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N6188BZ9
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par François Taquet, Professeur de Droit social (IESEG, Skema BS), Avocat, spécialiste en Droit du travail et protection sociale, Directeur scientifique du réseau d’avocats GESICA
le 05 Juillet 2023
Mots-clés : contrôle URSSAF • procédure contradictoire • mise en demeure • commission de recours amiable • contrainte • opposition à contrainte • travail dissimulé
La revue Lexbase Social vous propose de retrouver, tous les deux mois, le panorama d’actualités jurisprudentielles de François Taquet, Professeur et avocat, en matière de cotisations sociales et plus spécialement relatif au contentieux du recouvrement.
Sommaire
- CA Paris, 6-12, 19 mai 2023, n° 18/13754
- CA Grenoble, 12 mai 2023, n° 21/03040
- CA Dijon, 8 juin 2023, n° 21/00243, 21/00242 et 21/00241
- CA Toulouse, 14 juin 2023, n° 21/00325
- CA Amiens, 2 mai 2023, n° 21/01677
- CA Paris, 6-13, 19 mai 2023, n° 19/10653
- CA Paris, 6-13, 19 mai 2023, n° 19/12470
- CA Nîmes, 15 juin 2023, n° 21/01055
- CA Bordeaux, 11 mai 2023, n° 21/02626
- CA Aix-en-Provence, 26 mai 2023, n° 21/14010
IV. Commission de recours amiable
- CA Paris, 6-13, 26 mai 2023, n° 18/11888
- CA Orléans, 2 mai 2023, n° 21/03036
V. Contrainte et opposition à contrainte
- CA Paris, 26 mai 2023, n° 20/00415
- CA Bordeaux, 11 mai 2023, n° 20/00185
- CA Nîmes, 15 juin 2023, n° 21/00924
- CA Nîmes, 16 mai 2023, n° 20/02141
- CA Caen, 8 juin 2023, n° 20/00496
► CA Paris, 6-12, 19 mai 2023, n° 18/13754 N° Lexbase : A64769WR : aucune disposition légale n'empêche l'URSSAF de procéder à un contrôle simultané de plusieurs établissements d'une société et de plusieurs sociétés d'un même groupe. La possibilité pour l'Urssaf de procéder à un contrôle ne saurait être subordonnée à la capacité de la personne contrôlée à faire face aux obligations qui lui sont imposées dans ce cadre.
Jurisprudence constante. Ceci étant, cette solution n’est pas à confondre avec les récentes dispositions loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 (loi n° 2022-1616, du 23 décembre 2022 N° Lexbase : Z200942P) qui ont introduit dans le Code de la Sécurité sociale un article L. 243-7-4 N° Lexbase : L2552MGM donnant la possibilité à l’inspecteur d’utiliser, lors du contrôle d’une société appartenant à un groupe, les informations obtenues au cours de la vérification d’une autre société du même groupe (V. également décret n° 2023-262 du 12 avril 2023 N° Lexbase : L4194MHS).
► CA Grenoble, 12 mai 2023, n° 21/03040 N° Lexbase : A70919U8 : est nul le contrôle de cotisations portant, pour une même période, sur les points de la législation applicable ayant déjà fait l'objet d'une vérification.
Cette solution est fondée sur l’article L. 243-12-4 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L5714ISG, issu de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 N° Lexbase : L5099ISN, qui dispose qu’« il ne peut être procédé une nouvelle fois à un contrôle portant, pour une même période, sur les points de la législation applicable ayant déjà fait l’objet d’une vérification, sauf en cas de réponses incomplètes ou inexactes, de fraude, de travail dissimulé ou sur demande de l’autorité judiciaire ». Logiquement donc, dans cette espèce, la lettre d'observations du deuxième contrôle et la mise en demeure subséquente devaient être annulées puisqu’elles portaient sur la même période et qu’elles ne justifiaient ni de réponses incomplètes ou inexactes, ni de fraude ou de travail dissimulé ni de demande de l'autorité judiciaire.
