La lettre juridique n°731 du 15 février 2018 : Transport

[Doctrine] La prescription des actions en responsabilité dans le contentieux des transports maritimes de marchandises en droit CEMAC

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N2571BXI

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par Ebénézer Kenguep, Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles, Université de Douala - Cameroun

le 15 Février 2018

Depuis son entrée en vigueur, le 22 juillet 2012, le nouveau Code de la marine marchande de la CEMAC (1) est au centre d'un important débat portant sur la prescription des actions en responsabilité. D'après son article 561, ces actions seraient éteintes à l'expiration d'un délai de deux ans. Cependant, le domaine de cette prescription est très étendu puisqu'elle couvre toutes les actions introduites par l'assureur qui, après avoir indemnisé l'assuré exerce son recours contre le transporteur. Par ailleurs, le transporteur ou la partie exécutante exposé à une condamnation aux dommages et intérêts dispose d'une action récursoire à exercer contre le tiers garant ou responsable du dommage. Or, le nouveau Code vient de provoquer une véritable tempête dans une mer jusque-là calme en disposant, contre toute attente, que le délai de deux ans ne peut être "ni suspendu ni interrompu". Par son approche analytique, l'article explore les deux grandes tendances du droit de la prescription issu du nouveau texte qui se caractérise par la brièveté et l'harmonisation des délais. Par un Règlement n° 08/12-UEAC-088-CM- 23 du 22 juillet 2012, un nouveau Code de la marine marchande a été adopté en CEMAC en vue de mettre la législation communautaire en harmonie avec l'évolution récente du droit maritime international. Il s'agissait pour les experts réunis au sein de la commission de révision d'introduire dans le nouveau Code des dispositions très controversées des "Règles de Rotterdam" (Convention des Nations Unies sur le contrat de transport international de marchandises effectué entièrement ou partiellement par mer, 2008). Sur le plan juridique, ce volumineux Code de 800 articles constitue désormais le droit positif de la CEMAC puisqu'en vertu de l'article 41, paragraphe 2, du Traité révisé de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC), "les règlements et les règlements cadres ont une portée générale. Les Règlements sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tout Etat Membre..." (2). Au regard des nombreuses critiques, développées contre les "Règles de Rotterdam", par les spécialistes et les chargeurs tant africains qu'asiatiques ou même arabes, l'adoption de ce Code en même temps que celui portant sur l'aviation civile (3), est apparu comme un véritable coup de massue pour les modestes pays de chargeurs de la sous-région (4). Pour la majorité des maritimistes africains et communautaires, l'effort de modernisation est à saluer mais l'adoption "dans la précipitation des textes et conventions que le reste de la communauté internationale évite ou se refuse de ratifier" (5) est une démarche critiquable qui perpétue inutilement le déséquilibre contractuel au détriment des chargeurs africains (6).

La question de l'uniformisation du droit maritime ne manque cependant pas d'intérêt, l'Afrique Centrale étant caractérisée aujourd'hui par la disparité des textes internationaux applicables au transport de marchandises. En l'état actuel de la situation, l'on distingue au moins trois catégories d'Etats dans la sous-région : le Cameroun, qui applique les "Règles de Hambourg" ; la République du Congo qui applique la "Convention de Bruxelles" non modifiée et les autres Etats qui ne sont liés par aucune de ces conventions : le Gabon, la Guinée Equatoriale, la République Centrafricaine et le Tchad. En outre, le Cameroun, le Congo et le Gabon sont signataires des "Règles de Rotterdam" (7).

Mais au fond, quelle cacophonie et que de conflits à résoudre puisque la scène internationale est dominée par les "Règles de la Haye" de 1924, les "Règles de la Haye-Visby" précédant elles-mêmes les "Règles de Hambourg", les "Règles de Rotterdam " ne venant qu'en quatrième position. Les premières sont très anciennes et éprouvent le poids de l'âge. Elles ont toujours été présentées comme fortement déséquilibrées en dépit de leurs modifications successives. Celles de Hambourg, qui interviennent dans un contexte de "renouveau" maritime international marqué par la construction d'un nouvel ordre maritime international, ont séduit par leur clarté et leur effort d'équilibre des intérêts. Elles ont largement inspiré le législateur de la CEMAC qui s'en est abondamment servi pour la rédaction du Code révisé du 3 août 2001. Mais en raison des nombreuses campagnes de dénigrement et de torpillage dont elles ont été victimes, les "Règles de Hambourg" n'ont malheureusement connu qu'un faible succès. Les "Règles de Rotterdam" ont, quant à elles, été présentées comme un texte de compromis chargé de moderniser le droit international des transports et de réaliser les différents équilibres. Les grandes lignes de cette Convention ont été copieusement reprises dans le nouveau Code de la marine marchande de la CEMAC (8).

Toutefois, au regard des dispositions vétustes et surannées des précédentes versions de 1994 et 2001, le nouveau Code innove à bien d'égards puisqu'il modernise les règles applicables au contentieux des transports maritimes de marchandises. Depuis l'entrée en vigueur de sa première version, le Code de la marine marchande des Etats membres de la CEMAC a rendu d'innombrables et incontestables services à la communauté maritime de la sous-région (9). Il constitue aujourd'hui encore, l'une des plus belles réussites africaines en matière de communautarisation du droit des transports et l'on comprend qu'il ait inspiré de très nombreux travaux de doctrine et fondé d'abondantes décisions de justice (10).

Cependant, en choisissant d'aligner sa nouvelle législation sur les "Règles de Rotterdam", le législateur communautaire s'inscrit dans la même philosophie que le système des "Règles de la Haye-Visby" longtemps décrié par les chargeurs (11). Ce faisant, il a malheureusement rompu avec son passé glorieux hérité des "Règles de Hambourg" qui lui avaient permis de résoudre efficacement les problèmes liés à l'équilibre des intérêts dans le contrat de transport maritime de marchandises. Dès lors, l'option législative de la CEMAC d'aligner sa réglementation sur un régime international fragile, non éprouvé, non encore en vigueur et fortement critiqué, même par les puissances maritimes traditionnelles, paraît incongrue et suscite beaucoup d'interrogations surtout en ce qui concerne la prescription des actions en responsabilité dont les dispositions particulièrement audacieuses ont fortement ému toute la classe intellectuelle du continent (12). Ces actions sont, en principe, subordonnées à un avis de perte ou de dommage subi par la marchandise indiquant la nature générale de la perte ou du dommage (13). Cet avis, qui est adressé au transporteur ou à la partie exécutante qui a procédé à la livraison, doit être donné avant ou au moment de la livraison en cas de dommage apparent (14), ou dans un délai de sept jours ouvrables à compter de la livraison en cas de dommage non apparent (15). Cet avis n'est cependant pas nécessaire en cas de dommage constaté lors d'une inspection contradictoire des marchandises, effectuée par le réceptionnaire et le transporteur ou son mandataire (16). Toutefois, l'absence de cet avis n'a pas d'incidence sur le droit à réparation de l'ayant droit, ni sur le régime de la preuve (17). Par contre, en cas de retard, la réparation est subordonnée à un "avis de préjudice" adressé au transporteur dans un délai de vingt et un jours consécutifs à compter de la livraison (article 560 § 4 du nouveau Code communautaire de 2012).

