Le Quotidien du 9 août 2022

Le Quotidien

Avocats/Honoraires

[Focus] Une société peut-elle payer les frais d'avocat de son dirigeant ?

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par Gaëlle Deharo, Full Professor - ESCE international Business School, Centre de recherche sur la justice et le procès - OMNES Education research center

Le 05 Août 2022

Mots-clés : focus • avocat • honoraires • frais • société 


 

La question de la rémunération de l’avocat s’inscrit dans un cadre normatif défini par l’article 10 de loi n° 71-1130, du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ, les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID, les articles 10 et suivants du décret 2005-790, du 12 juillet 2005 N° Lexbase : L6025IGA et l’article 11 du Règlement Intérieur National N° Lexbase : L4063IP8. Si ces dispositions envisagent la détermination du montant des honoraires, l’organisation du contentieux portant sur ceux-ci et les modalités de recouvrement, la matière n’en recèle pas moins un contentieux abondant tenant, notamment, à l’évolution [1] et à la diversité des relations entre l’avocat et son client.

Plus spécifiquement, la question ici posée est la suivante : une société peut-elle payer les frais d'avocat de son dirigeant ?  

Il est courant de relever que la question des honoraires d’avocat est au confluent du droit des contrats et du droit spécial applicable aux avocats, mais la question ici posée interroge l’articulation du droit des contrats, du droit spécial applicable aux avocats et du droit des sociétés. Plus précisément, la question renvoie à l’hypothèse dans laquelle la société s’engage à prendre en charge les honoraires de l’avocat intervenant pour la défense des intérêts du dirigeant au bénéfice duquel la prestation de l’avocat est effectuée. L’opération que représente la défense des intérêts du dirigeant concerne alors trois parties distinctes unies par une convention indivisible [2] : l’avocat, le dirigeant et la société. La jurisprudence a précisé que la convention d’honoraires conclue dans ce cadre n’est pas une convention réglementée [3], mais sa validité doit néanmoins être appréciée sous l’éclairage des dispositions applicables à la profession d’avocat, du droit des contrats et du droit des sociétés. 

La prise en charge des frais d’avocat sous l’éclairage des dispositions applicables à la profession d’avocat

Il n’existe pas de dispositions spéciales relatives à la prise en charge des honoraires par une société. Il convient cependant de souligner que le dirigeant peut solliciter l’avocat en son nom personnel, en sa qualité de dirigeant ou en qualité de représentant de la société. Toute la difficulté est alors de déterminer selon quelle qualité il a fait appel à l’avocat : l’hypothèse renvoie alors à la détermination du débiteur. La jurisprudence a précisé que celle-ci ne relève pas de la procédure spéciale de contestation des honoraires d’avocats. Aussi, le juge de l’honoraire saisi d’une contestation relative à l’identité du débiteur des honoraires doit surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la juridiction compétente pour en connaitre [4]. Sous cet éclairage, le droit spécial de la profession d’avocat ne permet donc pas d’apporter une réponse univoque à la question de la prise en charge des frais d’avocat par la société.

La question doit encore être appréciée à l’aune des obligations déontologiques de l’avocat ; exerçant sa mission en toute indépendance, l’avocat ne saurait se trouver placé dans une situation de dépendance économique [5] à l’égard de la société.

La prise en charge des frais d’avocat sous l’éclairage des dispositions du droit des contrats

Selon l’article 1128 du Code civil N° Lexbase : L1228AB4, trois conditions sont essentielles pour la validité de la convention : le consentement de la partie qui s’oblige, sa capacité de contracter et un objet certain qui forme la matière de l’engagement. Ces différentes conditions s’imposent non seulement à la convention d’honoraires déterminant la rémunération de l’avocat, mais également à la clause prévoyant que la société prend en charge les honoraires de l’avocat. Il convient de préciser ici que la société peut fixer un plafond des honoraires pris en charge [6].

L’obligation de paiement mise à la charge de la société doit être appréciée sous l’éclairage du droit des sociétés : d’une part, la société doit avoir régulièrement accepté la prise en charge des honoraires, d’autre elle doit disposer de la capacité juridique et son représentant doit disposer du pouvoir d’agir dans ce cadre, enfin l’objet de la convention ne doit pas contrevenir à l’intérêt social.

La prise en charge des frais d’avocat sous l’éclairage des dispositions du droit des sociétés

Au risque d’une tautologie, il convient de rappeler que la société, personne morale, est apte à être titulaire de droits propres qu’elle exerce par l’intermédiaire d’un organe de direction agissant en son nom et pour son compte. Dans ce cadre, le dirigeant accomplit sa mission dans le respect des lois et règlements en vigueur, avec diligence et compétence, et doit rendre compte des fautes commises dans sa gestion. De façon générale, le principe se dégage que le dirigeant est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom de la société dans le respect de l’objet social de cette dernière.

