Le Quotidien du 31 août 2022

Le Quotidien

Droit des étrangers

[Brèves] Analyse insuffisante des risques concernant l’expulsion de ressortissants russes d'origine tchétchène vers la Russie par les autorités françaises : violation de l'article 3 de la CESDH

Réf. : CEDH, 30 août 2022, deux arrêts, Req. 49857/20, R c/ France (N° Lexbase : A30788G4) et Req. 1348/21, W c/ France (N° Lexbase : A30798G7)

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N2478BZS

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par Marie Le Guerroué

Le 30 Août 2022

► Dans deux arrêts rendus le 30 août 2022, la Cour dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme (interdiction de la torture et des traitements inhumains et dégradants) par les autorités françaises en raison d’une analyse insuffisante des risques concernant l’expulsion de ressortissants russes d'origine tchétchène vers la Russie.

Faits et procédure. Le premier arrêt de chambre concerne l’expulsion d'un ressortissant russe d’origine tchétchène, mise à exécution vers la Russie après la révocation de son statut de réfugié. Le second arrêt concerne une mesure d’expulsion vers la Russie prise également à l’encontre d’un ressortissant russe d’origine tchétchène dont le statut de réfugié a été révoqué sur le fondement de l'article L. 711-4 du CESEDA N° Lexbase : L1901LMD. Le requérant soutenait devant la Cour que son renvoi en Russie l'exposerait à des risques, car la préfecture avait transmis au consulat de la Fédération de Russie des éléments détaillés sur sa situation personnelle avec la demande de réadmission.

Décisions de la Cour. S’agissant du premier arrêt, après avoir relevé que le requérant avait conservé la qualité de réfugié, en dépit de la révocation de son statut sur le fondement de l’article L. 711-6 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile N° Lexbase : L1904LMH, la Cour rappelle qu'en vertu de sa jurisprudence, le fait que l’intéressé ait la qualité de réfugié est un élément qui doit particulièrement être pris en compte par les autorités internes lorsqu’elles examinent la réalité du risque allégué en cas d’expulsion. La Cour note ensuite que le tribunal administratif a rejeté, la veille de l’éloignement effectif du requérant, le référé suspension introduit par le requérant sans en indiquer expressément les motifs. Par deux jugements postérieurs à la mise en œuvre de la mesure d'éloignement, le tribunal administratif a rejeté les recours en annulation du requérant dirigés contre l’arrêté d’expulsion et la décision fixant la Russie comme pays de destination. La Cour considère que cette solution était fondée sur une évaluation approfondie de la situation du requérant, mais juge que cet examen ayant été effectué après l’expulsion du requérant vers la Russie, l’appréciation portée par le tribunal administratif ne saurait remédier aux insuffisances de l’analyse des risques effectuée avant l’éloignement. Dans cette affaire « R c. France », la Cour dit donc, à l’unanimité, qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

S’agissant du second arrêt de chambre, estimant que des faits sérieux et avérés conduisent à caractériser l'existence d'un risque réel de voir le requérant subir des traitements contraires à l’article 3 de la Convention en cas de renvoi en Russie, la Cour conclut, dans cet arrêt « W c. France » que la décision de renvoyer l’intéressé vers la Fédération de Russie emporterait également violation de l’article 3 de la Convention si elle était mise à exécution.

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Droit social européen

[Brèves] Ancienneté pécuniaire : appréciation européenne de la méthode de calcul de la rémunération des sapeurs-pompiers professionnels

Réf. : CJUE, 7 juillet 2022, aff. C-377/21 N° Lexbase : A04968AM

Lecture: 3 min

N2271BZ7

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par Lisa Poinsot

Le 30 Août 2022

► La clause 4 de l’accord-cadre européen sur le travail à temps partiel doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui, aux fins du calcul de la rémunération des pompiers professionnels engagés à temps plein, valorise, à titre d’ancienneté pécuniaire, les services préalablement fournis à temps partiel, en qualité de pompier volontaire, selon le principe du prorata temporis, c’est-à-dire en fonction des prestations réellement effectuées.

Faits et procédure. Un travailleur a d’abord été engagé comme sapeur-pompier volontaire dans le secteur public puis sapeur-pompier chauffeur poids lourd, par contrat de travail dans le secteur privé, avant d’être nommé sapeur-pompier professionnel chauffeur.

Pour calculer sa rémunération, il est tenu compte de « l’ancienneté pécuniaire » déterminée en fonction de la valorisation, sous certaines conditions, de la durée des services qu’ils ont fournis dans les secteurs public et privé. Sont ainsi prises en compte les périodes durant lesquelles il a été sapeur-pompier volontaire dans le secteur public et dans le secteur privé.

Contestant la méthode retenue pour calculer la rémunération qui lui est due en tant que pompier professionnel, c’est-à-dire en tant que travailleur à temps plein, le sapeur-pompier saisit la juridiction nationale compétente. Il invoque l’existence d’une différence de traitement contraire à la clause 4 de l’accord-cadre européen N° Lexbase : L8293AUP, en ce que l’application des règles relatives à la prise en compte de son ancienneté pécuniaire au titre d’une période pendant laquelle il a exercé une activité à temps partiel, en tant que pompier volontaire, aurait une incidence négative sur le montant de cette rémunération.

