Le Quotidien du 28 mars 2024

Le Quotidien

Droit pénal spécial

[Brèves] Revirement de jurisprudence en matière d’abus de confiance sur un immeuble

Réf. : Cass. crim., 12 mars 2024, n° 22-83.689, FS-B N° Lexbase : A05102UG

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N8881BZX

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par Florian Engel, Docteur en droit privé et sciences criminelles

Le 17 Avril 2024

► La Cour de cassation, opérant un revirement de jurisprudence, considère que l’expression « biens quelconques » utilisée par l’article 314-1 du Code pénal, peut concerner un bien immeuble remis à titre précaire. Le détournement de l’immeuble par la volonté de l’auteur de se comporter comme le propriétaire constitue donc l’élément matériel de l’abus de confiance.

Rappel des faits et de la procédure. C’est à l’occasion d’une tentaculaire affaire de prise illégale d’intérêt, abus de confiance, trafics d’influence, de blanchiment, favoritisme, abus de bien sociaux, faux et usage de faux, que la Cour de cassation fut saisie de multiples pourvois tendant à contester l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui avait condamné les différents prévenus, ainsi que deux arrêts de la chambre de l’instruction de la même cour d’appel. En l’espèce, le procureur avait requis l’ouverture d’une information judiciaire confiée à la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Marseille, en raison de différents faits liés à la gestion et le traitement des déchets dans les Bouches-du-Rhône. Cette instruction préparatoire avait permis de mettre en relief différentes infractions et à la mise en examen de plusieurs individus, dont le président du Conseil général et son frère. L’avocat de ce dernier avait présenté devant la chambre de l’instruction diverses requêtes en nullité.

Moyens soulevés. Parmi les moyens soulevés, un en particulier a attiré l’attention de la Cour de cassation. Il s’agissait d’un moyen soulevé par plusieurs prévenus, dont le frère du président du Conseil général, qui critiquaient l’arrêt de la cour d’appel qui les avait déclarés coupables d’abus de confiance et de complicité de cette infraction en raison du détournement d’un bien immobilier. Ils faisaient valoir qu’en application de la jurisprudence constante de la Cour de cassation en la matière, l’abus de confiance ne peut porter sur un bien immobilier. Ils considéraient ainsi qu’un revirement de jurisprudence in defavorem ne pouvait rétroagir à des faits commis antérieurement, de telle sorte qu’on ne pourrait de toute façon lui reprocher cette infraction pour des faits commis entre 2007 et 2010. Ils avançaient également qu’il n’existait en l’espèce aucun détournement et que l’infraction reprochée n’avait pas été réalisée au préjudice d’autrui.

Décision. Rappelant sa jurisprudence classique en la matière, la Cour reconnaît toutefois qu’un nouvel examen de la question s’impose, du fait de l’existence de controverses doctrinales sur la question. Dans une solution très pédagogique, la Cour explique que sa jurisprudence, qui a déjà évolué en matière d’escroquerie, mérite d’évoluer également en matière d’abus de confiance. Elle affirme que l’acte de détournement peut résulter de l’utilisation d’un bien à des fins étrangères à celles convenues, dès lors qu’il est constaté que son possesseur avait la volonté de se comporter comme véritable propriétaire du bien. Elle constate qu’en l’espèce tel était le cas, les prévenus s’étant comportés comme les propriétaires de certaines parcelles et infrastructures alors que la société qu’ils représentaient n’était qu’un prestataire qui bénéficiait du droit d’exploiter les terrains. Tout en censurant la cour d’appel qui avait affirmé que le préjudice n’était pas un élément constitutif du délit d’abus de confiance, la Cour considère qu’il existe bien un tel préjudice en l’espèce, qui se déduit du détournement et qui ne peut être qu’éventuel.

Enfin, s’agissant du revirement de jurisprudence, la Cour affirme que le principe de prévisibilité n’est pas méconnu, dès lors que les prévenus étaient en mesure de « s’entourer de conseils appropriés » et que la Cour avait déjà initié un élargissement de la conception d’objets détournés dans des arrêts antérieurs.