Application : l’intérêt social

En principe, il n’appartient pas à une société de prendre en charge les honoraires d'avocat exposés pour la seule défense des intérêts de ses associés ou dirigeants dans un procès dans lequel elle n'est pas partie. Nonobstant l’apparente simplicité de ce principe, les solutions dégagées par la jurisprudence sont très contrastées.

La Cour de cassation a dégagé une jurisprudence complexe en matière sociale ; au terme de celle-ci, l’employeur doit prendre en charge les frais d’avocat de ses salariés lorsque le contentieux est lié à l’exercice de la mission de ceux-ci  [7]. À l’opposé, lorsque ce qui est reproché au salarié est détachable de sa mission, l’employeur n’est pas tenu de prendre en charge les frais exposés [8]. Cette jurisprudence a largement inspiré les solutions consacrées plus spécifiquement à l’hypothèse de la prise en charge par la société des frais d’avocat du dirigeant : dans les deux cas, c’est l’intérêt social qui préside à la possibilité pour une société de prendre en charge les frais d’avocat [9].

Plus spécifiquement, c’est l’existence d’un lien entre ce qui est reproché au dirigeant (et contre quoi il doit se défendre) et l’activité de la société qui détermine si les honoraires de l’avocat peuvent être mis à la charge de la société : 

  • s’il existe un lien quelconque, entre ce qui est reproché au dirigeant et la société, son exploitation ou son activité, les frais d’avocat ne sont pas engagés dans le seul intérêt personnel du dirigeant [10]. Ainsi, la société peut prendre en charge les frais d’avocat de son dirigeant lorsqu’il existe une contrepartie des frais exposés [11] ;
  • S’il n’existe pas de lien entre ce qui est reproché au dirigeant et l’exploitation de la société, les honoraires de l’avocat ne doivent pas être imputés à la société. Dans une telle hypothèse, la société qui supporterait les frais d’un contentieux personnel au dirigeant pourrait être considérée comme ayant accordé une libéralité à celui-ci. La jurisprudence a jugé qu’en cas de violation des statuts ou de faute de gestion, par exemple, la société n’a pas à prendre en charge les frais d’avocat et peut même en demander le remboursement [12].

Si le critère semble clair, la grande diversité des hypothèses dans lesquelles le dirigeant peut être mis en cause implique une distinction très nuancée des différentes situations. Ainsi, la question de la faute non-intentionnelle du dirigeant constitue une question complexe qui reste soumise à la détermination de l’existence d’un lien entre les faits reprochés et la mission du dirigeant qui peut n’être déterminée qu’a posteriori par la décision prononcée par la juridiction.

Sanctions

Les frais d’avocat exposés pour la défense des intérêts personnels du dirigeant, sans lien avec ses fonctions, constituent des frais personnels qui n’ont pas lieu d’être payés par la société. Aussi, différentes conséquences doivent être envisagées :

  • la question se pose du statut de la somme exposée. À cet égard, la jurisprudence a précisé qu’à défaut d’intérêt pour la société, la prise en charge des honoraires d’avocat exposés pour la défense des intérêts d’un dirigeant, agissant en son nom personnel et non en sa qualité de dirigeant, constitue un revenu distribué imposable entre les mains de ce dirigeant [13] ;
  • les honoraires versés à des tiers constituent des frais généraux déductibles s’ils sont justifiés par l’intérêt direct de l’entreprise et non par l’intérêt personnel du dirigeant [14] ;
  • le paiement par la société des honoraires d’avocat au bénéfice du seul dirigeant constitue un acte anormal de gestion susceptible d’engager la responsabilité civile et pénale de son auteur ;
  • du point de vue civil, la question est assez classique dès lors que le paiement indu des honoraires d’avocat constitue un préjudice pour la société directement causé par l’acte anormal de gestion ;
  • du point de vue pénal, le fait de mettre à la charge de la société des frais d’avocat sans lien avec la fonction de dirigeant constitue un usage des biens de la société à des fins personnelles et contraires à l’intérêt de la société qui, s’il est accompli de mauvaise foi, dans une société à responsabilité limitée, est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375 000 euros [15].

Au demeurant, l’avocat doit prendre garde à ne pas être considéré comme complice de cette infraction.

À retenir

La grande diversité des hypothèses dans lesquelles un dirigeant peut engager sa responsabilité invite à questionner la possibilité pour la société de prendre en charge les frais exposés pour sa défense.