Cette juridiction relève que les pompiers volontaires et les pompiers professionnels accomplissent des missions semblables dans un même corps et que, dès lors, ils constituent des catégories comparables. En outre, l’activité de pompier volontaire est une activité accessoire qui s’inscrit dans une relation de travail de nature statutaire et non contractuelle.

Elle considère, par ailleurs, que l’accord-cadre européen du 6 juin 1997 s’applique à la situation des pompiers volontaires, de sorte que le demandeur peut se prévaloir, s’agissant de la détermination de son ancienneté pécuniaire relative à la période durant laquelle il a travaillé à temps partiel, d’une législation relative aux travailleurs à temps partiel.

Toutefois, la juridiction nationale saisit la CJUE d’une question préjudicielle :

« la clause 4 de l’accord-cadre doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale qui, aux fins du calcul de la rémunération des pompiers professionnels engagés à temps plein, valorise, à titre d’ancienneté pécuniaire, les services que ceux-ci ont préalablement fournis à temps partiel, en qualité de pompiers volontaires, selon le principe du prorata temporis, c’est-à-dire en fonction des prestations qu’ils ont réellement effectuées, et non en fonction de la période durant laquelle ces prestations ont été effectuées ? »

La solution. Énonçant la solution susvisée, la CJUE relève, en premier lieu, que l’application, en ce qui concerne de tels pompiers professionnels, d’un élément déterminant le niveau de leur rémunération, tel que l’ancienneté pécuniaire, qui correspond au pourcentage du temps de travail qu’ils ont accompli en tant que travailleurs à temps partiel par rapport au temps de travail accompli par les travailleurs à temps plein exerçant la même activité, constitue une application appropriée du principe du prorata temporis.

En second lieu, la détermination de l’ancienneté pécuniaire dépend directement de la quantité de travail effectuée par le travailleur concerné, et non exclusivement de la durée de l’ancienneté acquise par celui-ci.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le contrat de travail à temps partiel, La mise en place du travail à temps partiel dans l’entreprise, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0349GA8.

 

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Élections professionnelles

[Pratique professionnelle] Le vote électronique aux élections professionnelles au CSE

Lecture: 15 min

N2256BZL

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par Julien Damiano, Avocat, Greenwich Avocats

Le 30 Août 2022

Mots-clés : CSE  • élections • vote électronique • ressources humaines  • responsable des ressources humaines • DRH • droit social

De plus en plus d’entreprises font le choix du recours au vote électronique, notamment dans le cadre du renouvellement de leur CSE. Compte tenu de la souplesse qu’offre cette modalité pour l’organisation du scrutin, la loi et la jurisprudence définissent un cadre permettant notamment de garantir le respect des grands principes présidant aux élections professionnelles. Cet article a vocation à analyser comment la pratique et la théorie modèlent ce système, au carrefour du droit du travail, du droit électoral et du RGPD.


Les élections législatives et présidentielles les plus récentes l’ont montré avec force : l’acte de vote perd au fil des ans sa symbolique civique et l’abstentionnisme grimpe en flèche. Mais derrière ce dernier ne se cache pas uniquement un acte de militantisme face au panel de candidats composant le paysage politique, comme beaucoup aiment à le dire : il faut y ajouter une certaine paresse inavouée des électeurs à l’idée de devoir se déplacer ou d’anticiper un retour de week-end pour arriver avant la fermeture de leur bureau de vote et accomplir ce qu’ils considèrent désormais plus comme un devoir, qu’un droit. C’est vrai, à l’ère du numérique où tout est dématérialisé, pourquoi ne pas voter à distance ? À l’inverse, d’autres aimeraient pouvoir aller voter, mais travaillent le dimanche et ne peuvent matériellement aller voter, à moins d’établir une procuration.

Derrière ces situations se cachent les limites du vote physique : organisation matérielle lourde pour les organisateurs, manque d’envie et de temps pour les électeurs.

Alors, pourquoi ne pas instaurer le vote électronique ?

Si à l’échelle d’un État, on comprend qu’il soit limité, pour des raisons budgétaires évidentes, à ses seuls ressortissants vivant à l’étranger, de plus en plus d’entreprises y ont recours dans le cadre de la mise en place ou du renouvellement de leur comité social et économique.

Les retours d’expérience sont globalement très positifs du côté de l’entreprise comme du côté des salariés ou encore des syndicats : meilleur taux de participation, automatisation de la rédaction du procès-verbal, gain de temps considérable et fin des enveloppes multicolores, diminution des risques de contentieux.

Face à ce succès grandissant, comment mettre en place ce vote électronique tout en garantissant la validité et le succès de ses élections ?

Il convient avant toute chose de prendre connaissance des règles applicables, le vote électronique pour les élections au CSE étant strictement encadré par la loi et la jurisprudence, ce processus se trouvant à la croisée des chemins entre le droit du travail, le droit électoral et le RGPD.

