière.

Les faits et procédure. Un salarié, faisant valoir qu’il avait travaillé sur différents sites où il aurait été exposé à l’amiante, a présenté une demande additionnelle en paiement de dommages-intérêt en réparation d’un préjudice d’anxiété.

Par un arrêt du 1er avril 2015, la cour d’appel de Paris (CA Paris, Pôle 6, 9ème ch., 1er avril 2015, n° 12/09368 N° Lexbase : A8712NEE) a accueilli cette demande et condamné la société à des dommages-intérêts. La Cour de cassation a cassé cette décision, faute pour la cour d’appel d’avoir recherché si les établissements dans lesquels le salarié avait été affecté figuraient sur la liste des établissements éligibles au dispositif de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, mentionnée à l’article 41 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999 (N° Lexbase : L5411AS9) (Cass. soc., 28 septembre 2016, n° 15-19.031, F-D N° Lexbase : A7312R4L).

Constatant que les conditions n’étaient pas réunies, la cour d’appel de renvoi a rejeté la demande d’indemnisation par un arrêt du 5 juillet 2018, se conformant ainsi à ce qui était la doctrine de la Cour de cassation.

Concernant une autre affaire, l’Assemblée plénière a opéré un revirement de jurisprudence, le 5 avril 2019, en reconnaissant à tout salarié justifiant d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, la possibilité d’agir contre son employeur sur le fondement du droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements figurant sur la liste mentionnée à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 précitée (Ass. plén., 5 avril 2019, n° 18-17.442 N° Lexbase : A1652Y8P, lire Ch. Willmann, Préjudice d’anxiété : un revirement attendu, beaucoup d’inconnues, La lettre juridique, avril 2019, n° 780 N° Lexbase : N8642BXD).

Le salarié se trouvant encore dans les conditions de délai pour exercer un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel de renvoi du 5 juillet 2018, celui-ci ne lui ayant pas été signifié, il a formé un nouveau pourvoi en se prévalant du revirement intervenu.

Annulation. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction annule la solution de la cour d’appel, dit qu’il y a lieu d’admettre la recevabilité d’un moyen critiquant la décision par laquelle la juridiction s’est conformée à la doctrine de l’arrêt de cassation qui l’avait saisie, lorsqu’est invoqué un changement de norme intervenu postérieurement à cet arrêt, et aussi longtemps qu’un recours est ouvert contre la décision sur renvoi.

À lire :

 

newsid:477077

Avocats/Périmètre du droit

[Brèves] Usurpation du titre d'avocat, exercice illégal de la profession et principe ne bis in idem

Réf. : Cass. crim., 2 mars 2021, n° 20-80.482, F-D (N° Lexbase : A01294KY)

Lecture: 3 min

N7064BYB

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par Marie Le Guerroué

Le 28 Avril 2021

► Des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; il appartient, par conséquent, aux juges du fond d’expliquer le caractère distinct des faits constitutifs d’usurpation du titre d'avocat de ceux qui caractérisent l'exercice illégal de la profession pour condamner un prévenu de ces chefs.

Procédure. Le procureur de la République avait fait citer le demandeur à la cassation devant le tribunal correctionnel de Béthune pour avoir exercé illégalement la profession d'avocat. L'Ordre des avocats du barreau de Béthune avait également fait citer celui-ci, devant la même juridiction, pour avoir, entre le 8 octobre 2011 et le 1er décembre 2015, usurpé le titre d'avocat et exercé illégalement cette profession en ayant assisté un justiciable à l'occasion d'un litige porté devant le conseil de prud'hommes puis devant la cour d'appel de Douai. Le tribunal correctionnel, après avoir ordonné la jonction des poursuites, avait déclaré le prévenu coupable des faits visés à la prévention, l’avait condamné à cent vingt jours-amendes à 10 euros, avait ordonné une mesure de publication et s’était prononcé sur les intérêts civils.
Appel. Pour déclarer le demandeur coupable des faits d’usurpation du titre d'avocat et d'exercice illégal de cette profession, la cour d’appel de Douai retient en substance que le prévenu s’était présenté au justiciable comme étant avocat, qu’il lui avait apporté une assistance juridique notamment en rédigeant plusieurs actes de procédure produits devant les juridictions prud'homales et lui avait adressé, pour ces prestations, une « note d’honoraires » au nom de « Maître X ».

