Le Quotidien du 13 octobre 2023

Le Quotidien

Peines

[Le point sur...] Salah Abdeslam : peut-il échapper à l’exécution de sa peine en France ?

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par Julien d’Andurain et Jean-Marc Delas, avocats au Barreau de Paris

Le 18 Octobre 2023

Mots-clés : transfèrement international • perpétuité réelle • période de sûreté • non-rétroactivité

Salah Abdeslam a obtenu du juge des référés belge la suspension de son transfert vers la France, où il devait exécuter la peine de réclusion à perpétuité réelle à laquelle il a été condamné pour sa participation aux attentats du 13 novembre 2015. Peut-il espérer une confirmation par le juge du fond belge, et donc l’exécution en Belgique d’une peine soumise au droit belge ? C’est-à-dire avec la possibilité de solliciter un aménagement dans des conditions plus souples qu’en France.

Note liminaire. Les auteurs de cet article ont assisté plusieurs victimes des attentats du 13 novembre 2015, ainsi que l’association LIFE FOR PARIS lors du procès qui s’est tenu devant la cour d’assises spéciale de Paris de septembre 2021 à juin 2022.


 

Le 3 octobre 2023, la cour d’appel de Bruxelles, statuant en référé, a fait interdiction à l’État belge de transférer Salah Abdeslam à l’État français.

Par arrêt de la Cour d’assises de Paris spécialement composée du 29 juin 2022, Salah Abdeslam a été condamné à la réclusion dite à « perpétuité réelle », c’est-à-dire avec une durée illimitée de la période au cours de laquelle aucun aménagement de peine ne peut être sollicité, appelée période de sûreté.

Il a par la suite été remis à la Belgique, le temps d’être jugé pour sa participation aux attentats commis à Bruxelles le 22 mars 2016.

Reconnu coupable par la Cour d’assises de Bruxelles d’assassinats dans un contexte terroriste (arrêt du 25 juillet 2023), il a été dispensé de peine (arrêt du 15 septembre 2023).

Salah Abdeslam n’a contesté aucune de ses deux condamnations, lesquelles sont définitives.

Il doit désormais être transféré en France pour y exécuter sa peine française.

Mais il a saisi le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles d’une demande tendant à ce que son transfert en France soit interdit.

Cela notamment au motif que les conditions dans lesquelles il y serait susceptible d’obtenir le relèvement de la période de sûreté, et donc ensuite éventuellement un aménagement de peine, seraient trop restrictives et par là contraires aux dispositions de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH) N° Lexbase : L4764AQI, aux termes duquel « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».

Il a formulé la même demande en référé, afin que son transfert soit suspendu le temps que sa demande au fond soit jugée.

Débouté en première instance de sa demande en référé [1], il a obtenu gain de cause en appel par cet arrêt du 3 octobre 2023.

Il ne s’agit pas pour Salah Abdeslam d’obtenir des conditions plus souples de relèvement de sa période de sûreté française, plutôt d’exécuter en Belgique une peine belge, ce qui serait à son avantage (I.).

Mais la Cour d’appel de Bruxelles, statuant en référé, s’est trompée dans son analyse, la disposition française dont elle envisage qu’elle puisse être contraire à la CESDH n’étant applicable qu’aux faits commis à compter du 5 juin 2016 (II.).

I. De l’intérêt pour Salah Abdeslam d’exécuter sa peine en Belgique

Il existe plusieurs textes de droit international permettant à des personnes condamnées dans un État de solliciter d’exécuter leur peine dans un autre État [2].

Mais l’État d’« émission » de la condamnation, la France au cas d’espèce, dispose toujours d’une capacité à s’opposer à cette demande.

Il est intéressant de noter qu’il existe en droit belge une disposition permettant à un ressortissant ou un résident belge, dont la remise est sollicitée par un autre État membre de l’Union européenne pour y être jugé, de demander que son transfert soit effectué sous condition que la peine qui serait prononcée soit exécutée en Belgique [3].

Plusieurs des personnes condamnées pour leur participation aux attentats du 13 novembre 2015 ont sollicité et obtenu le bénéfice de cette disposition avant d’être jugées en France, et exécuteront donc en Belgique leur condamnation française.

Salah Abdeslam n’est pas ressortissant belge, mais il était résident belge lorsque la France a demandé sa remise en mars 2016, et pouvait donc solliciter que son transfert soit conditionné à l’exécution de sa peine en Belgique.

Il ne l’a pas fait à l’époque, mais entend tout de même aujourd’hui exécuter sa peine en Belgique.