Les actions ainsi visées doivent, sous peine de prescription, être introduites dans des délais très stricts prévus par les textes. Le Code civil présente la prescription comme un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps (C. civ., art. 2219 N° Lexbase : L7189IAI). Il s'agit donc d'une fin de non-recevoir, qui a pour but de faire déclarer irrecevable, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, l'action en responsabilité introduite par le chargeur contre le transporteur (18). La prescription constitue, pour le transporteur qui la soulève, le moyen de contester l'existence même de ce droit d'agir (19). Elle se distingue ainsi des défenses au fond qui ont pour objet de faire rejeter la prétention du demandeur en s'attaquant au bien-fondé de la demande. Celles-ci permettent au défendeur de se confronter directement à la prétention adverse pour obtenir son rejet définitif par une démonstration de la dénégation de son droit. La particularité de ce moyen est de porter le débat sur le fond du litige et non sur la forme de l'action et c'est précisément ce qui lui permet d'emporter des effets définitifs là où les exceptions de procédure ont des effets provisoires et n'emportent pas de sanction sur le fond. La qualification de défense au fond s'impose dès lors que le moyen tend à faire écarter la demande comme infondée et non pas irrégulière (exception) ou irrecevable (fin de non-recevoir) (20). Le sujet ne manque donc pas d'intérêt puisqu'il permet, sur le plan théorique, de préciser les notions de prescription et de moyens de défense et, sur le plan pratique, d'attirer l'attention des plaideurs et de leurs conseils sur le respect scrupuleux des délais d'action.

En contrepartie de la responsabilité objective qui pèse, en principe, sur le transporteur maritime de marchandises (21), le droit a toujours accordé à ce dernier le bénéfice d'une prescription brève. Celle-ci se justifie par le fait qu'il n'est pas nécessaire que le transporteur maritime reste trop longtemps sous la menace d'une action en justice pour les dommages causés aux marchandises. A l'instar de tous les autres textes de droit maritime, le nouveau Code communautaire accorde un délai aux ayants droit pour intenter leur action en réparation. L'article 561 du nouveau Code communautaire, prévoit que cette action serait éteinte à l'expiration d'un délai de deux ans tandis que la "Convention de Bruxelles" s'en tient au délai d'un an (22). A l'instar du Code communautaire, les "Règles de Hambourg" et de "Rotterdam" portent ce délai à deux ans (23).

Par ailleurs, en vertu de l'article 563 du nouveau Code communautaire, le transporteur ou la partie exécutante exposé à une condamnation aux dommages et intérêts dispose d'une action récursoire à exercer contre le tiers garant ou responsable du dommage (24). Dans ce cas, il bénéficie légalement d'un délai supplémentaire de quatre-vingt-dix jours pour l'exercice de ce recours à compter de la date à laquelle il a soit réglé la réclamation, soit lui-même reçu notification de l'assignation, selon l'évènement qui survient en premier (article 563 susvisé). Il s'ensuit que l'étude portant sur la prescription des actions en responsabilité dans le contentieux des transports maritimes de marchandises varie selon qu'il s'agit de l'action principale, dirigée en principe contre le transporteur (I) ou des actions récursoires prévues pour ce dernier (II).

I - La brève prescription de l'action principale : la sécurité juridique du défendeur

En tant que mode d'extinction du droit d'action, la prescription couvre non seulement les actions introduites par les chargeurs contre le transporteur maritime mais également toutes celles qui seraient initiées par l'assureur qui, après avoir indemnisé l'assuré, exerce son recours contre ce dernier. Il doit intenter son action dans le délai de deux ans à compter de la survenance du sinistre en application des dispositions de l'article 707 du nouveau code communautaire. D'après l'article 561 de ce Code, la prescription biennale s'applique à toutes les actions nées "d'un manquement à une obligation" du transporteur ou du chargeur. Il s'ensuit que les actions du transporteur contre le chargeur obéissent au même régime de prescription.

En matière de contentieux maritime, la brièveté de la prescription s'explique par la nécessité d'assurer au défendeur une sécurité juridique qui interdit d'intenter en justice des actions en réclamation de créances trop anciennes, ce qui l'obligerait à conserver au-delà d'un délai raisonnable les pièces justificatives en rapport avec l'opération de transport. Pour la Haute juridiction, le moyen tiré de la prescription brève du droit des transports maritimes de marchandises peut être soulevé en tout état de cause y compris pour la première fois devant la Cour suprême en tant que moyen de pur droit (25). Cette rigueur jurisprudentielle permet d'envisager les problèmes liés à l'application de la prescription et surtout en ce qui concerne son point de départ (A), sa prorogation (B) ou même les cas d'interruption et de suspension (C).

A - Le point de départ du délai de prescription en droit communautaire

D'après l'article 561, § 2, du nouveau Code communautaire, le délai de prescription des actions contre le transporteur "court à compter du jour où les marchandises ont été livrées par le transporteur ou, lorsqu'elles n'ont pas été livrées ou ne l'ont été que partiellement, à partir du dernier jour où elles auraient dû être livrées. Le jour indiqué comme point de départ n'est pas compris dans la computation" (26). Cette disposition est appliquée dans toute sa rigueur par les juridictions camerounaises. Celles-ci relèvent, par exemple, dans une espèce récente, "qu'entre la date des constatations des avaries et celle de l'assignation en justice, il s'est écoulé plus de deux ans ; qu'il échet donc de déclarer l'action de la société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) prescrite" (27).

La rédaction de l'article 561, § 2 permet cependant de distinguer trois hypothèses. La première vise celle où les marchandises ont été effectivement livrées par le transporteur mais avec des avaries. Dans ce cas, le délai court du jour où les marchandises ont été remises au destinataire ou à son représentant (28). En revanche, si les marchandises ont été offertes au destinataire mais non retirées par lui, le délai ne peut donc courir qu'à compter du jour de l'avis adressé à ce dernier. Cette situation se distingue de celle où les marchandises n'ont pas été livrées (perte totale) ou ne l'ont été que partiellement c'est-à-dire avec des manquants (perte partielle). Dans ces deux hypothèses, le délai de prescription court du "dernier jour où elles auraient dû être livrées" c'est-à-dire, en principe, du jour où le déchargement du navire prend fin (29).

