Le Quotidien du 17 janvier 2018 : Droit pénal spécial

[Brèves] Propos sur l'homosexualité : pas de délit de provocation sans appel ou exhortation à la haine ou à la violence

Réf. : Cass. crim., 9 janvier 2018, n° 16-87.540, FS-D (N° Lexbase : A1959XAS)

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N2267BXA

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par Marie Le Guerroué

le 18 Janvier 2018

Selon l'article 24, alinéa 8, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW), le délit de provocation n'est caractérisé que si les juges constatent que, tant par leur sens que par leur portée, les propos incriminés tendent à inciter le public à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes, à raison de leur orientation ou identité sexuelle. Tel est le rappel opéré par la Chambre criminelle le 9 janvier 2018 (Cass. crim., 9 janvier 2018, n° 16-87.540, FS-D N° Lexbase : A1959XAS).

Mme B., à la suite de la publication d'une interview, contenant la phrase "l'homosexualité est une abomination", avait été citée devant le tribunal correctionnel, pour répondre du délit de provocation publique à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur orientation sexuelle. La prévenue avait relevé appel de sa condamnation.

La cour d'appel confirme le jugement en énonçant que ne peut être retenue de distinction entre l'homosexualité et les homosexuels, la condamnation de l'orientation sexuelle revenant à condamner la personne. Les juges relèvent que la liberté d'opinion est limitée par celle de ne pas provoquer à la haine ou à la violence et si Mme B. s'est limitée à exprimer l'opinion largement partagée par des religions monothéistes, elle ne peut soutenir que ses propos soient uniquement maladroits voire choquants dans la mesure où elle a utilisé sciemment le terme d'"abomination" qu'elle a confirmé avoir dit dans une autre interview. Ils retiennent qu'elle l'a répété sans le nuancer, sachant en tant que personnalité politique influente, ex-présidente du parti chrétien-démocrate, catholique pratiquante connaissant parfaitement la Bible dont est issue cette expression, sa signification d'exécration, haine, détestation, répugnance, et renvoyant par extension à l'infamie, le crime, l'atrocité, la monstruosité, ou encore le comble du mal, et, dans le texte biblique, à la condamnation à mort des homosexuels. Ils ajoutent que ce terme péremptoire et violent, émanant d'une élue, a nécessairement un large écho dans la population et que, prononcé dans un climat ayant déjà donné lieu à l'occasion du vote de la loi sur le mariage pour tous à des réactions d'intolérance, il ne peut qu'inciter à l'hostilité, au rejet, à la discrimination à la haine ou à la violence envers ceux qui partagent cette orientation sexuelle gravement stigmatisée, et ne saurait être atténué par d'autres propos tenus. Ils concluent que le propos dépasse les limites admissibles de la liberté d'expression et caractérise le délit.

La Cour conclut qu'en statuant ainsi, alors que le propos, s'il est outrageant, ne contient pas, même sous forme implicite, d'appel ou d'exhortation à la haine ou à la violence à l'égard des personnes homosexuelles, la cour a méconnu le principe sus-énoncé (cf. l’Ouvrage "Responsabilité civile" N° Lexbase : E4081EYS).

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