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Avocats/Discipline

[Brèves] Suspension provisoire des fonctions d'avocat : la décision est exécutoire nonobstant appel

Réf. : Cass. civ. 1, 20 mars 2024, n° 23-22.150, F-D N° Lexbase : A81062W7

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N8912BZ4

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par Marie Le Guerroué

Le 28 Mars 2024

► Si l’article 16, dernier alinéa, du décret n°91-1197, du 27 novembre 1991, relatif aux barreaux prévoit que le délai d'appel suspend l'exécution de la décision du conseil de l'Ordre et que l'appel exercé dans ce délai est également suspensif, seul est applicable à la suspension provisoire d'un avocat l’article 199, alinéa 1er, du décret du 27 novembre 1991 énonçant spécifiquement que la décision suspendant provisoirement de ses fonctions l'avocat qui fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire est exécutoire nonobstant appel.

Faits et procédure. Un avocat associé avait été mis en examen des chefs d'abus de confiance commis au préjudice d'une personne vulnérable, de blanchiment aggravé et d'escroquerie et placé sous contrôle judiciaire. Par une délibération du 24 février 2023, confirmée par un arrêt du 28 mars suivant, le conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, saisi par le juge d'instruction, avait ordonné la suspension provisoire de l'avocat pour une durée de six mois. Par une délibération du 21 août 2023, le conseil de l'Ordre avait rejeté la demande de renouvellement de la mesure formée par le juge d'instruction et le procureur général avait formé un recours. L’avocat fait grief à l'arrêt rendu le 20 octobre 2023 par la cour d'appel de Basse-Terre (CA Basse-Terre, 20 octobre 2023, n° 23/00892 N° Lexbase : A50891RW) d'ordonner le renouvellement de la suspension provisoire de ses fonctions d'avocat pour une durée de six mois à compter de l'expiration de la première suspension.

Réponse de la Cour

  • Sur la qualité de partie du conseil de l’Ordre

L'arrêt énonçait que le conseil de l'Ordre avait été invité à comparaître et qu'il avait qualité de partie intéressée en application de l'article 16, alinéa 3, dès lors que la procédure n'était pas disciplinaire. La Haute juridiction rend sa décision au visa des articles 16, alinéa 3, 197 et 198, du décret n° 91-1197 ,du 27 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID. Elle déduit de la combinaison de ces textes que le conseil de l'Ordre, qui, à l'occasion d'une poursuite pénale ou disciplinaire, a suspendu provisoirement un avocat de ses fonctions en application de l'article 24 de la loi n° 71-1130, du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ n'est pas partie à l'instance. Elle conclut donc que la cour d'appel a violé les textes susvisés.

  • Sur la prise d’effet de la suspension provisoire

La Cour de cassation rend sa décision au visa des articles 16, dernier alinéa, et 199, alinéa 1er, du décret du 27 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID. Elle en déduit que si le premier de ces textes, relatif aux barreaux, prévoit que le délai d'appel suspend l'exécution de la décision du conseil de l'Ordre et que l'appel exercé dans ce délai est également suspensif, seul est applicable à la suspension provisoire d'un avocat le second énonçant spécifiquement que la décision suspendant provisoirement de ses fonctions l'avocat qui fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire, est exécutoire nonobstant appel. Pour ordonner le renouvellement de la suspension provisoire pour une durée de six mois à compter de l'expiration de la première suspension, l'arrêt retient qu'aux termes de l'article 16, alinéa 6, du décret du 7 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID, le délai d'appel suspend l'exécution de la décision du conseil de l'Ordre, de même que l'appel exercé dans ce délai, si bien que la mesure de suspension prise pour une durée de six mois suivant la délibération du conseil de l'Ordre du 24 février 2023 n'a pu prendre effet, compte tenu de l'appel interjeté par l’avocat, que le 25 avril 2023, date de la notification de l'arrêt confirmatif du 28 mars 2023, et n'est donc toujours pas expirée au jour de l'examen de l'affaire. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes précités, le premier par fausse application et le second par refus d'application.

Cassation. La Cour casse et annule par conséquent l'arrêt rendu le 20 octobre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre.


 

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Collectivités territoriales

[Brèves] Publication de la loi renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus

Réf. : Loi n° 2024-247, du 21 mars 2024, renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux N° Lexbase : L8964MLL

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par Yann Le Foll

Le 27 Mars 2024

► La loi n° 2024-247, du 21 mars 2024, renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux, publiée au Journal officiel du 22 mars 2024, vise notamment à accroître les sanctions encourues par les auteurs de faits de violences commis à leur encontre.

