Le Quotidien du 20 juin 2019 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Effectivité de la confidentialité des informations relatives aux procédures de mandat ad hoc et de conciliation : responsabilité de l’organe de presse ayant divulgué des informations sur la procédure amiable

Réf. : Cass. com., 13 juin 2019, n° 18-10.688, FS-P+B (N° Lexbase : A5864ZEW)

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[Brèves] Effectivité de la confidentialité des informations relatives aux procédures de mandat ad hoc et de conciliation : responsabilité de l’organe de presse ayant divulgué des informations sur la procédure amiable. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/51845016-breves-effectivite-de-la-confidentialite-des-informations-relatives-aux-procedures-de-mandat-i-ad-ho
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par Vincent Téchené

le 19 Juin 2019

► En imposant un devoir de confidentialité à toutes les personnes appelées à une procédure de conciliation ou de mandat ad hoc ou qui, par leurs fonctions, en ont connaissance, l'article L. 611-15 du Code de commerce (N° Lexbase : L4119HB8) a posé le principe de la confidentialité des informations relatives à ces procédures, qui se justifie par la nécessité de protéger, notamment, les droits et libertés des entreprises qui y recourent ;

► L'effectivité de ce principe ne serait pas assurée si ce texte ne conduisait pas à ériger en faute la divulgation, par des organes de presse, hormis dans l'hypothèse d'un débat d'intérêt général, des informations ainsi protégées ;

► Ainsi, engage sa responsabilité, un organe de presse qui a divulgué des informations confidentielles sur la procédure amiable qui n'étaient pas justifiées par un débat sur des questions d'intérêt général et ne contribuaient pas à la nécessité d'en informer le public.

 

Tel est le sens d’un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 13 juin 2019 (Cass. com., 13 juin 2019, n° 18-10.688, FS-P+B N° Lexbase : A5864ZEW).

 

En l’espèce, par plusieurs articles publiés par un éditeur en ligne spécialisé dans le suivi de l'endettement des entreprises et consultable par abonnement a rendu compte de l'évolution des procédures en cours et exposé les négociations engagées avec les créanciers des sociétés d’un groupe ayant fait l’objet d’un mandat ad hoc puis d’une conciliation sur le fondement des articles L. 611-3 (N° Lexbase : L2765LBZ) et L. 611-5 (N° Lexbase : L3164IM7) du Code de commerce citant des données chiffrées sur la situation financière des sociétés. Plusieurs sociétés de ce groupe et le conciliateur ont assigné l’éditeur devant le juge des référés pour obtenir le retrait de l'ensemble des articles contenant des informations confidentielles les concernant, ainsi que l'interdiction de publier d'autres articles. Le juge des référés ayant fait droit à leur demande (dans le cadre de ce contentieux, v. en dernier lieu, Cass. com., 13 février 2019, n° 17-18.049, FS-P+B+I N° Lexbase : A8600YWG ; lire N° Lexbase : N7694BXA), elles ont ensuite assigné l’éditeur en indemnisation des préjudices subis du fait de la publication des articles litigieux.

 

L’arrêt d’appel (CA Versailles, 14 septembre 2017, n° 15/08941 N° Lexbase : A8514WRR) ayant retenu la responsabilité de l’éditeur et l’ayant condamné à payer aux sociétés du groupe des dommages-intérêts, ce dernier a formé un pourvoi en cassation.

 

La Cour de cassation rejette le pourvoi.

 

Elle retient, en premier lieu, qu’en imposant un devoir de confidentialité à toutes les personnes appelées à une procédure de conciliation ou de mandat ad hoc ou qui, par leurs fonctions, en ont connaissance, l'article L. 611-15 du Code de commerce a posé le principe de la confidentialité des informations relatives à ces procédures, qui se justifie par la nécessité de protéger, notamment, les droits et libertés des entreprises qui y recourent et que l'effectivité de ce principe ne serait pas assurée si ce texte ne conduisait pas à ériger en faute la divulgation, par des organes de presse, hormis dans l'hypothèse d'un débat d'intérêt général, des informations ainsi protégées. Ainsi pour la Haute juridiction, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la faute reprochée à l’éditeur procédait de la méconnaissance du texte précité. Par ailleurs, ayant retenu que l’éditeur ne pouvait ignorer qu’il publiait des informations protégées et que, ce faisant, il risquait de causer un grave préjudice aux sociétés du groupe débiteur et, ainsi, d'engager sa responsabilité civile, la cour d'appel a justement écarté le grief pris de l'imprévisibilité de la règle légale.

 

En second lieu, la Cour relève qu’en divulguant des informations qu'il savait couvertes par la confidentialité sans que cette divulgation soit justifiée par la nécessité d'informer le public sur une question d'intérêt général, l’éditeur avait commis une faute à l'origine d'un préjudice. Par ailleurs, si la question de la résistance des opérations d'achat avec effet de levier (LBO) à la crise et les difficultés que des sociétés ainsi financées peuvent connaître relève d'un débat d'intérêt général, dont plusieurs journaux s'étaient déjà fait l'écho, mais en se contentant d'informations générales, n'informant le public que de l'existence de procédures en cours, tel n'est pas le cas des informations dont la publication est reprochée qui sont précises et chiffrées et portent sur le contenu même des négociations en cours et leur avancée, ces informations intéressant, non le public en général, mais les cocontractants et partenaires de ces sociétés en recherche de protection. Dès lors, la cour d'appel a pu déduire que les informations divulguées n'étaient pas justifiées par un débat sur des questions d'intérêt général et ne contribuaient pas à la nécessité d'en informer le public (cf. l’Ouvrage «Entreprises en difficulté» N° Lexbase : E9031EP8).

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