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le 18 Février 2011
La clôture de la procédure collective intervient peu souvent pour extinction du passif exigible de sorte que rares sont les arrêts statuant en ce domaine. Cette rareté ne fait qu'augmenter l'intérêt de la décision rendue le 16 novembre 2010 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation en matière de reprise des poursuites individuelles après clôture de la procédure pour extinction du passif.
En l'espèce, un créancier bénéficiaire d'une ordonnance de référé condamnant son débiteur à une provision avait été admis au passif de la procédure de redressement judiciaire de celui-ci ouverte ultérieurement. Un plan de redressement par voie de continuation avait été arrêté et prévoyait le règlement intégral de la créance du créancier sur une durée de dix ans. Trois années plus tard, le tribunal avait prononcé la clôture de la procédure collective pour extinction du passif en retenant que la société débitrice avait apuré la totalité de son passif sans attendre l'achèvement du plan. Le créancier, qui soutenait qu'il n'avait pas été désintéressé, avait alors, sur le fondement de l'ordonnance de référé obtenue avant l'ouverture de la procédure collective, notifié à la société débitrice un commandement de payer aux fins de saisie vente. Le juge de l'exécution puis la cour d'appel avaient annulé ce commandement de payer. La cour d'appel (CA Nîmes, 5 mai 2009) avait débouté le créancier en considérant qu'en raison du jugement ayant prononcé la clôture du redressement judiciaire pour extinction du passif il appartenait au créancier d'apporter la preuve qu'il n'avait pas été désintéressé de sa créance par la société débitrice.
Se pourvoyant en cassation, le créancier reprochait à l'arrêt d'appel d'avoir inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil (N° Lexbase : L1426ABG), aux termes duquel "celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation". Par cet arrêt appelé à la publication au Bulletin, la Chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi considérant que, "si le jugement de clôture pour extinction du passif n'a pas autorité de chose jugée quant à l'extinction des créances et si, dès lors, il ne rend pas irrecevable la demande en paiement formée par un créancier prétendant n'avoir pas été désintéressé, il appartient à celui-ci de rapporter la preuve de ce fait lorsque le jugement de clôture a été prononcé au motif que le passif avait été réglé ; qu'ayant relevé, au vu du jugement de clôture [...] que la société débitrice avait réglé, par anticipation, toutes les créances inscrites au plan, suivant les modalités de celui-ci, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il incombait [au créancier] de rapporter la preuve contraire".
Cet arrêt pose une solution inédite en matière de charge de la preuve de l'absence de paiement d'un créancier dans le cadre de la reprise de ses poursuites après clôture de la procédure collective du débiteur pour extinction du passif. Il donne, en outre, l'occasion de relever plusieurs questions relatives à la clôture de la procédure.
Tout d'abord, il apparaît, à deux titres, surprenant qu'ait été prononcée, en l'espèce, la clôture de la procédure pour extinction du passif.
La première remarque qui vient à l'esprit est la suivante : comment le passif avait-il pu être apuré sur trois ans alors que son règlement était prévu sur une durée de dix ans ? On sait, en effet, que le débiteur doit régler ses créanciers conformément aux dispositions du plan. S'il n'entend pas les respecter à la lettre, il lui appartient de solliciter du tribunal une modification du plan prévue à l'article L. 626-26 (N° Lexbase : L2418IB8), qui dispose qu'"une modification substantielle dans les objectifs ou les moyens du plan ne peut être décidée que par le tribunal, à la demande du débiteur et sur le rapport du commissaire à l'exécution du plan" (C. com., art. L. 621-69, al. 1er, anc. N° Lexbase : L6921AI8). De telles modifications portant sur les modalités d'apurement du passif -réduction de la durée de règlement de dix à trois ans- apparaissent incontestablement substantielles. Rappelons que, si le débiteur ne règle pas ses créanciers conformément aux dispositions du plan, il est passible des peines prévues par l'article L. 654-8 du Code de commerce (N° Lexbase : L4154HBH ; C. com., art. L 626-8, anc. N° Lexbase : L7064AIH), à savoir un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30 000 euros s'il effectue un paiement en violation des dispositions de règlement du passif prévues au plan. Dans cette espèce, un jugement de modification dans les moyens du plan aurait donc, logiquement, dû être rendu.