De plus, la CNIL a émis une recommandation le 25 avril 2019 N° Lexbase : Z612398N qu’il est judicieux de consulter avant de mettre en œuvre le vote électronique, dans la mesure où elle détermine différents niveaux de risques et objectifs de sécurité à atteindre, en fonction notamment de la taille de l’entreprise, de son climat social et des enjeux « politiques » liés aux élections professionnelles [1].

Enfin, de nombreux prestataires proposent aujourd’hui d’accompagner les entreprises. Cependant, il convient de s’assurer qu’elles seront à même d’assister les entreprises dans le respect des obligations ci-après décrites.

Quelques grands principes à respecter

La Cour de cassation a fréquemment l’occasion de rappeler les grands principes généraux du droit électoral et veille à leur respect scrupuleux par les entreprises, notamment dans le cadre du contentieux relatif au vote électronique, relevant des dispositions légales classiques portant sur le contentieux électoral.

Ainsi, pour garantir l’authenticité du vote électronique, dans la mesure où le votant n’est plus identifié physiquement par les membres d’un bureau de vote, mais par des accès informatiques, la Cour de cassation considère que le vote électronique est strictement personnel. Il n’est donc pas possible de faire une procuration à un autre salarié de l’entreprise [2].

Mais encore et pour la première fois récemment, la Haute juridiction a étendu l’application du principe d’égalité d’exercice du droit de vote entre les salariés électeurs au vote électronique, dans un arrêt destiné à être publié au bulletin [3].

Dans cette affaire, tous les salariés occupant la fonction de distributeur et relevant du collège « employés » qui ne disposaient pas, contrairement aux salariés agents de maîtrise et cadres, d’un bureau ou d’un poste de travail (soit un ordinateur professionnel, une tablette, etc.) dans le cadre de leurs fonctions, rencontraient des difficultés pour voter lors du scrutin.

L’employeur, invoquant la protection de la confidentialité et de la sincérité du scrutin, avait décidé d’interdire à ses salariés distributeurs, d’une part, de recourir au matériel informatique des salariés agents de maîtrise et cadres et, d’autre part, d’apporter à l’entreprise un ordinateur personnel.

Estimant que l’employeur portait atteinte à l’égalité des salariés face à l’exercice du droit de vote, deux syndicats décidaient de saisir le tribunal judiciaire en annulation des élections.

Devant les premiers juges, l’employeur soutenait qu’il n’avait pas le choix, ne pouvant, selon lui, pour des raisons de confidentialité, de sécurité et de sincérité du scrutin, dont il était le garant, autoriser des salariés du collège « employés » à utiliser les ordinateurs professionnels de leurs collègues de travail.

De plus, il arguait qu’il ne pouvait y avoir atteinte au principe d’égalité des électeurs dès lors que, d’une part, les salariés du collège « employés » n’étaient pas placés dans une situation identique à celles des salariés des autres collèges et que, d’autre part, ils pouvaient voter. À cet égard, il faisait valoir que les salariés du collège « employés » avaient bénéficié d’un délai de huit jours pour avoir accès à une connexion internet leur permettant de voter, en dehors de l’entreprise.

Le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a rejeté cette argumentation et la Cour de cassation a validé sa décision. En synthèse, le recours au vote électronique ne permet pas de déroger au principe d’égalité dans l’exercice du droit de vote et l’employeur aurait dû mettre à la disposition de ses distributeurs le matériel nécessaire [4].

On ne peut que saluer cette décision : la position retenue par l’employeur dans cette espèce n’étant pas légitime puisqu’il est toujours possible de retenir une formule hybride entre vote électronique et vote sous enveloppe, sauf si l’accord collectif, mentionné ci-après, exclut expressément cette possibilité.

Mise en place du vote électronique

La mise en place du vote électronique est régie par les articles R. 2314-5 et suivants du Code du travail N° Lexbase : L0631LI9.

Ab initio, le vote électronique doit être prévu par accord d’entreprise ou de groupe [5] « classique », c’est-à-dire que cet accord est soumis aux règles de validité issues du droit de la négociation collective.

L’accord collectif prévoyant le vote électronique doit nécessairement être conclu au niveau de l’entreprise ou du groupe, avant de pouvoir être décliné par accord d’établissement [6].

L’accord doit être déposé auprès de la DREETS avant la signature du protocole d’accord préélectoral (PAP) [7], qui fera mention expresse de l’existence de l’accord régulièrement déposé et, le cas échéant, du prestataire choisi.

Il est donc primordial d’intégrer cette phase de négociation et de conclusion d’un accord dans le rétroplanning des élections et de faire preuve d’anticipation, notamment par rapport à la date d’expiration des mandats en cours, en cas de renouvellement du CSE.

En cas d’échec des négociations menées loyalement ou au sein des entreprises dans lesquelles il n’y a pas de délégué syndical [8], l’employeur ne sera pas lésé et pourra toujours décider de mettre en place le vote électronique par décision unilatérale, en informant l’ensemble du personnel.