► CA Dijon, 8 juin 2023, n° 21/00243 N° Lexbase : A68109ZA, 21/00242 N° Lexbase : A66279ZH, 21/00241 N° Lexbase : A67349ZG : aucune disposition légale ne prévoit une durée maximale pour le déroulement des opérations de contrôle.
Confirmation de jurisprudence (Cass. civ. 2, 28-05-2015, n° 14-17.618, F-P+B N° Lexbase : A8152NIR - Cass. civ. 2, 5 novembre 2015, n° 14-23.281, F-D N° Lexbase : A0197NW9 – CA Paris, 6-12, 26 mai 2011, n° 09/08846 N° Lexbase : A7616HSU – CA Paris, 6-12, 19 juin 2014, n° 11/10615 N° Lexbase : A4965MRC – CA Paris, 6-12, 11 octobre 2019, n° 16/12147 N° Lexbase : A9632ZQS). La seule exception est prévue pour les pour les entreprises de moins de vingt salariés (CSS, art. L. 243-13 N° Lexbase : L2554MGP ; limitant (sauf exception) la durée des opérations de contrôle à trois mois (éventuellement renouvelables une fois).
► CA Toulouse, 14 juin 2023, n° 21/00325 N° Lexbase : A333193R : l’article R. 243-59 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L4373MHG n'impose donc pas la rédaction formelle d'une liste des documents consultés figurant en tête de la lettre d'observations, mais seulement la mention des documents consultés, pour permettre au cotisant de comprendre les fondements du redressement. Or, en l’espèce, les documents consultés par l'inspecteur du recouvrement sont bien mentionnés par la lettre d'observations, qui n'a pas à en détailler le contenu.
Confirmation de jurisprudence (CA Poitiers, 6 avril 2023, n° 20/02834 N° Lexbase : A74349NN – CA Paris, 6-13, 21 avril 2023, n° 19/07059 N° Lexbase : A21279SL). Aux termes de l’article R. 243-59, III, alinéa 1 du Code de la Sécurité sociale « à l'issue du contrôle ou lorsqu'un constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du Code du travail N° Lexbase : L0188LCX afin qu'il soit procédé à un redressement des cotisations et contributions dues, les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 N° Lexbase : L2550MGK communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux ou par d'autres agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du Code du travail N° Lexbase : L6327L44, le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci ». Cette mention de la liste des documents consultés est essentielle car elle le seul moyen pour le cotisant de se prévaloir d’une éventuelle décision implicite d’accord dès lors que l’URSSAF a vu une pratique lors d’un précédent contrôle et n’a pas redressé le cotisant (CSS, art. R. 243-59-7 N° Lexbase : L2793K9C). On comprend dès lors que la Cour de cassation insiste sur le fait que « la lettre d’observations doit mentionner l’ensemble des documents consultés par l’inspecteur du recouvrement ayant servi à établir le bien-fondé du redressement » (Cass. civ. 2, 24 juin 2021, n°s 20-10.136 N° Lexbase : A39374X4 et 20-10.139 N° Lexbase : A40374XS). Cependant, la jurisprudence fixe une limite à cette obligation : l’absence de mention dans la rubrique « documents consultés » n’invalide pas nécessairement le contrôle dès lors que lesdits documents figurent expressément dans le corps de la lettre d’observations. Rappelons enfin que suivant l’article R. 243-59, III du Code de la Sécurité sociale, dans sa réponse aux observations, « la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés ».
► CA Amiens, 2 mai 2023, n° 21/01677 N° Lexbase : A09609TQ : la mise en demeure doit expressément préciser que le cotisant doit s'acquitter des sommes dues dans le délai d'un mois. À défaut de préciser expressément ce délai, la mise en demeure ne respecte pas les prescriptions substantielles de l'article L. 244-2 N° Lexbase : L6932LN3 et doit être considérée comme nulle.