Il apparaît, ensuite, singulier qu'un jugement de clôture pour extinction du passif ait été rendu à la suite de l'exécution d'un plan de continuation. Remarquons, en effet, que, sous l'empire de la législation du 25 janvier 1985 (loi n° 85-98 N° Lexbase : L4126BMR), applicable en la cause, la fin du plan de continuation n'était pas officialisée par une décision de justice. Le texte n'envisageait pas la clôture des opérations du plan de continuation. La loi du 26 juillet 2005 (loi n° 2005-845 [LXB=L5150HGT ]) a innové à ce sujet en prévoyant que "quand il est établi que les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus, celui-ci [...] constate que l'exécution du plan est achevée" (C. com., art. L. 626-28 N° Lexbase : L4077HBM en sauvegarde, applicable également au plan de redressement par renvoi de l'article L. 631-19 N° Lexbase : L3314ICQ). La décision rendue n'est pas à proprement parler une décision de clôture des opérations du plan de redressement mais plutôt une décision de constat de l'exécution du plan (1).
Il apparaît ainsi que, dans l'espèce rapportée, le tribunal a fait preuve d'initiative en prononçant, à l'image de ce qui existe en matière de liquidation judiciaire, la clôture du plan de continuation pour extinction du passif.
Quoi qu'il en soit, la solution posée par la Chambre commerciale, dans ce cadre original de la clôture pour extinction du passif intervenue en plan de continuation, a vocation à s'appliquer dans le cadre plus classique de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour extinction du passif. Cette clôture est prévue par le Code de commerce, tant sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985 (C. com., art. L. 622-30, 1°, anc. N° Lexbase : L7025AIZ) que sous l'empire de la loi de sauvegarde des entreprises (C. com., art. L. 643-9, al. 2 N° Lexbase : L5568HDL), qui précisent qu'il y a place à clôture de la liquidation judiciaire "lorsqu'il n'existe plus de passif exigible ou que le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers".
Quid si, comme en l'espèce, la clôture pour extinction du passif est intervenue par erreur, alors qu'un créancier dont la créance a été admise au passif n'a pas été désintéressé ? En principe, cela doit rester sans conséquence pour le créancier car une différence essentielle existe quant aux effets respectifs de la clôture de la procédure pour extinction du passif et la clôture pour insuffisance d'actif. Seul "le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur" (C. com., art. L. 643-11, I N° Lexbase : L3338ICM, C. com, art. L. 622-32, al. 1er, anc. N° Lexbase : L7027AI4), sous réserve des exceptions prévues par le texte. Ainsi, la clôture de la procédure pour extinction du passif exigible n'interdit pas au créancier de demander au débiteur le paiement de sa créance (2).
La clôture pour extinction du passif suppose, comme son nom l'indique, que les créances soient éteintes (3). Cette extinction résultera classiquement du paiement du passif dont il sera fait état dans le jugement de clôture. Cependant, le jugement de clôture pour extinction du passif n'a pas autorité de chose jugée quant à l'extinction des créances et ne rend pas irrecevable la demande en paiement formée par un créancier. La Chambre commerciale rappelle ici que le débiteur ne peut donc se réfugier derrière l'autorité de la chose jugée attachée au jugement de clôture pour extinction du passif pour prétendre que la créance est éteinte (4). La clôture de la procédure pour extinction du passif n'interdira donc pas au créancier impayé de reprendre l'exercice de ses poursuites individuelles. Cependant, à qui va incomber la charge de la preuve de l'absence de désintéressement du créancier ? La Chambre commerciale répond ici à cette question en faisant peser la charge de cette preuve sur le créancier et non sur le débiteur. Est ainsi balayé l'argumentation du créancier qui soutenait que la cour d'appel avait inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil en obligeant le créancier à rapporter la preuve qu'il n'avait pas été désintéressé par la société débitrice.
Ainsi, le jugement de clôture pour extinction du passif, s'il n'a pas autorité de chose jugée quant à l'extinction des créances, a néanmoins pour effet d'emporter une présomption de règlement de l'intégralité des dettes du débiteur. Cette présomption simple devra être renversée par le créancier non désintéressé qui sera tenu de démontrer que sa créance n'a pas été réglée par le débiteur. Cette preuve ne sera pas aisée à rapporter car elle tend à l'établissement d'un fait négatif : il s'agit, pour le créancier, de prouver qu'il n'a pas été payé. ! Afin d'éviter cet écueil, le créancier non désintéressé serait bien avisé de former tierce-opposition réformation au jugement de clôture pour extinction du passif, sauf à considérer que cette décision est d'administration judiciaire et qu'elle n'est donc pas susceptible de recours, ce que nous ne pensons pas...
Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences à l'Université du Sud-Toulon-Var, Directrice du Master 2 Droit de la banque et de la société financière de la Faculté de droit de Toulon
L'article 1413 du Code civil (N° Lexbase : L1544ABS) pose le principe d'engagement des biens communs par l'initiative d'un époux, même agissant seul. Le créancier d'un époux peut, en conséquence, saisir les biens communs.
L'article 1414, alinéa 1er, du Code civil (N° Lexbase : L1545ABT) pose un tempérament pour la saisie des gains et salaires d'un époux lorsque la dette est entrée en communauté du chef de l'autre. Le principe est alors inversé : un créancier ne peut saisir les gains et salaires du conjoint de l'époux ayant fait naître la dette commune. Il n'est fait exception à ce principe que pour les dettes ménagères.
Interprété a contrario, ce texte conduit à décider que la saisie des gains et salaires est possible par un créancier si la dette est entrée en communauté du chef de ce conjoint, dont on veut saisir les gains et salaires. Les conditions d'un tel raisonnement sont réunies. L'article 1414, alinéa 1er, pose une exception au principe énoncé par l'article 1413 du Code civil : celui de l'engagement des biens communs par l'initiale d'un seul époux. Si l'on raisonne sur l'hypothèse de la naissance de la dette par l'initiative du conjoint du chef duquel on veut pratiquer une saisie des rémunérations, l'on n'est plus dans le cas explicitement visé à l'article 1414, alinéa 1er. En écartant ce dernier texte, puisque la situation sur laquelle on raisonne n'est pas celle visée au texte, on en revient au principe : celui de l'engagement des biens communs par l'initiale d'un seul des époux.
En énonçant à l'article 1414, alinéa 1er, du Code civil une telle exception au principe, le législateur fait apparaître que les gains et salaires ont la nature juridique de biens communs (5). Il n'en demeure pas moins qu'ils obéissent à un régime particulier : en effet, ils ne sont, en application de l'article 1414, alinéa 1er, engagés que par les dettes de l'époux qui les perçoit, et répondent du passif propre. Ces particularismes font écrire à des auteurs avertis du droit des régimes matrimoniaux que ces gains et salaires ont une nature hybride (6).
Quoi qu'il en soit, l'affirmation du caractère de biens communs des gains et salaires est lourde de conséquences, si une procédure collective s'ouvre contre l'un des époux communs en biens.
La Cour de cassation a déjà posé en règle que l'ouverture d'une procédure collective produit un effet de saisie réelle, en ce sens qu'elle joue comme une une saisie collective (7). La procédure collective fait tomber dans son périmètre tous les biens du débiteur, non seulement ses biens propres, mais encore tous les biens communs. La conjonction de l'effet de saisie collective qu'opère le jugement d'ouverture et de l'application de l'article1413 du Code civil, selon lequel "le paiement des dettes dont chaque époux est tenu, pour quelque cause que ce soit, pendant la communauté, peut toujours être poursuivi sur les biens communs", conduit à faire tomber dans le périmètre de la procédure collective tous les biens communs.
En application de ce principe, il n'apparaît pas possible de poursuivre le recouvrement d'une créance sur les biens communs, à l'encontre du conjoint. L solution a vocation à s'appliquer tant au régime de la communauté légale qu'à celui de la communauté universelle (8).
Si le conjoint est codébiteur, le créancier peut tenter d'exhiber cette qualité pour essayer de le poursuivre, non en tant que conjoint, mais en qualité de codébiteur. Mais il ne pourra obtenir paiement de celui-ci à l'aide d'argent commun, puisque les biens communs sont inclus dans le périmètre de la procédure collective.