De plus, le RGPD du 25 mai 2018 précise que le système n’a pas à être déclaré à la CNIL. En revanche, l’entreprise devra identifier le niveau de risque du vote, effectuer une analyse d’impact le cas échéant, inscrire le fichier dans leur registre des activités de traitement et informer les électeurs des conditions de traitement des données.

Enfin, le Code du travail impose à l’employeur de fournir à ses salariés une note explicative portant sur le déroulement du vote [9].

Conception du vote électronique

La conception et la mise en place peuvent être assurées par l’entreprise ou être confiées à un prestataire spécialisé choisi sur la base d’un cahier des charges [10]. Ce recours à un prestataire ne décharge pas l’entreprise de sa responsabilité du traitement des données dans la mesure où c’est sur elle que pèsent l’obligation de sécurité et la finalité du traitement [11].

Le cahier des charges doit être établi dans l'accord collectif ou, à défaut, par l'employeur, doit être tenu à la disposition des salariés sur le lieu de travail et mis en ligne sur l’intranet de l’entreprise, lorsqu’il existe.

Le cahier des charges n’est soumis à aucune condition de forme, mais demeure obligatoire, dans la mesure où il contient les données techniques et les attentes de l’entreprise sur le recours au vote électronique [12].

C’est donc, en principe, ce cahier des charges qui va déterminer le choix du prestataire, sauf à ce que l’entreprise décide de mettre en place son propre système, si elle en a les capacités techniques.

De même, le prestataire choisi doit être en mesure d’assurer qu’il traite toute donnée conformément au RGPD.

Ceci étant, le vote doit assurer la confidentialité des données transmises et notamment des fichiers constitués pour établir les listes électorales, la sécurité de la transmission des moyens d’authentification, de l’émargement, de l’enregistrement et du dépouillement (clés de chiffrement, codes confidentiels, système de scellé de l’urne, détermination des personnes habilitées à y accéder en cas d’incident, etc.).

La Cour de cassation a pu interpréter la portée de ces dispositions, décidant, par exemple, que le technicien informatique de l’entreprise pouvait prendre connaissance du sens du vote d’un salarié si son intervention a lieu à la demande expresse de ce dernier [13].

L’article R. 2314-9 du Code du travail N° Lexbase : L0627LI3 trouve enfin toute son importance, dans la mesure où il impose à l’employeur de faire procéder à un contrôle de conformité du système de vote électronique par un expert indépendant, lors de sa mise en place ou à l’occasion de toute modification substantielle.

Sur cette question, la jurisprudence du Conseil d’ État et celle de la Cour de cassation divergent : le premier considère que ce contrôle de conformité doit avoir lieu avant chaque scrutin [14], tandis que la seconde, plus souple, considère que seule une modification substantielle du système impose un nouveau contrôle de conformité [15].

Le rapport doit être tenu à la disposition de la CNIL, qui considère que l’expertise doit couvrir tout le dispositif avant le scrutin, l’utilisation pendant le scrutin et les opérations postérieures au vote [16].

Pour schématiser les étapes ci-dessus rappelées :

  • conclusion d’un accord collectif sur le vote électronique ou décision unilatérale de l’employeur ;
  • rédaction d’un cahier des charges ;
  • contrôle de conformité du système lors de sa mise en place ou d’une modification substantielle ;
  • tout ceci, avec ou sans recours à un prestataire spécialisé.

    Collaboration avec les salariés et la représentation élue

    Une des clés de la réussite des opérations de vote électronique, d’après les retours d’expérience de différentes entreprises, est d’intégrer pleinement les salariés, la représentation élue et les organisations syndicales existantes à ce processus.

    À ce titre, le Code du travail prévoit, tout d’abord, que l’employeur doit assurer une formation sur le système de vote aux membres de la délégation du personnel et aux membres du bureau de vote (qui peuvent être les élus dont le mandat est en cours). Cette formation est, dans les faits, relativement rapide puisque la plateforme de vote est en elle-même facile d’utilisation.

    Ensuite, l’employeur doit remettre à chaque salarié électeur une notice d’utilisation [17].

    En réalité, et cela peut sembler peu original, il est important d’instaurer un dialogue avec la représentation élue sur le vote électronique et de ne pas hésiter à l’associer aux tests du système, en plus de la formation, afin de les rassurer sur les garanties de sincérité, de confidentialité et de régularité du système.

    Il en va de même avec les organisations syndicales, notamment lorsque c’est la première fois que le vote électronique est instauré.

    Généralement, le contentieux électoral portant sur une demande d’élections professionnelles après recours au vote électronique trouve sa source dans la mise en doute de la sincérité du scrutin.

    Les obligations de l’employeur

    Tout d’abord, l’employeur doit mettre en place une cellule d’assistance chargée :

    • de veiller au bon fonctionnement et à la surveillance du système ;
    • de procéder à des vérifications avant l’ouverture du vote (test du système, vérification que l’urne est vide, chiffrée et scellée par plusieurs clés) ;
    • de tester le système de dépouillement.

    Tous ces tests étant effectués en présence des représentants des listes électorales [18].

    L’employeur doit également établir les listes électorales, étant responsable de la conformité des listes importées sur le système de vote et du contrôle des candidatures (par rapport aux conditions définies dans le PAP).