Réponse de la Cour. La Cour rend sa décision au visa de l'article 593 du Code de procédure pénale et le principe ne bis in idem. Elle rappelle que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes. Elle relève, ensuite, que les juges ont déduit l’intention coupable de la qualité de professionnel du droit du demandeur, dès lors que celui-ci avait été avocat stagiaire du 8 avril 1998 au 30 mars 1999 et avait prétendu être enseignant en droit depuis lors. Pour la Chambre criminelle, en se prononçant ainsi, sans mieux s'expliquer sur le caractère distinct des faits constitutifs d’usurpation du titre d'avocat de ceux qui caractérisent l'exercice illégal de cette profession pour lesquels elle avait déclaré le prévenu coupable, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

Cassation. La Cour casse l’arrêt rendu par la cour d'appel de Douai, en date du 17 décembre 2019.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : La représentation en justice et défense, Les sanctions pour contravention au monopole judiciaire de l'avocatin La profession d'avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase (N° Lexbase : E36323RX).

 

newsid:477064

Contrat de travail

[Brèves] Sanction en cas d’illicéité d’une clause d’exclusivité prévue dans un contrat de travail à temps partiel

Réf. : Cass. soc., 24 mars 2021, n° 19-16.418, FS-P (N° Lexbase : A67474MT)

Lecture: 2 min

N7048BYP

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par Charlotte Moronval

Le 02 Avril 2021

► La clause par laquelle un salarié à temps partiel se voit interdire toute autre activité professionnelle, soit pour son compte, soit pour le compte d'un tiers, porte atteinte au principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et n'est dès lors valable que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise et si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché ;

Si la nullité d'une telle clause n'a pas pour effet d'entraîner la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, elle permet toutefois au salarié d'obtenir réparation du préjudice ayant résulté pour lui de cette clause illicite.

Faits et procédure. Un salarié est engagé par contrats de travail à durée déterminée successifs par une société en qualité d’agent de sécurité. Un des contrats stipulait que le salarié s’obligeait à réserver à l’entreprise l’exclusivité de ses services, l'exercice de toute autre activité professionnelle, soit pour son compte, soit pour le compte d'un tiers, lui étant formellement interdit.

Ce salarié a saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la requalification de son contrat de travail à durée déterminée à temps partiel en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et le paiement de diverses sommes à titre d’indemnités et de rappels de salaires. Débouté de ses demandes par la cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 26 janvier 2018, n° 16/18112 N° Lexbase : A8019XBM), il forme un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale rejette le pourvoi.

Ayant constaté qu'elle était saisie d'une demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet au motif que le contrat comportait une clause d'exclusivité illicite, sans que le salarié ne formule de demande de dommages-intérêts, la cour d'appel a exactement énoncé que la nullité d'une telle clause ne pouvait avoir pour effet d'entraîner la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, en sorte que la demande de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés afférente devait être rejetée.

Pour en savoir plus sur la clause d’exclusivité :

 

newsid:477048

Filiation

[Brèves] Interdiction des contacts entre la requérante et ses enfants lors d’une procédure d’adoption : violation du droit de la requérante au respect de sa vie familiale

Réf. : CEDH, 1er avril 2021, Req. 70896/17, A.I. c/ Italie (N° Lexbase : A00594NI)

Lecture: 4 min

N7073BYM

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 09 Avril 2021

► La Cour observe en particulier que la cour d’appel n’a pas tenu compte des conclusions de l’expertise qui préconisait le maintien des liens entre la requérante et les enfants et n’a pas motivé sa décision sur les raisons qui l’ont amenée à ne pas prendre en compte ces conclusions ; au vu de la gravité des intérêts en jeu, il appartenait aux autorités d’apprécier la vulnérabilité de la requérante de manière plus approfondie au cours de la procédure ;

La Cour considère que, pendant le déroulement de la procédure qui a abouti à l’interruption des contacts entre la requérante et ses enfants, les autorités n’ont pas accordé suffisamment de poids à l’importance de la vie familiale de la requérante et de ses enfants ; la procédure n’a donc pas été entourée de garanties proportionnées à la gravité de l’ingérence et des intérêts en jeu.

