Le Quotidien du 8 décembre 2020

Le Quotidien

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Victimes de pesticides : publication du décret organisant le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides et fixant les modalités d’instruction des demandes d’indemnisation des victimes

Réf. : Décret n° 2020-1463 du 27 novembre 2020, relatif à l'indemnisation des victimes de pesticides (N° Lexbase : L7918LYW)

Lecture: 3 min

N5507BYM

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par Laïla Bedja

Le 07 Décembre 2020

► Un décret du 27 novembre 2020, publié au Journal officiel du 29 novembre 2020, fixe les modalités d'organisation et de fonctionnement du fonds d'indemnisation des victimes de pesticides et modalités d'instruction des demandes et règles d'indemnisation des victimes, en procédant aux adaptations nécessaires au regard du droit commun de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT/MP).

L’article 70 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 (loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 N° Lexbase : L1993LUD) crée au sein de la caisse centrale de mutualité sociale agricole un fonds d'indemnisation des victimes de pesticides, afin de permettre une centralisation de l'instruction des demandes d'indemnisation.

Ses dispositions sont applicables aux demandes déposées à compter du 1er janvier 2020, ou en cours d'instruction à cette date, à l'exception de celles ayant donné lieu à une décision avant le 29 novembre 2020 (CSS, art. L. 491-1 N° Lexbase : L2718LWL).

♦ Détermination de la procédure d’instruction

Il est créé dans le Code de la Sécurité sociale, sous le Livre IV de la partie réglementaire, un Titre IX relatif à l’indemnisation des victimes de pesticides.

Le décret (art. 1) détermine la procédure d’instruction pour les personnes exposées aux pesticides du fait de leur activité professionnelle (CSS, art. R. 491-1 à R. 491-3) et celle relative aux enfants exposés durant la période prénatale du fait de l’activité professionnelle de l’un de leurs parents (CSS, art. R. 491-4 à R. 491-6).

Le décret détaille ensuite la procédure (délais, offre d’indemnisation, recours) (CSS, art. R. 491-7 à R. R. 491-19).

♦ Organisation et fonctionnement du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides

Pour ce faire, le décret (art. 2) donne compétence au directeur de la CCMSA pour déléguer tout ou partie de la gestion du fonds à une caisse de MSA, en s'appuyant sur ses services administratifs et médicaux. Il prévoit que le fonds est constitué d'un conseil de gestion, d'un comité de reconnaissance des maladies professionnelles ad hoc, chargé d'instruire les demandes des victimes professionnelles qui ne remplissent pas les conditions des tableaux de maladies professionnelles ou dont la maladie n'est pas désignée dans un tableau, et d'une commission d'indemnisation des enfants victimes d'une exposition prénatale aux pesticides, chargée d'examiner les demandes d'indemnisation pour les enfants exposés durant la période prénatale (C. rur., art. R. 723-24-7 à R. 723-24-22).

♦ Fixation des règles de calcul des prestations, en particulier s'agissant du complément d'indemnisation versé aux non-salariés agricoles

Enfin, le décret fixe les règles de calcul des prestations (C. rur., art. R. 752-87 à R. 752-91), en particulier s’agissant du complément d’indemnisation versé aux non-salarié agricoles (CSS, art. R. 761-60-2 à R. 761-60-5).

newsid:475507

Avocats/Statut social et fiscal

[Brèves] Paiement des cotisations relatives au bureau secondaire : elles sont dues même en l’absence de mention du nom de l’avocat dans la rubrique du tableau de l'Ordre

Réf. : CA Colmar, 26 octobre 2020, n° 19/02968 (N° Lexbase : A93903YG).

Lecture: 2 min

N5331BY4

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Décembre 2020

►Le bénéficie d'un cabinet secondaire n'est pas lié à la régularisation de la mention du nom de l’avocat dans la rubrique annexe correspondant au Tableau de l'Ordre ; dès lors, l’avocat est redevable du paiement de ses cotisations relatives à l'ouverture et l'existence d’un bureau secondaire même en l’absence de cette mention (CA Colmar, 26 octobre 2020, n° 19/02968 N° Lexbase : A93903YG ; compa., Cass. civ. 1, 23 mars 2004, n° 02-13.823 N° Lexbase : A6210DBM) .

Faits/procédure. Dans ce dossier, un avocat exerçait un recours devant la cour d'appel de Colmar contre la décision implicite de refus de son admission au Barreau de Strasbourg prise par le Conseil de l'Ordre. L'Ordre des Avocats du Barreau de Strasbourg affirme qu'il n'était pas possible d'inscrire au Barreau un avocat qui n'avait pas payé ses cotisations dues pour un cabinet secondaire 

Réponse de la cour d’appel. La cour note que le rapporteur de l’Ordre avait demandé à l’avocat de régler trois années de cotisations pour l'exercice de ses fonctions dans le cadre d'un bureau secondaire à Strasbourg. Elle note aussi que l’avocat a pu bénéficier d'un cabinet secondaire au sein du ressort du Barreau de Strasbourg à compter de 2016, et cet état de fait juridique n'est pas lié à la régularisation de la mention de son nom dans la rubrique annexe correspondant au tableau de l'Ordre. Elle estime qu’à ce titre, l’avocat était débiteur des frais de dossier et des cotisations dues pour cette période et ne les a pas réglés et n'a pas non plus justifié d'une assurance. L’avocat ne propose, en outre, aucun moyen sérieux de nature à étayer son argumentation selon laquelle, il ne serait pas débiteur des frais de dossier et des cotisations, alors qu'il a bénéficié de ce bureau secondaire, et qu'il devait régler les sommes afférentes à ce bureau secondaire. Le non-paiement des cotisations constitue un manquement aux règles déontologiques par le non-respect du principe de probité, tel qu'il résulte de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) et des articles 1 et 1.3 du Règlement Intérieur de la profession d'Avocat (N° Lexbase : L4063IP8).
Confirmation. Dans ces conditions, la décision implicite de rejet de l'admission de l’avocat au Barreau de Strasbourg prise par le conseil de l'Ordre entreprise était, selon la cour, justifiée et est confirmée.
 

