La lettre juridique n°898 du 17 mars 2022 : Droit rural

[Brèves] Droit de reprise du bailleur versus droit à prorogation du preneur pour atteindre l’âge de la retraite : dispositions censurées par le Conseil constitutionnel

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-978 QPC du 11 mars 2022 N° Lexbase : Z3985317

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 16 Mars 2022

Le troisième alinéa de l'article L. 411-58 du Code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, est déclaré contraire à la Constitution, en ce qu’il résulte de ses dispositions que, dans le cas où le preneur s'oppose à la reprise moins de dix-huit mois avant l'expiration de la période de prorogation, le bailleur est placé dans l'impossibilité de notifier un nouveau congé, dans le délai imparti ; ces dispositions portent ainsi au droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi.

L'article L. 411-47 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L4008AE8 prévoit que le bailleur qui entend refuser le renouvellement d'un bail rural aux fins de reprise de l'exploitation doit délivrer au preneur, dix-huit mois au moins avant l'expiration du bail, un congé présentant les motifs et les conditions de cette reprise. En application du deuxième alinéa de l'article L. 411-58 du même code N° Lexbase : L4470I4C, le preneur peut toutefois s'y opposer s'il se trouve à moins de cinq ans de l'âge de la retraite retenu pour les exploitants agricoles ou de l'âge lui permettant de bénéficier d'une retraite à taux plein. Le bail est alors prorogé de plein droit pour une durée égale à celle lui permettant d'atteindre l'âge correspondant.

Les dispositions contestées imposent au bailleur qui souhaite reprendre son bien au terme de la période de prorogation de délivrer, au moins dix-huit mois avant son expiration, un nouveau congé au preneur.

Selon le Conseil constitutionnel, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu garantir la continuité des exploitations agricoles en s'assurant qu'à l'issue de la période de prorogation, le bailleur souhaite toujours reprendre son bien en vue de l'exploiter et remplit les conditions pour ce faire.

Toutefois, il résulte des dispositions contestées que, dans le cas où le preneur s'oppose à la reprise moins de dix-huit mois avant l'expiration de la période de prorogation, le bailleur est placé dans l'impossibilité de notifier un nouveau congé, dans le délai imparti.

Dès lors, ces dispositions portent au droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi. Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, elles doivent donc être déclarées contraires à la Constitution.

Abrogation différée. Les Sages relèvent qu’en l'espèce, l'abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles entraînerait des conséquences manifestement excessives. Par suite, il y a lieu de reporter au 31 décembre 2022 la date de l'abrogation de ces dispositions.

En revanche, afin de faire cesser l'inconstitutionnalité constatée à compter de la publication de la présente décision, il y a lieu de juger que, jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi ou jusqu'à la date de l'abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles, en cas d'opposition du preneur à la reprise du bail dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 411-58 du Code rural et de la pêche maritime, le bailleur n'est pas tenu de délivrer un nouveau congé en application des dispositions déclarées inconstitutionnelles si la durée de la prorogation du bail résultant de cette opposition est inférieure à dix-huit mois.

Pour aller plus loin :

- cf. ÉTUDE : Droit de reprise du bailleur à ferme, Reprise pour exploiter du bailleur après la prorogation du bail, in Droit rural, (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E9156E9Y ;

- cette décision fera également l’objet d’un commentaire approfondi par Christine Lebel, à paraître prochainement dans Lexbase Droit privé.

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