Le Quotidien du 30 septembre 2022 : Autorité parentale

[Brèves] GPA, adoption et retrait de l’autorité parentale

Réf. : Cass. civ. 1, 21 septembre 2022, n° 20-18.687, F-B N° Lexbase : A25398KA

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par Laure Florent

le 29 Septembre 2022

► Le retrait de l’autorité parentale, qui est une mesure de protection de l’enfant, suppose la démonstration par le requérant d’un danger manifeste pour la santé, la sécurité, ou la moralité de ce dernier ;
► Le droit au respect de la vie privée et familiale des enfants, consacré par l’article 8 de la CESDH, n’est pas violé par le refus du juge de retirer l’autorité parentale à la mère biologique, ayant conçu les enfants dans le cadre d’une convention de gestation pour autrui, et renoncé à ses droits parentaux par déclaration, dès lors, d'une part, que ce droit n'impose pas de consacrer, par une adoption, tous les liens d'affection, fussent-ils anciens et établis, d'autre part, que la voie de l'adoption des enfants par le conjoint du père demeure ouverte, si les conditions en sont remplies, ce qui suppose en particulier que le juge vérifie la validité et la portée de déclaration par laquelle la mère a renoncé à ses droits parentaux et qu'il s'assure de sa conformité avec l'intérêt de l'enfant.

Faits et procédure. Des jumeaux sont nés en Inde, le 25 mars 2010, d’un père et d’une mère biologiques, de nationalité indienne, cette dernière ayant, selon déclaration du 30 juillet effectuée en Inde, renoncé à tous ses droits parentaux sur les deux enfants.

Par acte du 19 décembre 2017, le père, alléguant avoir eu recours à une gestation pour autrui, a assigné la mère en retrait de l’autorité parentale sur les deux enfants. La cour d’appel de Lyon (CA Lyon, 9 juin 2020, n° 19/01536) a rejeté sa demande.

Griefs. Se fondant sur les termes de l’article 378-1 du Code civil N° Lexbase : L5369LTZ, le père reprochait à la cour d’appel de de s’être abstenue de rechercher, comme il le lui était demandé, si le maintien de l'autorité parentale de la mère biologique sur les enfants, dont elle constatait le défaut de soins en relevant qu'elle était absente de leur vie, ne mettait pas en danger leur sécurité et leur santé, d’une part en interdisant leur adoption par le conjoint du père, et d’autre part « en leur interdisant de constituer une vraie famille » avec le même conjoint.

Par ailleurs, le père avançait que toute personne avait droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance et que la jouissance des droits et libertés reconnus dans la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales devait être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur la naissance, ce que la cour d’appel violait, en rejetant la demande de retrait de l’autorité parentale. Cette décision privait en effet selon lui de fait les enfants, nés dans le cadre d’une convention de gestation pour autrui, de la possibilité de faire l’objet d’une adoption simple par son conjoint.

Rejet. La Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel de Lyon et rejette le pourvoi.

  • Pas de violation du droit interne

Elle rappelle tout d’abord les termes de l’article 378-1, alinéa premier, qui prévoit que peuvent se voir retirer totalement l'autorité parentale, en dehors de toute condamnation pénale, les père et mère qui, soit par de mauvais traitements, soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiants, soit par une inconduite notoire ou des comportements délictueux, notamment lorsque l'enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre, soit par un défaut de soins ou un manque de direction, mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l'enfant.

Il résulte selon elle de ce texte qu’« un défaut de soins ou un manque de direction ne peut justifier le retrait de l'autorité parentale que s'il met en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l'enfant ».

Les Hauts magistrats reprennent ensuite le raisonnement de la cour d’appel, en notant qu’elle avait rappelé que le retrait de l’autorité parentale, qui est une mesure de protection de l’enfant, suppose la démonstration par le requérant d’un danger manifeste pour la santé, la sécurité, ou la moralité de ce dernier.

La Cour énonce que les juges du fond avaient également constaté des pièces communiquées que les enfants étaient équilibrés, heureux, et parfaitement pris en charge.

Ils avaient souverainement retenu que rien ne démontrait que l’absence de leur mère soit une source de danger pour eux, et que le père n’établissait pas en quoi la protection de l’intérêt supérieur des enfants commandait le retrait de l’autorité parentale de la mère biologique, ajoutant que le dispositif conventionnel et législatif n’avait pas vocation à faciliter ses démarches administratives.

  • Pas de violation de la CESDH

Répondant aux griefs du requérant relatifs à la violation de l’article 8 de la CESDH N° Lexbase : L4798AQR, protégeant notamment le droit au respect de la vie privée et familiale (des enfants en l’espèce), les Hauts magistrats énoncent que la cour d’appel n’y a pas porté atteinte, dès lors, d'une part, que ce droit n'impose pas de consacrer, par une adoption, tous les liens d'affection, fussent-ils anciens et établis, d'autre part, que la voie de l'adoption des enfants par le conjoint du père demeure ouverte, si les conditions en sont remplies, ce qui suppose en particulier que le juge vérifie la validité et la portée de déclaration du 30 juillet 2010 par laquelle la mère a renoncé à ses droits parentaux et qu'il s'assure de sa conformité avec l'intérêt de l'enfant.

Enfin, la première chambre civile considère que la cour d’appel de Lyon n’a pas davantage violé l’interdiction de toute discrimination posée par l'article 14 de la CESDH N° Lexbase : L4747AQU, les dispositions de l'article 378 du Code civil s'appliquant indifféremment à tous les enfants, sans distinction aucune fondée sur la naissance.

La cour d’appel de Lyon a ainsi légalement justifié sa décision.

Pour aller plus loin : cet arrêt fera l’objet d’un commentaire approfondi par le Professeur Adeline Gouttenoire, à paraître prochainement dans la revue Lexbase Droit privé.

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