Faits et procédure. La requérante est une réfugiée nigériane, victime de la traite, en situation de vulnérabilité et mère de deux enfants.

Invoquant l’article 8 de la CESDH (N° Lexbase : L4798AQR) relatif au droit au respect de la vie familiale, elle se plaignait de l’empêchement automatique de son droit de visite de ses enfants, à la suite de la déclaration du tribunal considérant ceux-ci en état d’abandon et adoptables, la procédure étant toujours pendante depuis plus de trois ans.

Elle se plaignait également de la séparation de ses enfants, adoptés par des familles différentes.

La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits de l’Homme le 13 octobre 2017.

Décision. La Cour relève que les parties ne contestent pas que les décisions litigieuses s’analysent en une ingérence dans le droit au respect de la vie familiale de la requérante, prévue par la loi et poursuivant des buts légitimes.

Elle est pleinement consciente que, dans tout processus décisionnel, l’intérêt de l’enfant doit constituer la considération primordiale.

La Cour reconnaît qu’en dépit de l’absence d’indices de violence ou d’abus commis sur ses enfants, et contrairement aux conclusions de l’expertise, la requérante a été privée de tout droit de visite, alors que la procédure d’adoption est à ce jour toujours pendante.

La décision de la CEDH s'articule principalement autour des trois points suivants : 

  • contrariété à l’intérêt supérieur des enfants de la mesure de placement dans deux familles différentes

Les juridictions ont placé les enfants dans deux familles différentes, ce qui a fait obstacle au maintien des liens fraternels. Cette mesure a provoqué l’éclatement de la famille et celui de la fratrie ; elle est donc allée à l’encontre de l’intérêt supérieur des enfants.

  • manquement des autorités à leur obligation d’appréciation de la vulnérabilité de la requérante de manière plus approfondie au cours de la procédure

La requérante était victime de traite. Les autorités lui ont fourni une assistance sanitaire et une aide sociale, en revanche, les juridictions n’ont pas pris en considération la situation de vulnérabilité de la requérante pour évaluer ses capacités parentales et sa demande de maintenir des contacts avec ses enfants. Dans le cas des personnes vulnérables, les autorités doivent faire preuve d’une attention particulière et doivent leur assurer une protection accrue.

Au vu de la gravité des intérêts en jeu, il appartenait aux autorités d’apprécier la vulnérabilité de la requérante de manière plus approfondie au cours de la procédure. Il ressort par ailleurs des décisions du tribunal et de la cour d’appel que les juridictions internes ont apprécié les aptitudes parentales de la requérante sans prendre en compte son origine nigériane ni le modèle différent d’attachement entre parents et enfants qu’on peut retrouver dans la culture africaine, comme le rapport d’expertise l’avait largement mis en évidence.

Conclusion. Pendant le déroulement de la procédure qui a abouti à l’interruption des contacts entre la requérante et ses enfants, il n’a pas été accordé suffisamment de poids au fait de permettre à l’intéressée et aux enfants de connaître une vie familiale. La procédure n’a pas été entourée de garanties proportionnées à la gravité de l’ingérence et des intérêts en jeu. Il y a eu en conséquence violation de l’article 8 de la Convention.

newsid:477073

Procédure administrative

[Brèves] Référé-liberté : la suspension demandée de la mesure litigieuse doit avoir un effet utile à court terme

Réf. : CE référé, 27 mars 2021, n° 450592 (N° Lexbase : A69624MS)

Lecture: 3 min

N7044BYK

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par Yann Le Foll

Le 02 Avril 2021

► Le juge des référés ne peut ordonner à l’État une mesure réglementaire non provisoire, qui dépasse ses pouvoirs en tant que juge de l’urgence.

Recours. L’ONG Sea Shepherd a demandé au juge des référés du Conseil d'État, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3058ALT) (référé-liberté) de suspendre la pêche présentant un risque de capture accidentelle de dauphins dans le golfe de Gascogne de janvier à mars et de mi-juillet à mi-août et de renforcer les dispositifs de contrôle, afin de réduire ces captures.

Rappel. D’après des données du CNRS, le juge observe que les échouages de dauphins se sont fortement accrus depuis 2016 dans le golfe de Gascogne, et que ces échouages sont dans la plupart des cas dus à une mort dans un engin de pêche.