Suivant les dispositions de l'article L. 244-2 du Code de la Sécurité sociale, que toute action ou poursuite effectuée en application de l'article L. 244-1 N° Lexbase : L1238I7Y ou des articles L. 244-6 N° Lexbase : L4976ADN et L. 244-11 N° Lexbase : L0470LCE est obligatoirement précédée, d'une mise en demeure adressée à l'employeur l'invitant à régulariser sa situation dans le mois. En l’absence d’indication pour le cotisant à « régulariser sa situation dans le mois », la mise en demeure est logiquement nulle (Cass. civ. 2, 31 mai 2005, n° 03-30.658 FS-D N° Lexbase : A5126DIP - Cass. civ. 2, 19 décembre 2019, n° 18-23.623, F-P+B+I N° Lexbase : A1285Z9H - Cass. civ. 2, 12 mars 2020, n° 18-20.008, F-D N° Lexbase : A76713IX - Cass. civ. 2, 7 janvier 2021, n° 19-22.978, F-D N° Lexbase : A88414B3 et 19-23.973, F-D N° Lexbase : A89304BD).
► CA Paris, 6-13, 19 mai 2023, n° 19/10653 N° Lexbase : A64459WM : si l'Urssaf réclame à la société par la mise en demeure, au titre du contrôle opéré, un montant total de cotisations de 94 950 euros, alors que le montant de cotisations redressées porté à la lettre d'observations est de 94 940 euros, la différence de dix euros est minime et relève d'une erreur de plume manifeste, peu important ici qu'elle soit défavorable à la société dans la mesure où la mise en demeure précisait que le montant des redressements correspondait « au dernier échange du 15/02/18 », lequel confirme le montant total du redressement à la somme de 94 940 euros conformément à la lettre d'observations.
Certes, dix euros de différence entre le montant principal inscrit sur les observations et celui figurant sur la mise en demeure peuvent paraître minimes sur un montant de 94 950 € (1/10 000ème de la somme)… Et pourtant ! Rappelons que suivant l’article L. 244-2, alinéa 2 du Code de la Sécurité sociale, « le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé ». En l’espèce, précis veut dire « exact » selon la définition du Larousse. Or, ici, force est de constater que ce montant n’est pas exact. Qui plus est, admettre un tel raisonnement ne revient-il pas à cautionner la notion « d’enrichissement sans cause » pour les organismes de recouvrement ! Car, finalement, c’est bien en l’espèce la somme de 94 950 euros inscrite sur la mise en demeure qui aura été validée et non 94 940 euros inscrite sur la lettre d’observations… Nous adhérons davantage à un autre arrêt de la Cour de Paris suivant lequel : « la discordance entre le montant des cotisations figurant sur la mise en demeure et celui mentionné dans la lettre d'observations [4 €] sans que le moindre élément d'explication n'en soit porté sur la mise en demeure, ne permettait pas au cas d'espèce au cotisant d'avoir connaissance de l'étendue exacte et certaine de son obligation, peu important à cet égard que la différence de montant soit peu importante, dès lors qu'elle a été appliquée en défaveur du cotisant, et qu'elle n'apparaît au surplus toujours pas justifiée » (CA Paris, 6-12, 14 octobre 2022, n° 18/05457).
► CA Paris, 6-13, 19 mai 2023, n° 19/12470 N° Lexbase : A64299WZ : si la mise en demeure doit préciser la dénomination de l'organisme social qui l'a émise, aucun texte n'exige que la mise en demeure soit signée par le directeur de l'organisme de recouvrement. Ainsi, une signature préimprimée de celui-ci n'affecte pas la validité de la mise en demeure.