    L’employeur doit enfin mettre en place une cellule de secours en cas de panne [19].

    À toutes ces obligations, préside le respect constant de la confidentialité des données transmises et importées dans le système.

    Déroulement du scrutin

    C’est bien là tout l’avantage du scrutin par vote électronique : il peut se dérouler aussi bien pendant le temps de travail qu’en dehors et dans les locaux de l’entreprise, comme à distance [20].

    Ainsi, les salariés, qu’ils soient en congés payés, en télétravail, en arrêt de travail ou en déplacement professionnel, pourront voter.

    En effet, la Haute juridiction a pu préciser que le principe selon lequel le vote doit avoir lieu pendant le temps du travail, en application de l’article L. 2314-27 du Code du travail N° Lexbase : L8483LGB, ne s’applique pas au vote électronique [21].

    Cette souplesse est un des atouts du vote électronique. Sa conséquence directe, d’après les entreprises, est une augmentation du taux de participation aux élections professionnelles.

    Enfin, la plateforme est ouverte, à chaque scrutin, pendant une période de temps prédéterminée, qui peut durer plusieurs jours.

    Pour le reste, c’est assez simple :

    • le vote se fait au moyen d’une authentification sur la plateforme avec un identifiant et un code strictement personnels, afin de garantir l’unicité du vote ;
    • lesdits identifiants et mots de passe sont transmis à chaque salarié selon un moyen sécurisé, permettant à l’employeur de s’assurer que les électeurs en sont les seuls destinataires, à peine de nullité des élections [22]. Le principe de personnalité du vote oblige. Pour la Cour de cassation, l’envoi des identifiants sur une messagerie professionnelle avec mot de passe présente une garantie suffisante [23] ;
    • après l’identification, l’électeur est dirigé sur une page qui lui permet, en quelques « clics », de faire son vote et de le valider, ce qui le rend définitif ;
    • le vote est anonyme et le salarié reçoit un accusé de réception attestant de son vote, qu’il pourra conserver ;
    • quand la période de vote est clôturée, l’urne est scellée, son contenu et les listes d’émargement étant figés et horodatés.

    À l’issue du vote, la cellule d’assistance contrôle le scellé du système entre la clôture du vote et le dépouillement.

    Lors du dépouillement, tout est automatisé. Le procès-verbal des élections est établi automatiquement, ce qui représente là encore un gain de temps précieux. Le risque de contestation des résultats est quant à lui fortement diminué, car il n’y a pas de place à l’erreur.

    Après le dépouillement

    Après le dépouillement, les fichiers supports sont conservés sous scellés par l’employeur ou le prestataire jusqu’à l’expiration du délai de recours et, lorsqu’une action contentieuse a été engagée, jusqu’au prononcé de la décision devenue définitive. À l’expiration de ces délais, l’employeur procède à leur destruction [24].

    Très récemment, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur deux questions :

    • en cas de contestation des élections et après la clôture des opérations de vote, qui a accès à la liste d’émargement ?
    • à quelle date apprécier, en cas de recours au vote électronique, l’ancienneté des électeurs et des candidats, notamment quand le scrutin dure plusieurs jours ?

    Sur la première de ces deux questions, la Haute juridiction a tranché : seul le juge compétent en matière de contentieux électoral peut avoir accès à la liste d’émargement après la clôture des opérations de vote.

    En effet, la Cour de cassation déduit de l’arrêté du 25 avril 2007 N° Lexbase : L3398HX7 et de l’article R. 2314-17 du Code du travail N° Lexbase : L0619LIR que les parties intéressées peuvent toujours demander l’intervention du juge après la clôture du scrutin.

    Ainsi, même si elles ne disposent pas d’un droit d’accès aux listes d’émargement, les parties intéressées peuvent, après la clôture du scrutin, contester judiciairement les élections et demander au juge que lesdites listes soient tenues à sa disposition afin qu’il procède à leur vérification.

    Quant à la seconde question, qui peut s’avérer essentielle pour déterminer l’éligibilité d’un salarié (et le cas échéant, la protection y afférente), la Cour de cassation censure le jugement querellé, considérant qu’en cas de recours au vote électronique se déroulant sur plusieurs jours, les conditions d’ancienneté dans l’entreprise pour être électeur et éligible s’apprécient à la date du premier jour du scrutin, le protocole d’accord préélectoral ne pouvant déroger à cette règle [25].

    Pour conclure

    Traduit en termes juridiques, le recours au vote électronique peut sembler fastidieux, mais en pratique, il est d’une grande simplicité dans sa mise en place et son utilisation. Il convient simplement de l’anticiper dans le rétroplanning des élections professionnelles, notamment par rapport à la date d’expiration des mandats. Avec autant de souplesse mise à la disposition des entreprises et des salariés, les excuses pour ne pas voter vont se faire rares…


    [1] CNIL, délibération n° 2019-053, du 25 avril 2019 N° Lexbase : Z612398N.

    [2] Cass. soc., 3 octobre 2018, n° 17-29.022, F-P+B N° Lexbase : A5411YE7.

