Le Quotidien du 19 février 2021

Le Quotidien

Construction

[Brèves] La vue, un trouble anormal du voisinage ?

Réf. : Cass. civ. 3, 28 janvier 2021, n° 19-24.174 F-D (N° Lexbase : A16654EE)

Lecture: 3 min

N6453BYN

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 17 Février 2021

► Nul ne doit causer un trouble anormal du voisinage ;
► ce principe général du droit s’applique à tous les troubles à conditions qu’ils soient anormaux ;
► la vue d’une toiture-terrasse peut donc caractériser un trouble anormal du voisinage.

Longtemps fondé sur les dispositions des articles 544 (N° Lexbase : L3118AB4) et 1240 (N° Lexbase : L0950KZ9) du Code civil, la formule selon laquelle « Nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage » est aujourd’hui un principe général du droit. Autrement dit, cette création prétorienne s’applique en tant que principe, sans fondement textuel particulier. Ainsi, un voisin qui s’estime victime d’un trouble anormal peut assigner le voisin, qu’il soit propriétaire ou non. C’est ainsi que la jurisprudence a pu admettre l’action du voisin contre les constructeurs d’un chantier situé sur le fonds contigu au sien (pour exemple, Cass. civ. 3, 19 mai 2016, n° 15-16.248, FS-D N° Lexbase : A0868RQ9). Mais, la plupart du temps, le voisin agira contre son voisin propriétaire.

La mise en œuvre de l’action fondée sur les troubles anormaux du voisinage est redoutable. D’abord, parce qu’il s’agit d’une responsabilité objective. La preuve de l’absence de faute du voisin est indifférente (pour exemple, Cass. civ. 3, 25 octobre 1972, n° 71-12.434, publié au bulletin N° Lexbase : A9839CIA). Ensuite parce que la notion de trouble, forcément subjective, est, pour le moins, protéiforme (bruit, odeur, poussière, construction, végétation, glissement de terrain, eaux de pluie, etc.). Enfin, parce que seule l’anormalité du trouble importe (pour exemple toujours Cass. civ. 3, 2 décembre 1982, n° 80-13.159 N° Lexbase : A7994CES), ce qui rend inopérant le respect de la règlementation applicable. Or, la qualification de ce qui est normal, ou non, est, sans jeu de mots, troublante en droit. Quel est le référentiel ? Le bon père de famille qui n’existe plus ?

En l’espèce, il s’agissait d’un trouble de vue ou, pour manier l’ironie, la revendication d’un droit de vue. Le propriétaire d’une parcelle de terre mitoyenne à une autre appartenant à une SCI a assigné son voisin en vue d’obtenir la démolition de sa toiture-terrasse sur le fondement des troubles anormaux du voisinage outre l’allocation de la somme toute ronde de 10 000 euros. Selon lui, la vue plongeante sur le fonds contigu caractérise un trouble anormal. La cour d’appel de Bastia, dans un arrêt rendu le 11 septembre 2019 (CA Bastia, 11 septembre 2019, n° 17/00995 [LXB=A0947ZNE) ordonne la démolition de la toiture-terrasse et condamne à réparation.

Le voisin forme un pourvoi en cassation. Selon lui, les juges du fond auraient dû rechercher, comme ils y étaient invités par voie de conclusions, si en raison de l’existence de panneaux brise-vue, aucune vue n’est possible depuis le toit-terrasse en direction de la parcelle voisine, ce qui serait de nature à exclure l’existence d’un préjudice.

La Haute juridiction censure. L’arrêt rapporté est ainsi l’occasion de rappeler le contrôle de motivation opéré par la Cour de cassation. Après avoir rappelé que tout jugement doit être motivé et que le défaut de réponse constitue un défaut de motifs, elle censure les juges d’appel, faute de réponse à l’ensemble des moyens avancés par voie de conclusions.

Autrement dit, si les faits sont laissés à l’appréciation souveraine des juges du fond, la Cour de cassation exerce un contrôle sur la qualification du trouble anormal (pour exemple encore, Cass. civ. 3, 6 juillet 1988, n° 86-18.626 N° Lexbase : A6228CNY).