Pour le calcul de la prescription, le nouveau Code communautaire (article 561) précise que le jour indiqué comme point de départ du délai (dies a quo) ne compte pas dans la computation. Cette disposition trouve son origine dans l'article 2260 du Code civil (N° Lexbase : L2546ABW) (disposition application) qui dispose que "la prescription se compte par jours et non par heures". Ce délai expire normalement le dernier jour anniversaire sans qu'il soit possible de procéder à une réduction conventionnelle. En droit interne, il est courant que le délai de prescription soit prorogé jusqu'au premier jour ouvrable s'il expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé mais s'agissant d'un droit international, il est évident que les fêtes et les jours non ouvrables peuvent varier d'un pays à un autre. La précaution juridique commanderait donc de s'en tenir au dernier jour du délai d'après le décompte strict des jours ou du quantième jour à la fin duquel le délai expire (dies ad quem). En s'inspirant du droit commun, il est possible de dire aujourd'hui qu'il n'est pas permis aux parties de s'accorder pour réduire la durée du délai de prescription prévue par la loi. C'est ce qui ressort d'une importante décision rendue par la cour d'appel d'Aix-en-Provence rendue le 28 avril 1989 (30). En revanche, la prorogation conventionnelle est prévue par l'ensemble de la législation internationale et communautaire.

B - La prorogation conventionnelle du délai de prescription

Le problème de la validité de l'accord de prorogation a été réglée par l'article 562 du nouveau Code communautaire de la marine marchande qui dispose que "la personne à qui une réclamation est adressée peut, à tout moment, pendant le cours du délai, proroger celui-ci par une déclaration adressée à l'ayant droit". Ce délai peut être de nouveau prorogé par une ou plusieurs autres déclarations. Cette disposition est une reproduction littérale de l'article 63 des "Règles de Rotterdam" sur la prorogation du délai pour agir. La possibilité de proroger le délai est prévue en des termes similaires par l'article 20, § 4 des "Règles de Hambourg" qui déclare que celui-ci peut être prolongé "par une déclaration adressée par écrit à l'auteur de la réclamation". Il en est de même de l'article 3, § 4 de la "Convention de Bruxelles" tel que modifié par les "Règles de Visby" qui donne la possibilité aux parties de prolonger le délai de prescription, mais à condition que l'accord conclu à cet effet intervienne "postérieurement à l'évènement qui a donné lieu à l'action" (31).

La forme de cet accord a également retenu l'attention du législateur communautaire qui précise, à cet effet, que la prorogation du délai de prescription doit être faite par une déclaration adressée à l'ayant droit. Pour être efficace, il est important que cette déclaration se fasse par écrit ainsi que le précise l'article 20 des "Règles de Hambourg". Faisant application du texte de la "Convention de Bruxelles", la jurisprudence décide qu'en raison de son caractère exceptionnel, l'accord de prolongation doit être formel. Pour elle, la prolongation ne saurait résulter du seul silence opposé par le transporteur à la réclamation du destinataire, car ce silence ne vaut pas accord du transporteur sur une prolongation de la prescription (32). Par ailleurs, elle poursuit en décidant que, si la prorogation du délai de la prescription est acquise par un accord contractuel, on ne peut cependant pas, à défaut de stipulation contractuelle contraire, considérer que, lorsque la prorogation arrive à son terme, elle se trouve à nouveau prolongée, par une sorte de tacite reconduction (33). Il a également été jugé, conformément aux principes, que le défendeur, "en l'espèce, il s'agissait d'une entreprise de manutention, mais il en serait de même du transporteur", pouvait renoncer au bénéfice de la prescription, mais seulement après son expiration, et à condition que cela résulte d'une manifestation formelle de volonté, et non, par exemple, d'une simple participation aux opérations d'expertise (34).

C - Suspension et interruption du délai de prescription : désormais impossible ?

En droit commun, la prescription peut être suspendue par certaines causes limitativement prévues par les textes. Celles-ci sont des événements qui allongent, d'un laps de temps égal à leur durée, les délais de prescription. En droit civil, il y a deux sortes d'événements qui peuvent suspendre le délai de prescription : ceux prévus par l'article 2251 du Code civil (N° Lexbase : L2539ABN) à savoir, les exceptions tenant aux relations personnelles entre le créancier et le débiteur, et ceux qui empêchent le créancier d'agir tels que l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement légal, d'une convention des parties ou d'un cas de force majeure. Il en va de même, mais en partie seulement, en droit maritime puisque sous l'empire du Code communautaire de 2001, et des Conventions internationales de "Bruxelles" et de "Hambourg", la jurisprudence considère que la prescription de l'action en responsabilité contre le transporteur maritime peut être suspendue au cas d'empêchement majeur d'agir (35). La suspension qui en résulte ne proroge cependant pas le délai de prescription de toute la durée de l'empêchement. Elle en déduit que, si au moment où l'empêchement prend fin le destinataire a encore devant lui un délai raisonnable pour agir avant l'expiration du délai normal de prescription, il doit assigner sans attendre la fin de ce délai, s'il ne veut pas que son action soit déclarée prescrite (36).

Cette règle fondamentale du droit maritime, relative à la suspension, vient cependant d'être totalement remise en cause par les dispositions de l'article 562 du nouveau Code communautaire adopté le 22 juillet 2012 qui, reproduisant les dispositions de l'article 63 des "Règles de Rotterdam", déclare que "le délai de prescription ne peut être 'ni suspendu ni interrompu". Cette disposition légale porte une sérieuse atteinte aux droits de la défense car, à la différence des délais de procédure qui sont des délais de rigueur, les délais de prescription sont, en principe, susceptibles de suspension et d'interruption (37). A notre sens, elle confère un avantage exorbitant et inutile au transporteur maritime qui conserve seul le pouvoir souverain de proroger le délai de prescription par une déclaration adressée au chargeur ou au destinataire.

En revanche, l'interruption résulte d'évènements qui effacent le délai de prescription acquis et font courir un nouveau délai de même durée que l'ancien. Dans le Code civil, les articles 2244 (N° Lexbase : L1509C3B) et 2248 (N° Lexbase : L2536ABK) prévoient que la prescription puisse être interrompue par la reconnaissance du droit du réclamant (expéditeur, destinataire, commissionnaire ou transporteur), par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée. Faisant application des "Règles de la Haye" et d'"Hambourg", la jurisprudence maritime décide que la prescription de l'action est interrompue, soit par la reconnaissance de sa responsabilité par le transporteur, soit par l'assignation en justice du transporteur. Il s'ensuit que "l'échange de correspondances entre les parties ne constitue pas une cause d'interruption de la prescription" (38). Dans le nouveau Code communautaire de 2012, le délai de prescription ne peut plus être interrompu ainsi que l'indique l'article 562. Il s'agit donc d'une grande première aussi bien en droit maritime qu'en droit commun, qui porte gravement atteinte aux droits des plaideurs. Cette disposition n'est pas sans poser de sérieuses difficultés en ce qui concerne les effets d'une reconnaissance en responsabilité ou d'une assignation en justice introduite avant l'expiration du délai de prescription.