Le droit du créancier à exécuter sur le débiteur sous sauvegarde, en redressement ou en liquidation judiciaire, conditionne son droit d'exécution sur l'époux in bonis. Si le créancier ne peut poursuivre l'époux commun en biens sous procédure collective, il ne pourra davantage poursuivre le conjoint commun en biens resté in bonis. Cette symétrie dans le droit de poursuite a bien été mise en évidence par la Cour de cassation. Ainsi, pour que le créancier puisse poursuivre en paiement le codébiteur in bonis, il faut qu'il ait le droit de poursuivre également le débiteur commun en biens sous procédure collective. Il n'en est ainsi que dans une hypothèse. Le créancier titulaire d'une sûreté spéciale retrouve son droit de poursuite du débiteur, sur le fondement de l'article L. 643-2, alinéa 1er, du Code de commerce (N° Lexbase : L3367ICP), lorsque le liquidateur n'a pas entrepris la vente du bien grevé dans les trois mois de la liquidation judiciaire. En pareille situation, ce créancier retrouve identiquement le droit de poursuivre le conjoint in bonis (9). La solution, qui existait déjà sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985 (C. com., art. L. 622-23, anc. N° Lexbase : L7018AIR) est reconductible sous l'empire de la loi de sauvegarde des entreprises, laquelle, tout en conservant le délai de principe de trois mois (C. com. art. L. 643-2, al. 1er), prévoit que, si le tribunal a envisagé un délai de présentation d'offres de cession de l'entreprise, la possibilité pour un créancier de reprendre ses poursuites individuelles est recouvrée soit au jour où le tribunal statue sur le plan de cession, dès lors que le bien n'est pas intégré dans le plan, soit à l'expiration de la période provisoire d'activité autorisée en liquidation judiciaire (C. com., art. L. 643-2, al. 2).
Ce cas de poursuite du codébiteur in bonis, commun en biens, est exceptionnel, comme l'est la possibilité de poursuivre le débiteur pendant sa procédure collective.
On pressent les difficultés que pourrait avoir un créancier à poursuivre le conjoint commun en biens, resté in bonis, alors même qu'il serait débiteur, en tentant de son chef une saisie des rémunérations. C'est la problématique sur laquelle a dû statuer la Cour de cassation, dans un arrêt de sa Chambre commerciale du 16 novembre 2010.
En l'espèce, deux époux ont donné à bail un immeuble à M. B.. Ce dernier avait réclamé l'exécution de travaux à ses bailleurs et un litige s'était élevé au sujet de cette dernière. L'époux bailleur avait été placé en redressement, puis en liquidation judiciaire. Trois ans plus tard, le locataire assignait ses bailleurs. Seule l'épouse commune en biens a été condamnée, du fait de la règle de l'arrêt des poursuites individuelles. Fort de cette condamnation, le locataire a alors tenté une saisie des rémunérations du chef de sa bailleresse, tout à la fois codébitrice in bonis, et épouse commune en biens.
Les juges du fond ont fait droit à la demande, du fait de la nature de revenus des sommes saisies. Implicitement, mais nécessairement, les juges du fond ont dû poser en postulat que les salaires de l'époux in bonis sont saisissables parce qu'ils ne sont pas des biens communs.
La Cour de cassation va censurer l'arrêt de la cour d'appel en ces termes : "les salaires d'un époux marié sous un régime de communauté sont des biens communs frappés par la saisie collective au profit de l'époux des créanciers de l'époux mis en procédure collective qui ne peuvent être saisis, pendant la durée de celle-ci, au profit d'un créancier de l'époux maître de ses biens".
La Cour de cassation ne statuait pas ici sur l'application de l'article 1414, alinéa 1er, du Code civil, puisque la saisie était faite du chef de l'époux ayant fait naître la dette commune, les deux époux, en l'occurrence ayant contracté cette dette.
Pour répondre à la question posée, la Cour de cassation devait impérativement qualifier les salaires : il s'agit, affirme-t-elle sans ambiguïté, de biens communs. Une fois l'affirmation posée, le raisonnement peut être déroulé de manière la plus simple.
La Cour de cassation réaffirme une nouvelle fois -c'est la troisième en 2010- que l'ouverture de la procédure collective produit un effet de saisie collective. Elle n'utilise pas ici le concept précédemment employé d'"effet réel" de la procédure collective, mais qu'importe, le résultat est le même. Puisque la procédure collective produit un effet de saisie collective, et puisque, par l'effet de l'article 1413 du Code civil, les actes d'un seul des époux engagent la communauté, la procédure collective appréhende à elle seule tous les biens communs. Ces derniers étant collectivement saisis, ils ne peuvent plus l'être individuellement au profit d'un créancier soumis à la discipline collective. Ce créancier n'a pas plus de droits à faire valoir sur les biens communs, que ce soit du chef de l'époux placé sous procédure collective ou du chef de son conjoint demeuré in bonis. La procédure collective opère in rem, et interdit toute initiative sur les biens qui y sont assujettis, ce qui est le cas des biens communs. Cela n'interdit pas, à notre sens, de poursuivre en paiement le codébiteur in bonis, époux commun en biens : le titre de condamnation semble pouvoir être obtenu, sous réserve des interdictions de poursuites des codébiteurs pendant la période d'observation de la sauvegarde ou du redressement judiciaire, depuis la loi de sauvegarde des entreprises (C. com., art. L. 622-28, al. 2 N° Lexbase : L3512IC3, texte de la sauvegarde applicable en redressement judiciaire). Ce qui, en revanche, est interdit est d'exercer des voies d'exécution ou des saisies conservatoires sur les biens communs, puisqu'ils sont déjà saisis collectivement par l'effet de l'ouverture de la procédure collective.