La cour d’appel de renvoi devra donc s’interroger sur l’existence, ou non, d’une vue plongeante sur le fonds voisin. La jurisprudence retient, en effet, le caractère anormal du trouble en cas, pour un exemple similaire, de création d’une vue directe sur la propriété voisine par création d’une ouverture et d’une plate-forme située au dernier étage d’un bâtiment (CA Aix-en-Provence, 16 septembre 2011, n° 10/08533 N° Lexbase : A0963H7S).

 

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Fiscalité des particuliers

[Brèves] Déductibilité des revenus fonciers des travaux ayant conduit à la transformation d’une maison de maître en onze appartements

Réf. : CE 9° ch., 11 février 2021, n° 431595, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A82704GE)

Lecture: 2 min

N6499BYD

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par Marie-Claire Sgarra

Le 18 Février 2021

Doivent être regardés comme des travaux de reconstruction ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, ou qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros œuvre, ainsi que les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et, comme des travaux d'agrandissement, ceux qui ont pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants.

Les faits :

⇒ les requérants et leurs deux filles sont associés de la société civile immobilière qui a pour activité la location de biens immobiliers ;

⇒ la SCI a acquis un ensemble immobilier composé d'une maison de maître et d'une dépendance, auparavant loué à une association pour y accueillir des enfants ;

⇒ la société a effectué des travaux afin de réaliser onze appartements dans la maison principale et un douzième dans la dépendance ;

⇒ à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a remis en cause le caractère déductible de ces dépenses de travaux qu'elle a regardées comme des dépenses de reconstruction et d'agrandissement ;

⇒ le tribunal administratif de Pau, par trois jugements, a rejeté la demande de décharge des impositions mises à la charge des requérants ; la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel contre ces jugements (CAA Bordeaux, 12 avril 2019, n° 17BX00425 N° Lexbase : A7575Y9G).

La cour administrative d’appel :

  • après avoir relevé que la création des onze appartements dans la demeure principale, qui n'était que partiellement affectée à l'habitation, avait nécessité d'importants travaux de réaménagement interne, l'installation de cuisines et de sanitaires dans chacun d'entre eux et la réfection des réseaux d'eau, d'électricité et d'évacuation des eaux usées, a jugé que ces travaux réalisés présentaient, en raison de leur ampleur, le caractère de travaux de reconstruction et d'agrandissement ;
  • a estimé que la création des deux appartements n'était pas dissociable de la création, dans la maison principale, des neuf autres appartements, alors que techniquement et fonctionnellement, ces travaux étaient indépendants.

Solution du Conseil d’État :

✔ les travaux en litige n'ont pas affecté de manière importante le gros œuvre et ne sont pas d'une ampleur suffisante pour être qualifiés de travaux de reconstruction ;

✔ en omettant de se prononcer sur le caractère dissociable des travaux réalisés dans la dépendance alors qu'elle y était invitée, la cour a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation.

 

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Fonction publique

[Brèves] Publication de l’ordonnance relative à la négociation et aux accords collectifs dans la fonction publique

Réf. : Ordonnance n° 2021-174, du 17 février 2021, relative à la négociation et aux accords collectifs dans la fonction publique (N° Lexbase : L3419L3Z)

Lecture: 4 min

N6497BYB

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par Yann Le Foll

Le 18 Février 2021

L’ordonnance n° 2021-174 du 17 février 2021, relative à la négociation et aux accords collectifs dans la fonction publique, élaborée en application de l'article 14 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019, de transformation de la fonction publique (N° Lexbase : L5882LRB), a pour objectif de promouvoir un dialogue social de qualité et de proximité en donnant les moyens aux acteurs de terrain de trouver les solutions collectives les plus adaptées aux enjeux des territoires et des services publics.

L'article 1er de l'ordonnance remplace l'actuel article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L6938AG3), par les nouveaux articles 8 bis à 8 nonies.