    [3] Cass. soc., 1er juin 2022, n° 20-22.860, F-B N° Lexbase : A58487YA.

    [4] Attendu de principe : « ayant relevé, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de preuve, que la société, alertée sur les difficultés de certains salariés, parmi les distributeurs ne disposant d’aucun bureau ni poste de travail dans les locaux de la société, à se connecter sur la plate-forme de vote durant la période d’ouverture du vote, avait interdit, pour des raisons de confidentialité, toute utilisation des ordinateurs de la société par les distributeurs ou d’un ordinateur personnel par ces derniers au sein de l’entreprise, sans avoir l’assurance que l’ensemble de ses salariés pourraient avoir accès à un matériel permettant d’exercer leur droit de vote et sans justifier de ce qui l’empêchait de mettre en place des procédés permettant de pallier le défaut d’accès de ses distributeurs au matériel de vote, comme, par exemple, la mise en place dans ses établissements des terminaux dédiés au vote électronique avec un protocole garantissant la sécurité et la confidentialité des votes, le tribunal en a déduit que la société n’avait pas pris les précautions appropriées pour que ne soit écartée du scrutin aucune personne ne disposant pas du matériel nécessaire ou résidant dans une zone non desservie par internet, ce dont il résultait une atteinte au principe général d’égalité face à l’exercice du droit de vote, constituant à elle seule une cause d’annulation du scrutin, quelle que soit son incidence sur le résultat. Le tribunal a ainsi légalement justifié sa décision, sans être tenu de procéder aux recherches prétendument omises que ses constatations rendaient inopérantes ».

    [5] C. trav., art. R. 2314-5 N° Lexbase : L0631LI9.

    [6] Cass. soc., 10 mars 2010, n° 09-60.096, FS-P+B N° Lexbase : A1862ET7.

    [7] Cass. soc., 28 septembre 2011, n° 11-60.028, FS-P+B N° Lexbase : A1304HYX.

    [8] Cass. soc., 13 janvier 2021, n° 19-23.533, FS-P+R+I N° Lexbase : A23054CD.

    [9] C. trav., art. R. 2314-12 N° Lexbase : L0624LIX.

    [10] C. trav., art. R. 2314-5 et R. 2314-6 N° Lexbase : L0630LI8.

    [11] CE, 11 mars 2015, n° 368748, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6899NDU ; CNIL, délibération n° 2019-053, précit.

    [12] Cass. soc., 3 novembre 2016, n° 15-21.574, FS-P+B N° Lexbase : A8973SE3.

    [13] Cass. soc., 14 novembre 2013, n° 13-10.519, FS-P+B N° Lexbase : A6236KPN.

    [14] CE, 11 mars 2015, n° 368748, préc.

    [15] Cass. soc., 21 septembre 2016, n° 15-60.216, FS-P+B N° Lexbase : A9984R38.

    [16] CNIL, délibération n° 2010-371, du 21 octobre 2010 N° Lexbase : Z24205KS.

    [17] C. trav., art. R. 2314-12 N° Lexbase : L0624LIX.

    [18] C. trav., art. R. 2314-10 N° Lexbase : L0626LIZ et R. 2314-15 N° Lexbase : L0621LIT.

    [19] Arrêté du 25 avril 2007, pris en application du décret n° 2007-602, du 25 avril 2007, relatif aux conditions et aux modalités de vote par voie électronique pour l’élection des délégués du personnel et des représentants du personnel au comité d’entreprise et modifiant le Code du travail N° Lexbase : L3398HX7.

    [20] C. trav., art. R. 2314-5 N° Lexbase : L0631LI9.

    [21] Cass. soc., 5 avril 2011, n° 10-19.951, F-P+B N° Lexbase : A3430HND.

    [22] CE, 11 mars 2015, préc. ; Cass. soc., 27 février 2013, n° 12-14.415, FS-P+B N° Lexbase : A8744I8D.

    [23] Cass. soc., 14 décembre 2015, n° 15-16.491, F-D N° Lexbase : A8750NZ4.

    [24] C. trav., art. R. 2314-17 N° Lexbase : L0619LIR.

    [25] Cass. soc., 23 mars 2022, n° 20-20.047, FS-B N° Lexbase : A12727RK.

    newsid:482256

    Formation professionnelle

    [Brèves] CPF : une proposition de loi pour lutter contre les abus et fraudes

    Réf. : AN, proposition de loi n° 212, 23 août 2022

    Lecture: 2 min

    N2477BZR

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    par Charlotte Moronval

    Le 30 Août 2022

    ► Une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale le 23 août 2022 afin de lutter contre les abus et les fraudes au compte personnel de formation (CPF).

    Principales dispositions. L’article 1er du texte interdit le démarchage téléphonique, par SMS et par courriel des organismes de formation en vue de lutter contre la fraude au CPF. L’interdiction sera inscrite dans le Code de la consommation.

    Le texte inscrit également l’interdiction du démarchage téléphonique concernant le CPF dans le Code du travail, dès lors que ce démarchage n’a pas lieu dans le cadre d’une prestation en cours entre un individu et un organisme de formation.