Pour aller plus loin : V. ETUDE : L’admission au tableau de l’Ordre, Le refus d'inscrire le candidat au tableau de l'Ordre (N° Lexbase : E33673R7) et ETUDE : Les structures d’exercice, Le fonctionnement du bureau secondaire (N° Lexbase : E42023R3), in La profession d’avocat, Lexbase.

 

newsid:475331

Contrôle fiscal

[Brèves] Possibilité pour le contribuable de renverser une présomption d’activité occulte en faisant valoir qu’il a fait une erreur : cas d’un contribuable ayant satisfait à ses obligations fiscales dans un autre État

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 27 novembre 2020, n° 428898, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A214238T)

Lecture: 5 min

N5623BYW

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par Marie-Claire Sgarra

Le 09 Décembre 2020

Dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenues de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives ;

S'agissant d'un contribuable qui fait valoir qu'il a satisfait à l'ensemble de ses obligations fiscales dans un État autre que la France, la justification de l'erreur commise doit être appréciée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du niveau d'imposition dans cet autre État et des modalités d'échange d'informations entre les administrations fiscales des deux États.

Les faits. Le requérant qui exploite à titre individuel une entreprise de droit polonais exerce en France, depuis 2005, une activité dans le secteur du bâtiment. À ce titre, il a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle, à l'issue duquel l'administration fiscale a estimé qu'il exerçait une activité occulte en France. Après avoir évalué d'office ses bénéfices industriels et commerciaux au titre des années de 2005 à 2010, elle lui a réclamé des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties des pénalités, au titre des mêmes années, ainsi que, par voie de taxation d'office, un rappel de TVA. Le tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande de décharge des impositions en litige. La cour administrative d'appel de Lyon, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur d'un dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus de son appel contre ce jugement (CAA Lyon, 17 janvier 2019, n° 16LY01260 N° Lexbase : A8258YWR).

Solution du Conseil d’État. Ici, le contribuable a exercé depuis 2005 et jusqu'en 2011 une activité d'entrepreneur exclusivement en France, pour laquelle il n'a déposé aucune déclaration d'activité auprès d'un centre de formalités des entreprises ou d'un greffe de tribunal de grande instance, ni aucune déclaration en matière de bénéfices professionnels ou de taxe sur la valeur ajoutée auprès de l'administration fiscale, alors qu'il existait une importante différence de niveau d'imposition entre la France et la Pologne.

Pour juger que le requérant ne pouvait être regardé comme ayant commis une erreur en déclarant en Pologne les revenus de son activité individuelle réalisée en France, la cour administrative d'appel ne commet pas d'erreur de droit en comparant le montant d'impôt sur le revenu acquitté en Pologne par le contribuable et le montant mis à sa charge par l'administration française.

Les jurisprudences antérieures :

Le Conseil d’État a dans un arrêt du 7 décembre 2015, précisé les conditions d’application de la majoration pour activité occulte. En effet, il a ainsi jugé que le contribuable peut échapper à des pénalités lorsqu’il établit que c’est par erreur qu’il n’a pas déposé dans les délais légaux les déclarations fiscales qu’il était tenu de souscrire et n’a pas fait connaître son activité à un CFE ou au greffe du tribunal de commerce (CE Plénière, 7 décembre 2015, n° 368227, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0405NZZ).

Lire sur cet arrêt, C. Louit, Établissement stable et pénalité de 80 % pour activité occulte : une avancée de la jurisprudence du Conseil d'État, Lexbase Fiscal, janvier 2016, n° 639 (N° Lexbase : N0825BWH).

Plus tard, le Conseil d’État transposera cette jurisprudence, dans un arrêt du 21 juin 2018, en jugeant que le délai de reprise ne peut être invoqué lorsque le contribuable établit qu’il a commis une erreur justifiant que les obligations déclaratives n’ont pu être honorées (CE 10° et 9° ch.-r., 21 juin 2018, n° 411195, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8763XTQ).

Lire sur cet arrêt, É. Crépey, Précisions sur la fiscalité applicable aux gains tirés de la pratique habituelle du poker – Conclusions du Rapporteur public, Lexbase Fiscal, septembre 2018, n° 754 (N° Lexbase : N5500BXY).

Le Conseil d’État a confirmé que le contribuable peut s’opposer tant à la majoration de 80 %, qu’au délai spécial de reprise de dix ans en cas d’activité occulte, s’il établit qu’il a commis une erreur justifiant qu’il ne se soit acquitté d’aucune de ses obligations déclaratives (CE 9° et 10° ch.-r., 18 mars 2019, n° 410573, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1771Y4D).

Lire sur cet arrêt, V. Truyens, Délai de reprise spécial : appréciation du caractère occulte d’une activité, Lexbase Fiscal, avril 2019, n° 780 (N° Lexbase : N8586BXB).

Enfin, dans un arrêt du 4 décembre 2019, le Conseil d’État a admis que « le contribuable établissait que l’absence de souscription de déclaration devait être regardée comme une erreur justifiant qu’il ne se soit pas acquitté de ses obligations dès lors que ce n’est que postérieurement aux années d’imposition en litige que la jurisprudence et l’administration fiscale ont expressément estimé que de tels gains étaient, dans certaines conditions, imposables à l’impôt sur le revenu » (CE 9° et 10° ch.-r., 4 décembre 2019, n° 420488, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9649Z47).