Le nouvel article 8 bis réaffirme, en premier lieu, que les négociations relatives à l'évolution des rémunérations et du pouvoir d'achat des agents publics relèvent des seules organisations syndicales représentatives au seul niveau national et des autorités nationales.

L'article 8 ter fixe, en premier lieu, une première liste exhaustive sur les domaines ouverts à la négociation et auxquels s'applique le nouveau régime juridique défini par l'ordonnance.
Il prévoit, en second lieu, la possibilité pour les autorités compétentes et les organisations syndicales, de conclure des accords sur des thématiques non prévues par cette liste. Ces accords ne peuvent toutefois pas comporter des clauses ayant une portée juridique.

L'article 8 quater confirme, premièrement, la règle du caractère majoritaire d'un accord conclu. Celui-ci est réputé valide dès lors qu'il est signé par une ou par plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli, à la date de la signature de l'accord, au total au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur des organisations habilitées à négocier lors des dernières élections professionnelles organisées au niveau auquel l'accord est négocié. Il pose, deuxièmement, le principe selon lequel l'autorité compétente pour conclure et signer un accord est celle qui est compétente pour s'engager soit à prendre les mesures réglementaires que comporte le cas échéant l'accord ou pour, soit entreprendre des actions déterminées qu'il prévoit.

L'article 8 quinquies prévoit qu'à l'initiative des organisations syndicales représentatives ayant recueilli au total au moins 50 % des suffrages exprimés, l'ouverture de négociations fasse l'objet d'échanges formalisés. L'autorité compétente organise alors une réunion pour déterminer si les conditions d'ouverture d'une négociation sont réunies.

L'article 8 sexies précise les conditions et limites de la portée normative que peuvent revêtir les clauses réglementaires d'un accord. Ces clauses, qui ne sont pas soumises à la consultation préalable des organismes consultatifs, ne peuvent pas porter sur des règles que la loi a chargé un décret en Conseil d'État de fixer, ni modifier des règles fixées par un décret en Conseil d'État ou y déroger.
L'article 8 septies réaffirme les conditions du principe de faveur selon lequel un accord relatif aux conditions d'application à un niveau inférieur d'un accord ne peut que préciser cet accord ou améliorer l'économie générale dans le respect de ses stipulations essentielles.

L'article 8 octies pose les principes, d'une part, de la publication des accords, dont les conditions seront fixées par décret en Conseil d'État, et, d'autre part, de leur entrée en vigueur. Celle-ci intervient au lendemain de la publication ou à une date déterminée par l'accord lui-même. Il prévoit, en outre, une information spécifique des conseils supérieurs et des comités sociaux concernés.

L'article 3 de l’ordonnance introduit, en premier lieu, une obligation, pour les autorités administratives ou territoriales, de proposer à l'ensemble des organisations syndicales représentatives l'ouverture d'une négociation dans les conditions prévues par la présente ordonnance pour élaborer un nouveau plan d'action, six mois au plus tard avant l'expiration du plan d'action en faveur de l'égalité professionnelle entre femmes et hommes. Il modifie, en second lieu, l'article 23 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (N° Lexbase : L7448AGX), pour tenir compte de la nouvelle compétence conférée aux centres de gestion habilités, le cas échéant, à participer aux négociations et à conclure des accords.

L'article 4 prévoit les dispositions, à titre transitoire, jusqu'au prochain renouvellement général des instances de la fonction publique.

L'article 5 précise le régime applicable, qui demeure celui de l'article 8 bis actuel, aux négociations engagées avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance.

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Marchés publics

[Brèves] Prestations de gardiennage, d'accueil et de filtrage de sites militaires : exclusion du champ d’application des marchés de défense ou de sécurité

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 4 février 2021, n° 445396, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A81744EH)

Lecture: 3 min

N6439BY7

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par Yann Le Foll

Le 10 Février 2021

► Eu égard à ses caractéristiques, un marché portant sur des prestations de gardiennage, d'accueil et de filtrage de trois sites militaires à La Réunion ne constitue pas un marché de défense ou de sécurité au sens du 4° de l'article L. 1113-1 du Code de la commande publique (N° Lexbase : L4123LR7).