Dans une telle hypothèse, lorsqu’une personne condamnée obtient d’exécuter sa peine dans un autre État que celui où elle a été jugée, le principe est que la condamnation est régie par le droit de l’État d’exécution et doit, le cas échéant, être adaptée.

C’est-à-dire que si la peine prononcée dans l’État d’émission est supérieure au maximum légal encouru pour des infractions de même nature dans l’État d’exécution, elle est réduite pour correspondre à ce dernier [4].

En Belgique, l’auteur d’un meurtre commis dans le cadre d’une entreprise terroriste encourait comme en France, au moment des attentats du 13 novembre 2015, la réclusion à perpétuité [5].

Cependant :

  • jusqu’à une loi du 21 décembre 2017 [6], le droit belge ne connaissait pas véritablement la notion de période de sûreté. Il était seulement prévu, s’agissant d’une personne non-récidiviste condamnée à une peine privative de liberté à perpétuité, tel Salah Abdeslam, qu’une libération conditionnelle pouvait être sollicitée après avoir subi dix ans de la peine prononcée ;
  • depuis, une période de sûreté peut être prononcée pour une durée de quinze à vingt-cinq années [7].

Or, il existe en droit pénal un principe de non-rétroactivité de la loi [8], c’est-à-dire que la norme applicable est celle en vigueur au moment des faits, sauf si elle devient plus « douce » par la suite.

Principe dont le Conseil d’État belge a considéré qu’il s’appliquait à la période de sûreté [9].

Dans l’hypothèse où Salah Abdeslam obtiendrait d’exécuter sa peine en Belgique, ce principe de non-rétroactivité de la loi pénale pourrait conduire à ce qu’il exécute sa peine au regard des dispositions antérieures à celles de la loi du 21 décembre 2017.

Détenu depuis 2016, il pourrait donc y solliciter une libération conditionnelle à partir de 2026.

S’il devait en revanche être retenu, comme c’est le cas en France [10], que l’adaptation de la peine doit se faire en tenant compte de la loi en vigueur dans l’État d’exécution au moment du transfert et non pas des faits, alors il pourrait solliciter sa libération après quinze ans de réclusion, soit à partir de 2031.

II. De l’impossibilité d’interdire un transfert vers la France

En France, l’article 720-4 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L5647DYS prévoit qu’une personne condamnée à la réclusion à perpétuité « réelle » peut demander à être relevée de la période de sûreté dont sa peine a été assortie, et ensuite solliciter un aménagement de peine.

Ce relèvement peut intervenir dès lors que le condamné a subi une incarcération au moins égale à trente ans et après une expertise réalisée par un collège de trois experts médicaux qui se prononcent sur l’état de dangerosité du condamné.

L’article 720-5 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L4877K87, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 [11] entrée en vigueur le 5 juin 2016, a rendu plus restrictives les conditions d’un tel relèvement en matière de terrorisme.

En effet, en sus des conditions précitées de droit commun, le relèvement de la période de sûreté ne peut alors intervenir que :

  • lorsque le condamné manifeste des gages sérieux de réadaptation sociale ;
  • lorsque la réduction de la période de sûreté n'est pas susceptible de causer un trouble grave à l'ordre public ;
  • après avoir recueilli l'avis des victimes ayant la qualité de parties civiles lors de la décision de condamnation.

C’est au regard de cet article 720-5 du Code de procédure pénale que la Cour d’appel de Bruxelles a pris sa décision :

« si de jure l’article 720-5 du Code de procédure pénale offre une possibilité de réduction de la peine de sûreté, il est permis de s’interroger, prima facie, sur la possibilité de réexamen de facto, et partant sur l’effectivité du mécanisme et l’existence d’une perspective réelle d’être un jour libéré, dès lors que sont requis (i) l’avis des parties civiles et (ii) l’absence de trouble grave à l’ordre public, conditions que la Cour EDH n’a pas examinées dans l’arrêt Bodein » (§ 21 de l’arrêt du 3 octobre 2023).

Cependant, le droit français tient compte, comme le droit belge, du principe de non-rétroactivité de la loi pénale [12].

Les règles relatives à l’exécution et à l’application des peines n’y dérogent pas « lorsqu'elles auraient pour résultat de rendre plus sévères les peines prononcées par la décision de condamnation […] » [13].

Et le Conseil constitutionnel a déjà eu l’occasion de juger que tel était le cas de dispositions restreignant les conditions d’un relèvement de la période de sûreté [14].

Les nouvelles dispositions de l’article 720-5 du Code de procédure pénale ne sont donc applicables qu’aux faits commis à compter de leur entrée en vigueur le 5 juin 2016.