 

newsid:475623

Covid-19

[Brèves] Précisions par décret des modalités de réunions à distance du CSE

Réf. : Décret n° 2020-1513, du 3 décembre 2020, relatif aux modalités de consultation des instances représentatives du personnel pendant la période de l'état d'urgence sanitaire (N° Lexbase : L8693LYM)

Lecture: 2 min

N5633BYB

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par Charlotte Moronval

Le 09 Décembre 2020

► Publié au Journal officiel du 4 décembre 2020, le décret n° 2020-1513 du 3 décembre 2020 précise les modalités de consultation et de tenue des réunions des instances représentatives du personnel pendant la période d'état d'urgence sanitaire.

Pour rappel, une ordonnance n° 2020-1441 du 25 novembre dernier (N° Lexbase : L7763LY8, lire N° Lexbase : N5474BYE) a été publiée pour assouplir les modalités d’organisations des réunions du CSE pendant l’état d’urgence sanitaire et autorise, notamment, la tenue des réunions par visioconférence, conférence téléphonique ou messagerie instantanée.

Ce décret vient préciser les modalités de consultation du CSE lorsque les réunions sont organisées à distance selon l’un de ces modes de communication. Il reprend ce qui avait déjà été mis en place par le décret n° 2020-419 du 10 avril 2020 (N° Lexbase : L6651LWA, lire N° Lexbase : N2996BYM), notamment que :

  • le dispositif technique mis en œuvre doit garantir l'identification de ses membres ainsi que leur participation effective en assurant la retransmission continue et simultanée du son des délibérations ;
  • le vote a lieu de manière simultanée. A cette fin, les participants disposent d’une durée identique pour voter à compter de l’ouverture des opérations de vote indiquée par le président de l’instance ;
  • le vote doit pouvoir être organisé à bulletin secret ;
  • lorsque la réunion est organisée par messagerie instantanée, les débats sont clos par un message du président de l'instance, qui ne peut intervenir avant l'heure limite fixée pour la clôture de la délibération ;
  • de même, au terme du délai fixé pour l'expression des votes, le président de l'instance en adresse les résultats à l'ensemble de ses membres.

Ces règles sont applicables jusqu’à l’expiration de la période de l’état d’urgence sanitaire.

newsid:475633

Entreprises en difficulté

[Brèves] Banqueroute : caractérisation de l’élément intentionnel pour absence de comptabilité ou tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière

Réf. : Cass. crim., 25 novembre 2020, n° 19-85.205, F-P+B+I (N° Lexbase : A552037L)

Lecture: 5 min

N5565BYR

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par Vincent Téchené

Le 16 Décembre 2020

► Il résulte des article L. 654-2, 4° et 5° du Code de commerce (N° Lexbase : L3433IC7) et 121-3 du Code pénal (N° Lexbase : L2053AMY) que la caractérisation de l’élément intentionnel des délits de banqueroute par absence de comptabilité ou tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière suppose la seule conscience de son auteur de se soustraire à ses obligations comptables légales ;

Elle n’exige pas la preuve que le prévenu a eu la volonté soit d’éviter ou de retarder la constatation de l’état de cessation des paiements, soit d’affecter la consistance de l’actif disponible dans des conditions de nature à placer l’intéressé dans l’impossibilité de faire face au passif exigible.

Faits et procédure. Le 30 décembre 2008, une SCI a acquis un terrain en vue de la réalisation d’un vaste programme immobilier, financé en totalité par un découvert en compte d’un montant de 1 400 000 euros. Le 4 juin 2012, l’un des actionnaires de la SCI, a déposé plainte contre X auprès du procureur de la République pour abus de confiance. Il a reproché aux dirigeants de la SCI, d’avoir détourné une partie de la trésorerie au profit d’un groupe, dont ils assuraient également la direction. Le 15 octobre 2013, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte au profit de la SCI, la date de cessation des paiements étant fixée au 13 septembre 2013. L’administrateur provisoire a transmis au procureur de la République le rapport d’expertise comptable établi par un cabinet, désigné par le tribunal dans le cadre de cette procédure, certaines irrégularités constatées par l’expert lui paraissant relever d’une qualification pénale. À l’issue des investigations, les dirigeants ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, en qualité de dirigeants de fait ou de droit de la SCI, des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue irrégulière de comptabilité et absence de comptabilité.

Les juges du premier degré ont alors fixé la date de cessation des paiements au 21 mai 2012 et reconnu les prévenus coupables du délit de banqueroute pour les faits commis à compter de cette date. Les prévenus ayant été relaxés par la cour d’appel, un pourvoi a été formé.

Décision. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction relève que, pour relaxer les prévenus du chef de banqueroute par tenue d’une comptabilité irrégulière et absence de comptabilité, l’arrêt a constaté la tenue irrégulière de la comptabilité de la SCI en 2011 et l’absence de comptabilité de la société en 2012 et 2013. Il énonce alors que l’absence totale de comptabilité de la société en 2012 et 2013 s’inscrit dans un contexte de conflit entre les associés qui a notamment entraîné la démission de l’expert-comptable. En outre, la cour d’appel a retenu qu’elle ne disposait d’aucun élément permettant de considérer que les irrégularités comme le défaut de comptabilité auraient eu lieu dans le but poursuivi par les prévenus de retarder la constatation de l’état de cessation des paiements ou d’affecter l’actif de la SCI dans des conditions qui allaient la mettre dans l’impossibilité de faire face au passif exigible.

Les juges du fond ajoutent que l’historique de la société, l’implication des prévenus et de leurs épouses, l’argent qu’ils ont perdu dans cette opération immobilière, leur personnalité (tous deux se présentant avec un casier judiciaire vierge en dépit d’une longue expérience d’associé ou de gérant de société), et la poursuite de l’activité de la SCI, qui a respecté le plan de redressement mis en place, sont autant d’éléments qui se heurtent à la thèse selon laquelle ils auraient eu l’intention de maintenir artificiellement l’activité de celle-ci avant la date de cessation des paiements telle que fixée par le tribunal de grande instance.