Faits. La direction du commissariat d'outre-mer des forces armées dans la zone sud de l'Océan indien a lancé, par un avis publié le 8 avril 2020, une procédure d'appel d'offres restreint en vue de la passation d'un marché sans allotissement, d'une durée d'un an tacitement renouvelable trois fois, pour des prestations de gardiennage, d'accueil et de filtrage de trois sites militaires à La Réunion. La société Osiris Sécurité Run (OSR) a été informée par un courrier du 4 septembre 2020 que son offre, classée troisième, avait été rejetée et que le marché avait été attribué à la société Réunion Air Sûreté. Sur demande de la société OSR, le juge des référés du tribunal administratif de la Réunion a, par une ordonnance du 2 octobre 2020 contre laquelle la ministre des Armées se pourvoit en cassation, annulé la décision du 4 septembre 2020 et la procédure de passation du marché litigieux au motif que celui-ci aurait dû faire l'objet d'un allotissement. Rappelons que cet allotissement est facultatif pour les marchés de défense et de sécurité en vertu des dispositions de l'article L. 2313-5 du Code de la commande publique (N° Lexbase : L4123LR7).

Rappel. Aux termes de l'article L. 1113-1 du Code de la commande publique : « Un marché de défense ou de sécurité est un marché conclu par l'Etat ou l'un de ses établissements publics et ayant pour objet : (...) / 4° Des (...) travaux et services destinés à la sécurité et qui font intervenir, nécessitent ou comportent des supports ou informations protégés ou classifiés dans l'intérêt de la sécurité nationale. / (...) ».

Décision. S'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que les salariés chargés de l'exécution du marché en litige auront accès au système de contrôle d'accès, détection d'intrusion, vidéosurveillance, dont les informations font l'objet d'une « diffusion restreinte », le juge des référés du tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'une telle circonstance n'impliquait pas nécessairement que les services prévus par le marché fassent intervenir des informations protégées dans l'intérêt de la sécurité nationale au sens des dispositions précitées. Il n'a pas non plus dénaturé les pièces du dossier ni les faits de l'espèce en jugeant, d'une part, qu'il ne résultait pas de l'instruction que les informations en cause seraient protégées au sens de ces mêmes dispositions et, d'autre part, que les installations contenant des informations protégées ou classifiées bénéficiaient d'une protection spécifique par des personnels militaires.

En outre, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en ne déduisant pas de son caractère de « contrat sensible », à le supposer établi, que le marché en litige constituerait un marché de défense ou de sécurité.

Le pourvoi est donc rejeté.

Pour aller plus loin : ETUDE, Les marchés publics : définitions et champ d'application, in Droit de la commande publique (dir. N. Lafay, E. Grzelczyk), Lexbase (N° Lexbase : E9090ZMM).

 

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Procédure civile

[Brèves] Mise en cause de l’assureur en appel : la liquidation judiciaire ne constitue pas une évolution du litige !

Réf. : Cass. civ. 2, 11 février 2021, n° 18-16.535, F-P+I (N° Lexbase : A45084G3)

Lecture: 4 min

N6501BYG

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 25 Février 2021

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 11 février 2021, vient d’effectuer un revirement de sa jurisprudence ; elle énonce que l’ouverture, après le jugement, d’une procédure collective n’a pas pour effet de modifier les données juridiques du litige, et ne constitue pas une évolution de ce dernier permettant, pour la première fois en cause d’appel, la mise en cause de l’assureur ; en conséquence, l’assignation en intervention forcée, faute d’évolution du litige au sens de l’article 555 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6706H7I) sera déclarée irrecevable.

Faits et procédure. Dans cette affaire, un contrat de fournitures de pièces constituant l’un des composants de boîtes automatiques destinées à équiper des véhicules automobiles a été conclu entre la société General Motors Strasbourg et la société Sidéo RDT, assurée auprès de la société Allianz. Le traitement thermique de durcissement de ces pièces a été confié par la société Sidéo RDT à la société Amyot, assurée au titre de sa responsabilité civile par la société Generali. Lors d’un contrôle interne, il a été découvert que certaines des pièces commandées n’avaient pas fait l’objet d’un traitement thermique, la société General Motors Strasbourg, aujourd’hui dénommée la société PPS, a assigné la société Sidéo RDT en paiement de dommages-intérêts et de frais financiers. Cette dernière a assigné en garantie la société Amyot. La société PPS a formé contre la société Allianz, intervenue volontairement dans la procédure, une demande de condamnation à garantir son assurée.