    L’article habilite également les agents de la DGCCRF à rechercher et constater les manquements à cette disposition et de veiller ainsi au respect de cette interdiction.

    L’article 2 permet à la Caisse des dépôts et consignations, à France compétences et aux services de l’État compétents d’échanger toute information utile à la prévention et à la détection des fraudes, à la réalisation des contrôles et aux sanctions à prendre en cas de manquement des titulaires de compte et des prestataires d’actions concourant au développement des compétences aux conditions générales d’utilisation de « Mon compte formation ». Les services de l’État qui pourront notamment être concernés sont, en fonction des fraudes identifiées, les services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour le démarchage abusif et ceux du ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion.

    L’article vise également à permettre à la cellule de renseignement financier nationale, TRACFIN, de transmettre des informations à la Caisse des dépôts et consignations et à l’Agence de services et de paiement aux fins notamment de mieux lutter contre la fraude au CPF.

    Calendrier. Le texte sera débattu à l’automne.

    Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le compte personnel de formation, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3975EYU.

    newsid:482477

    Procédure pénale/Détention provisoire

    [Brèves] Appel d’une ordonnance de prolongation de détention provisoire : précision sur la notion de « vérifications » de l'article 194 du Code de procédure pénale

    Réf. : Cass. crim., 27 juillet 2022, n° 22-83.212, F-D N° Lexbase : A30518DD

    Lecture: 6 min

    N2479BZT

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    par Adélaïde Léon

    Le 21 Septembre 2022

    ► Conformément aux articles 194 et 199 du Code de procédure pénale, la chambre de l’instruction saisie du recours contre une ordonnance de prolongation de détention provisoire doit se prononcer dans les plus brefs délais et au plus tard dans les quinze jours de l’appel, ce délai étant prolongé de cinq jours en cas de comparution personnelle de la personne concernée. En cas de non respect des délais impartis, les investigations destinées à déterminer les raisons pour lesquelles la comparution par visioconférence de l’intéressé n’a pu être réalisée ne constituent pas des vérifications au sens de l’article 194 du Code de procédure pénale susceptibles de justifier l’absence de remise en liberté de l’intéressé.

    Rappel des faits. Un individu est mis en examen des chefs de tentatives de meurtre aggravé, vol aggravé, recel, en bande organisée, association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes et placé en détention provisoire.

    Par ordonnance du 30 mars 2022, le juge des libertés et de la détention (JLD) a prolongé sa détention provisoire pour une durée de six mois.

    Le 11 avril 2022, l’intéressé a formé appel de cette décision en demandant à comparaître personnellement devant la chambre de l’instruction.

    Le 13 avril 2022, un avis d’audience, adressé au centre pénitentiaire pour notification au mis en examen, a été retourné à la juridiction avec la mention « reçu notification le 13 avril 2022 ». Le 27 avril 2022, l’intéressé n’a pas comparu. Il s’est avéré que l’administration pénitentiaire avait programmé une visioconférence avec un autre détenu portant le même nom de famille.

    Le 28 avril 2022, la chambre de l’instruction a renvoyé l’examen de l’appel à une audience ultérieure, afin de procéder à des investigations pour déterminer les raisons pour lesquelles il n’avait pas été programmé de visioconférence avec le demandeur, et pour identifier le circuit suivi par la convocation.

    Les parties ont été convoquées pour une nouvelle audience au 4 mai 2022.

    Préalablement à cette audience, une demande de mise en liberté d’office du mis en examen a été présentée à la chambre de l’instruction au motif qu’elle n’avait pas statué sur l’appel dont elle était saisie dans le délai imparti.

    En cause d’appel. La chambre de l’instruction a écarté le moyen tiré du dépassement du délai de vingt jours. Les juges d’appel, estimant que des investigations devaient être effectuées compte tenu de l’irrégularité alléguée de la convocation du mis en examen, ont ordonné un renvoi de l’affaire.

    La juridiction d’instruction du second degré a ajouté, sur le fond, qu’elle ne pouvait apprécier la question du bien-fondé du renvoi ainsi que les motifs qu’elle a elle-même retenus, cette question ne pouvant être appréciée que par la Cour de Cassation, elle-même saisie d’un pourvoi contre l’arrêt du 28 avril 2022.

    Le mis en examen a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction du 5 mai 2022.

    Moyens du pourvoi. Il était fait grief à la juridiction d’appel d’avoir rejeté la nullité, refusé d’ordonner la mise en liberté et confirmé l’ordonnance de prolongation.

    La chambre de l’instruction saisie le 11 avril de l’appel contre l’ordonnance de prolongation de la détention provisoire a statué le 5 mai, soit après le délai de vingt jours, lequel expirait le 2 mai 2022, et ce sans caractériser une circonstance imprévisible ou insurmontable extérieure au service de la justice, ni la nécessité d’effectuer des vérifications concernant la demande du prévenu.

    Décision. La Chambre criminelle casse l’arrêt au visa des articles 194 N° Lexbase : L8103MAD et 199 N° Lexbase : L1339MAT du Code de procédure pénale.