S'agissant de la reconnaissance de responsabilité, cette solution a été inaugurée en droit français, avec beaucoup de surprise, par la cour d'appel de Paris. Dans un arrêt du 9 mars 2011, il a été jugé que "le transporteur ayant signé une lettre par laquelle il reconnaît son entière responsabilité et son obligation de réparer les dommages ainsi causés, il s'ensuit que la prescription applicable à l'action litigieuse initiée par l'ayant droit à la marchandise tendant à obtenir réparation de cette faute est la prescription décennale de droit commun, une reconnaissance précise de responsabilité valant titre nouveau substituant à la prescription annale la prescription décennale entre commerçants" (39).

Il résulte des faits de l'espèce que la société Riso France, spécialisée dans le marché de duplicopieurs avait, dans le cadre d'une relation contractuelle établie avec la société SBI INT installée à Dakar (Sénégal), confié le 30 janvier 2005 à la société Necotrans, transporteur, l'expédition par voie maritime d'un conteneur au départ du Havre pour être livré à Dakar à la société SBI INT selon le connaissement FBL 61610/100563. Il était convenu entre les parties que les marchandises ne devaient être livrées à la société SBI INT qu'après remise documentaire. Et pourtant, c'est tout l'inverse qui est survenu, les marchandises ayant, en effet, été livrées par le transporteur sans présentation des connaissements originaux.

Bien qu'ayant retenu une responsabilité contractuelle du transporteur défaillant, l'arrêt de la cour d'appel décide, contrairement aux autres décisions, que les termes de la lettre signée en l'espèce par le transporteur maritime Necotrans, constituent de sa part "une reconnaissance expresse de sa responsabilité" des conséquences dommageables pouvant résulter de sa faute consistant dans la remise des marchandises sans connaissement, cette reconnaissance s'accompagnant d'un engagement de réparer le dommage à hauteur de 48 617,14 euros. Les juges en concluent alors que la prescription applicable à l'action litigieuse initiée par la société Riso France tendant à demander réparation à la société Necotrans des conséquences dommageables de cette faute est la prescription décennale de droit commun, "une reconnaissance précise de responsabilité valant titre nouveau substituant à la prescription annale la prescription décennale entre commerçants" (40). En l'espèce, l'action litigieuse ayant été initiée par acte d'huissier délivré le 2 janvier 2007, soit moins de dix ans après la livraison fautive des marchandises intervenue le 24 mars 2005, les juges estiment qu'il y a lieu de déclarer non prescrite cette action et de rejeter la fin de non-recevoir.

Pour le Professeur Martin Ndendé, commentateur avisé de cette décision, l'arrêt procède à un glissement subtil entre la responsabilité contractuelle, qui est strictement fondée sur le contrat de transport maritime proprement dit, et celle qui serait, comme en l'espèce, fondée sur une obligation nouvelle née des cendres du contrat préexistant et cristallisée par le nouvel engagement du transporteur souscrit dans sa "lettre". La démarche, précise-t-il, est fort astucieuse car, elle offre à l'ayant droit à la marchandise une plus grande facilité de pouvoir poursuivre le transporteur maritime, reconnu défaillant, au-delà de la prescription annale prévue par la Convention de "Bruxelles" de 1924. Cette solution mérite cependant d'être accueillie avec beaucoup de prudence, "le risque étant trop grand d'assister, par le jeu des prescriptions différenciées, à un éclatement interminable des contentieux nés pourtant d'une même opération juridique" (41).

En des termes presque identiques, la cour d'appel du Littoral (Cameroun) avait déjà reconnu la responsabilité de la société Campship Lines SA. Dans une affaire l'opposant à la société EPA, il a été décidé que "tout en essayant de dégager sa responsabilité et en se réfugiant derrière une panne mécanique du navire chargé dudit transport pour prétendre qu'il y a absence de faute de sa part parce qu'il y avait vice caché, s'était cependant engagée dans une correspondance, à allouer à la société EPA et à lui accorder une remise sur fret" (42). La cour a alors jugé que la société Campship entendait ainsi contribuer à la réparation du préjudice subi et que, dans ces conditions, la société EPA était fondée à demander réparation des pertes subies.

La cour d'appel vient d'être suivie dans cette voie par le tribunal de grande instance du Wouri, qui décide, en des termes presque semblables que, "la reconnaissance implicite de leur responsabilité dans la nécessaire réparation du dommage découle de leur évaluation respective du préjudice à hauteur de 1 803 882 F par le transporteur et de 727 436 F par l'acconier" (43).

Dans cette espèce, Mme K. avait fait expédier, d'Anvers à Douala, par la voie maritime en date du 4 février 2007, un véhicule de marque Mercedes E 290 réceptionné au départ sans réserves par le capitaine commandant le M/S Euro - Cargo Africa appartenant à l'Armement Grimaldi. A l'arrivée du navire au port de Douala, les opérations de débarquement ont été assurées par la société camerounaise d'opérations maritimes (SOCOMAR). Lors de la livraison du véhicule, d'importants dommages ont été constatés et attestés par un rapport d'expertise dressé le 9 mars 2007 par l'expert Chapeh Njiejie Michel.

Saisi d'une demande en réparation émanant de Dame Kitio, le juge d'instance a certainement tiré parti de la décision rendue précédemment par la cour d'appel, et qui infirmait une position contraire du tribunal de grande instance (44). Pour lui, le fait pour les défendeurs de conclure à une limitation de responsabilité tenant compte de la nature de la marchandise, tout en indiquant les montants de réparation éventuelle en application de l'article 6, alinéa 1 (a), équivaut à une "reconnaissance implicite de responsabilité" de leur part. Une reconnaissance de responsabilité vaut donc interruption de la prescription. En revanche, l'offre de règlement faite par le transporteur maritime au destinataire de la marchandise "ne peut être considérée comme une reconnaissance, même partielle, de sa responsabilité ou comme une renonciation de sa part à se prévaloir de tous les moyens de droit opposés à ce jour à la réclamation" (45). Dans une autre espèce, il a été décidé en jurisprudence comparée qu'une proposition d'indemnisation, adressée par le transporteur à l'autre partie, valait interruption de la prescription par reconnaissance de sa responsabilité (46), mais pas la simple transmission du dossier à l'assureur (47).