Sur injonction du Conseil d’État par une décision « au fond » de juillet 2020, la ministre de la Mer a étendu en novembre l’obligation pour tous les navires français de plus de 12 mètres d’utiliser des répulsifs sonores censés permettre une baisse de 21 % des captures accidentelles de cétacés. Un plan d’action a suivi cette première mesure, comprenant : la déclaration obligatoire des captures accidentelles, des programmes d’observation aérienne pour estimer l’abondance des dauphins et leur aire de distribution et un projet international avec l’Espagne et le Portugal. 

Cette année, le nombre d’échouages de dauphins a été de 657, après une moyenne de 850 les quatre dernières années.

Décision et application du principe. Si l’ONG estime que les mesures récemment mises en place sont encore insuffisantes, le juge des référés rejette aujourd’hui ses demandes.

La fermeture des zones de pêches durant quatre mois ne serait efficace que si elle était appliquée année après année, durant une longue période. Cela revient donc à demander au juge des référés d’ordonner à l’État une mesure réglementaire non provisoire, ce qui dépasse ses pouvoirs en tant que juge de l’urgence.

La demande de l’ONG d’ordonner la présence d’observateurs et de dispositifs de contrôle à distance sur les bateaux de pêche français est également une mesure non provisoire que le juge des référés ne peut satisfaire (voir, dans le même sens, la nécessité pour une association de démontrer l'existence d'un intérêt suffisant à saisir le juge des référés, TA Mayotte, 8 avril 2020, n° 2000501 N° Lexbase : A88703KQ).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le juge des référés statuant en urgenceLes limites du pouvoir du juge du référé-liberté, in Procédure administrative, (dir. C. De Bernardinis), Lexbase (N° Lexbase : E9504XZZ).

newsid:477044

Procédure civile

[Brèves] Lorsque la Cour de cassation censure l’abus de caducité de la déclaration d’appel

Réf. : Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 18-13.940, F-P (N° Lexbase : A67304M9)

Lecture: 3 min

N7006BY7

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 08 Avril 2021

 La deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt rendu le 25 mars 2021, précise que la notification de l’acte de constitution d’avocat de l’intimé à l’appelant, tend à lui rendre cette constitution opposable ; dans le cas où cette notification n’a pas été régulièrement effectuée, l’appelant pour satisfaire à l’obligation de notification de ses conclusions à l’intimé énoncée par l’article 911 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7242LEX), doit lui signifier par voie d’huissier de justice, il peut également satisfaire à cette obligation en les notifiant à l’avocat que l’intimé a constitué.

Faits et procédure. Dans cette affaire, une association a interjeté appel le 10 octobre 2016 à l’encontre d’un jugement rendu par un conseil de prud’hommes. L’intimée a fait le choix pour la défense de ses intérêts d’un avocat dépendant de la cour d’appel de Paris. Ce dernier a adressé à la cour d’appel de Colmar sa constitution par lettre recommandée avec avis de réception. L’appelante informée de la constitution de l’intimée lui a adressé, le 10 janvier 2017, ses conclusions et les a remises au greffe le même jour. Le conseiller de la mise en état a invité d’office les parties à s’expliquer sur l’irrecevabilité de la constitution de l’avocat de l’intimée, et sur l’irrecevabilité de ses conclusions en application de l’article 930-1 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0362ITL), dans sa rédaction alors applicable. La caducité de la déclaration d’appel, faute de lui avoir signifié ses conclusions d’appelante, a été soulevée par l’intimée à titre subsidiaire, dans le cas où sa constitution serait irrecevable.

Le conseiller de la mise en état a déclaré, par ordonnance rendue le 6 juillet 2017, irrecevables tant la constitution, que les conclusions de l’intimée, et constaté la caducité de la déclaration d’appel.

Le pourvoi. L’association fait grief à l’arrêt (CA Colmar, 19 janvier 2018, n° 16/04706 N° Lexbase : A9289XAB) d’avoir violé les articles 902 (N° Lexbase : L7237LER), 906 (N° Lexbase : L7238LES) et 901 (N° Lexbase : L8613LYN) du Code de procédure civile, ensemble les droits de la défense, en déclarant caduque sa déclaration d’appel.