La peine de Salah Abdeslam est en revanche régie par les dispositions de l’article 720-4 du Code de procédure pénale [15].

Or, ainsi que le rappelle la Cour d’appel de Bruxelles, statuant en référé, dans son arrêt du 3 octobre 2023, la Cour européenne des droits de l’Homme a jugé que l’article 720-4 du Code de procédure pénale est conforme aux dispositions de la CESDH [16].

L’interdiction du transfert de Salah Abdeslam vers la France ne devrait donc pas pouvoir être confirmée par les juridictions belges, que ce soit dans l’hypothèse d’une procédure en cassation relative à l’arrêt rendu en référé, ou dans le cadre de la procédure au fond qu’il a par ailleurs initiée sur la même question.

En tout cas pas pour le motif retenu par la Cour d’appel de Bruxelles dans son arrêt du 3 octobre 2023.

 

[1] Tribunal de première instance francophone de Bruxelles, section civile, chambre des référés, 13 septembre 2023, n° 2023/111/C [en ligne].

[2] Par exemple la Convention de Strasbourg, du 21 mars 1983,  sur le transfèrement des personnes condamnées N° Lexbase : L9436LE9 et la Décision-cadre 2008/909/JAI, du Conseil de l'Union européenne, du 27 novembre 2008 [en ligne].

[3] Loi (belge), du 19 décembre 2003, relative au mandat d’arrêt européen, art. 8 [en ligne].

[4] Cf. Décision-cadre 2008/909/JAI, du Conseil de l’Union européenne, du 27 novembre 2008, art. 8 préc. et, pour la transposition en droit belge : Loi (belge), du 15 mai 2012, relative à l'application du principe de reconnaissance mutuelle aux peines ou mesures privatives de liberté prononcées dans un État membre de l'Union européenne, art. 18 [en ligne].

[5] Combinaison des articles 393, 137 et 138 (§ 1er, 10°) du Code pénal belge.

[6] Cf. Loi (belge) du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine, art. 25 [en ligne].

[7] Loi (belge), du 21 décembre 2017, modifiant diverses dispositions en vue d'instaurer une période de sécurité et modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive en ce qui concerne l'arrestation immédiate, art. 3 [en ligne] : « en cas de condamnation […] à une réclusion ou détention à perpétuité, l'arrêt peut établir que la libération conditionnelle ou la mise en liberté provisoire en vue d'éloignement du territoire ou en vue de remise ne peut être accordée qu'après que la personne condamnée a subi plus de quinze ans et maximum vingt-cinq ans de cette peine ».

[8] Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, art. 7, § 1er N° Lexbase : L4797AQQ « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. De même il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’infraction a été commise » ; Code pénal belge, art. 2 [en ligne] : « Nulle infraction ne peut être punie de peines qui n'étaient pas portées par la loi avant que l'infraction fût commise. Si la peine établie au temps du jugement diffère de celle qui était portée au temps de l'infraction, la peine la moins forte sera appliquée ».

[9] Avis du Conseil d’État belge n° 61.996/1/V du 12 septembre 2017, reproduit dans le Projet de Loi modifiant la Loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive concernant l’arrestation immédiate et introduisant une période de sûreté, 23 octobre 2017, p. 31 [en ligne] : « Une durée minimale fixée par la loi, en fonction de la gravité de l’infraction, doit être considérée comme un élément de la gravité de la peine ».

[10] Cass. crim., 24 juin 2015, n° 13-87.316, FS-P+B+I N° Lexbase : A0099NMM : « il se déduit de l'article 728-4 précité que l'adaptation de la peine prononcée, à l'étranger, à l'encontre du condamné transféré se fait au regard de la loi française en vigueur à la date de son transfèrement ».

[11] Loi n° 2016-731, du 3 juin 2016, renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale N° Lexbase : L4202K87.

[12] DDHC, 26 août 1789, art. 8 N° Lexbase : L1372A9P : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Cf. également Code pénal, art. 112-1, al. 1 et 2 N° Lexbase : L2215AMY : « Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date […] ».

[13] Code pénal, art. 112-2 N° Lexbase : L0454DZT.

[14] Cons. const., décision n° 86-215 DC, 3 septembre 1986 N° Lexbase : A8141ACI.

[15] Sur ce point, cf. J.-B. Thierry, Professeur à l’Université de Lorraine, Perpétuité avec période de sûreté incompressible pour S. Abdeslam : une remise en liberté largement conditionnée mais possible, Le club des juristes, 4 juillet 2022 [en ligne] à propos de l’applicabilité du régime prévu depuis le 5 juin 2016 à l’article 720-5 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L4877K87 : « Ce régime particulier n’est toutefois pas celui qui s’appliquera à Salah Abdeslam ».