En revanche, introduite avant l'expiration du délai, l'assignation en justice établit la preuve de la diligence du demandeur et sa ferme volonté d'interrompre la prescription qui court en faveur du transporteur. Pour être valable et produire un effet interruptif, l'assignation doit être adressée soit au transporteur lui-même, soit au consignataire du navire qui le représente (48). Toutefois, puisque l'interruption a un caractère personnel, l'assignation d'un transitaire ou d'un commissionnaire agréé en douane, chargé des formalités de déclaration des marchandises en détail, ne saurait interrompre la prescription à l'égard du transporteur maritime.

II - La prescription des actions récursoires (49) : l'harmonisation délais

La prescription biennale fixée par l'article 561, § 1 du nouveau Code communautaire de la marine marchande s'applique à toutes les actions relatives aux réclamations et aux litiges découlant d'un manquement à une des obligations du transporteur maritime ou chargeur. Elle s'étend aux actions dirigées contre les auxiliaires du transport maritime notamment, les consignataires du navire et de la cargaison en vertu de l'article 621, § 4 du Code, les entrepreneurs de manutention (article 633) et les transitaires (article 641, § 1). Il en est de même des actions nées des opérations de pilotage (article 659) et de remorquage (article 663) (50). En ce qui concerne les actions nées du contrat d'assurance maritime sur facultés, la prescription biennale court à compter de la date de la survenance du sinistre (article 707). Dans un souci d'harmonisation des prescriptions, le Code prévoit que les actions nées du contrat d'affrètement se prescrivent par deux ans à compter :

- de la date du débarquement complet de la marchandise, ou de l'évènement qui a mis fin au voyage, en cas d'affrètement au voyage ;

- de l'expiration de la durée du contrat ou de l'interruption définitive de son exécution en cas d'affrètement à temps ou "coque nue" ;

- pour le sous-affrètement, dans les conditions réglées ci-dessus selon que le sous-affrètement est au voyage ou à temps.

Il s'ensuit que la prescription est de deux ans aussi bien pour les contrats d'affrètement que pour les sous-affrètements. Curieusement, contrairement à l'article 562, la prescription, en ce qui concerne ces deux catégories de contrats, peut être interrompue ou suspendue conformément au droit commun de chaque Etat membre de la CEMAC. Il s'agit manifestement d'une incohérence législative et d'une discrimination négative qui peut être source de nombreuses injustices pour les chargeurs maritimes. Cependant, l'exploitation des textes permet de relever qu'une prescription spéciale a été fixée pour les actions récursoires (A), ce qui impose de déterminer non seulement les bénéficiaires (B) mais également le point de départ de cette prescription (C).

A - La prescription spéciale des actions récursoires

L'application généralisée de la prescription biennale à toutes les actions nées du contrat de transport maritime de marchandises ou d'affrètement aurait été préjudiciable aux nombreux plaideurs disposant d'une action récursoire contre un tiers, responsable ou garant. Ces derniers seraient ainsi exposés à un risque permanent d'irrecevabilité de leurs propres actions au cas où ils auraient été assignés quelque temps seulement avant l'expiration du délai de deux ans. Pour corriger cette injustice pouvant résulter d'une application trop rigoureuse des dispositions légales, l'article 563 prévoit que toute "personne tenue responsable, peut exercer une action récursoire après l'expiration du délai prévu à l'article 561 si elle le fait dans les quatre-vingt-dix jours à compter de la date à laquelle elle a soit réglé la réclamation, soit elle-même reçu signification de l'assignation, selon l'évènement qui survient en premier".

Des dispositions similaires ont été prévues en ce qui concerne les actions dirigées contre l'affréteur coque nue ou toute personne identifiée comme étant le transporteur. Ces actions peuvent être intentées même après l'expiration du délai de deux ans, si elles le sont dans les quatre-vingt-dix (90) jours à compter de la date à laquelle le transporteur a été identifié, ou le propriétaire inscrit ou l'affréteur coque nue a réfuté la présomption selon laquelle il est transporteur (article 564).

La prescription spéciale est également prévue en droit international par l'article 64 des "Règles de Rotterdam" qui fixe deux délais, le plus long étant retenu selon qu'il s'agit du délai déterminé par la loi applicable de l'Etat où l'action est engagée ou, dans les quatre-vingt-dix jours à compter de la date à laquelle la personne tenue responsable a soit réglé la réclamation, soit elle-même reçu signification de l'assignation, selon l'évènement qui survient le premier. Sous l'empire des "Règles de Hambourg", encore en vigueur au Cameroun, l'action récursoire de la personne tenue responsable peut être exercée même après l'expiration du délai de prescription de deux ans prévu à l'article 20 § 1, si elle l'est dans le délai déterminé par la loi de l'Etat où les poursuites sont engagées ou dans le délai de quatre-vingt-dix (90) jours qui suivent le règlement de la réclamation ou la signification de l'assignation (article 20 § 5 des Règles de Hambourg). Cette solution est identique à celle issue de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 telle que modifiée par les "Règles de Visby" du 23 février 1968. D'après l'article 3 de cette Convention, "les actions récursoires pourront être exercées même après l'expiration du délai prévu au paragraphe précédent [prescription annale], si elles le sont dans le délai déterminé par la loi du tribunal saisi de l'affaire. Toutefois ce délai ne pourra être inférieur à trois mois à partir du jour où la personne qui exerce l'action récursoire a réglé la réclamation ou a elle-même reçu signification de l'assignation".

C - Les bénéficiaires de la prescription spéciale

La prescription spéciale de quatre-vingt-dix jours, instituée par l'article 563 du nouveau Code de la marine marchande de la CEMAC, s'applique d'abord à tous les recours introduits par les transporteurs maritimes dont la responsabilité est recherchée, qu'il s'agisse d'un recours contre un autre transporteur, condamné in solidum, ou même d'un recours contre un chargeur, en cas de dommage causé par sa marchandise à celle d'un autre chargeur mais pour lequel le transporteur doit en répondre au premier chef. Le recours du transporteur peut également être exercé contre tout autre intervenant de la chaîne de transport, notamment les commissionnaires de transport chargés de faire exécuter un transport de bout en bout, les consignataires de navires et les entrepreneurs de manutention mandatés par le transporteur pour accomplir les opérations qu'il ne peut pas accomplir lui-même dans les ports d'escale.

