Le Quotidien du 23 juin 2025 : Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Observations] La rechute d’une maladie professionnelle n’a pas pour effet de faire courir à nouveau le délai de prescription de l’action en faute inexcusable

Réf. : Cass. civ. 2, 5 juin 2025, n° 23-11.468, F-B N° Lexbase : B5695AEN

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N2492B3P

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[Observations] La rechute d’une maladie professionnelle n’a pas pour effet de faire courir à nouveau le délai de prescription de l’action en faute inexcusable. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/120585107-observations-la-rechute-dune-maladie-professionnelle-na-pas-pour-effet-de-faire-courir-a-nouveau-le-
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par Yann Bougenaux, Avocat associé, cabinet Oren Avocats

le 20 Juin 2025

► La Cour de cassation confirme sa jurisprudence selon laquelle la prise en charge d’une rechute par la CPAM ne fait pas courir de nouveau le délai de prescription de deux ans permettant d’intenter une action en reconnaissance de faute inexcusable de l’employeur.

Dans son arrêt du 5 juin 2025, publié au Bulletin, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence relative au délai de prescription en matière de faute inexcusable et de l’absence d’incidence de la prise en charge d’une rechute.

Un salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle peut tenter d’engager une procédure de reconnaissance de faute inexcusable à l’encontre de son employeur afin de bénéficier d’une indemnisation plus favorable.

Cette procédure est encadrée par des délais stricts, prévus à l’article L. 431-2 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L2713LWE, en ce qui concerne les accidents, et aux articles L. 461-1 N° Lexbase : L8868LHW et L. 461-5 N° Lexbase : L8865LHS du même Code, s’agissant des maladies professionnelles.

Il convient de retenir que le délai prévu par le Code de la Sécurité sociale est de deux ans mais que le point de départ peut varier et il sera retenu le point de départ le plus tardif afin de limiter les effets stricts du délai.

Pour synthétiser, les points de départ du délai les plus fréquents sont les suivants :

  • jour de l’accident ;
  • engagement d’une procédure pénale (ou issue de la procédure) ;
  • en cas de maladie professionnelle, de la date à laquelle la victime est informé par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle ;
  • jour de cessation du paiement de l’indemnité journalière en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

L’évènement le plus récent sera retenu.

Le cas qui était soumis à la Cour de cassation concernait un évènement imprévisible en cas de maladie professionnelle, en l’espèce une rechute.

La rechute est constituée d’un évènement nouveau, qui peut être une aggravation de la lésion initiale ou l’apparition d’une nouvelle lésion résultant directement de la maladie professionnelle originelle.

Ce qui distingue la rechute d’une nouvelle lésion (au sens juridique), c’est que la rechute intervient nécessairement après consolidation.

La rechute peut donc intervenir plusieurs années après la reconnaissance de la maladie professionnelle ou après la cessation du paiement de l’indemnité journalière, qui sont les deux points de départ les plus fréquent en matière de reconnaissance de faute inexcusable.

En particulier, la Cour de cassation devait se pencher sur le cas d’un salarié victime de l’amiante et dont la maladie professionnelle avait été reconnue en 2004.

Dans ce type de cas, la maladie professionnelle initiale peut être d’une gravité modérée mais s’aggraver de manière très importante par la suite.

En l’occurrence, le salarié s’était fait diagnostiquer un épaississement pleural en 2004 puis un mésothéliome 13 ans après en 2017, qui a entrainé son décès dans un délai très bref.

Ainsi, le salarié (ou ses ayants droits) sollicite que la rechute permette d’ouvrir un nouveau délai de deux ans pour solliciter la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur en raison de l’aggravation de sa pathologie.

Initialement, le salarié n’avait pas intenté cette action dans la mesure où les séquelles n’étaient pas, selon lui, particulièrement importantes.

Il change d’avis après avoir constaté une aggravation très importante de sa pathologie.

En face du côté employeur, se pose la question de la sécurité juridique, la maladie ayant été diagnostiquée 13 ans avant.

La cour d’appel (CA Nîmes, 29 novembre 2022, n° 20/00868 N° Lexbase : A55258XW, puis la Cour de cassation, ont toutes les deux rejetés l’argument des demandeurs en procédant à une application stricte des textes relatifs au délai de prescription.

La Cour rappelle alors que le Code de la Sécurité sociale prévoit une prescription de deux ans en cas de reconnaissance de maladie professionnelle.

Le salarié, qui se savait donc victime d’une maladie professionnelle, pouvait donc solliciter la reconnaissance de la maladie professionnelle de son employeur.

Puis la Cour rappelle que la rechute n’est pas considérée comme une nouvelle maladie mais la seule aggravation de la maladie initiale.

Il n’y a donc pas de nouveau délai qui s’ouvre dans ce cas.

Il s’agit d’une application stricte des textes, au détriment des salariés victimes et au bénéfice d’une sécurisation des cas permettant d’éviter des contentieux trop tardifs.

Pour les salariés, il convient dès lors d’engager une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, indépendamment de la gravité des lésions, surtout dans des cas de maladie professionnelle liée à l’amiante où il est malheureusement très fréquent que la pathologie s’aggrave de manière très importante plusieurs années après.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles, La faute inexcusable, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E56114QU.

 

 

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