Par jugement rendu le 14 juin 2013, la société Amyot a été condamnée à garantir dans une certaine limite, la société Sidéo RDT et son assureur Allianz des condamnations prononcées à leur encontre au bénéfice de la société PPS. Le 6 octobre 2014, la société Amyot a été placée en redressement judiciaire, puis, le 23 septembre 2015, en liquidation judiciaire, et un liquidateur judiciaire a été désigné.

Le 25 juillet 2013, la société Allianz a interjeté appel de la décision, puis elle a assigné le 11 mai 2016, la société Generali en intervention forcée.

Le pourvoi. La société Generali fait grief à l’arrêt (CA Colmar, 14 mars 2018, n° 13/03711 N° Lexbase : A9211XGA) d’avoir violé l’article 555 du Code de procédure civile, en déclarant recevable sa mise en cause par la société Allianz. L’intéressée énonce que l’appel en garantie de l’appelante aurait pu être effectué dès la première instance, du fait que la société Allianz avait été appelée en la cause à ce stade de la procédure. En l’espèce, la cour d’appel, pour déclarer recevable la mise en cause de la société Generali par la société Allianz, retient que la première, qui n’était pas partie à l’instance, a été assignée en intervention forcée devant la cour d’appel. Les juges d’appel ont également retenu que la société Amyot avait été placée en liquidation judiciaire postérieurement au jugement frappé d’appel, ce qui constitue une évolution du litige rendant recevable la mise en cause de la société Generali afin de garantir la société Amyot des condamnations prononcées à son encontre.

Réponse de la Cour. Énonçant la solution précitée au visa de l’article 555 du Code de procédure civile, les Hauts magistrats censurent le raisonnement de la cour d’appel,  en énonçant les dispositions du texte précité, selon lesquelles « les personnes qui n’ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité peuvent être appelées devant la cour d’appel, même aux fins de condamnation, quand l’évolution du litige implique leur mise en cause ».

Solution. Après avoir donné avis aux parties, la Cour suprême statuant sur le fond dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, a déclaré irrecevable l’appel en intervention forcée à l’encontre de la société Generali, retenant qu’il n’y avait pas lieu de prononcer la mise hors de cause. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt sans renvoi, retenant que la SCP désignée en qualité de liquidateur de la société Aymot sera seule tenue de relever et garantir la société RDT et la société Allianz de l’ensemble de leurs condamnations.

Conseil pratique : nous ne pouvons que conseiller de ne pas omettre d’assigner l’assureur dès la première instance, afin de ne se pas se heurter à une irrecevabilité en appel.

 

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Procédure pénale

[Brèves] Conditions légales de la détention provisoire : où, quoi et quand contrôler ?

Réf. : Cass. crim., 9 février 20201, n° 20-86.339, FS-P+I (N° Lexbase : A21694GG)

Lecture: 5 min

N6500BYE

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par Adélaïde Léon

Le 24 Février 2021

La chambre de l’instruction doit, à chaque stade de la procédure, même d’office, s’assurer que les conditions légales de la détention provisoire sont réunies et notamment contrôler l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux faits reprochés ;

Dans ce cadre, les juges ont l’obligation de vérifier au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure au moment où ils statuent, que les pièces du dossier établissent, d’une part, l’existence d’agissements susceptibles de caractériser les infractions pour lesquelles la personne est mise en examen, selon la qualification notifiée à ce stade, et, d’autre part, la vraisemblance de leur imputabilité à celle-ci ;

Lorsqu’ils concluent souverainement à la vraisemblance de la participation de l’intéressé à la commission d’une ou de plusieurs infractions, les juges ne sont tenus que d’exposer les éléments du dossier par lesquels ils se déterminent.