Si le créancier n'est pas concerné par la discipline collective, qui lui interdit d'obtenir paiement de sa créance, d'agir en justice pour en obtenir le paiement et de pratiquer des mesures d'exécution à cette même fin, alors il peut appréhender les biens communs. Ainsi, pour obtenir paiement d'une créance postérieure méritante, il peut agir non seulement contre le débiteur sous procédure collective, mais également contre son conjoint in bonis, commun en biens.
Enfin, précise la Cour de cassation, l'interdiction de pratiquer, du chef du conjoint époux commun en biens des mesures d'exécution sur les biens communs ne dure que le temps de la procédure collective. Et le raisonnement se comprend : la procédure collective provoque un effet de saisie collective. Cet effet cesse lorsqu'elle est clôturée. Cela ne signifie pas que, dans les rapports entre le créancier et le débiteur ayant été placé sous procédure collective, la poursuite après clôture de la procédure collective sera possible sur les biens communs. En effet, l'effet de saisie de la procédure collective est relayé à la clôture pour insuffisance d'actif par une interdiction de principe de reprise des poursuites individuelles. En revanche, cette interdiction, qui n'affecte que l'action en justice contre le débiteur et non pas le droit substantiel de créance, n'interdit nullement d'exercer des poursuites contre le codébiteur qui était resté in bonis, fut-il époux commun en biens.
Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du CERDP (ex Crajefe) et Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises
(1) V. en ce sens J. Vallansan, Difficultés des entreprises - Commentaire article par article du livre VI du Code de commerce, Litec, 4ème éd., n° 319 ; Sur les conditions du constat de l'exécution du plan de redressement, v. P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz, 2010/2011, n° 525.11.
(2) V. sur la question P.-M. Le Corre, préc., n° 592.25.
(3) "Ou que le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers" (C. com., art. L. 643-9, al. 2 N° Lexbase : L5568HDL).
(4) Cass. com., 4 octobre 2005, n° 03-17.619, F-P+B (N° Lexbase : A7050DKC), Bull. civ. IV, n° 192 ; D., 2005, AJ 2806, obs. A. Lienhard ; D., 2006, somm. 82, obs. P.-M. Le Corre ; JCP éd. E, 2006, chron. 1006, p. 74, n° 9, obs. M. Cabrillac ; Gaz. proc. coll., 2006/2, p. 36, obs. M. Sénéchal.
(5) J. Flour et G. Champenois, Les régimes matrimoniaux, éd. Armand Colin, 2ème éd., 2001, n° 451.
(6) J. Flour et G. Champenois, ibid..
(7) Cass. com., 16 mars 2010, n° 08-13.147, FS-P+B (N° Lexbase : A8033ETP), D., 2010, AJ p. 825, note A. Lienhard ; D., 2010, 1112, note M.-L. Bélaval ; D., 2010, pan. com. 1828, nos obs. ; Gaz. pal. éd. sp. Droit des entreprises en difficulté, 2 et 3 juillet 2010, n° 183 et 184, p. 13, note L. Antonini-Cochin ; Act. proc. coll., 2010/8, n° 122, note J. Vallansan.
(8) CA Colmar, 1ère ch., 26 novembre 2002, RD banc. et fin., 2004/1, p. 31, n° 33, obs. F.-X. Lucas.
(9) Ass. plén., 23 décembre 1994, n° 90-15.305 (N° Lexbase : A9933AYK), Bull. Ass. plén., n° 7, D., 1995, jur. 145, rapp. Y. Chartier, et note F. Derrida, JCP éd. N, 1995, II, 423, note. D. Randoux, JCP éd. E, 1995, II, 660, note Ph. Pétel, RJ com., 1995, 55 obs. M. Storck, Quot. jur., 7 février 1995, p. 5, note P. M., Banque, 1995, 91, obs. J.-L. Guillot ; Cass. com., 17 juin 1997, n° 95-14.470, inédit (N° Lexbase : A8326CUW), D., Affaires, 1997, 901.
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