[16] CEDH, 13 novembre 2014, Req. 40014/10, Bodein c/ France N° Lexbase : A0031M3K.

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Avocats/Procédure

[Brèves] Droit de réponse : attention le mandat spécial de l’avocat doit être précis !

Réf. : CA Paris, 22 septembre 2023, n° 23/00903 N° Lexbase : A55891K9

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par Marie Le Guerroué

Le 12 Octobre 2023

► Un directeur de la publication n'est pas tenu d'insérer une réponse lorsque la demande est formée par un avocat qui ne produit pas le mandat spécial qui lui a été remis à cet effet par la personne mise en cause ; tel est le cas lorsque le mandat spécial de l’avocat vise l'édition papier du journal et non son édition numérique.

Procédure. Dans cette affaire, un premier juge avait retenu qu’une demande d'insertion d'un droit de réponse était irrecevable s'agissant du support en ligne au motif que le mandat spécial donné à l’avocat ne faisait référence qu'à l'édition papier.

La personne mise en cause soutient devant la cour d’appel que sa demande d'insertion d'un droit de réponse sur le site internet est recevable dès lors que le mandat spécial donné à ses conseils visait nécessairement les deux publications du même article, dans l'édition numérique et dans l'édition papier du journal, la première en date du 5 juillet 2022, la seconde en date du 6 juillet 2022, le contenu des deux articles étant strictement identique.

Réponse de la cour. La cour rappelle les dispositions de l'article 6, IV, de la LCEN (loi n° 2004-575, du 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique N° Lexbase : L2600DZC) sur le droit de réponse. Elle ajoute que le caractère strictement personnel du droit de réponse justifie qu'il ne puisse être mis en œuvre que par celui qui a été mis en cause dans la publication litigieuse. Il en résulte que la réponse adressée par l'avocat de la personne désignée dans l'article doit être accompagnée d'un pouvoir spécial et que le directeur de la publication n'est pas tenu d'insérer une réponse lorsque la demande est formée par un avocat qui ne produit pas le mandat spécial qui lui a été remis à cet effet par la personne mise en cause.
La cour relève que le mandat spécial est ainsi libellé : « Je soussigné [N] [U], né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 6] (Algérie) et domicilié [Adresse 2], déclare par la présente mandater Maître [F] [J] et Maître [W] [A] afin d'exercer en mon nom un droit de réponse à l'article publié le 06/07/2022 par le quotidien Libération, intitulé "Inceste, des mères en lutte contre l'aliénation parentale" ».
Il ne peut qu'être constaté que la date et l'intitulé de l'article ainsi désigné visent uniquement l'édition papier du journal, à l'exclusion de la version numérique, publiée le 5 juillet 2022 sous un intitulé différent : « Violences sexuelles - Inceste : le "syndrome d'aliénation parentale", travail de sape de la parole des mères ».
Les juges estiment donc que le mandat vise exclusivement la version papier du journal, ainsi que l'a exactement retenu le premier juge, de sorte que le directeur de la publication n'était pas tenu de répondre à la demande d'insertion sur le site internet.
Confirmation. L'ordonnance est donc confirmée de ce chef.

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Conventions et accords collectifs

[Brèves] Métallurgie : un avenant de révision peut-il mettre fin à un accord de branche ?

Réf. : Cass. soc., 4 octobre 2023, n° 22-23.551, FS-B+R N° Lexbase : A03721KY

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par Lisa Poinsot

Le 11 Octobre 2023

► Est valide un avenant de révision conclu par les organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de l’accord révisé à la date de conclusion de l’avenant de révision et n’ayant pas fait l’objet d’opposition ;

Les partenaires sociaux sont en droit de conclure un avenant de révision d’un accord de branche à durée indéterminée mettant fin à cet accord, dès lors que cette extinction prend effet à compter de l’entrée en vigueur d’un autre accord collectif dont le champ d’application couvre dans son intégralité le champ professionnel et géographique de l’accord abrogé par l’avenant de révision.

Telles sont les solutions énoncées par la Chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 4 octobre 2023.  

Faits et procédure. Le 7 février 2022, la nouvelle Convention collective nationale de la métallurgie est signée. Elle est étendue par arrêté du 14 décembre 2022.

Le 9 février 2022, l’Union des industries et métiers de la métallurgie (IUMM) de Savoie et plusieurs syndicats ont signé un avenant portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiées applicables aux mensuels de la métallurgie de Savoie. Cet avenant prévoit que cette convention collective et ses avenants et ses annexes sont abrogés et cessent de produire leurs effets à compter de l’entrée en vigueur de la Convention collective nationale de métallurgie, soit le 1er janvier 2024.