La Chambre criminelle censure donc l’arrêt d’appel sur ce point : en prononçant ainsi, la cour d’appel a violé les articles L. 654-2, 4° et 5° du Code de commerce et 121-3 du Code pénal.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation rappelle par ailleurs qu’il ne saurait être fait grief à la cour d’appel d’avoir retenu la date de cessation des paiements fixée par le jugement d’ouverture de la procédure collective. En effet si la cessation des paiements, constatée par le jugement d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, est une condition préalable nécessaire à l’exercice de poursuites des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière ou absence de comptabilité, sa date est sans incidence sur la caractérisation de ces délits, qui peuvent être retenus indifféremment pour des faits commis antérieurement ou postérieurement à la cessation des paiements.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les règles spéciales à la banqueroute, Art. L. 654-2, 5° : la tenue d'une comptabilité incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales (N° Lexbase : E9048EPS) et L'absence de comptabilité (N° Lexbase : E9051EPW), in Entreprises en difficulté, Lexbase.

 

newsid:475565

Environnement

[Brèves] Validation des dispositions environnementales et « commande publique » de la loi « ASAP »

Réf. : Cons. const., décision n° 2020-807 DC du 3 décembre 2020 (N° Lexbase : A721138L)

Lecture: 4 min

N5625BYY

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par Yann Le Foll

Le 07 Décembre 2020

► Sont conformes à la Constitution les dispositions de la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (« Asap »), spécialement celles relatives au droit de l’environnement (accélération des implantations industrielles, champ de l’enquête publique) et à la commande publique (marchés sans publicité ni mise en concurrence pour motif d'intérêt général).

- Aménagement des conditions d'application des règles et prescriptions en matière d'ICPE (article 34 de la loi déférée) : ces dispositions ne sont pas applicables lorsqu'y fait obstacle un motif tiré de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques ou du respect des engagements internationaux de la France, notamment du droit de l'Union européenne. En outre, en étendant aux projets en cours d'instruction les délais et conditions de mise en conformité accordés aux installations existantes, les dispositions contestées se bornent à reporter la mise en œuvre des règles et prescriptions protectrices de l'environnement fixées par l'arrêté ministériel et à aligner leurs modalités d'application sur celles retenues pour les installations existantes. Elles n'entraînent donc pas de régression de la protection de l'environnement.

- Autorisation de l'exécution anticipée de certains travaux de construction avant la délivrance de l'autorisation environnementale (article 56 de la loi déférée) : tout d’abord, l'autorisation préfectorale ne peut concerner que les travaux dont la réalisation ne nécessite pas l'une des décisions exigées au titre des législations spéciales couvertes par l'autorisation environnementale. En outre, cette autorisation ne peut être accordée au pétitionnaire qu'après que le préfet a eu connaissance de l'autorisation d'urbanisme. Il s'y ajoute qu'elle peut être contestée devant le juge administratif dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir ou d'un référé-suspension. Dans ces conditions, les dispositions contestées ne méconnaissent ni l'article 1er ni l'article 3 de la Charte de l'environnement (loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 N° Lexbase : O4198ARW) et ne méconnaissent pas davantage le droit à un recours juridictionnel effectif.

- Marchés sans publicité ni mise en concurrence pour motif d'intérêt général (article 131 de la loi déférée) : ces dispositions n'exonèrent pas les acheteurs publics du respect des exigences constitutionnelles d'égalité devant la commande publique et de bon usage des deniers publics rappelées à l'article L. 3 du Code de la commande publique (N° Lexbase : L4460LRM).

- Dérogation aux règles de passation et d'exécution des marchés publics et des contrats de concession afin de permettre la poursuite de ces procédures en cas de circonstances exceptionnelles (article 132 de la loi déférée) : ces circonstances ne peuvent être que celles définies comme telles par les lois sur le fondement desquelles les prérogatives précitées sont mises en œuvre et elles doivent affecter les modalités de passation ou les conditions d'exécution d'un marché public ou d'un contrat de concession.

- Conclusion d’un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables, dès lors que la valeur estimée du besoin auquel répond ce marché est inférieure à un seuil de 100 000 euros hors taxes (article 142 de la loi déférée) : le législateur a ainsi entendu faciliter la passation des seuls marchés publics de travaux, en allégeant le formalisme des procédures applicables, afin de contribuer à la reprise de l'activité dans le secteur des chantiers publics, touché par la crise économique consécutive à la crise sanitaire causée par l'épidémie de covid-19. Les Sages remarquent, pour rejeter le grief d’inconstitutionnalité, qu’en fixant au 31 décembre 2022 la fin de cette dispense, le législateur en a limité la durée à la période qu'il a estimée nécessaire à cette reprise d'activité. Par ailleurs, là aussi, cette dispense n'exonère pas les acheteurs publics du respect des exigences constitutionnelles d'égalité devant la commande publique et de bon usage des deniers publics rappelées à l'article L. 3 du Code de la commande publique.

newsid:475625

Fonction publique

[Brèves] Possibilité pour l'agent de solliciter la transformation d’un CDD en CDI en cas de durée de services publics effectifs au moins égale à six années auprès du même employeur

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 27 novembre 2020, n° 432713, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A214738Z)

Lecture: 3 min

N5540BYT

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par Yann Le Foll

Le 03 Décembre 2020

► Lorsqu'un agent estime remplir, avant l'échéance de son contrat en cours, les conditions de transformation de ce dernier en contrat à durée indéterminée, il peut, à défaut de proposition d'avenant en ce sens adressée par l'autorité d'emploi, demander à cette dernière le bénéfice de cette transformation, et ce jusqu'à deux mois après l'expiration de ce contrat (CE 3° et 8° ch.-r., 27 novembre 2020, n° 432713, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A214738Z).