En l’espèce, la cour d’appel, pour constater la caducité de la déclaration d’appel, a retenu, qu’après avoir interjeté appel le 10 octobre 2016, l’association avait transmis ses conclusions à la cour par voie électronique le 10 janvier 2017. Le conseiller de la mise en état relève que ces conclusions n’ont pas été signifiées avant le 10 février 2017 à l’intimée, tout en relevant que l’appelante n’a pas été destinataire d’un acte de constitution par voie électronique. En conséquence, la cour d’appel énonce que l’appelante ne pouvant justifier d’un avis par voie électronique d’une constitution de la part de l’avocat de l’intimée, ne peut prétendre que l’envoi des conclusions adressées par fax, ne pourrait suppléer le défaut de signification de ses conclusions à l’intimée.

Réponse de la Cour. Énonçant la solution précitée aux visas des articles 908 (N° Lexbase : L7239LET), 911 et 960 du Code de procédure civile, la Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel, relevant la violation des textes précités. 

Solution. La Cour suprême casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel.

 

newsid:477006

Procédure pénale

[Brèves] Pouvoir d’évocation de la chambre de l’instruction et renvoi à l’instruction : interprétation extensive de l’article 207 du Code de procédure pénale

Réf. : Cass. crim., 30 mars 2021, n° 20-84.974, F-P+I (N° Lexbase : A79514MG)

Lecture: 4 min

N7078BYS

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par Adélaïde Léon

Le 28 Avril 2021

► L’article 207, alinéa 2, du Code de procédure pénale, permet à la chambre de l’instruction dès lors qu’elle est saisie selon les modalités qu’il énumère, de renvoyer à un autre juge d’instruction que celui initialement saisi, dans le cas où, après avoir infirmé la décision contestée, la juridiction d’appel évoque partiellement et procède à tel acte qu’elle juge utile à la manifestation de la vérité.

Rappel des faits. Un individu a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire. Par la suite, le magistrat instructeur a reçu une lettre comportant cinq courriers de cinq auteurs, se disant proche d’une personne qu’ils présentaient comme le défunt fils adoptif du mis en examen. Ces courriers mettaient ce dernier en cause pour avoir commis des viols et agressions sexuelles sur son fils.

Par soit-transmis, le procureur de la République a retourné au juge d’instruction, qui les lui avait communiquées, les lettres, informant ce dernier que les faits dénoncés étaient prescrits. Le procureur demandait toutefois l’annexion au dossier de personnalité de ces pièces et de la procédure de découverte du corps du fils du mis en examen, à laquelle aucune suite n’avait été donnée.

Le procureur de la République a par la suite saisi le juge d’instruction d’une demande d’actes, portant sur l’annexion de ces pièces au dossier de personnalité, l’audition de certains proches du mis en examen et des auteurs des courriers ainsi que des membres de la famille du fils défunt.

Après rejet de ses demandes par le juge d’instruction, le procureur de la République a relevé appel de cette décision.

En cause d’appel. Après évocation partielle pour ordonner le versement à la procédure des pièces concernées, la chambre de l’instruction a désigné un autre juge et n’a pas évoqué pour les autres actes requis par le procureur de la République. La juridiction d’appel a rappelé que selon l’alinéa 2 de l’article 207 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2994IZW) la chambre de l’instruction peut renvoyer le dossier à un autre juge d’instruction afin de poursuivre l’information lorsqu’elle infirme une ordonnance en toute autre matière que la détention provisoire sans évoquer ou en évoquant partiellement.

Le mis en examen a formé un pourvoi.

Moyens du pourvoi. Il était fait grief à la chambre de l’instruction d’avoir renvoyé le dossier à un autre juge d’instruction afin de poursuivre l’information alors que lorsqu’elle infirme une ordonnance rendue par un juge d’instruction et qu’elle procède à une évocation partielle du dossier en ne procédant qu’à certains actes, elle doit renvoyer le dossier au juge d’instruction initialement saisi.