Il n’existe pas de texte organisant ou interdisant la prise en charge des frais d’avocat du dirigeant par la société et il ne s’agit pas davantage d’une convention réglementée.

La jurisprudence en la matière est contrastée.

C’est l’intérêt social qui constitue la pierre angulaire de la prise en charge des honoraires d’avocat par la société.

Les sanctions en la matière sont lourdes et intéressent les matières civiles, pénales et fiscales.

 

[1] G. Deharo, Rupture de la relation entre l’avocat et son client : quand les questions commerciales s’invitent dans le contentieux de la profession d’avocat, Lexbase Avocats, janvier 2022 N° Lexbase : N9898BYA.

[2] CA Paris, 18 juin 2020, n° 16/00608 N° Lexbase : A96123NC.

[3] CA Paris, 18 juin 2020, n° 16/00608 N° Lexbase : A96123NC.

[4] Cass. civ. 2, 28 mars 2013, n° 12-17.493, F-P+B N° Lexbase : A2712KB3.

[5] Cass. civ. 2, 9 décembre 2021, n° 20-10.096, F-P+B N° Lexbase : A48147EZ.

[6] M. Le Guerroué, L’administration refuse de payer les factures de l’avocat : qui est compétent pour régler le contentieux ?, Lexbase Avocats, octobre 2021 N° Lexbase : N8967BYR.

[7] E. Daoud, B. Bouche, L’intérêt social, vecteur de la décision de prise en charge des frais de défense pénale du dirigeant ou du salarié, AJ Pénal, 2014, 348.

[8] Cass. soc., 18 octobre 2006, n° 04-48.612, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A9633DR9.

[9] E. Daoud, B. Bouche, L’intérêt social, vecteur de la décision de prise en charge des frais de défense pénale du dirigeant ou du salarié, AJ Pénal, 2014, 348.

[10] CAA Paris, 9 juin 2021, n° 20PA01202 N° Lexbase : A10624WA.

[11] Cass. com., 7 octobre 2020 n° 19-12.996 N° Lexbase : A32863XY.

[12] CA Montpellier, 26 mars 2013, n° 11/08719 N° Lexbase : A9489KAP.

[13] CAA Versailles, 1er juin 2017, n° 15VE01815 et n° 15VE01816 N° Lexbase : A2889WG4.

[14] CAA Paris, 9 juin 2021, n° 20PA01202 N° Lexbase : A10624WA.

[15] C. com., art. L. 241-3, 4° N° Lexbase : L9516IY4.

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Conventions et accords collectifs

[Brèves] Extension d’un accord relatif au regroupement de branches professionnelles conditionnées à des motifs d’intérêt général

Réf. : CE, 4e-1e ch. réunies, 5 juillet 2022, n° 444949, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A916779E

Lecture: 4 min

N2311BZM

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par Lisa Poinsot

Le 04 Août 2022

► Si l’exercice par le ministre du Travail de son pouvoir de fusion de branches professionnelles est conditionné à l’existence de conditions sociales et économiques analogues entre les branches concernées, l’extension d’un accord collectif par le ministre du Travail n’est pas subordonnée au respect d’une telle condition ;

Toutefois, il lui appartient, lorsqu’il est saisi d’une demande d’extension d’un tel accord, d’apprécier, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si des motifs d’intérêt général sont de nature à s’opposer à l’extension, alors même que la restructuration des branches répond, en principe et par elle-même, à des conditions d’intérêt général.

Faits et procédure. Deux syndicats demandent l’annulation de l’arrêté du 10 juillet 2020 de la ministre du Travail, portant extension d’un accord collectif relatif au regroupement des branches professionnelles des entreprises techniques au service de la création et de l’événement et des mannequins adultes et mannequins enfants de moins de seize ans employés par les agences de mannequins.

Pour fonder leur demande, les requérants soutiennent que :

  • l’arrêté procède à l’extension d’un accord négocié et conclu sans que l'ensemble des organisations syndicales représentatives n'aient été associées à toutes les réunions de négociation de cet accord ;
  • la procédure de négociation de l'accord de rapprochement entre les branches professionnelles des entreprises techniques au service de la création et de l'événement et des mannequins adultes et mannequins enfants de moins de seize ans employés par les agences de mannequins est irrégulière en ce que l'information de ce regroupement a été dissimulée aux organisations syndicales et patronales de la branche des mannequins ;
  • des considérations d'intérêt général tenant notamment à l'hétérogénéité des conditions sociales et économiques des deux branches auraient dû conduire la ministre du Travail à refuser de procéder à l'extension de l'accord collectif de rapprochement entre les deux branches en cause ;
  • au regard de l’objet de l’accord étendu, la ministre du Travail aurait dû formuler dans son arrêté une réserve permettant de préserver les dispositions d'ordre public et les stipulations en vigueur relatives au travail des enfants mannequins et à la protection de la santé des mannequins.

