Le Quotidien du 2 février 2022 :

[Brèves] Sanction de la déchéance du droit aux intérêts pour défaut d’information annuelle de la caution : rappels et précisions

Réf. : Cass. com., 19 janvier 2022, n° 20-17.553, F-D N° Lexbase : A19977K8

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N0196BZB

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[Brèves] Sanction de la déchéance du droit aux intérêts pour défaut d’information annuelle de la caution : rappels et précisions. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/77689203-breves-sanction-de-la-decheance-du-droit-aux-interets-pour-defaut-dinformation-annuelle-de-la-cautio
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par Vincent Téchené

le 01 Février 2022

► D’une part, ne font pas la preuve de l'envoi de la lettre d’information annuelle de la caution, ni la seule production de la copie de cette lettre, ni le prélèvement effectué par la banque sur le compte de la société débitrice d'une somme au titre des frais d'information annuelle de la caution ;

D’autre part, le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé et toute clause contraire est réputée non écrite ; dès lors, en l'absence de déchéance du terme tant à l'égard du débiteur principal que de la caution, les paiements effectués par le débiteur principal ne peuvent être imputés que sur le capital exigible de la caution, lorsque l'établissement de crédit est déchu de son droit aux intérêts au taux conventionnel pour défaut d'information annuelle de la caution.

Faits et procédure. Fort classiquement, par deux actes des 24 janvier 2013 et 19 septembre 2014, une banque a consenti à une société des prêts garantis par les cautionnements de deux époux. La société ayant été mise en redressement judiciaire le 22 mars 2016, la banque a, après l'adoption d'un plan de redressement, assigné les cautions en paiement.

La caution ayant été condamnée à payer à la banque diverses sommes, elle a formé un pourvoi en cassation.

De son côté, la banque a formé un pourvoi incident contre l'arrêt d’appel qui a jugé que, dans ses rapports avec la caution, les versements effectués par la société débitrice principale seraient réputés affectés au principal des prêts souscrits.

Décision. Examinons les deux pourvois.

Sur le pourvoi incident de la banque qui reprochait à la cour d’appel d’avoir prononcé la déchéance des intérêts contractuels au motif qu’elle n’aurait pas informé annuellement la caution, la Cour de cassation approuve l’arrêt d’appel. Elle rappelle que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi. En outre, selon la Cour, ne fait pas non plus la preuve de cet envoi le prélèvement effectué par la banque sur le compte de la société débitrice d'une somme au titre des frais d'information annuelle de la caution. Ainsi, la cour d'appel en a souverainement déduit que ces documents ne permettaient pas à la banque de rapporter la preuve de l'envoi des lettres d'information.

La Cour opère ici un rappel. Elle a déjà retenu que la copie datée d'une lettre, sans justifier de son envoi ne suffit pas à établir que le banquier a rempli son obligation d'information (Cass. com., 28 octobre 2008, n° 06-17.145, FS-P+B N° Lexbase : A0549EBX – Cass. com., 12 novembre 2008, n° 07-17.634, F-D N° Lexbase : A2323EBN – dans le même sens, concernant l’obligation d’information annuelle prévue par l’ancien article L. 333-2 du Code de la consommation N° Lexbase : L1160K74, Cass. com., 9 février 2016, n° 14-22.179, FS-P+B N° Lexbase : A0236PLC). De même, elle a déjà retenu que la remise d'une facture relative aux frais d'information, ainsi que son règlement, ne constitue pas une preuve suffisante de l'information de la caution (Cass. com., 15 décembre 2015, n° 14-10.675, F-P+B N° Lexbase : A8588NZ4).

Sur le pourvoi principal de la caution, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 622-29 N° Lexbase : L3749HBH et L. 631-14 N° Lexbase : L9175L7X du Code de commerce, et de l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L7564LBR.

Elle rappelle qu’il résulte des deux premiers textes que le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé et que toute clause contraire est réputée non écrite. Dès lors, selon la Cour, en l'absence de déchéance du terme tant à l'égard du débiteur principal que de la caution, les paiements effectués par le débiteur principal ne peuvent être imputés que sur le capital exigible de la caution, lorsque l'établissement de crédit est déchu de son droit aux intérêts au taux conventionnel pour défaut d'information annuelle de la caution sur le fondement du troisième texte.

Or, la Haute juridiction relève que, pour condamner la caution à payer, après avoir déclaré la banque déchue de son droit aux intérêts contractuels pour les périodes concernées par le défaut d'information annuelle de la caution, la cour d'appel a déduit, pour chacun des prêts garantis, les règlements effectués par la société débitrice principale du capital restant dû au jour du prononcé de son arrêt.

Dès lors, pour la Cour de cassation, en statuant ainsi, quand une partie du capital restant dû au jour du prononcé de l’arrêt de la cour d’appel n'était pas échue à cette date et n'était donc pas exigible, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes visés.

Observations. Depuis la réforme du droit des sûretés par l’ordonnance du 15 septembre 2021 (ordonnance n° 2021-1192 N° Lexbase : L8997L7D ; v. Dossier spécial « La réforme du droit des sûretés par l'ordonnance du 15 septembre 2021 », Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 691 N° Lexbase : N8992BYP), cette obligation a intégré le Code civil.  L’idée générale est reprise des textes antérieurs. La réforme apporte une modification relative à la sanction. Désormais, il est prévu que le créancier défaillant est déchu de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information jusqu’à celle de communication de la nouvelle information (v. not., G. Piette, Réforme du droit des sûretés par l’ordonnance du 15 septembre 2021 : effets et extinction du cautionnement, in « Dossier spécial » préc., Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 691 N° Lexbase : N8979BY9).

Pour aller plus loin :

  • v. ÉTUDE : Les effets du cautionnement entre le créancier et la caution, La sanction de l'obligation d'information annuelle, in Droit des sûretés, (dir. G. Piette), Lexbase N° Lexbase : E0892A8K ;
  • v.  ÉTUDE : Le cours des intérêts, l'exigibilité de la créance et le cours des inscriptions de sûretés, Le principe de l'absence de déchéance du terme par l'effet du jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, in Entreprises en difficulté, (dir. P .-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E8115EWH.

 

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