Décision. La Chambre criminelle rejette le pourvoi au visa de l’article 207, alinéa 2, du Code de procédure pénale. À cette occasion la Cour livre son interprétation de cette disposition et affirme qu’elle doit être interprétée comme autorisant, dès lors que la chambre de l’instruction est saisie selon les modalités énumérées dans ce texte, le renvoi à une autre juge d’instruction dans le cas où, après avoir infirmé la décision du magistrat instructeur initialement saisi, la juridiction d’appel évoque partiellement et procède à tel acte qu’elle juge utile à la manifestation de la vérité.

Le renvoi à un autre juge d’instruction n’est donc pas limité aux seuls cas dans lesquels la chambre de l’instruction infirme uniquement la décision du magistrat saisi initialement ou évoque en totalité et ordonne un supplément d’information, hypothèses explicitement prévues par l’article 207, alinéa 2, du Code de procédure pénale.

Pour aller plus loin :

  • v. E. Maurel, ÉTUDE : Les règles de compétence pénales, L’évocation par la cour d’appel, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E19483BR) ;
  • v. J.-B. Thierry, ÉTUDE : Les voies de recours, L’appel contre les ordonnances du juge d’instruction, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E0665ZML).

 

newsid:477078

Transport

[Brèves] Contrat de transport de marchandises : nullité de la clause d’exclusion de responsabilité du transporteur en cas de perte des colis dépassant une certaine valeur

Réf. : Cass. com., 24 mars 2021, n° 19-22.708, F-P (N° Lexbase : A67844M9)

Lecture: 3 min

N7017BYK

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par Vincent Téchené

Le 02 Avril 2021

► Est nulle une clause, insérée dans un contrat de transport de marchandises, ayant pour effet d'exclure, en toutes circonstances, la responsabilité du transporteur en cas de perte des colis dont la valeur dépasse un certain montant.

Faits et procédure. Une société ayant pour activité la révision et l'entretien de matériels aéronautiques a confié le transport de colis à un transporteur, qui, avant de les acheminer vers la destination prévue, les a conservés dans son entrepôt où ils ont été endommagés à la suite d'un incendie consécutif à une tentative de vol par effraction. Le transporteur ayant refusé d'indemniser l’expéditeur du préjudice subi, celui-ci et son assureur l'ont assigné en paiement. L’assureur a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt d’appel qui a rejeté ses demandes dirigées contre le transporteur (CA Versailles, 9 juillet 2019, n° 18/00476 N° Lexbase : A4676ZIZ).

Décision. L’assureur faisait deux griefs à l’arrêt d’appel : d’une part, d’avoir refusé de retenir la faute inexcusable du transporteur et, d’autre part, d’avoir donné effet à une clause élusive de la responsabilité du voiturier.

  • Sur la faute inexcusable

Sur ce point, la Cour de cassation rejette le moyen. Elle retient en effet que la destruction, même volontaire, par le transporteur des marchandises qui lui ont été confiées ne peut pas, par principe, être qualifiée de faute inexcusable, cette qualification dépendant des circonstances de chaque espèce. Ainsi, la cour d'appel, qui a retenu que le transporteur avait détruit les marchandises en partie calcinées par l'incendie a légalement justifié sa décision.

  • Sur la clause élusive de responsabilité

La Cour de cassation commence par rappeler que, aux termes, de l'article L. 133-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L5642AIS) « le voiturier est garant de la perte des objets à transporter, hors les cas de la force majeure. Il est garant des avaries autres que celles qui proviennent du vice propre de la chose ou de la force majeure. Toute clause contraire insérée dans toute lettre de voiture, tarif ou autre pièce quelconque, est nulle ».

En l’espèce, la clause litigieuse des conditions générales du transporteur prévoit que « si l'envoi n'est pas conforme aux restrictions indiquées au paragraphe 3-1, à savoir une valeur maximale du colis limitée à 50 000 USD, [le transporteur] ne sera responsable d'aucune perte que l'expéditeur pourrait subir en lien avec le transport quelle qu'en soit la cause ». La valeur déclarée du colis était supérieure à cette somme.

Dès lors, la Haute juridiction censure l’arrêt d’appel : en statuant comme elle l’a fait, alors qu'est nulle une telle clause ayant pour effet d'exclure, en toutes circonstances, la responsabilité du transporteur en cas de perte des colis dont la valeur dépasse un certain montant, la cour d'appel a violé l’article L. 133-1 du Code de commerce.

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