Or, le tribunal judiciaire est saisi au motif qu’il ne pouvait être mis fin à un accord collectif par un avenant de révision, de sorte qu’il est demandé aux juges d’obtenir l’annulation de l’avenant du 9 février 2022.

La cour d’appel (CA Chambéry, 24 octobre 2022, n° 22/01427 N° Lexbase : A91988WL) annule l’avenant du 9 février 2022 aux motifs qu'en l'absence de disposition légale prévoyant que la révision peut porter sur la disparition ou l'abrogation totale d'un accord collectif, la procédure de révision n'est relative qu'aux modifications des conventions et accords collectifs et non à leur extinction.

En outre, elle considère que  les règles de la révision ne peuvent avoir pour objet l'extinction d'une convention collective au moyen d'une révision adoptée en vertu de la règle de la majorité, ayant pour effet d'imposer à une organisation syndicale non signataire une extinction sans passer par la procédure de dénonciation et les garanties qui y sont attachées, notamment celles de l'article L. 2261-9 du Code du travail N° Lexbase : L2434H9Z prévoyant un délai de préavis précédant la dénonciation et celles de l'article L. 2261-11 du même code N° Lexbase : L2437H97 relatives au maintien des effets des dispositions de l'accord dénoncé par une partie des signataires.

Enfin, elle affirme que l'avenant de révision litigieux ne peut être qualifié d'accord de révocation d'un commun accord dès lors que l'un des signataires s'est opposé à la signature de cet avenant.

La question posée à la Cour de cassation est alors la suivante : de quelle manière les partenaires sociaux peuvent-ils mettre fin à une convention collective de branche, par la voie unilatérale de la dénonciation ou par la voie négociation d’un avenant de révision-extinction ?

La solution. Sous le couvert de la liberté contractuelle en matière de négociation collective (Cons. const., décision n° 2019-816 QPC du 29 novembre 2019 N° Lexbase : A8689Z39) et au visa des articles L. 2231-1, alinéa 1er N° Lexbase : L3746IBD, L. 2232-6 N° Lexbase : L1876INS , L. 2261-7 N° Lexbase : L7185K9Y et L. 2261-8 N° Lexbase : L2432H9X du Code du travail, la Chambre sociale de la Cour de cassation admet la validité d’un avenant de révision mettant fin à un accord collectif à durée indéterminée à condition que l’avenant de révision n’abroge pas un accord collectif sans dispositif conventionnel de remplacement.

En l’espèce, l’avenant de révision du 9 février 2022 ne conduit à aucun vide conventionnel puisque cette extinction prend effet à compter du 1er janvier 2024, soit à compter de l’entrée en vigueur des dispositions de la nouvelle Convention collective nationale de la métallurgie s’appliquant dans le champ professionnel et géographique de la convention territoriale abrogée.

→ Quel impact en pratique ? La procédure de révision, validée par la Cour de cassation peut dès lors s’appliquer à toutes les conventions territoriales dans le domaine de la métallurgie et plus largement lorsqu’un nouvel accord couvre un champ d’application plus large que celui abrogé. Dès lors, il n’est pas besoin de procéder par voie de dénonciation unilatérale. Une question demeure néanmoins : est-ce que cette solution peut s’appliquer à la négociation d’entreprise ?

Pour aller plus loin :

  • v. la notice explicative de la Cour de cassation ;
  • v. ÉTUDE : La révision des conventions et accords collectifs de travail, Les conditions de la révision des conventions et accords collectifs, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0698YTZ.

 

newsid:487057

Entreprises en difficulté

[Brèves] Contestation sérieuse : le tribunal compétent est réputé saisi dès la date de la délivrance de l'assignation

Réf. : Cass. com., 4 octobre 2023, n° 22-14.439, F-B N° Lexbase : A17201KW

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N7054BZB

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par Vincent Téchené

Le 11 Octobre 2023

► En cas de contestation sérieuse (ou de déclaration d’incompétence), le tribunal compétent est réputé saisi dès la date de la délivrance de l'assignation, dès lors que celle-ci est remise au greffe, même postérieurement.

Faits et procédure. Une société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, un créancier a déclaré une créance qui a été contestée. Par une ordonnance notifiée au débiteur le 5 février 2019, le juge-commissaire a constaté que la contestation ne relevait pas de ses pouvoirs juridictionnels et a invité le débiteur à saisir la juridiction compétente.