    La Haute juridiction souligne qu’en vertu de ces textes, la chambre de l’instruction saisie du recours contre une ordonnance de prolongation de détention provisoire doit se prononcer dans les plus brefs délais et au plus tard dans les quinze jours de l’appel, ce délai étant prolongé de cinq jours en cas de comparution personnelle de la personne concernée. À défaut de respect des délais impartis, l’intéressé est remis d’office en liberté. Il peut être fait exception à ce dernier point dans deux hypothèses :

    • des vérifications concernant la demande de la personne concernée ont été ordonnées ;
    • des circonstances imprévisibles et insurmontables font obstacle au jugement de l’affaire dans le délai imparti.

    La Chambre criminelle juge que le raisonnement de la chambre de l’instruction, qui a statué le 5 mai 2022 au-delà du délai de vingt jours suivant la déclaration d’appel accompagnée d’une demande de comparution personnelle devant elle, a méconnu les textes précités.

    D’une part, les investigations portant sur les raisons pour lesquelles la visioconférence n’avait pas été correctement programmée ne constituent pas des vérifications concernant une demande formulée par le mis en examen.

    D’autre part, aucune circonstance imprévisible et insurmontable, extérieure au service la justice, fait obstacle au jugement de l’affaire dans les délais légaux n’est en l’espèce caractérisée.

    Dès lors, aucune des exceptions à la remise en liberté d’office, en cas de non respect des délais impartis à la chambre de l’instruction pour statuer sur un recours contre une ordonnance de prolongation de détention provisoire, n’était en l’espèce constituée.

    La Chambre criminelle casse l’arrêt de la chambre de l’instruction.

    Portée et conséquences de la cassation. Selon toute vraisemblance, le mis en examen aurait dû être remis en liberté sauf s’il était détenu pour une autre cause.

    Toutefois, l’article 803-7, alinéa 1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L4833K8I permet à la Cour de placer sous contrôle judiciaire la personne dont la détention provisoire est irrégulière en raison de la méconnaissance du Code de procédure pénale dès lors que la procédure fait apparaître des éléments d’information pertinents et que la mesure paraît indispensable pour assurer l’un des objectifs énumérés à l’article 144 du Code de procédure pénale (motifs de placement ou de prolongation de la détention provisoire).

    En l’espèce, considérant qu’il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable que l’intéressé ait pu participer, comme auteur ou complice à la commission des infractions objets de l’instruction, la Cour estime que la mesure de contrôle judiciaire est indispensable pour :

    • empêcher une concertation frauduleuse et prévenir le risque de pression sur les témoins ou les victimes ;
    • maintenir le mis en examen à la disposition de la justice.
    Pour aller plus loin : E. Catelan, ÉTUDE : Les mesures de contrainte au cours de l’instruction : contrôle judiciaire, Le contentieux du placement en détention provisoirein Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E4182Z9R.

    newsid:482479

    Responsabilité médicale

    [Brèves] Devoir d’information : de la nécessité d’une information complète conforme à la littérature médicale

    Réf. : Cass. civ. 1, 6 juillet 2022, n° 21-14.939, F-D N° Lexbase : A51338AD

    Lecture: 2 min

    N2323BZ3

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    par Laïla Bedja

    Le 30 Août 2022

    ► Selon l’article L. 1111-2 du Code de la santé publique, l'information due à toute personne sur son état de santé porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent, ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.

    Les faits et procédure. Le patient a subi une arthroplastie, accompagnée de la pose d’un implant, réalisée par un chirurgien.

    Le patient a assigné le chirurgien en responsabilité et indemnisation au titre de différents manquements, notamment dans l’information préalable à l’intervention.

    La cour d’appel. Pour rejeter les demandes du patient au titre d'un manquement du praticien à son devoir d'information, la cour d’appel (CA Montpellier, 9 février 2021, n° 17/00233 N° Lexbase : A19434G3) retient, en se fondant sur le rapport d'expertise, que, si le risque d'échec évoqué par le chirurgien de l'ordre de 10 à 12 % est nettement inférieur à celui de la littérature plus proche de 40 % d'échec ou de résultat incomplet et si l'information donnée a été imparfaite sur la qualité des résultats à attendre, il n'est pas sûr que le patient aurait modifié sa décision s'il avait eu une connaissance plus exacte de ces résultats dans la mesure où il se trouvait dans une impasse thérapeutique et en déduit qu'aucune faute d'information ne peut être retenue.

    La décision. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt de la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations. En effet, l’information donnée par le praticien était imparfaite sur la qualité des résultats à attendre quant à l’intervention proposée, le médecin ayant indiqué un risque d’échec de 10 à 12 % alors que la littérature médicale annonce un risque d’échec ou de résultat incomplet plus proche des 40 % (CSP, art. L. 1111-2 N° Lexbase : L4848LWH).

    Pour aller plus loin : C. Hussar, ÉTUDE : La responsabilité civile des professionnels de santé, La responsabilité pour faute des professionnels de santé, in Droit médical, Lexbase N° Lexbase : E12983RI, e) La faute dans le devoir d'information du soignant.

    newsid:482323

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