La protection contre les violences. Pour mieux protéger les élus en cas de violences commises à leur encontre (titre Ier), celles-ci, lorsqu’elles ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours, sont punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende (dans la limite de six ans à compter de l'expiration du mandat). Toute destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à l’un de ces élus en cette qualité est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende.

Les paroles, gestes ou menaces dont ils font l’objet constituent un outrage puni de 7 500 euros d'amende et d'une peine de travail d'intérêt général. Le fait de les harceler par des propos ou comportements répétés est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ont entraîné aucune incapacité de travail.

Le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à leur vie privée, familiale ou professionnelle pendant la durée de la campagne électorale, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

La prise en charge des élus victimes. La loi a aussi pour objectif d’améliorer la prise en charge des élus victimes de violences, d’agressions ou d’injures dans le cadre de leur mandat ou d’une campagne électorale (titre II). Ainsi, la commune accorde sa protection (fonctionnelle) au maire, aux élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation, ou à l'un de ces élus ayant cessé ses fonctions, lorsqu'ils sont victimes de violences, de menaces ou d'outrages à l'occasion ou du fait de leurs fonctions. Elle répare, le cas échéant, l'intégralité du préjudice qui en a résulté.

Toutefois, le conseil municipal peut retirer ou abroger la décision de protection accordée à l'élu par une délibération motivée prise dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle l'élu bénéficie de la protection de la commune (sur le modèle du retrait d’une décision individuelle explicite créatrice de droits illégale, CE, ass., 26 octobre 2001, n° 197018 N° Lexbase : A1913AX7).

Cette protection implique notamment la prise en charge par la commune de tout ou partie du reste à charge ou des dépassements d'honoraires résultant des dépenses liées aux soins médicaux et à l'assistance psychologique engagées par les bénéficiaires de cette protection.

Chaque candidat bénéficie, pendant les six mois précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'au tour de l'élection auquel il participe, de cette protection assurée par l'État. Celui-ci assure notamment la protection de l'intégrité physique du candidat.

Le rôle des acteurs judiciaires et étatiques. Le texte vise enfin à renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par les acteurs judiciaires et étatiques (titre III). Lorsque le procureur de la République est saisi de faits mettant en cause, comme auteur dans l'exercice de son mandat, un maire ou un adjoint au maire, peut, d'office, sur proposition du procureur de la République et à la demande de l'intéressé, transmettre la procédure au procureur de la République auprès du tribunal judiciaire le plus proche du ressort de la cour d'appel.

Dorénavant, le maire est systématiquement (et non plus à sa demande) informé par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés.

Il est aussi systématiquement (et non plus à sa demande) informé, dans un délai d'un mois, par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent des infractions signalées par lui.

Des conventions prévoyant un protocole d'information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l'encontre des élus peuvent être signées entre les associations représentatives des élus locaux, le représentant de l'État dans le département et le procureur de la République.

Signalons enfin que le procureur de la République du ressort de la cour d'appel compétent sur le territoire de la commune peut diffuser dans un espace réservé toute communication en lien avec les affaires de la commune, lorsque celle-ci compte plus de 1 000 habitants.

À ce sujet : lire le numéro spécial La protection du mandat des élus locaux avec le cabinet Seban Avocats, Lexbase Public, décembre 2023, n° 729 N° Lexbase : N7744BZT.

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Construction

[Brèves] Revirement sur la décennale appliquée aux éléments d’équipements sur existants

Réf. : Cass. civ. 3, 21 mars 2024, n° 22-18.694 FS-B+R N° Lexbase : A24682WC

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N8919BZD

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 27 Mars 2024

► Revirement de jurisprudence : si les éléments d’équipement installés en remplacement ou pas adjonction sur un ouvrage existant ne sont pas eux-mêmes un ouvrage, ils relèvent de la responsabilité contractuelle de droit commun.

À force de persévérance, chacun peut soulever une montagne, proverbe chinois.

Multipliant les occasions de saisir la Haute juridiction de cette question, les détracteurs de la jurisprudence constante depuis 2017 sur ce que certains ont appelé les quasi-ouvrages, ont fini par être entendus. INRI ?