Faits. Le requérant a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite du président directeur général de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) rejetant sa demande de transformation de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée présentée le 29 janvier 2015. Le tribunal administratif de Nantes a rejeté ces demandes et a vu son jugement annulé par les juges d’appel.

En cause d’appel.  Pour faire droit à la demande du requérant, la cour administrative d'appel (CAA Nantes, 27 mai 2019, n° 17NT03439 N° Lexbase : A9242ZZC) s'est bornée à juger que l'Inserm devait être regardé comme ayant été l'employeur réel de ce dernier entre le 1er septembre 2006 et le 3 septembre 2012, alors qu'il résulte de ce qui précède qu'il lui appartenait d'examiner si, le 29 janvier 2015, date à laquelle l’intéressé a demandé à l'Inserm la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée conclu avec le centre hospitalier universitaire de Nantes, d'une part, il  pouvait encore être regardé comme employé par l'Inserm par un contrat en cours ou ayant expiré depuis moins de deux mois, et, d'autre part, l'Inserm pouvait être regardé, au titre de ce contrat et de ceux l'ayant précédé, comme ayant été l'employeur réel de l’agent, sans interruption de plus de quatre mois, pendant au moins six ans. 

Décision. Enonçant le principe précité tel que résultant de l'article 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 (N° Lexbase : L7077AG9), dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 (N° Lexbase : L3774ISL), la Haute juridiction énonce que l'Inserm est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit et à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

Rappel : il a été jugé qu’un contrat d'ATER signé avec une Université ne peut être assimilé à un contrat de recherche conclu avec le CNRS dont la durée de services publics effectifs peut être prise en compte pour la transformation d'un CDD en CDI (CE 2° et 7° ch.-r., 9 octobre 2019, n° 422866, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6661ZQR).

Pour aller plus loin : L’intégration des agents contractuels, in Droit de la fonction publique (N° Lexbase : E10763LG).

 

newsid:475540

Procédure civile

[Brèves] Le caractère significatif de l’exécution reposant sur le dispositif de première instance

Réf. : Cass. civ. 2, 19 novembre 2020, n° 19-25.100, F-P+B+I (N° Lexbase : A946334A)

Lecture: 5 min

N5556BYG

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 08 Décembre 2020

► Lorsque la radiation de l’appel est prononcée faute d’exécution, tout acte d’exécution significative manifeste la volonté non équivoque de l’exécuter, ayant comme conséquence d’interrompre le délai de péremption ; pour le rétablissement de l’affaire au rôle, l’appréciation du caractère significatif de l’exécution est effectuée en prenant en considération le dispositif de la décision du premier juge.

Faits et procédure. Dans cette affaire, en 2011, un résidant monégasque qui était placé sous un régime de protection est décédé. Le 23 juin 2005, le défunt avait déposé un testament désignant en qualité de légataire universel M. X. Le tribunal de première instance de Monaco, a par ordonnance, envoyé ce dernier en possession et désigné un administrateur provisoire de la succession.

Le 16 novembre 2012, la veuve du défunt a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris, en leurs noms personnels, et en leurs qualités, l’administrateur des biens, le notaire intervenant à la succession, l'administrateur ad hoc en charge des intérêts de M.X et l’ancien curateur, ainsi que l'administrateur judiciaire des biens du défunt, devant le tribunal de grande instance de Paris, aux fins notamment de voir prononcer la nullité du testament. Un jugement retenant que le legs à des institutions de bienfaisance à Monaco ou ailleurs est caduc a été rendu. La décision énonçait que l’intégralité de la succession était transmise à la demanderesse, et enjoignait le notaire à lui communiquer l’inventaire complet et définitif de la succession ainsi que le compte définitif de gestion du patrimoine, enfin il désignait un notaire en charge de régler la succession d’un bien sis à Paris et il condamnait solidairement les défendeurs à lui verser la somme de 100 000 euros au titre du manque à gagner découlant de la perte des loyers.

Le 8 octobre 2015, deux défendeurs ont interjeté appel de la décision, et l’affaire a été radiée à la demande de l’intimée, faute d’exécution du jugement. Le 4 septembre 2018, les appelants ont effectué un virement bancaire en règlement de leur condamnation, et ils ont sollicité la réinscription au rôle de l’affaire. Un incident de péremption a été déposé par l’intimée. Le conseiller de la mise en état a constaté par ordonnance que l’affaire n’était pas périmée « et a dit n’y avoir lieu à rétablissement de l’affaire au rôle, faute d’exécution du jugement frappé d’appel respectant l’ordonnance de radiation ».

La demanderesse à l’incident a déféré l’ordonnance devant la cour d’appel.

Le pourvoi. Le demandeur fait grief à l’arrêt  (CA Paris, 11 septembre 2019, n° 18/28808 N° Lexbase : A0267ZN9) d’avoir confirmé dans un premier temps l’ordonnance déférée, et ensuite de l’avoir infirmée en ce qu’elle a constaté que l’instance d’appel n’était pas périmée. Également en ce que l’arrêt a statué à nouveau, en constatant la péremption, et énonçant qu’elle était acquise au 6 septembre 2018, et qu’en conséquence, dire que le jugement de première instance était définitif et avait force de chose jugée. Enfin, en ce que l’arrêt condamne le demandeur solidairement à verser la somme de 12 000 euros à l’intimée, au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, et à la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1253IZG).