La solution. Énonçant la solution susvisée, le Conseil d’État affirme, tout d’abord, en application de l’article L. 2261-19 du Code du travail N° Lexbase : L7753LGA, que les syndicats requérants ont pu prendre connaissance en temps utile du projet de regroupement et exprimer en l'occurrence leur rejet de ce projet. En outre, au sein des commissions paritaires, se trouvaient des organisations syndicales représentatives de chaque branche.

Ensuite, aux termes des articles L. 2261-15 N° Lexbase : L0633LZH et L. 2261-25 N° Lexbase : L1463LKE du Code du travail, il considère que les deux branches en cause se caractérisent par des conditions sociales et économiques qui ne sont pas dénuées de points de convergence puisque ces branches relèvent de la même institution de prévoyance et du même opérateur de compétences en matière de formation professionnelle. Il n’existe donc pas d’hétérogénéité des conditions sociales et économiques mettant en exergue des considérations d’intérêt général.

Enfin, le Conseil d’État relève que l’accord étendu se borne à prévoir le regroupement des deux branches professionnelles concernées et à définir le champ d’application de la future convention commune ainsi que la méthode de négociation de celle-ci. L’accord ne se substitue pas aux stipulations conventionnelles applicables antérieurement au regroupement, de sorte qu’aucune réserve formulée par le ministre du Travail n’était nécessaire sur le fondement de l’article L. 2261-33 du Code du travail N° Lexbase : L6673K9Z.

Pour aller plus loin :

  • v. ÉTUDE : L’application des conventions collectives, La restructuration des branches professionnelles, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E7447E9P ;
  • v. ÉTUDE : Les dispositions propres aux accords de branches, Les acteurs de la procédure d’extension des conventions et accords de branche, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2344ETY.

 

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Droit financier

[Brèves] Sanction d’un dépositaire pour des manquements à ses obligations professionnelles

Réf. : AMF CS, décision du 6 juillet 2022, sanction N° Lexbase : L5292MDD

Lecture: 3 min

N2408BZ9

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par Vincent Téchené

Le 14 Septembre 2022

► Dans une décision du 20 juillet 2022, la Commission des sanctions de l’AMF a infligé à une société dépositaire une sanction de 500 000 euros assortie d’un avertissement pour exercice lacunaire du contrôle dépositaire et suivi irrégulier et défaillant de certains flux de liquidités.

La société sanctionnée est un établissement de crédit qui, à l’époque des faits, exerçait principalement une activité de banque dépositaire d’OPCVM et de FIA, à destination de fonds d’investissement et de clients institutionnels.

Dans le cadre de cette activité, l’établissement concerné avait notamment pour mission de contrôler si les OPCVM dont il était dépositaire respectaient les ratios d’investissement et de composition de l’actif qui leur étaient applicables et, en cas de dépassement de l’un de ces ratios, de mettre en œuvre une procédure d’intervention par paliers.

Après analyse d’un échantillon de dépassements de ratios par les contrôleurs, il était reproché au dépositaire vingt-huit anomalies dans la mise en œuvre de cette procédure d’intervention. La Commission des sanctions a considéré que vingt-cinq de ces anomalies étaient avérées, tout en précisant que plusieurs anomalies retenues procédaient des mêmes faits et étaient redondantes entre elles.

La Commission a en revanche écarté les reproches formulés par la poursuite quant à l’absence d’attribution d’un identifiant unique propre à chacun des dépassements de ratios identifiés, ou à l’existence d’incohérences entre les dates de début de dépassement recensées dans les différents outils de contrôle et de reporting utilisés par la mise en cause.

Le dépositaire avait également pour mission le suivi des flux de liquidités entrants et sortants des fonds dont elle était dépositaire. À ce titre, il devait identifier les flux importants et en particulier ceux qui pourraient ne pas correspondre aux activités du FIA, et s’assurer que les instructions dont pouvaient procéder ces flux n’étaient pas contraires aux dispositions législatives ou réglementaires, au règlement et aux documents constitutifs ainsi qu'au prospectus du FIA.

Sur la base d’une extraction de plusieurs milliers de flux relatifs à sept FIA dont l’intéressé était dépositaire sur une période de quarante-cinq mois, les contrôleurs ont identifié quatorze flux problématiques.