Rappel de la procédure. Un individu a été mis en examen des chefs de complicité de vol en bande organisée et association de malfaiteurs et placé en détention provisoire. L’intéressé a interjeté appel de cette décision.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a confirmé l’ordonnance de placement en détention provisoire, avec placement sous mandat de dépôt, motivant sa décision par le fait qu’il existait des indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux faits reprochés. Elle estimait également que la détention provisoire constituait en l’état l’unique moyen de mettre fin à l’infraction ou de prévenir son renouvellement car le caractère lucratif du trafic auquel se serait livré l’intéressé pouvait le motiver à poursuivre cette activité illicite s’il était laissé en liberté. La juridiction précisait enfin que la détention provisoire était l’unique moyen de faire cesser le trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction laquelle, constituée par un trafic de clés « Vigik », avait favorisé la multiplication de cambriolages.

L’intéressé a formé un pourvoi contre cette décision.

Moyen du pourvoi. Le mis en examen reprochait à la chambre de l’instruction d’avoir confirmé l’ordonnance de placement en détention provisoire alors que la juridiction n’avait pas répondu à un moyen essentiel de ses écritures contestant la matérialité des faits reprochés. Il estimait que c’était à tort qu’elle avait retenu la circonstance aggravante de bande organisée, qu’elle ne s’était pas fondée, pour motiver sa décision, sur des éléments concrets établissant un risque de renouvellement de l’infraction et enfin qu’elle n’avait pas caractérisé l’existence d’un trouble exceptionnel et persistant causé par l’infraction.

Décision. La Chambre criminelle rejette le pourvoi en affinant sa jurisprudence récente s’agissant des conditions du prononcé des mesures de sûreté.

Dans la continuité de sa décision du 14 octobre 2020 (Cass. crim., 14 octobre 2020, n° 20-82.961, FS-P+B+I N° Lexbase : A50093XS), la Cour de cassation était déjà venue préciser le champ d’application et la nature du contrôle de l’existence d’indices graves ou concordants en matière de mesure de sûreté (Cass. crim., 27 janvier 2021, n° 20-85.990, FS-P+B+I N° Lexbase : A65064DC). La Chambre criminelle rappelle qu’en vertu de cette jurisprudence, la chambre de l’instruction doit, à chaque stade de la procédure, même d’office, s’assurer que les conditions légales de la détention provisoire sont réunies et notamment contrôler l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux faits reprochés.

La Haute juridiction vient une nouvelle fois spécifier la teneur du contrôle que les juges doivent opérer à cette occasion. Elle affirme qu’ils ont l’obligation de vérifier au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure au moment où ils statuent, que les pièces du dossier établissent, d’une part, l’existence d’agissements susceptibles de caractériser les infractions pour lesquelles la personne est mise en examen, selon la qualification notifiée à ce stade, et, d’autre part, la vraisemblance de leur imputabilité à celle-ci.

La Chambre criminelle précise également que, lorsque les juges concluent souverainement à la vraisemblance de la participation de l’intéressé à la commission d’une ou de plusieurs infractions, ils ne sont tenus que d’exposer les éléments du dossier par lesquels ils se déterminent.

En l’espèce, la chambre de l’instruction n’avait donc pas à suivre le mis en examen dans le détail de son argumentation relative à la pertinence d’un indice particulier ni à caractériser au-delà de sa vraisemblance la circonstance aggravante de bande organisée.

S’agissant de l’appréciation des alternatives à la détention provisoire, la Haute juridiction constate que la chambre de l’instruction s’est déterminée par des considérations de droit et de fait répondants aux exigences légales pour affirmer que cette mesure de sûreté constituait l’unique moyen de mettre fin à l’infraction ou de prévenir son renouvellement et de faire cesser le trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction.

Pour aller plus loin : N. Catelan, ÉTUDE : Les mesures de contrainte au cours de l’instruction : contrôle judiciaire, assignation à résidence et détention provisoire, La détention provisoire, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E0810Z9U).

 

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