1. Rappel de la jurisprudence antérieure sur les éléments d’équipement sur existant

Depuis l’arrêt cité dans la décision rapportée rendue le 15 juin 2017 (Cass. civ. 3, 15 juin 2017, n° 16-19.640, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6831WHH), la troisième chambre civile de la Cour de cassation a opéré, ce que beaucoup qualifient, de revirement de jurisprudence. Ce n’est pourtant pas complètement le cas. Auparavant, pour que la responsabilité décennale s’applique, il fallait que les travaux sur existant fussent, eux-mêmes, qualifiés d’ouvrage. La jurisprudence se fondait sur plusieurs critères, tels que l’ampleur des travaux (pour exemple, le cas d’une rénovation lourde, Cass. civ. 3, 29 janvier 2003, n° 01-13.034, FS-P+B N° Lexbase : A8328A49), l’immobilisation dans un ouvrage existant (pour exemple, le cas d’un silo intégré au bâtiment par soudure, Cass. civ. 3, 8 juin 1994, n° 92-12.655, inédit au bulletin N° Lexbase : A7265CPR) ou encore le critère de reprise d’une partie d’ouvrage assurant une fonction de clos et de couvert (pour exemple, le cas d’une reprise de toiture, Cass. civ. 3, 8 octobre 2014, n° 13-21.807, FS-D N° Lexbase : A2128MYH). Mais, dans certaines situations, les juges appliquaient la responsabilité décennale à des désordres aux éléments d’équipement, même dissociables (CA Montpellier, 9 mars 1999, n° 95/0007479 N° Lexbase : A6955XCL) lorsqu’ils rendaient l’ouvrage lui-même impropre à sa destination (par exemple pour des canalisations, Cass. civ. 3, 3 décembre 2002, Constr. Urb. 2002, p.125, ou du chauffage Cass. civ. 3, 10 mars 1981, n° 80-10.069 N° Lexbase : A8898CGN, JCP 1981, IV, 190, ou encore une climatisation Cass. civ. 3, 20 novembre 1984, JCP 1985, IV, 42). L’élément déterminant était, l’affectation de la solidité ou, le plus souvent, l’impropriété à la destination de l’ouvrage lui-même, le caractère dissociable ou non de l’élément d’équipement étant indifférent (Cass. civ. 3, 23 janvier 1991, n° 88-20.221 N° Lexbase : A2626ABU).

Les arrêts rendus par la Haute juridiction depuis juin 2017 ne faisaient que stigmatiser ces solutions, par le truchement d’un attendu de principe selon lequel les désordres affectant les éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (Cass. civ. 3, 15 juin 2017, n° 16-19.640, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6831WHH ; Cass. civ. 3, 14 septembre 2017, n° 16-17.323, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6554WR8 ; Cass. civ. 3, 26 octobre 2017, n° 16-18.120, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A8797WWQ ; Cass. civ. 3, 14 décembre 2017, n° 16-10.820, FS-D N° Lexbase : A1265W8D et Civ.3ème 25 janvier 2018, n° 16-10.050, F-D N° Lexbase : A8526XBE). La Cour de cassation a tenu à en faire état dans le Bulletin d’information du 1er décembre 2017 : « désormais, tous les dommages, de la gravité requise par l’article 1792 du code civil, relèvent de la responsabilité décennale, qu’ils affectent des éléments d’équipement dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, dès lors qu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ». La souplesse du critère de l’impropriété à destination autorise, une nouvelle fois, l’extension du champ d’application de la responsabilité décennale.

Dans le prolongement, l’assurance RCD devait être souscrite (Cass. civ. 3, 26 octobre 2017, préc.).

Ce principe ne s’applique que pour les éléments d’équipement qui fonctionnent. Ce régime extensif ne s’applique, toutefois, que si l’élément d’équipement à vocation à fonctionner. Les désordres, quelle que soit leur gravité, affectant un élément d’équipement non destiné à fonctionner, relèvent exclusivement de la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur (Cass. civ. 3, 13 février 2020, n° 19-10.249, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A75253EG).

2. Revirement de jurisprudence

La Haute juridiction se justifie de ce qu’elle appelle un revirement.

Ces jurisprudences avaient, en premier lieu, un objectif de simplification en ne distinguant plus selon l’élément d’équipement d’origine ou seulement adjoint à l’existant, lorsque les dommages l’affectant rendaient l’ouvrage en lui-même impropre à sa destination.