Le débiteur a assigné le liquidateur et le créancier pour qu'il soit statué sur sa créance devant le tribunal de grande instance.

Arrêt d’appel.  La cour d’appel (CA Rouen, 27 janvier 2022, n° 21/00808 N° Lexbase : A58677KI) a déclaré le débiteur et le liquidateur irrecevables en leurs demandes à raison de la tardiveté de la saisine du tribunal de grande instance. Pour statuer de la sorte, les juges du fond ont relevé que l’ordonnance du juge-commissaire du 31 janvier 2019 avait été notifiée le 5 février 2019 à la débitrice qui avait assigné les 25 et 26 février 2019 et la remise au greffe était  intervenue le 4 avril 2019, soit postérieurement au délai d'un mois de la notification de l'ordonnance du juge-commissaire.

Le créancier a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l'article R. 624-5 du Code de commerce N° Lexbase : L7228LEG, rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article R. 641-28 du même code N° Lexbase : L1056HZ7.

La Haute juridiction rappelle qu’il résulte de ce texte que le tribunal est réputé saisi dès la date de la délivrance de l'assignation, dès lors que celle-ci est remise au greffe. Et, selon la Cour, il en est ainsi, lorsque l’assignation a ensuite été remise au greffe. La cour d’appel a donc violé le texte visé.

Observations. En cas de contestation sérieuse ou de déclaration d’incompétence, on sait que la personne désignée par le juge-commissaire pour saisir le juge compétent a un mois à compter de la notification ou de la réception de l’avis pour le faire, sous peine de forclusion. C’est à notre connaissance la première fois que la Cour de cassation précise la date à laquelle le juge compétent est réputé saisi.

Le tribunal de commerce de Nanterre avait déjà statué en ce sens. Les juges nanterriens avaient alors précisé que « dans un contentieux privé, l'instance nait de la seule volonté des parties, que c'est donc bien à la date de l'assignation qu'il convient de se placer pour savoir quand l'instance a été introduite, que dès lors la mise au rôle, sous la seule réserve qu'elle soit régulière, c'est-à-dire intervenue au plus tard 8 jours avant l'audience, en application de l'article 857 du Code de procédure civile, doit être considérée comme une condition suspensive qui, lorsqu'elle est réalisée, répute le tribunal saisi rétroactivement à la date de l'assignation » (T. com. Nanterre, 18 avril 2019, aff. n° 2018F00866 N° Lexbase : A1784ZKB).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La décision du juge-commissaire en matière de déclaration et de vérification des créances, Les modalités procédurales en cas de contestation sérieuse, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E3556E4H.

 

 

newsid:487054

Eoliennes

[Brèves] Pas d’éoliennes dans un paysage « proustien »

Réf. : CE, 5°-6° ch. réunies, 4 octobre 2023, n° 464855, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A20901KM

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par Yann Le Foll

Le 11 Octobre 2023

L’exigence de protection des paysages faisant obstacle à la mise en service d’une éolienne peut inclure des dimensions historiques, mémorielles, culturelles et artistiques du paysage, y compris littéraires.

Faits. Une société demande l’annulation de l'arrêté du 15 octobre 2020 par lequel la préfète d'Eure-et-Loir a rejeté sa demande d'autorisation environnementale pour l'installation et l'exploitation d'un parc éolien composé de huit aérogénérateurs et quatre postes de livraison sur le territoire des communes de Montigny-le-Chartif et Vieuvicq. Elle demande aussi que lui soit délivrée l'autorisation environnementale sollicitée en enjoignant à la préfète d'Eure-et-Loir de fixer les conditions d'exploitation de celle-ci.

Principe. Pour l'application des articles L. 350-1 A N° Lexbase : L7707K9C et L. 511-1 du Code de l'environnement N° Lexbase : L6525L7S, le juge des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) apprécie le paysage et les atteintes qui peuvent lui être portées en prenant en considération des éléments présentant, le cas échéant, des dimensions historiques, mémorielles, culturelles et artistiques, y compris littéraires.

En cause d’appel. Pour écarter le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation que la préfète d'Eure-et-Loir aurait commises en refusant l'autorisation sollicitée, la cour administrative d’appel (CAA Versailles, 2e ch., 11 avril 2022, n° 20VE03265 N° Lexbase : A98217TW) a notamment relevé que la réalisation du projet de parc éolien risquerait de porter une atteinte significative notamment à l'intérêt paysager et patrimonial du site remarquable, classé au titre de l'article L. 631-1 du Code du patrimoine N° Lexbase : L2454K9R, du village d'Illiers-Combray et de ses abords.

