Réf. : Cass. com., 6 novembre 2024, n° 22-24.543, F-D N° Lexbase : A68606ES
Lecture: 3 min
N0942B3B
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Vincent Téchené
le 13 Novembre 2024
► Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d’appel qui refuse de décharger les cautions, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en s'abstenant d'exercer en temps utile ses droits de créancier nanti sur le fonds de commerce, la créancière n'avait pas fait perdre aux cautions un droit qui aurait pu leur bénéficier par subrogation.
Faits et procédure. Le 30 décembre 2013, une banque a consenti à une société un prêt de 280 000 euros, garanti par le nantissement du fonds de commerce exploité par la société, ainsi que par des cautionnements solidaires dans la limite de 80 500 euros chacun. Le 7 juillet 2015, la banque a résilié ses concours accordés à la société, laquelle a été mise en liquidation judiciaire le 13 avril 2016.
Le 9 octobre 2017, la banque a assigné en paiement deux cautions qui ont demandé à être déchargées de leurs engagements de caution sur le fondement de l'article 2314 du Code civil N° Lexbase : L1373HIP. Les cautions ayant été condamnées à payer une certaine somme (CA Paris, 5-6, 21 septembre 2022, n° 19/10286 N° Lexbase : A97838KK), elles ont formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation rappelle que selon l’article 2314, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192, du 15 septembre 2021 N° Lexbase : L8997L7D, la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution. On rappellera que l’ordonnance de réforme n’a pas modifié le sens de cette disposition (v. C. civ., art. 2314 N° Lexbase : L0178L84). La seule nouveauté de l’ordonnance concernant le bénéfice de subrogation est que la caution ne peut plus reprocher au créancier son choix du mode de réalisation d'une sûreté. Il s’agit ici d’une condamnation de la jurisprudence antérieure (Cass. com., 8 mars 2017, n° 14-29.819, F-D N° Lexbase : A4600T3R).
Dans l’affaire qui nous occupe, pour refuser de décharger les cautions, l'arrêt retient que, dès lors que le nantissement prévu au contrat de prêt a effectivement été inscrit le 10 janvier 2014, c'est vainement que les cautions reprochent à la banque le défaut de poursuites diverses, non prévues, qu'il est loisible au créancier d'exercer ou non.
Pour la Haute juridiction, en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en s'abstenant d'exercer en temps utile ses droits de créancier nanti sur le fonds de commerce, la banque n'avait pas fait perdre aux cautions un droit qui aurait pu leur bénéficier par subrogation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
En outre, la Cour rappelle qu’il incombe au créancier de prouver que la perte du droit préférentiel invoquée par la caution n'a causé aucun préjudice à celle-ci (v. déjà en ce sens, Cass. com., 13 décembre 2017, n° 16-14 672, F-D N° Lexbase : A1191W8M).
Ainsi l’arrêt d’appel est également censuré pour avoir inversé la charge de la preuve en refusant de décharger les cautions au motif que les cautions ne démontrent pas l'effectivité potentielle des mesures qu'ils reprochent à la banque de ne pas avoir mises en œuvre.
Pour aller plus loin :
|
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:490942