Certes, cette position est conforme à la jurisprudence (CA Toulouse, 14 juin 2023, RG n° 22/03274 N° Lexbase : A332593K – CA Nîmes, 15 juin 2023, n° 21/00924 N° Lexbase : A824593R). Elle pose toutefois question au regard de l’article L. 212-1 du Code des relations entre le public et l'administration N° Lexbase : L1194LDL, suivant lequel « toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ». En on sait que le Code des relations entre le public et l'administration est applicable aux relations entre les cotisants et les URSSAF via l’article L. 100-3 du même Code N° Lexbase : L1766KNQ. Les conclusions du rapporteur public sous CE, 18 décembre 2020, n° 425796 N° Lexbase : A71494AZ, suivant lesquelles : « à la différence de la levée de l’anonymat prévue à l’article L. 111-2 du Code des relations entre le public et l'administration N° Lexbase : L1769KNT, qui vise avant tout à humaniser la relation entre l’administré et l’administration en donnant à cette dernière un visage, l’ambition qui sous-tend cette obligation de signature est plus pragmatique : elle vise à permettre aux administrés d’identifier facilement l’auteur de l’acte, pour qu’ils soient à même de vérifier sa compétence et son impartialité – notamment en cas de contentieux ».
► CA Nîmes, 15 juin 2023, n° 21/01055 N° Lexbase : A804593D : à la différence de la lettre d'observations, la lettre de mise en demeure notifiée, en application de l'article L. 244-2 du Code de la Sécurité sociale, par l'organisme de recouvrement à l'issue des opérations de contrôle et de redressement, laquelle constitue la décision de recouvrement, est seule susceptible de faire l'objet, dans les conditions fixées par les articles R. 142-1, alinéa 3, et R. 142-18 du même code, d'un recours contentieux.
V. sur ce point : « la mise en demeure notifiée par l’URSSAF à l’issue des opérations de contrôle et de redressement, laquelle constitue la décision de recouvrement, est seule susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux et non la réponse des inspecteurs de l’URSSAF à celle du cotisant » (Cass. civ. 2, 14 février 2019, n° 17-27.759, F-P+B N° Lexbase : A3377YXD).
► CA Bordeaux, 11 mai 2023, n° 21/02626 N° Lexbase : A27249UG : la nullité de la mise en demeure prive de fondement l'obligation au paiement des sommes qui en font l'objet, mais aucunement que l'organisme de recouvrement constatant une erreur affectant la mise en demeure ne peut pas la rectifier et dresser une nouvelle mise en demeure.
Le principe est connu : L’URSSAF peut toujours régulariser une mise en demeure nulle par l’envoi d’une nouvelle mise en demeure faite dans le respect de la procédure cette fois ainsi que des prescriptions applicables (Cass. civ. 2, 6 juillet 2017, n° 16-19.384, F-P+B N° Lexbase : A8348WLR). Rappelons en effet que la mise en demeure ne constitue qu’une « invitation » du débiteur à régulariser sa situation (Cass. soc., 19 mars 1992, n° 88-11.682 N° Lexbase : A1077AA7).
► CA Aix-en-Provence, 26 mai 2023, n° 21/14010 N° Lexbase : A15339ZS : le défaut ou l'insuffisance des mentions des modalités et voies de recours indiquées aux mises en demeures n'ont pas pour sanction leur annulation, mais l'impossibilité pour la caisse de soulever la forclusion des délais de recours à l'encontre de l'opposant.
V. dans le même sens : CA Rennes, 13 octobre 2021, n° 18/04072 N° Lexbase : A023249H.
IV. Commission de recours amiable
► CA Paris, 6-13, 26 mai 2023, n° 18/11888 N° Lexbase : A78799X4 : la société a formé un recours amiable tendant à obtenir l'annulation de certains chefs de redressement ainsi que la remise des majorations de retard, son courrier mentionnant : « la société demande à votre commission d'annuler l'intégralité des points de redressement contestés par la présente. À titre subsidiaire, la société demande à votre commission une remise des majorations de retard de 10 % ». La société est donc fondée à soutenir tout moyen tendant à obtenir l'annulation des chefs de redressement, y compris des moyens non soumis préalablement à la commission de recours amiable.