Elle a relevé que le classement de ce site, qui a le caractère d'une servitude d'utilité publique, trouve son fondement dans la protection et la conservation de paysages étroitement liés à la vie et à l'œuvre de Marcel Proust, dont un parcours pédestre favorise la découverte. Elle a également relevé que le clocher de l'église d'Illiers-Combray et le jardin du Pré Catelan, dessiné par Jules Amiot, oncle de Marcel Proust, sont classés au titre des monuments historiques

Décision. En prenant ainsi en considération des éléments qui ont trait aux dimensions historiques, mémorielles, culturelles et notamment littéraires du paysage, pour juger que le projet litigieux n'était pas compatible avec l'exigence de protection des paysages résultant des dispositions de l'article L. 511-1 du Code de l'environnement, la cour n'a pas commis d'erreur de droit. Le pourvoi est rejeté.

À ce sujet. Lire Pas d’éoliennes au pays de la « recherche du temps perdu » – Questions à Antoine Bourrel, Maître de conférences HDR en droit public, Université de Pau, Lexbase Public n° 667, 2022 N° Lexbase : N1483BZX.

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Mineurs

[Brèves] Assistance éducative : les garanties procédurales précisées par un décret d’application de la loi du 7 février 2022

Réf. : Décret n° 2023-914 du 2 octobre 2023 portant diverses dispositions en matière d'assistance éducative N° Lexbase : L7855MIR

Lecture: 3 min

N7080BZA

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 12 Octobre 2023

►  Le décret n° 2023-914 du 2 octobre 2023 vient préciser les modalités de mise en œuvre des nouvelles dispositions issues de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, s’agissant plus particulièrement des garanties procédurales en matière d’assistance éducative.

Le décret est pris pour l’application des articles 14, 25 et 26 de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants N° Lexbase : L1950MBT.

Pour mémoire, l’article 14 de la loi précitée a inscrit la médiation familiale dans le cadre de l’assistance éducative dans un nouvel article 375-4-1 du Code civil N° Lexbase : L2300MBS ; le présent décret précise les modalités de mise en œuvre dans un nouvel article 1189-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L8033MID, qui précise notamment que la médiation familiale ainsi proposée « a pour objet d'aider les parents à mettre fin à leur conflit concourant à la situation de danger pour l'enfant ».

Un autre apport de la loi du 7 février 2022 réside dans la collégialité de la juridiction « juge des enfants », puisque la loi a consacré dans le Code de l’organisation judiciaire (COJ, art. L. 252-6 N° Lexbase : L2304MBX) la pratique permettant au juge des enfants, à tout moment de la procédure, lorsque la complexité de l’affaire le justifie, d’ordonner son renvoi à la formation collégiale du tribunal judiciaire qui statue comme juge des enfants et qui sera présidée par le juge des enfants saisi de l’affaire. Pour l’application de ces dispositions, le présent décret insère un nouvel article R. 252-3 N° Lexbase : L8024MIZ dans la partie réglementaire du Code de l’organisation judiciaire, qui prévoit que « Le président du tribunal judiciaire ou, sur délégation de ce dernier, le magistrat désigné en application de l'article R. 251-3 désigne les magistrats assesseurs de la formation collégiale » et précise que « Les décisions relatives au renvoi à la formation collégiale sont des mesures d'administration judiciaire. »

Toujours dans l’objectif d’améliorer les garanties procédurales en matière d’assistance éducative, la loi du 7 février 2022 est venue améliorer l’assistance de l’enfant (par un avocat) et/ou sa représentation (par un administrateur ad hoc) lorsque l’enfant n’est pas capable de discernement, et imposer l’audition individuelle de l’enfant. Le présent décret vient alors préciser les modalités d’assistance du mineur non capable de discernement par l'administrateur ad hoc.

À noter, enfin, que le décret met en cohérence diverses dispositions en assistance éducative du Code de procédure civile.

Entrée en vigueur. Le décret est entré en vigueur le 5 octobre 2023.

Pour aller plus loin : le présent décret fera l’objet d’un commentaire détaillé concernant plus particulièrement l'administrateur ad hoc, en tant que nouvel acteur de l'assistance éducative, par le Professeur Adeline Gouttenoire, à paraître prochainement dans la revue Lexbase Droit privé.

Et pour revenir en détail sur les apports de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, V. A. Gouttenoire, Y. Favier, La loi du 7 février 2022 relative à la protection de l’enfant : une réforme pragmatique, Lexbase Droit privé, n° 899, 24 mars 2022.

