Le Quotidien du 27 octobre 2020 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Résiliation du bail d’habitation par le bailleur en liquidation judiciaire : obligation de respecter les dispositions d’ordre public de la loi de 1989

Réf. : Cass. com., 7 octobre 2020, deux arrêts, n° 19-10.685, FS-P+B (N° Lexbase : A33003XI) et n° 19-14.388, FS-P+B (N° Lexbase : A33553XK)

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[Brèves] Résiliation du bail d’habitation par le bailleur en liquidation judiciaire : obligation de respecter les dispositions d’ordre public de la loi de 1989. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/61069137-breves-resiliation-du-bail-dhabitation-par-le-bailleur-en-liquidation-judiciaire-obligation-de-respe
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par Vincent Téchené

le 23 Octobre 2020

► Lorsque le bailleur est mis en liquidation judiciaire, le liquidateur qui entend céder de gré à gré et libre d'occupation le logement donné à bail est tenu de délivrer au locataire un congé pour vendre, en se conformant aux dispositions de l’article 15, I et II de la loi du 6 juillet 1989 (N° Lexbase : L8461AGH).

Faits et procédures. Dans deux affaires similaires, une société a consenti un bail d'habitation. Un jugement du 22 février 2017 a étendu à la bailleresse la liquidation judiciaire ouverte le 9 novembre 2015 à l'égard d’une autre société. Estimant qu'il était nécessaire de procéder à la réalisation des actifs de la société non grevés de baux « manifestement anormaux » selon lui, le liquidateur a saisi le juge-commissaire de requêtes tendant à obtenir la résiliation des baux conclus, sur le fondement de l'article L. 641-11-1, IV du Code de commerce (N° Lexbase : L3298IC7). Le juge-commissaire ayant accueilli ces demandes, chaque locataire a formé un recours contre l’ordonnance le concernant et demandé le rejet de la demande de résiliation du liquidateur.

Par deux arrêts, la cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 15 novembre 2018, deux arrêts, n° 18/06789 N° Lexbase : A4110YLS et n° 18/06787 N° Lexbase : A2844YLW) a prononcé la résiliation des baux. Les locataires ont alors formé des pourvois en cassation.

Décisions. La Cour de cassation censure les deux arrêts d’appel au visa des articles 15, I et II de la loi du 6 juillet 1989 et L. 641-11-1, IV du Code de commerce. Elle énonce qu’il résulte du premier de ces textes que lorsque le bailleur entend résilier un bail d'habitation relevant des dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 pour vendre le logement donné à bail, il doit, en respectant un délai de préavis de six mois, délivrer un congé qui, à peine de nullité, doit être motivé par sa décision de vendre le logement et indiquer le prix et les conditions de la vente projetée, le congé valant offre de vente au profit du locataire. Or, l’article L. 641-11-1, IV du Code de commerce n'excluant pas l'application de l’article 15 précité en cas de liquidation judiciaire, il s'ensuit que, lorsque le bailleur est mis en liquidation judiciaire, le liquidateur qui entend céder de gré à gré et libre d'occupation le logement donné à bail est tenu de délivrer au locataire un congé pour vendre, en se conformant aux dispositions du premier texte.

Pour prononcer la résiliation des baux d'habitation consentis par la société débitrice, les arrêts d’appel retiennent identiquement que, les dispositions de l'article L. 641-11-1, IV du Code du commerce étant dérogatoires au droit commun, celles-ci ne peuvent, à défaut de dispositions d'exception expressément mentionnées, céder devant les dispositions de la loi du 6 juillet 1989 relatives au congé pour vendre.

Dès lors, pour la Cour de cassation, en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Par ailleurs, dans l’un de ces deux arrêts (pourvoi n° 19-10.685), la Cour de cassation opère une seconde censure.

En effet, pour prononcer la résiliation du bail, l'arrêt d’appel retient que c'est à bon droit que le juge-commissaire a fait droit à ses demandes de résiliation d'un bail conclu de façon évidente au détriment des intérêts de la société bailleresse eu égard à la sous-évaluation du loyer consenti par des membres de l'entourage proche des locataires, et donc au détriment des créanciers, et que la résiliation du bail dans de telles circonstances ne revêt pas pour les locataires, qui ne le démontrent pas, de conséquences manifestement excessives.

Or, selon la Haute juridiction, il résulte de l’article L. 641-11-1, IV du Code de commerce que la résiliation d'un contrat en cours à la date du jugement ouvrant la liquidation judiciaire peut être demandée par le liquidateur, lorsque la prestation du débiteur ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent, au juge-commissaire qui ne peut prononcer la résiliation que si deux conditions cumulatives sont réunies : cette résiliation est nécessaire aux opérations de liquidation et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant.

Ainsi, en se déterminant par des motifs insuffisants à caractériser en quoi la résiliation du bail était concrètement nécessaire aux opérations de liquidation, et en quoi l'atteinte portée aux intérêts du locataire n'était pas excessive, cependant que le bail dont la résiliation était demandée, portant sur la résidence principale des intéressés, se trouvait soumis aux dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Pour aller plus loin, v. ÉTUDE : Les règles communes aux contrats en cours, Le droit pour l'organe titulaire de l'option de faire prononcer la résiliation du contrat, in Entreprises en difficulté, Lexbase (N° Lexbase : E0051EUG).

 

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