► CA Orléans, 2 mai 2023, n° 21/03036 N° Lexbase : A88629TE – CA Pau, 15 juin 2023, n° 21/01206 N° Lexbase : A808793W : il ne peut être considéré que par la seule mention du montant total du redressement soit 12 214 euros, dans le courrier de saisine de la commission de recours amiable, la société ait entendu contester l'ensemble des chefs de redressement, dès lors qu'elle ne fait ni référence aux chefs de redressement n° 4 et 5, ni au caractère justifié des frais professionnels que l'URSSAF a réintégrés dans l'assiette de cotisations. L'argumentation de la requérante ne portait en effet que sur l'existence de la qualité de salarié de M. N. La commission de recours amiable n'a donc pas été saisie d'une contestation des chefs de redressement n° 4 et 5 dans le délai de deux mois à compter de la réception de la mise en demeure. La contestation de ceux-ci devant la juridiction de sécurité sociale est irrecevable.
Le commentaire de ces deux arrêts pourrait être intitulé : de l’intérêt de bien saisir la commission de recours amiable.
Comment saisir cette commission ?
▪ Si le cotisant a limité son recours à un ou plusieurs chefs de redressement, il ne pourra plus contester les autres points de redressement devant la juridiction contentieuse (Cass. soc., 29 mars 2001, n° 99-17.912, inédit N° Lexbase : A1059ATE – Cass. civ. 2, 16 novembre 2004, n° 03-30.426, F-D N° Lexbase : A9564DDL – CA Orléans, 2 mai 2023, n° 21/03036 N° Lexbase : A88629TE).
▪ En revanche, si le cotisant a contesté, devant la commission, la totalité du redressement, celui-ci est fondé à contester l’ensemble des éléments même non motivés dans la requête initiale devant la commission de recours amiable (Cass. soc., 25 janvier 1989, n° 86-11.940 N° Lexbase : A3917AG8 – Cass. civ. 2, 7 mai 2015, n° 14-14.914 N° Lexbase : A6990NHD – Cass. civ. 2, 12 mars 2020, n° 19-13.422, F-P+B+I N° Lexbase : A21143I7).
Dans un arrêt récent du 1er juin 2023 (Cass. civ. 2, 1er juin 2023, n° 21-21.329, F-B N° Lexbase : A64009XC), une société avait saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF par une lettre de réclamation dans laquelle elle annonçait « contester l'intégralité du redressement dont elle a fait l'objet, tant sur la forme que sur le fond », sachant que n’étaient motivés que les points de contestation portant sur les chefs de redressement n° 9, n° 14 et n° 15… La cour d’appel en avait étrangement déduit que le contentieux était limité à ces trois points. La Cour de cassation censure cette position en relevant que « le recours amiable de la société portait sur l'ensemble des chefs de redressement » puisque le cotisant en avait contesté d’entrée la « totalité », même si la motivation ne portait que sur trois points.
Ainsi, le cotisant doit se montrer très vigilant quant au contenu de la saisine et ne pas opérer de contestation à la légère.
V. Contrainte et opposition à contrainte
► CA Paris, 26 mai 2023, n° 20/00415 N° Lexbase : A81209XZ : la circonstance tirée de la saisine de la commission de recours amiable puis de la juridiction du contentieux de la Sécurité sociale d'une contestation par la cotisante de la mise en demeure qui lui a été notifiée ne prive pas l'organisme du recouvrement de la possibilité d'émettre une contrainte.
V. dans le même sens : Cass. soc., 31 mai 2001, n° 99‑14.622, inédit N° Lexbase : A5139ATI – Cass. civ. 2, 3 avril 2014, n° 13‑15.136, F-P+B N° Lexbase : A6280MIG – Cass. civ., 1er décembre 2022, n° 21-17.379, F-D N° Lexbase : A42118XA.