Réponse de la Cour. Après avoir énoncé la solution précitée, aux visas des articles 386 (N° Lexbase : L2277H44), 480 (N° Lexbase : L2318LUE) et 526 (N° Lexbase : L7263LEQ) du Code de procédure civile dans leur rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 (N° Lexbase : L2696LEL). La cour de cassation a relevé, que les juges d’appel avaient retenu que le patrimoine était en possession du légataire universel, dont les droits avaient été écartés en première instance. Il appartenait donc à ce dernier ou à ses administrateurs de démontrer qu’ils ont permis à l’intimée de rentrer en possession des biens, mais aucun justificatif de diligence n’a été produit. L’arrêt relève que l’absence de diligence, tant auprès de la juridiction ayant prononcé l’envoi en possession, qu’auprès du notaire ayant établi l’acte de notoriété, démontre « le défaut de volonté réelle d’exécuter de façon effective, c’est-à-dire significative » la décision. Les Hauts magistrats énoncent que les juges d’appel ont violé les textes précités, du fait d’avoir relevé dans un premier temps que le jugement s’était borné à indiquer que l’intégralité de la succession était transmise à la demanderesse, sans impartir de diligence au défendeur, cela lui permettait d’entrer en possession des biens. Dans un second temps, ils relèvent que leur « condamnation en principal au paiement de dommages et intérêts avait été exécutée à l’exclusion des intérêts ».

Solution. Le raisonnement est censuré par la Cour suprême, qui casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel.

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Télétravail

[Focus] Les principales nouveautés de l’accord national interprofessionnel du 26 novembre 2020 relatif au télétravail

Lecture: 14 min

N5631BY9

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par Marie-Laurence Boulanger, avocat associé, et Alexandra Clerc, avocat, cabinet Fromont Briens

Le 09 Décembre 2020

Les partenaires sociaux ont finalisé, le 26 novembre dernier, un projet d’accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail très attendu. Le texte est ouvert à la signature jusqu’au 23 décembre prochain. À cette date, il devrait être signé par tous les partenaires sociaux, à l’exception de la CGT.

Ce nouveau texte, qui intervient dans un contexte exceptionnel, durant lequel le télétravail s’est, de fait, mis en place de manière massive au sein des entreprises pour faire face à la crise sanitaire, permet notamment de clarifier les règles applicables existantes et de les compléter.

S’il vient compléter le cadre juridique du télétravail, composé de l’ANI du 19 juillet 2005, relatif au télétravail et des articles L. 1222-9 (N° Lexbase : L0292LMR) à L. 1222-11 (N° Lexbase : L8103LG9) du Code du travail (modifiés par les ordonnances « Macron » en 2017), il ne créé pas de droits nouveaux.

En effet et selon les termes du texte : « les organisations signataires souhaitent, par le présent accord, expliciter l’environnement juridique applicable au télétravail et proposer aux acteurs sociaux dans l’entreprise et dans les branches professionnelles, un outil d’aide au dialogue social, et un appui à la négociation, leur permettant de favoriser une mise en œuvre réussie du télétravail ».

L’ANI constitue donc un cadre « non contraignant » pour l’organisation du télétravail et laisse une large place à la négociation et à la décision de l’employeur dans son organisation, tout en donnant un cadre clair sur les modalités de sa mise en œuvre.

En effet, « c’est au niveau de l’entreprise que les modalités de mise en œuvre du télétravail sont définies ».

Par ailleurs, il prend en compte, à la suite des récents retours d’expérience, de nouvelles thématiques telles que la nécessité de préserver le collectif de travail et de maintenir le lien social (avec notamment la prévention de l’isolement), l’adaptation des pratiques managériales au télétravail…

Il est à noter que le nombre d’accords relatifs au télétravail a doublé depuis 2017. Il est fort probable que cette forme d’organisation du travail, qui a pris un essor supplémentaire avec les périodes de confinements successifs, soit de plus en plus plébiscitée. Le cadre général ainsi posé par l’ANI du 26 novembre 2020 permettra-t-il d’encourager cette dynamique de négociation et le déploiement du télétravail à plus grande échelle ?

1. Intégration du télétravail dans l’entreprise

Fort du diagnostic sur le télétravail rendu par les partenaires sociaux en septembre dernier sur les avantages et les risques du télétravail, relevant notamment des enjeux organisationnels importants au niveau de l’entreprise, l’ANI invite, dans un premier temps, les entreprises à réfléchir à l’articulation entre le présentiel et le distanciel afin de préserver les fonctionnements collectifs et l’efficacité des organisations du travail, en particulier dans le cadre du dialogue social.

L’accord incite les entreprises à rester attentives à ce que la mise en place et le développement du télétravail ne soient pas source de difficultés entre les salariés en termes d’inégalité de traitement ou encore de perte du lien social. La cohésion sociale interne doit être préservée !

Conscient du pouvoir d’attractivité et de fidélisation du télétravail sur des salariés, l’ANI précise également que ce mode d’organisation peut figurer dans les offres d’emploi.

2. Identifier les activités éligibles au télétravail

Après avoir rappelé, d’une part :

  • la définition du télétravail à savoir « toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail aurait pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux, de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication »
  • et, d’autre part, les règles de mise en place de celui-ci :

- par un accord d’entreprise ou, à défaut, une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE s’il existe,

- en l’absence d’accord ou de charte, d’un commun accord entre les parties,

l’ANI souligne l’importance d’identifier les activités éligibles au télétravail, qui relèvent du pouvoir de direction de l’employeur, tout en précisant que la détermination des critères d’éligibilité peut utilement alimenter le dialogue social.

Ainsi, le CSE devra être consulté sur les décisions de l’employeur relatives à l’organisation du travail ayant un impact sur la marche générale de l’entreprise, « dont les conditions de mise en œuvre et le périmètre du télétravail ». Dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux ou de CSE, l’employeur est encouragé à se concerter avec les salariés, au regard d’un accord de branche s’il existe.