La prescription spéciale s'applique aussi aux recours exercés contre le transporteur maritime par le commissionnaire de transport qui a indemnisé son commettant pour le dommage subi par sa marchandise et qui se trouve subrogé dans les droits de ce dernier (51). En effet, lorsque le commissionnaire de transport exécute spontanément son obligation contractuelle en réglant sans plus attendre son cocontractant, il bénéficie, en principe, d'un recours contre le transporteur maritime en se fondant sur les dispositions de l'article 1251 du Code civil qui opère au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter. La prescription spéciale s'applique enfin aux actions récursoires des assureurs sur facultés qui, après avoir indemnisé l'assuré, se retournent contre le transporteur maritime, auteur du dommage subi par la marchandise (52). Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que la prescription de l'action principale soit acquise au moment où l'action récursoire est engagée, dès lors qu'on est toujours dans les limites du délai de quatre-vingt-dix jours (53).

B - Le point de départ de la prescription spéciale

Le délai de quatre-vingt-dix jours prévu en droit communautaire pour l'exercice des actions récursoires ne s'ajoute pas nécessairement au délai de deux ans, prévu pour la prescription de l'action principale. Ce délai de quatre-vingt-dix jours ne court pas de l'expiration du délai de deux ans, mais du jour où l'auteur du recours, généralement le transporteur ou l'assureur, a été lui-même assigné comme responsable, ou du jour où il a indemnisé le demandeur à l'amiable, quelle que soit la date de cette transaction (54). Au surplus, il importe peu que la prescription de l'action principale soit acquise ou non lorsque l'action récursoire est engagée, du moment qu'on est toujours dans les limites du délai de quatre-vingt-dix jours (55).

Le délai de quatre-vingt-dix jours étant considéré comme indépendant du délai de prescription de deux ans prévue pour l'action principale, il s'ensuit que l'exercice de l'action récursoire peut très bien prospérer alors que le délai d'action contre le transporteur est expiré (56). La validité de l'action récursoire a ainsi été retenue alors que l'action principale avait été intentée dans le délai de report de prescription accordé (57). De même, il a été jugé que si l'assureur a entamé des négociations avant d'être assigné par son assuré, le délai de son action récursoire ne part que du jour où il aura, à l'amiable, réglé la réclamation (58). En revanche, dans une espèce récente, la Cour de cassation rappelle que la suspension conventionnelle de la prescription n'est opposable aux substitués que si ces derniers y ont consentie (59). En l'espèce, le report n'était pas opposable à la société CMA CGM qui n'y avait pas adhéré. Par conséquent, l'action diligentée au-delà du délai d'un an prévu par l'article 3 § 6 de la "Convention de Bruxelles" du 25 août 1924 amendée par le protocole du 23 février 1968, était prescrite. Pour la Haute juridiction, le plaideur qui souhaite préserver la recevabilité de l'action récursoire au-delà du délai de prescription doit veiller impérativement à obtenir un report de prescription du substitué avant d'accorder le sien.