► CA Bordeaux, 11 mai 2023, n° 20/00185 N° Lexbase : A42469US : le cotisant qui n'a pas contesté la mise en demeure devant la commission de recours amiable peut, à l'appui de l'opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, contester la régularité de la procédure et le bien-fondé des causes de la contrainte.
V. dans le même sens : Cass. civ. 2, 22 septembre 2022, n° 21-10.105, FS-B N° Lexbase : A25408KB et 21-11.862 N° Lexbase : A25488KL.
► CA Nîmes, 15 juin 2023, n° 21/00924 N° Lexbase : A824593R : conformément à l'article L. 244-9 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L0695LTW, la contrainte doit être délivrée par le directeur ou un agent de l'organisme intéressé ayant reçu délégation de pouvoir ; elle doit donc comporter la signature manuscrite de l'agent habilité, et non une simple griffe. Il appartient aux juges du fond de vérifier que le signataire de la contrainte est effectivement titulaire d'une délégation du directeur ; cependant, l'apposition de l'image numérisée d'une signature manuscrite ne suffit pas, à elle seule, à retenir que son signataire est dépourvu de tout pouvoir.
Cette position est conforme à la jurisprudence (V. CA Paris, 6-13, 17 février 2023, n° 19/10570 N° Lexbase : A03309EX – CA Paris, 6-13, 3 février 2023, n° 19/08117 N° Lexbase : A55669C7 – CA Grenoble, 23 juin 2022, n° 20/01162 N° Lexbase : A777078B). On relèvera que le raisonnement est identique s’agissant de la lettre d’observations : si l'article R. 243-59 du Code de la Sécurité sociale exige la signature de la lettre d'observations, il n'exige pas que la signature soit manuscrite ; l'apposition sur la lettre d'observations d'une image numérisée d'une signature manuscrite, ne permet pas à elle seule, de faire obstacle à l'identification du signataire ou de retenir que son signataire était dépourvu de la qualité pour ce faire (Cass. civ. 2, 28 mai 2020, n° 19-11.744, F-P+B+I N° Lexbase : A22853ML).
► CA Nîmes, 16 mai 2023, n° 20/02141 : la lettre d'observations mentionne qu'elle intervient à la suite d’un contrôle opéré dans le cadre des articles L. 8221-1 N° Lexbase : L3589H9S et L. 8221-2 N° Lexbase : L3591H9U du Code du travail, soit dans le cadre de la recherche d'infractions de travail dissimulé. L'audition de Mr N. était donc soumise aux exigences de forme de l'article L. 8271-6-1 du Code du travail N° Lexbase : L5006K8W, et non pas à celles de l'article R. 243-59 du Code de la Sécurité sociale et pouvait par suite se dérouler en n'importe quel lieu.
Dans le cadre du travail dissimulé et s’agissant de l’audition des personnes intéressées, on sait que suivant l’article L. 8271-6-1 du Code du travail, les agents de contrôle sont habilités à entendre, en quelque lieu que ce soit et avec son consentement, tout employeur ou son représentant et toute personne rémunérée, ayant été rémunérée ou présumée être ou avoir été rémunérée par l'employeur ou par un travailleur indépendant, afin de connaître la nature de ses activités. Il est clair que l’audition peut se dérouler en n’importe quel lieu. En revanche, et s’agissant d’un contrôle effectué dans le cadre des articles L. 243-7 et R. 243-59 du Code de la Sécurité sociale, l’URSSAF ne peut entendre des salariés dans ses locaux (CA Rennes, 22 septembre 2021, n° 18/00387 N° Lexbase : A123647W) …
► CA Caen, 8 juin 2023, n° 20/00496 N° Lexbase : A68269ZT : s’il procède du constat d'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi, le redressement a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations afférentes à cet emploi, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'intention frauduleuse de l'employeur.
V. dans le même sens : Cass. civ. 2, 26 janvier 2023, n° 21-14.049, F-D N° Lexbase : A44719AT – CA Paris, 6-13, 17 mars 2023, n° 18/02689 N° Lexbase : A52739KI.
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