Réf. : Proposition de loi tendant à renforcer les moyens de surveillance des individus condamnés pour des infractions sexuelles, violentes ou terroristes en ligne
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par Pauline Le Guen
le 27 Novembre 2024
Le 5 novembre 2024, la proposition de loi tendant à renforcer les moyens de surveillance des individus condamnés pour des infractions sexuelles, violentes ou terroristes a été adoptée en première lecture. Ce texte tend notamment à encadrer de façon plus efficace les demandes de changement d’état civil par les anciens condamnés ainsi qu’à assurer un meilleur suivi de ces individus.
La proposition de loi visant à renforcer la surveillance des condamnés pour infractions sexuelles, violentes ou terroristes, portée par Marie Mercier (LR), a été déposée le 11 septembre 2024 au Sénat. Comme a pu l’indiquer la sénatrice, cette proposition de loi vise notamment à encadrer de façon plus stricte les demandes de changement de nom ou de prénoms des anciens condamnés (I.) et assurer un meilleur suivi de ces personnes (II.).
I. Un meilleur encadrement des demandes de changement d’état civil des anciens condamnés
La loi du 2 mars 2022, relative au choix du nom issu de la filiation N° Lexbase : L7681MB4 est venue faciliter les démarches pour les personnes souhaitant changer de nom de famille. La loi dite « Vignal » permet en effet une procédure simplifiée pour ces démarches, mais aucun contrôle tenant à la légitimité de la demande n’est prévu. Ainsi, rapidement après son entrée en vigueur, des individus malveillants et anciens condamnés pour des faits particulièrement graves (crimes sexuels ou terroristes notamment) ont pu utiliser cette procédure afin de retrouver un certain anonymat. Comme l’a relevé Marie Mercier, cette situation a provoqué la colère des familles des victimes et une incompréhension quant à l’impossibilité pour l’officier d’état civil de vérifier les motivations de changement de nom. Par ailleurs, avec cette procédure, l’autorité judiciaire n’est pas avertie du changement d’état civil et aucune obligation de déclarer une inscription aux fichiers nationaux automatisés des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) ou terroristes (FIJAIT) n’est davantage prévue. La présente proposition de loi tend ainsi à tirer les conséquences des détournements procéduraux qui ont pu avoir lieu en raison de ces différentes lacunes législatives.
Le texte présenté reprend ainsi, dans un premier article, le dispositif voté en janvier 2024 par le Sénat, permettant une information systématique du procureur de la République lorsqu’un condamné pour des crimes terroristes ou sexuels demande un changement d’état civil. Si cette demande ne présente pas de motifs légitimes, le procureur pourra s’y opposer. Par ailleurs, l’article 1 de la proposition de loi prévoit que lorsque la demande de changement de nom concerne un majeur ou un mineur de plus de treize ans, elle doit comprendre le bulletin n° 2 et un document faisant état de l’inscription ou de l’absence d’inscription du demandeur aux fichiers mentionnés plus tôt. De même, lorsque la demande est susceptible de constituer une menace pour l’ordre public en raison de la condamnation ou de l’inscription de l’intéressé à l’un des fichiers, l’officier de l’état civil saisit sans délai le procureur de la République.
Enfin, le texte prévoit une modification du Code de procédure pénale imposant aux personnes condamnées ou inscrites dans l’un des fichiers de déclarer toute demande de changement de prénom ou de nom dans un délai de quinze jours après le dépôt de la demande, ainsi que tout changement dans un délai de quinze jours au plus tard après un tel changement.
II. Un renforcement du suivi des anciens condamnés
Au-delà de l’encadrement des demandes de changement d’état civil formulées par les anciens condamnés, la proposition de loi tend également à renforcer leur suivi. Ainsi, l’article 2 du texte étend la liste des infractions susceptibles d’entraîner l’inscription au FIJAISV. Est ainsi ajouté le délit d’incitation d’un mineur, par un moyen de communication électronique, à commettre tout acte de nature sexuelle, soit sur lui-même, soit sur ou avec un tiers ainsi que le délit de sollicitation auprès d’un mineur de la diffusion ou de la transmission d’images, vidéos ou représentations à caractère pédopornographiques, infractions prévues aux articles 227-22-2 N° Lexbase : L2647L4S et 227-23-1 N° Lexbase : L2650L4W du Code pénal depuis la loi du 21 avril 2022 N° Lexbase : L2442L49.
L’article 3 quant à lui reprend un dispositif voté par le Sénat en février 2024 et adopté par la commission des lois de l’Assemblée nationale, visant à faciliter la consultation du FIJAIVS. Les opérateurs de transport public de personnes pourront dès lors contrôler les antécédents judiciaires des personnes qu’ils emploient et des candidats. Ainsi, le texte prévoit que les condamnés ou les personnes inscrites aux fichiers ne pourront exercer les fonctions de conducteur de véhicule de transport public collectif routiers lorsque ces fonctions impliquent un contact habituel avec des mineurs ou des majeurs en situation de vulnérabilité. Le contrôle des incapacités sera assuré par la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire et un accès aux informations contenues dans le FIJAIVS sera accordé.
Il est également prévu que les académies et chefs d’établissements devront être informés en cas de mise en examen ou de condamnation d’un de leurs élèves ou futur élève pour terrorisme.
De surcroît, la peine complémentaire obligatoire d’interdiction définitive d’exercer une activité en contact habituel avec des mineurs est étendue à de nouvelles infractions sur mineurs (meurtre, proxénétisme et traite des êtres humains notamment) et une interdiction de droit d’exercer une telle activité pendant 10 ans est créée en cas de condamnation pour incitation des mineurs à commettre une infraction ou à se mettre en danger.
Enfin, les associations ou les employeurs de professions impliquant un contact habituel avec des enfants ou des personnes vulnérables pourront demander la transmission du bulletin n° 3 du casier, indiquant notamment les interdictions d’exercice.
L’Assemblée nationale doit désormais examiner la proposition de loi, qui lui a été transmise le 6 novembre 2024.
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