(1) Très réputée pour son dynamisme dans le domaine du droit maritime, la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) a été créée par un Traité signé à N'Djamena au Tchad le 16 mars 1994 et révisé le 30 janvier 2009 à Libreville au Gabon. Dotée de la personnalité juridique en vertu de son article 3, elle compte six Etats membres à savoir : le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale, la République Centrafricaine et le Tchad. Voir le texte complet du Traité révisé de la CEMAC dans le numéro 87 de Juridis Périodique, juillet-août-septembre 2011, p. 103 et s. et le commentaire de J. Bipele Kemfouedio intitulé : La CEMAC à la recherche de son affermissement.
(2) Voir, Juridis Périodique, n° 87, juillet-août-septembre 2011, p. 103 et s. et le commentaire de J. Bipele Kemfouedio intitulé : la CEMAC à la recherche de son affermissement, art. préc..
(3) Le Code de l'aviation civile de la CEMAC a été adopté dans les mêmes conditions le 22 juillet 2012 par Règlement n° 07/12-UEAC-066-CM-23.
(4) Voir par contre, G. Ngamkan, Etude comparée entre le droit maritime français et le droit maritime communautaire de l'Afrique centrale (CEMAC), DMF juillet-août 2012, p. 647 et s ; et DMF septembre 2012, p. 756 et s., cité par M. Ndendé, Adoption de deux nouveau codes CEMAC (Aviation Civile et Marine marchande), Ramatrans, n° 5, juillet 2013, p. 96.
(5) M. Ndende, Adoption de deux nouveau Codes CEMAC (Aviation Civile et Marine marchande), Ramatrans, n° 5, juillet 2013, p. 96.
(6) E. Kenguep, Les Règles de Rotterdam : dérive et servitude du législateur maritime de la CEMAC, Juridis Périodique, n° 97, janvier - février - mars 2014, p. 99 à 110 ; "Les clauses dérogatoires de compétence maritime : les ambigüités d'un antagonisme Nord-Sud, Revue électronique Neptunus, Volume 22, 2015/2, avril - mai - juin 2015 ; Kamel Khelifa, Les Règles de Rotterdam : un autre marché de dupes concocté par les puissances maritimes ?, Le Phare, Journal des échanges internationaux, des transports et de la logistique, n° 131, mars 2010, p. 5 ; Ben Fadhel relève par exemple que cet esprit hégémonique se trouve derrière chaque convention de droit matériel uniforme dont la bonne intention est de fédérer tout le monde : Les Règles de Rotterdam 2009, une 7ème version de droit uniforme sur la responsabilité du transporteur international de marchandises, Le Phare, Journal des échanges internationaux, des transports et de la logistique, n° 131, mars 2010, p. 14 et s. ; Voir par contre, G. Ngamkan, Les Règles de Rotterdam : le point de vue d'un maritimiste africain, DMF, n° 755, février 2014, p. 151 et s..
(7) Les "Règles de Rotterdam" ont déjà été ratifiées par l'Espagne (le 19 janvier2011), le Togo (le 17 juillet 2012), le Congo - Brazzaville (28 janvier 2014) et le Cameroun (décret présidentiel N° 2017/130 le 18 avril 2017). La ratification de la nouvelle Convention par ces deux pays de la CEMAC (Congo Brazzaville et Cameroun) est la conséquence immédiate de l'adoption du nouveau Code communautaire et de son entrée en vigueur.
(8) E. Kenguep, Les Règles de Rotterdam : dérive et servitude du législateur maritime de la CEMAC, Juridis Périodique, art. préc..
(9) Le Traité fondateur de la CEMAC est un dispositif de sept articles signé le 16 mars 1994 à N'djamena au Tchad. La CEMAC a été créée pour remplacer l'UDEAC qui existait depuis 1964.
(10) Voir par exemple, J. Biamo, La communautarisation du droit des transports en Afrique : le cas de l'Afrique de l'Ouest et du Centre, Thèse de Doctorat en droit soutenue le 10 novembre 2008 à l'Université de Yaoundé II - Soa (Cameroun) ; J. Nguene Nteppe, La nouvelle Convention des nations unies dite "Règles de Rotterdam" et le défi de la construction d'un nouvel ordre maritime international, Ramatrans, janvier 2011, n° 3, p. 33 et s. ; CA Littoral, 15 février 2013, Affaire "Société Express Afrique Congo S.A. c/ Société SDV Cameroun S.A. et Société SOCOMAR SA", inédit ; CA du Littoral, 1er avril 2013, n° 095/C, inédit.
(11) E. Kenguep,
La ratification des Règles de Rotterdam par le Cameroun : un coup d'épée dans la mer, Bulletin de l'UCCA, juillet 2017.
(12) Sur l'ensemble de la question voir, E. Kenguep, Les Règles de Rotterdam : dérive et servitude du législateur maritime de la CEMAC, Juridis Périodique, n° 97, janvier - février - mars 2014, p. 99 à 110 ; Les clauses dérogatoires de compétence maritime : les ambigüités d'un antagonisme Nord - Sud, Revue électronique Neptunus, Volume 22, 2015/2, avril - mai - juin 2015 ; G. Ngamkan, Les Règles de Rotterdam : le point de vue d'un maritimiste africain, DMF, n° 755, février 2014, p. 151 et s..
(13) Code de la marine marchande de la CEMAC du 22 juillet 2012, art. 560. L'avis consiste dans le constat de dommage effectué sur la marchandise c'est-à-dire, l'émission de réserves circonstanciées dans des conditions acceptables : RR : article 23, paragraphe 1 ; nouveau Code de la marine marchande : article 560, paragraphe 1.
(14) Le dommage apparent est celui qui résulte d'un constat extérieur tel que le pointage des marchandises. Celui-ci permet de vérifier les allégations du transporteur quant au nombre de colis. Selon les usages du port, le pointage peut être fait contradictoirement ou pas et surtout en présence d'un commissaire aux avaries maritimes. Le dommage apparent peut également être déterminé par prélèvement d'un échantillon ou par contrôle visuel, olfactif ou auditif. Ces contrôles permettent alors au destinataire de détecter un produit défectueux, une odeur de pourriture ou même un bruit de verres cassés, autant d'indices qui vont l'obliger à émettre des réserves sur l'état et la quantité des marchandises réceptionnées.
(15) Le dommage non apparent est, en revanche, celui qui ne peut être détecté qu'après un contrôle approfondi soit par un expert maritime soit après dépotage du conteneur dans les magasins du destinataire. Dans ce cas, ce dernier dispose d'un délai de sept jours pour adresser un avis au transporteur, ce qui est largement inférieur aux quinze jours prévus par l'article 19 des "Règles de Hambourg" encore en vigueur au Cameroun. On le perçoit bien, la tendance du nouveau texte est de réduire les délais d'action accordés au destinataire afin de le rapprocher de la situation de l'époque des "Règles de la Haye" qui lui accordaient pour le même type de dommage un délai de trois jours.
(16) Dans la pratique, les constats contradictoires sont effectués par un commissaire aux avaries maritimes, assermenté, en présence des parties et consignés dans un procès-verbal établi par ses soins.
(17) Le droit à réparation naît du dommage ou de la perte et non de l'avis prévu par les textes.
(18) La prescription est appliquée avec beaucoup de rigueur par les juridictions camerounaises : tribunal de grande instance du Wouri, jugement n° 035/Com. du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana, la société OT Africa Lines et la société Delmas Cameroun S.A.", inédit.
(19) L'action en justice se présente comme le droit pour l'auteur d'une prétention d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
(20) Les moyens de défense tendent au rejet d'une prétention initiale ou incidente ; ils ne portent en eux-mêmes aucune prétention spécifique. Les moyens mis à la disposition du défendeur pour s'opposer, définitivement ou temporairement, au succès de la prétention formée à son encontre se classent en trois catégories : les défenses au fond, les fins de non-recevoir et les exceptions de procédure qui tendent, soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. Voir Xavier Marchand, Jurisclasseur Procédure civile, Fasc. 128 : Moyens de défense - Règles générales, 10 septembre 2014, n° 5.