3. Les conditions d’accès et de sortie du télétravail

L’accord reprend les conditions d’accès au télétravail, rappelle l’existence d’une période d’adaptation ainsi que les conditions de réversibilité de ce dispositif.

3.1 Conditions d’accès au télétravail

Le télétravail revêt un caractère volontaire, que ce soit de la part du salarié comme de l’employeur, sauf en cas de circonstances exceptionnelles ou force majeure (comme l’a d’ailleurs parfaitement illustré la crise sanitaire).

En cas de refus de l’employeur d’accorder à un salarié le passage en télétravail, celui-ci devra :

  • dans l’hypothèse où le télétravail a été institué par un accord collectif ou une charte et que le salarié y est éligible, motiver sa décision ;
  • dans les autres cas, il est simplement invité à préciser les raisons de son refus.

Rappelons que, si l’employeur est à l’initiative de la demande de passage en télétravail, le refus du salarié ne constitue pas un motif de rupture du contrat de travail.

3.2 Formalisation de l’accord des parties

Le télétravail peut être prévu à l’embauche ou en cours d’exécution du contrat.

En l’absence de dispositions dans l’accord ou la charte, les parties peuvent formaliser leur accord par tout moyen. Cependant, si l’écrit n’est pas obligatoire, il reste fortement recommandé, et ce pour des raisons probatoires évidentes.

Le texte vient d’ailleurs préciser les informations devant être transmises, par écrit, au salarié, à savoir notamment les modalités d’articulation entre télétravail et présentiel, les modalités pratiques du télétravail telles que le rattachement hiérarchique, les modalités d’évaluation de la charge de travail, les règles de prise en charge des frais professionnels…

3.3 Période d’adaptation et réversibilité

À cet effet, l’ANI vient rappeler l’existence, dans le cadre du télétravail régulier, d’une période d’adaptation pendant laquelle l’employeur, comme le salarié, peuvent mettre un terme à ce dispositif en respectant un délai de prévenance (période de test qui permet à l’employeur de vérifier si le télétravail est compatible avec l’organisation du travail et les compétences techniques du salarié mais également au salarié de revenir sur son lieu de travail si le télétravail ne lui convient pas). Dans cette hypothèse, le salarié retrouve son poste dans l’entreprise.

Quant aux règles de réversibilité, les conditions de retour à une exécution de travail doivent être prévues (délai de prévenance, formalisme à adopter, énumération des situations autorisant la fin du télétravail) :

  • si le salarié est en télétravail depuis son embauche, il bénéficie d’une simple priorité « à tout emploi vacant, s’exerçant dans les locaux de l’entreprise et correspondant à sa qualification » ;
  • si le télétravail a été instauré en cours d’exécution du contrat, le salarié devra retrouver son poste au sein de l’entreprise.

Le texte précise également que l’employeur peut toujours prévoir les conditions de retour ponctuel du salarié en cas de situation ou besoin particulier.

4. L’organisation du télétravail

Au préalable, il est à noter que la « fréquence du télétravail », hors circonstances exceptionnelles, soit le nombre de jours de télétravail par semaine ou par mois, est fixée par accord entre l’employeur et le salarié. L’ANI met ainsi en exergue l’importance de trouver un équilibre entre le télétravail et le travail sur site (mesure mise en évidence par le retour d’expérience à la suite du premier confinement, où le télétravail à 100 % n’a pas toujours été bien vécu, que ce soit par l’entreprise ou par le salarié).

4.1 Le temps de travail

Rappel important : les salariés en télétravail ont les mêmes droits que les salariés en présentiel et notamment en termes de durée du travail et temps de repos, de contrôle du temps de travail et respect du droit à la déconnexion et de la vie privée.

À cet effet, l’employeur à l’obligation de s’assurer du respect par ses salariés des dispositions relatives à la durée du travail.

Focus : Les questions relatives au temps de travail, régulièrement objet de contentieux, doivent être particulièrement sécurisées.

À cet effet, il est impératif de veiller à fixer des règles précises, que ce soit en termes :

  • de plages horaires durant lesquelles le salarié en télétravail peut être contacté,
  • de décompte du temps travaillé,
  • de suivi régulier de l’activité et de la charge de travail,
  • mais également de droit à la déconnexion et au respect de la vie privée.

4.2 Les outils et équipements de travail

L’ANI précise que les outils utilisés en télétravail peuvent être ceux fournis par l’employeur comme ceux appartenant personnellement aux salariés.

Focus : l’employeur doit encadrer l’utilisation des outils numériques notamment au vu de règles du « RGPD ».

L’employeur doit notamment prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection :

  • des données personnelles du salarié en télétravail,
  • comme des données traitées par ce dernier à des fins professionnelles.

À titre d’exemple, l’entreprise peut notamment informer le salarié par le biais d’un « socle de consignes minimales à respecter » ou « d’une liste de communications et de travail collaboratif appropriés au travail à distance ».

En tout état de cause, en pratique, la mise en œuvre du télétravail doit être accompagnée de la mise à jour notamment de la charte informatique et de la charte « RGPD ».

Il est également effectué des recommandations en termes d’ergonomie du matériel de travail ou encore les règles relatives aux écrans de visualisation.

4.3 La prise en charge des frais professionnels

Sur ce point, l’accord réaffirme que le principe selon lequel les frais engagés par un salarié dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail doivent être supportés par l’employeur s’applique à l’ensemble des situations de travail et donc également au télétravail.

À cet effet, il appartient à l’employeur de prendre en charge les dépenses engagées par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle, après validation de sa part.

Il précise à ce sujet que le choix des modalités de prise en charge des frais professionnels peut être un sujet de dialogue social au sein de l’entreprise.

Enfin, le texte précise que l’allocation forfaitaire, que peut verser l’employeur pour rembourser le salarié, est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite des seuils prévus par la loi.

