Réf. : Cass. soc., 16 décembre 2020, n° 19-17.637, F-P+B (N° Lexbase : A68944AL))
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N5971BYS
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par Charlotte Moronval
le 06 Janvier 2021
► Dès lors qu'il constate un motif légitime à la production forcée d'éléments de preuve, le juge doit vérifier que cette mesure est indispensable à la protection du droit à la preuve du salarié et est proportionnée au but poursuivi, au besoin en cantonnant le périmètre de la production des pièces sollicitées.
Faits et procédure. Des salariés, exerçant des mandats de représentants du personnel et soutenant faire l’objet d’une discrimination en raison de leurs activités syndicales, ont saisi la formation de référé de la juridiction prud’homale pour obtenir les informations permettant l'évaluation utile de leur situation au regard de celle des autres salariés placés dans une situation comparable.
Pour débouter les salariés de leur demande de production et communication de pièces sous astreinte, la cour d’appel énonce que si le demandeur à la mesure d'instruction n'est pas tenu, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49), de caractériser le motif légitime qu'il allègue au regard des différents fondements juridiques qu'il envisage pour son action future, il doit néanmoins apporter au juge les éléments permettant de constater l'existence d'un tel motif au regard de ces fondements. Elle constate que les salariés caractérisent ce motif légitime en produisant un tableau issu de la négociation annuelle obligatoire, dressant la moyenne des rémunérations des salariés classés dans leur catégorie et dont il résulte que, malgré leur ancienneté, leur rémunération annuelle se trouve tout juste dans la moyenne, différence de traitement qu'elle met en lien avec l'activité syndicale. La cour d’appel en déduit qu'il existe un litige potentiel susceptible d'opposer le salarié et l'employeur, lequel détient effectivement les éléments de fait pouvant servir de base au procès lié à une discrimination syndicale. Elle constate néanmoins que les salariés, qui ne se comparent pas avec des salariés nommément visés, demandent communication de l'ensemble des éléments concernant les salariés embauchés sur le même site qu'eux, la même année ou dans les deux années précédentes et suivantes, dans la même catégorie professionnelle, au même niveau ou à un niveau très proche de qualification/classification et de coefficient ainsi que de tous les éléments de rémunération, de diplômes, de formation en lien avec l'évolution de carrière, de sorte que cette demande s'analyse en une mesure générale d'investigation, portant sur plusieurs milliers de documents. La cour d’appel déduit de ces constatations que la mesure demandée excède, par sa généralité, les prévisions de l'article 145 du Code de procédure civile et doit être rejetée.
La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel au visa de l’article 145 du Code de procédure civile et des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, 9 du Code civil (N° Lexbase : L3304ABY) et 9 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1123H4D).
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