Elles visaient aussi, en second lieu, à assurer une meilleure protection des maîtres d’ouvrage, qui réalisent de plus en plus de travaux de rénovation ou de réhabilitation.

Mais ces objectifs n’ont pas été atteints.

Elle décide donc d’y renoncer. Désormais, si les éléments d’équipements installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement et ce quel que soit le critère de gravité des désordres. Seule la responsabilité contractuelle de droit commun à vocation à s’appliquer.

Le principe est applicable aux instances en cours.

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Fiscalité internationale

[Brèves] Approbation de la convention fiscale entre la France et la Moldavie

Réf. : Loi n° 2024-246, du 21 mars 2024, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Moldavie pour l'élimination de la double imposition en matière d'impôts sur le revenu et pour la prévention de l'évasion et de la fraude fiscales N° Lexbase : L8965MLM

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N8834BZ9

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par Marie-Claire Sgarra

Le 27 Mars 2024

La loi n° 2024-246, publiée au Journal officiel du 22 mars 2024, autorise l’approbation de la nouvelle convention fiscale entre la France et la Moldavie.

Pour rappel, une nouvelle convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Moldavie pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et pour la prévention de l’évasion et la fraude fiscales, a été signée le 15 juin 2022 à Chisinau.

Consulter le texte de la convention [en ligne].

newsid:488834

Syndicats

[Brèves] Délégué syndical dans une entreprise de moins de cinquante salariés : peut-il être également représentant syndical au CSE ?

Réf. : Cass. soc., 20 mars 2024, n° 23-18.331, F-B N° Lexbase : A20502WT

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N8907BZW

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par Lisa Poinsot

Le 28 Mars 2024

Dans les entreprises dont l’effectif est inférieur à cinquante salariés, un délégué syndical ne peut pas être investi du mandat de représentant syndical au comité social et économique, qu'il soit ou non membre élu de ce même comité.

Faits et procédure. Un syndicat désigne une salariée en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au CSE d’une entreprise employant moins de cinquante salariés.

L’employeur saisit le tribunal judiciaire aux fins d’annuler uniquement la désignation du représentant syndical au CSE.

Le tribunal judiciaire constate, tout d’abord, que l’association emploie moins de cinquante salariés.

Le tribunal rappelle, ensuite, que le cumul entre les mandats de délégué syndical et de représentant syndical au CSE dans les entreprises de moins de cinquante salariés est exclu. Dès lors, une salariée ne peut siéger simultanément dans le même CSE en qualité à la fois de membre élu, titulaire ou suppléant, et de représentant syndical auprès de celui-ci. Selon le tribunal, cette incompatibilité résulte de l’impossibilité d’exercer, en même temps, les fonctions délibératives qui sont celles d’élu et les fonctions consultatives liées au mandat de représentant syndical, lorsqu’elle est désignée par une organisation syndicale.

Enfin, le tribunal affirme que la salariée n’a pas de voix délibérative au CSE et ne risque donc pas un cumul incompatible en qualité de représentant syndical avec voix consultative.

En conséquence, le tribunal judiciaire rejette la demande en annulation de la désignation du représentant syndical au CSE.

L’employeur forme alors un pourvoi en cassation.

Rappel. Les syndicats désignent les salariés en qualité de représentants. Au contrairement, les membres du CSE sont élus par le personnel de l’entreprise et ne sont pas nécessairement soutenus par un syndicat. Les règles sont dès lors les suivantes :

  • les syndicats représentatifs désignent au sein de l’entreprise un ou plusieurs délégués syndicaux habilités à engager des négociations collectives ;
  • les syndicats non représentatifs au sein de l’entreprise nomment un représentant de section syndicale ;
  • les syndicats peuvent désigner des représentants syndicaux au CSE, distincts des membres élus au CSE.

Si l’entreprise compte au moins trois cents salariés, chaque organisation syndicale représentative au sein de l’entreprise peut désigner un représentant syndical au CSE. Il ne peut pas s’agir d’un membre élu du CSE. La désignation du représentant syndical au CSE est distincte de celle de délégué syndical.

Si l’entreprise comprend un effectif entre cinquante et deux cent quatre-vingt-dix-neuf salariés, le délégué syndical est d’office le représentant syndical au CSE dès lors qu’il n’est pas élu au CSE.

Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation vient apporter une précision pour la première fois quant à la désignation du représentant syndical au CSE dans les entreprises de moins de cinquante salariés au visa des articles L. 2314-2 N° Lexbase : L8508LG9, L. 2143-3 N° Lexbase : L1436LKE, L. 2143-6 N° Lexbase : L8708LGM et L. 2143-22 N° Lexbase : L8651LGI du Code du travail.

La Haute juridiction précise que la désignation dérogatoire d'un membre de l'institution représentative du personnel prévue dans les entreprises de moins de cinquante salariés comme délégué syndical résultant d’une disposition conventionnelle, sans crédit d'heures de délégation supplémentaire, n'a pas pour conséquence de rendre applicable la possibilité de désigner un représentant syndical auprès du CSE des entreprises de moins de cinquante salariés.

Pour aller plus loin :

  • v. fiche pratique, FP174, Désigner un délégué syndical, Droit social – RH N° Lexbase : X2794CQK ;
  • v. formulaire, MDS0127, Lettre de désignation d’un délégué syndical dans une entreprise de 50 salariés, Droit social N° Lexbase : X3299AKE ;
  • v. ÉTUDE : Le délégué syndical, Les rôles respectifs des délégués syndicaux au comité social et économique, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E1884ETX ;
  • v. ÉTUDE : La délégation du personnel au comité social et économique, Les représentants syndicaux au comité social et économique, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0183ZR9.

 

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Transport

[Brèves] Remboursement des passagers aériens en cas d’annulation d’un vol : précisions sur la notion d’« accord signé du passager »

Réf. : CJUE, 21 mars 2024, aff. C-76/23 N° Lexbase : A28712WA

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N8873BZN

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par Vincent Téchené

Le 27 Mars 2024

► Le passager aérien est réputé avoir accepté le remboursement du billet sous la forme d’un bon de voyage lorsque, tout en remplissant un formulaire sur le site internet du transporteur aérien, il a renoncé au remboursement du billet sous la forme d’une somme d’argent. Néanmoins, il incombe au transporteur aérien de faire en sorte que le passager soit placé dans la situation où il est clairement informé des modalités de remboursement.

Faits et procédure. Un passager aérien a réservé un vol au départ de Fortaleza (Brésil) à destination de Francfort-sur-le-Main avec une correspondance prévue à Lisbonne et assurée par la compagnie TAP Air Portugal (TAP). Ce vol avec correspondance a été annulé.

Pour obtenir le remboursement du vol annulé, TAP offre une alternative aux passagers : (i) soit un remboursement immédiat sous forme d’un bon de voyage en remplissant un formulaire en ligne, (ii) soit un remboursement sous une autre forme, par exemple, une somme d’argent, à condition de prendre préalablement contact avec son service clientèle, afin que celui-ci procède à un examen des faits.

Le passager a demandé à être remboursé par un bon de voyage, qu’il a aussitôt obtenu par courrier électronique. Deux mois plus tard, il a cédé ses droits à Cobult, qui a demandé à TAP de procéder au remboursement sous la forme d’une somme d’argent correspondant au prix du vol annulé dans un délai de quatorze jours.

TAP ayant refusé de procéder à ce remboursement, Cobult a saisi les juridictions allemandes. Le tribunal régional de Francfort-sur-le-Main s’interroge sur l’interprétation du Règlement sur les droits des passagers aériens (Règlement (CE) n° 261/2004, du 11 février 2004 N° Lexbase : L0330DYU) et, plus précisément, sur la notion d’« accord signé du passager », qui est nécessaire pour pouvoir recourir au remboursement sous la forme d’un bon de voyage.

Décision. La Cour de justice de l'Union européenne confirme que le passager est réputé avoir donné son « accord signé » lorsqu’il a rempli un formulaire en ligne sur le site internet du transporteur aérien par lequel il a opté pour cette forme de remboursement, à l’exclusion d’un remboursement sous forme d’une somme d’argent. À cette fin, il est nécessaire que le passager soit en mesure d’effectuer un choix efficace et informé. Il doit donc pouvoir consentir de manière éclairée au remboursement de son billet sous la forme d’un bon de voyage plutôt que sous la forme d’une somme d’argent. Cela suppose que le transporteur aérien ait fourni, de manière loyale, une information claire et complète quant aux différentes modalités de remboursement qui s’offraient au passager.

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