Focus : la question des frais est au cœur du débat. D’emblée, on peut relever que l’accord semble prévoir une nouvelle condition de prise en charge des dépenses, tenant à leur validation préalable par l’employeur, qui serait alors moins favorable que l’ancien dispositif.

Par ailleurs, aucune indication n’est donnée quant à la possibilité d’un cumul entre une allocation forfaitaire et un remboursement au réel des frais.

En effet, certaines situations de télétravail pourraient amener l’employeur à souhaiter cumuler les deux systèmes de remboursement en fonction des besoins et de l’objet du remboursement. Ce cumul est-il envisageable ? Cette question reste en suspens.

4.4 Protection de la santé et accidents du travail

Un télétravailleur demeure un salarié comme les autres. En conséquence, il bénéficie des dispositions du Code de la Sécurité sociale relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.

Comme auparavant, il y a une présomption d’imputabilité en matière d’accidents de travail et ce « malgré les difficultés de mise en œuvre pratique » que le télétravail occasionne.

Même si l’employeur ne peut avoir une maitrise complète du lieu dans lequel s’exerce le télétravail et de l’environnement (qui relève de la sphère privée), les télétravailleurs bénéficient des mêmes protections en matière de santé et sécurité que les autres salariés.

5. L’adaptation des pratiques managériales et la prévention de l’isolement

À l’heure où le télétravail a été mis en place de manière massive et dans l’urgence, il ressort une nécessité de faire évoluer les pratiques managériales. Les nouveaux enjeux liés au management à distance étaient déjà abordés dans le cadre de l’ANI du 28 février 2020, portant diverses orientations pour les cadres, en précisant que « le télétravail appelle à une forme de renouveau des pratiques managériales qui parviendrait à concilier la multiplicité des organisations de travail, la mobilisation des nouveaux outils numériques, et les bénéfices que représentent les liens humains avec le collectif de travail ».

L’importance de cette notion d’adaptation des pratiques managériales ainsi que de la prévention de l’isolement ont été exacerbées par les périodes de confinement.

Focus sur la sensibilisation des managers au télétravail ainsi que leur formation :

Dans le cadre d’une étude menée début 2020 [1], les managers interrogés confirment une hausse des difficultés ressenties lors de la mise en place du télétravail entre 2018 et 2019 (exemples : une diminution des échanges informels, des difficultés pour répartir la charge de travail, des difficultés pour détecter les collaborateurs pour lesquels le télétravail engendre une certaine souffrance ou de l’isolement, des difficultés pour maintenir le lien et la cohésion des équipes…).

Face à ses situations, il convient donc de faire évoluer la culture managériale qui ne pourra être un succès que si elle repose « sur une relation de confiance entre le responsable et le travailleur », mais également sur l’autonomie et la responsabilité nécessaires au télétravail.

Par ailleurs, une importance particulière doit être portée par le manager sur la conservation du lien social et les risques d’isolement.

« La mise en œuvre réussie du télétravail, se traduit par des règles d’organisation claires (définies principalement par les managers) afin d’assurer le bon fonctionnement de la communauté de travail et de fixer un cadre au sein duquel le collaborateur peut évoluer de la manière la plus autonome possible ».

Dans le même sens, l’accord précise les catégories de salariés nécessitant une « attention particulière », à savoir :

  • les nouveaux embauchés, pour lesquels une période de présentiel peut précéder la mise en œuvre du télétravail pour une meilleure intégration dans la collectivité de travail ;
  • les alternants, pour qui le télétravail peut nécessiter une adaptation afin de garantir l’encadrement des missions, la formation et le lien avec le tuteur ou le maître d’apprentissage ;
  • les salariés en situation de handicap et ceux présentant des problèmes de santé ou atteints d’une maladie chronique ou invalidante pour lesquels l’organisation du travail peut être adaptée, avec une attention particulière des managers ;
  • les aidants familiaux pour lesquels le télétravail peut être mobilisé, articulé avec les dispositifs ou droits spécifiques dont ils disposent au titre de leur qualité d’aidants.

6. La continuité du dialogue social de proximité en situation de télétravail

Là encore, l’accord rappelle que les salariés en télétravail ont les mêmes droits collectifs que les autres salariés et notamment s’agissant « de leurs relations avec les représentants du personnel, s’ils existent, et l’accès aux informations syndicales ».

Dans ce cadre, il est proposé, à titre d’exemple, la mise en place de « panneaux d’affichage ou de local syndical numérique ». La mise en place de ces outils numériques fait l’objet d’une forte sollicitation des organisations syndicales ces derniers mois afin notamment que l’exercice de leur mission auprès des salariés en télétravail soit préservée.

7. Le télétravail en cas de circonstances exceptionnelles

Tirant les leçons de la crise sanitaire, l’accord invite à anticiper désormais une telle situation et à prévoir les modalités de télétravail applicables en cas de circonstances exceptionnelles ou force majeure.

Ainsi, si dans l’ensemble, les règles applicables au télétravail régulier ou occasionnel ont vocation à s’appliquer en cas de circonstances exceptionnelles, l’identification des activités éligibles au télétravail ainsi que l’élaboration d’un plan de continuité et/ou de reprise d’activité peut à cet effet prévoir une mise en place plus rapide.

Dans ce cadre, et compte tenu du fait que le télétravail est rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité et garantir la protection des salariés, le principe du volontariat n’a pas à être respecté et le télétravail s’impose au salarié, après qu’il en a été informé par tout moyen (si possible par écrit).

En l’absence d’accord ou de charte, il est rappelé que le CSE doit être consulté, mais peut l’être a posteriori, dans les plus brefs délais, en raison de l’urgence.


[1] Étude télétravail, Malakoff, mars 2020 [en ligne].

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