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Sociétés

[Brèves] SARL : nullité des assemblées générales en raison de la participation d'une personne n'ayant pas la qualité d'associé

Réf. : Cass. com., 11 octobre 2023, n° 21-24.646, FS-B N° Lexbase : A8524IKW

Lecture: 3 min

N7102BZ3

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par Perrine Cathalo

Le 12 Octobre 2023

► Les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 223-27 du Code de commerce, qui prévoient que toute assemblée irrégulièrement convoquée peut être annulée, et la règle selon laquelle le juge conserve la liberté d'appréciation de l'opportunité d'une telle annulation concernent l'hypothèse d'une irrégularité de convocation de l'assemblée générale et n'ont pas vocation à s'appliquer lorsque l'annulation est sollicitée, non pas parce que l'assemblée a été irrégulièrement convoquée, mais parce qu'elle a été tenue avec une personne n'ayant pas la qualité d'associé ;

Il résulte de la combinaison des articles 1844, alinéa 1er, et 1844-10, alinéa 3, du Code civil que la participation d'une personne n'ayant pas la qualité d'associé aux décisions collectives d'une société à responsabilité limitée constitue une cause de nullité des assemblées générales au cours desquelles ces décisions ont été prises, dès lors que l'irrégularité est de nature à influer sur le résultat du processus de décision.

Faits et procédure. Le 22 juin 1992, une mère et son fils ont constitué à parts égales une société à responsabilité limitée, détenant chacun deux cent cinquante parts.

Par deux actes du 11 mars 1998, des époux se sont portés acquéreurs de l’intégralité des parts de la mère. Par deux actes du même jour, son fils a cédé deux cents parts à deux autres personnes physiques.

La mère est décédée le 4 septembre 2010, en laissant pour lui succéder ses deux enfants.

Soutenant qu’elle avait appris, à l’ouverture de la succession de sa mère, que les parts que celle-ci détenait dans le capital de la SARL ne faisaient plus partie du patrimoine successoral et contestant que celle-ci ait signé les actes de cession, sa fille a assigné les cessionnaires en annulation de ces actes pour faux et en réintégration des parts à l’actif successoral. Son frère – associé fondateur de la SARL – est intervenu volontairement à l’instance et s’est associé à cette action en annulation.

Ce dernier a également assigné la SARL en annulation de toutes les assemblées générales ordinaires annuelles tenues entre les mois de mars 1998 et juin 2012.

Par décision du 7 octobre 2021, la cour d’appel de Rouen (CA Rouen, 7 octobre 2021, n° 14/04637) a déclaré les héritiers recevables en leur action en nullité des cessions de parts intervenues le 11 mars 1998 et prononcé l’annulation de l’ensemble des assemblées générales ordinaires et extraordinaires de la SARL à partir de celle du 31 mai 2010, aux motifs que les cessionnaires n’avaient pas la qualité d’associé, entraînant de facto la nullité des décisions collectives (C. civ., art. 1844, al. 1er N° Lexbase : L2412LRR et 1844-10, al. 3 N° Lexbase : L8683LQN).

Les cessionnaires ont formé un pourvoi devant la Cour de cassation.  

Décision. La Haute juridiction rejette le pourvoi.

La Chambre commerciale rappelle ainsi que l’action en nullité est soumise à la prescription quinquennale prévue par l’article 1304 du Code civil N° Lexbase : L0955KZE, dont le point de départ se trouve être le décès de l’associée – le 4 septembre 2010 – et non pas la date de la cession, de sorte que cette action n’est pas prescrite.

La Cour conteste ensuite l’argument des défendeurs consistant à faire dire que les délibérations votées postérieurement à la conclusion du contrat de cession relevaient de la nullité facultative prévue à l’article L. 223-27 du Code de commerce N° Lexbase : L2428LRD, qui n’a pourtant pas vocation s’appliquer au litige dès lors que l’annulation des assemblées générales est sollicitée non pas parce qu’elles ont été irrégulièrement convoquées, mais parce qu’elles ont été tenues avec des personnes dépourvues de la qualité d’associé.

C’est ainsi que les Hauts magistrats affirment que la participation d'une personne n'ayant pas la qualité d'associé aux décisions collectives d'une société à responsabilité limitée constitue une cause de nullité des assemblées générales au cours desquelles ces décisions ont été prises, dès lors que l'irrégularité est de nature à influer sur le résultat du processus de décision ; comme c’est le cas en l’espèce, les cessionnaires détenant à eux deux quatre cent cinquante parts sur les cinq cents parts composant le capital de la SARL.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : Les associés de société à responsabilité limitée, La sanction des irrégularités de convocation des assemblées, in Droit des sociétés (dir. B. Saintourens), Lexbase N° Lexbase : E6009A3X.

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