(21) Le fondement de cette responsabilité a connu une évolution significative au fil des ans puisqu'on est passé d'une présomption de responsabilité dans la Convention de Bruxelles de 1924 à une responsabilité pour faute présumée dans les Règles de Hambourg et le Code de la marine marchande de 2001, puis à un système ambigu de responsabilité. Ce dernier combine le principe d'une présomption de responsabilité, celui d'une responsabilité pour faute prouvée et celui d'une responsabilité pour faute présumée (nouveau Code communautaire de la marine marchande adopté le 22 juillet 2012 et les Règles de Rotterdam.
(22) Convention de Bruxelles, art. 3 § 6 (d).
(23) Convention de Hambourg, art. 20, al. 1er ; "Règles de Rotterdam", art. 62 (1) ; Code CEMAC, art. 407.
(24) L'action récursoire est également prévue en droit maritime international par l'article premier des "Règles de Visby" du 23 février1968 modifiant et complétant certaines dispositions de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 (Règles de la Haye) et l'article 64 des "Règles de Rotterdam".
(25) Cass. com., 6 février 1990, n° 88-15.495 (N° Lexbase : A3572CNM), DMF, 1992, p. 210 et 1993, p. 88, obs. P. Bonassies.
(26) Dans une formule similaire, l'article 3 § 6, alinéa 4, de la Convention internationale de Bruxelles, modifié par l'article 1er des "Règles de Visby", dispose que "sous réserve des dispositions du paragraphe 6 bis [concernant les actions récursoires], le transporteur et le navire seront en tous cas déchargés de toute responsabilité quelconque relativement aux marchandises, à moins qu'une action ne soit intentée dans l'année de leur délivrance ou de la date à laquelle elles eussent dû être délivrées".
(27) TGI du Wouri, jugement n° 035/com du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana, la société OT Africa Lines et la société Delmas Cameroun S.A.", inédit.
(28) La livraison est également considérée comme effective, par la jurisprudence comparée, si la marchandise a été déposée dans un entrepôt sous douane, conformément aux indications du connaissement, où le destinataire pouvait la retirer : CA Aix-en-Provence, 5 juillet 1988, DMF, 1991, p. 43 et 1992, p. 168, obs. P. Bonassies.
(29) CA Paris, 5 mai 1978, DMF 1978, p. 716.
(30) DMF, 1991, p. 254 et 1992, p. 170, obs. P. Bonassies.
(31) Faisant application de la prolongation du délai de prescription telle que prévue par la Convention de Bruxelles modifiée par les Règles de Visby, la jurisprudence déclare que l'accord des parties doit être formel, en raison de son caractère exceptionnel. En particulier, la prolongation du délai de prescription ne saurait résulter du seul silence opposé par le transporteur à la réclamation du destinataire, car ce silence ne vaut pas accord du transporteur sur une prolongation de la prescription : CA Rennes, 21 octobre 1987, DMF 1989, p. 460 et 1990, p. 155, obs. P. Bonassies.
(32) CA Rennes, 21 octobre 1987, DMF 1989, p. 460 et 1990, p. 155, obs. P. Bonassies. De même, une offre, ou un accord sur la prorogation du délai, qui serait subordonné à une condition, serait caduc au cas de défaillance de cette condition. V. CA Aix-en-Provence, 14 avril 1992, DMF 1993, p. 118 et 1994, p. 179, obs. P. Bonassies, en l'espèce, le transporteur avait donné son accord sur la prorogation de la prescription, à condition que le litige soit soumis aux juridictions de Hambourg ; et le destinataire avait saisi le tribunal de commerce de Marseille. V. également, CA Rouen, 18 juin 1992, DMF 1993, p. 357 et 1994, p. 179, obs. P. Bonassies.
(33) CA Paris, 5e ch., sect. A, 23 février 1994.
(34) Cass. com., 7 juillet 1987, n° 86-11.174 (N° Lexbase : A9504AT8).
(35) V. par exemple, dans le cas où cet empêchement venait du comportement du transporteur, Cass. com., 16 juillet 1958, Bull. civ. III, n° 314 ; DMF 1959, p. 34. En l'espèce, le transporteur retenait indûment les pièces du dossier qui lui avaient été communiquées, pour empêcher son adversaire d'agir. V. également, CA Paris, 5 mai 1978, DMF 1978, p. 716.
(36) Cass. com., 11 janvier 1994, n° 92-10.241 (N° Lexbase : A6719ABH), Bull. civ. IV, n° 22.
(37) La jurisprudence rappelle très opportunément que, pour les délais de prescription et les délais de forclusion, la suspension et l'interruption sont la règle : Cass. crim., 14 janvier 1977, n° 74-15061 (N° Lexbase : A3834CHH), p. 89, concl. Schmelk ; Gaz. Pal., 1977, 1, p. 145, note R. Rodière ; RTDCiv., 1977, p. 366, obs. R. Perrot.
(38) Tribunal de grande instance du Wouri, jugement n° 035/Com. du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana, la société OT AFRICA LINES et la société Delmas Cameroun S.A.", inédit.
(39) RD transp., n ° 5, mai 2011, comm. 83, note M. Ndendé.
(40) CA Paris, 9 mars 2011 (N° Lexbase : A1827HAW), RD transp. n° 5, mai 2011, comm. 83, note M. Ndendé.
(41) Pour un cas récent de maintien de la prescription annale en dépit d'une livraison irrégulière effectuée par le transporteur, V. CA Rouen, 2ème ch., 16 septembre 2010, RD transp., 2011, comm. 25, note M. Ndendé.
(42) CA du Littoral, 18 décembre 2009, n° 161/C affaire "Campship Lines SA., c/ Elevage Promotion Afrique", infirmant le jugement civil n° 639/C du 13 août 2008, rendu par le TGI du Wouri à Douala, préc.
(43) Jugement n° 438 du 3 juin 2010, affaire "Mme Kitio née Nanfack Zebate Claudine Marie Pascale c/ CPT CDT M/S Euro-Cargo, Armement Grimaldi Compagnia Di Navigazione et Socomar, inédit.
(45) Arrêt n° 161 / C, du 18 décembre 2009, affaire "Campship Lines SA., c/ Elevage Promotion Afrique", préc..
(46) Tribunal de Grande Instance du Wouri, jugement n° 035/COM du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana", la société "OT AFRICA LINES et la société Delmas Cameroun SA", inédit.
(46) CA Paris, 5 mai 1978, DMF 1978, p. 716.
(47) V. dans le cadre d'un transport terrestre CA Lyon, 31 octobre 1986, DMF 1988, p. 159, obs. P. Bonassies, Comp. pour un arrêté de compte, CA Rouen, 9 juillet 1970, DMF, 1971, p. 279.
(48) Cass. com., 20 janvier 1987, n° 85-13164 (N° Lexbase : A6435AAL), Gaz. Pal. 1987, 1, pan. jurispr., p. 79 ; DMF, 1988, p. 48 ; 1989, p. 84, obs. P. Bonassies. Dans le même sens CA Aix-en-Provence, 17 décembre 1986, DMF 1988, p. 43 ; 1989, p. 84, obs. P. Bonassies.
(49) E. Kenguep, Le recours subrogatoire de l'assureur maritime sur facultés en droit interne et communautaire des transports : juges, soyez vigilants ! Juridis Périodique, n° 95, juillet-août-septembre, 2013, p. 103 à 113 ; Annuaire de Droit Maritime et Océanique de Nantes, Tome XXXII - 2014, n° 000534 - 2014, p. 243 à 263.
(50) Bien que le Code ne le déclare pas expressément, les actions nées des contrats de lamanage devraient être soumises à la même prescription biennale. Le contraire serait difficilement admissible et rendrait le texte non seulement discordant mais aussi et surtout disharmonieux.
(51) Cass. com., 12 janvier 1988, n° 86-14.609 (N° Lexbase : A7434CRR), Bull. civ. IV, n° 27 ; JCP éd. G, 1988, IV, 108, cet arrêt rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu par CA Aix-en-Provence, 20 mars 1986, DMF, 1987, p. 141, obs. P. Bonassies.
(52) E. Kenguep, Le recours subrogatoire de l'assureur maritime sur facultés en droit interne et communautaire des transports : juges, soyez vigilants !, art. préc.
(53) CA Aix-en-Provence, 10 mars 1994, BTL 1994, p. 624.
(54) CA Rouen, 29 mai 1986, DMF 1988, p. 160, obs. P. Bonassies.
(55) CA Aix-en-Provence, 10 mars 1994, précité.
(56) CA Rouen, 3 décembre 1998, DMF 2000, p. 664.
(57) CA Rouen, 12 juin 1997, navire Tadeusz Kosciuszko, DMF 1998, p. 151, obs. J.-F. Tantin : dans cette espèce, les juges du fond ont fait partir le délai de prescription de la fin du report de report de prescription.
(58) CA Rennes, 19 mai 1986, BTL 1987, p. 319, obs. A. Chao.
(59) M. Follin, Rappel des règles en matière de suspension, interruption de la prescription et délais de l'action récursoire, note sous Cass. com., 20 avril 2017, n° 14-28.849, F-D (N° Lexbase : A3093WAS), DMF, n° 796, novembre 2017, p. 898 et s..

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