Le Quotidien du 23 août 2022 : Autorité parentale

[Brèves] Enlèvement international d’enfants : appréciation souveraine du juge de la valeur des preuves d’un danger encouru par les enfants en cas de retour

Réf. : Cass. civ. 1, 6 juillet 2022, n° 22-11.435, F-D N° Lexbase : A50708AZ

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par Laure Florent

le 22 Août 2022

C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle décidait d'écarter et qui a procédé à la recherche prétendument omise, a estimé que le père ne rapportait pas la preuve d'un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable au sens de l'article 13 b) de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, en cas de retour immédiat des enfants au Maroc.

Rappel du principe du retour de l’enfant. Pour rappel, la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 N° Lexbase : L0170I8S a pour objet d'assurer le retour immédiat dans l'État de leur résidence habituelle des enfants retenus illicitement dans tout autre État contractant.

Par exception, l'article 13, alinéa 1er , b), de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, prévoit que le retour de l'enfant déplacé illicitement de sa résidence habituelle peut ne pas être ordonné lorsqu'il existe un risque grave que le retour n'expose l'enfant à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable.

On rappellera à cet égard que, dans un arrêt rendu le 16 février 2022 (Cass. civ. 1, 16 février 2022, n° 21-19.061, F-B N° Lexbase : A63517NK), la Cour de cassation a réaffirmé le principe du retour de l’enfant, retenant une lecture très stricte des dispositions de l'article 13, alinéa 1er , b), de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, dont il résulte, selon elle, qu’il ne peut être fait exception au retour immédiat de l'enfant que s'il existe un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable (v. en ce sens : Cass. civ. 1, 7 décembre 2016, n° 16-20.858, F-P+B N° Lexbase : A3851SPC ; Cass. civ. 1, 13 février 2013, n° 11-28.424, FS-P+B+I N° Lexbase : A0545I8P).

Cette jurisprudence contredit celle de la Cour européenne, « qui tend à faire du seul intérêt supérieur de l'enfant un obstacle à son retour » (v. A. Gouttenoire, Déplacement illicite d'enfant : la difficile conciliation de l'obligation au retour et du respect de l'intérêt supérieur de l'enfant, Lexbase Droit privé, mars 2013, n° 520 N° Lexbase : N6287BTZ).

Quoi qu’il en soit, les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation quant à la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à leur examen concernant l’existence d’un danger encouru par les enfants en cas de retour, ainsi qu’en atteste la présente décision.

Faits et procédure. En l’espèce, de l’union d’une femme marocaine et d’un homme français sont nés deux enfants.

Le 9 mars 2021, la juridiction marocaine prononce le divorce des époux, confie la garde des enfants à leur mère, et accorde un droit de visite au père. Quelques jours auparavant, le père avait quitté le Maroc avec ses filles pour la France.

La mère ayant saisi l’autorité centrale marocaine sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bourges a, le 19 août 2021, saisi le juge aux affaires familiales pour voir ordonner le retour des enfants.

La cour d’appel de Bourges, dans son arrêt du 20 janvier 2022 (CA Bourges, 20 janvier 2022, n° 21/01169), a, notamment, ordonné le retour des enfants au Maroc.

Le père a formé un pourvoi contre cet arrêt, arguant que ses enfants encourraient un danger en cas de retour au domicile de leur mère au Maroc. Il alléguait que ses enfants avaient subi des mauvais traitements et des sévices sexuels commis par leur mère, et que la cour d’appel n’avait pas examiné les éléments de preuve en attestant.

Rejet. La Cour de cassation rejette le pourvoi, s’en remettant au pouvoir d’appréciation souverain de la cour d’appel de la valeur et la portée des éléments de preuve soumis à son examen.

En l’espèce, la cour d’appel avait relevé que le père n’avait déposé plainte pour mauvais traitements et sévices sexuels que plusieurs mois après les faits d’enlèvement, et postérieurement à la découverte du lieu de résidence de la mère. Elle avait constaté que les allégations de violences physiques étaient fondées sur les seules déclarations du père et qu'à l'occasion de leur audition, l'une des filles n'y avait pas fait allusion, l'autre déclarant seulement avoir été frappée une fois par sa mère.

Elle avait alors considéré que le père ne rapportait pas la preuve, par des éléments objectifs et différents de ses propres allégations, que les enfants seraient dans une situation psychique telle que leur retour auprès de leur mère serait rendu impossible.

Partant, la cour d'appel a estimé que le père ne rapportait pas la preuve d'un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable au sens de l'article 13 b) de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, en cas de retour immédiat des enfants au Maroc.

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