La Commission a estimé que pour l’ensemble de ces quatorze flux, la société mise en cause n’avait pas recueilli des documents suffisamment précis et probants pour se conformer aux obligations précitées.

S’agissant particulièrement de cinq de ces flux, qui correspondaient à des avances en compte courant versées par l’un des FIA à une société bénéficiaire, la Commission a également estimé que l’intéressé avait manqué à son obligation de s’assurer que le fonds concerné bénéficiait bien de 5 % au moins du capital de cette société.

 

newsid:482408

Droit pénal de l'environnement

[Jurisprudence] Première convention judiciaire d’intérêt public environnementale : la justice pénale dos à l’Histoire

Réf. : Convention judiciaire d'intérêt public entre le vice-procureur de la République près le tribunal judiciaire du Puy-en-Velay et le Syndicat Mixte de Production et d'Adduction d'Eau (SYMPAE), 22 octobre 2021 N° Lexbase : L7376MAG

Lecture: 8 min

N0424BZQ

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par Julien Lagoutte, Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’Université de Bordeaux, Institut des sciences criminelles et de la justice

Le 05 Août 2022

Mots-clés : Convention judiciaire d'intérêt public environnementale • CJIPE • SYMPAE • AAPMA • FDPHL • droit pénal de l'environnement • préjudice environnemental • pollution • eau

La première convention judiciaire d’intérêt public environnementale – alternative aux poursuites introduite par la loi du 24 décembre 2020 relative, entre autres, à la justice environnementale – a été conclue puis validée à la fin de l’année passée. Répondant, en l’occurrence, pour une pollution d’eaux douces, son contenu confirme les doutes et les craintes que pouvait susciter cette convention : l’amende est d’un montant dérisoire ; la réparation prononcée suivant des modalités peu pertinentes et le « programme » de mise en conformité frise le ridicule.


 

1. La convention judiciaire d’intérêt public environnementale (CJIPE), petite sœur du deferred prosecution agreement états-unien et, plus près de nous, de la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) de la loi « Sapin II » N° Lexbase : L6482LBP, a été instituée par la loi du 24 décembre 2020 relative, notamment, à la justice environnementale [1]. Il s’agit d’une alternative aux poursuites – ou au jugement, le juge d’instruction pouvant, au moment du règlement de l’information, renvoyer l’affaire au parquet afin qu’il choisisse ou non de se désister de l’action publique en traitant conventionnellement les faits – réservée aux personnes morales simplement mises en cause pour l’un des délits prévus par le Code de l’environnement (outre la plupart des infractions connexes). En l’échange de l’exécution de l’une des obligations proposées par le procureur de la République (paiement d’une amende d’intérêt public (sic), soumission à un programme de mise en conformité, réparation du préjudice écologique et des préjudices personnels éventuels) et qu’elle aura acceptées, la personne morale échappera, en cas de validation de l’accord par le président du tribunal judiciaire, à tout procès pénal en bonne et due forme et, partant, à toute déclaration de culpabilité, condamnation et inscription au casier judiciaire. Surtout, elle continuera de pouvoir accéder aux marchés internationaux et publics.

2. Pour cette raison, principale, et pour d’autres, plus avouables, la CJIPE a été présentée comme parée de toutes les vertus par le législateur. Pêle-mêle : rapidité avantageuse pour la réparation des préjudices environnementaux, contrôle de la gestion de l’entreprise par le biais du programme de mise en conformité, caractère dissuasif des amendes, responsabilisation de la personne morale et contribution de cette dernière à la recherche des preuves de la culpabilité de son (ancien) dirigeant qui, lui, ne peut pas bénéficier de ce mécanisme de clémence, bonne administration de la justice. L’efficacité de la CJIP en droit pénal des affaires (corruption, fraude fiscale et blanchiment), réelle – si l’on considère, poussant fort loin l’idée de fongibilité de l’argent, qu’il ne s’agit, in fine, que de questions économiques et que la confiance dans les institutions publiques et le devoir de contribuer à l’œuvre commune par l’effort fiscal (la fraternité ?) ne sont pas des valeurs à dimension extrapatrimoniale – a constitué un argument massue en faveur de l’adoption de la CJIPE face aux parlementaires qui y voyaient, clairvoyants, un instrument inadapté à la protection de l’environnement, une forme nouvelle de droit à polluer contre (injuste et aléatoire) indemnité. De tout cela, nous avons déjà pu dire ailleurs à quel point nous en étions, pour le moins, peu convaincus [2].

3. L’heure est venue de la mise à l’épreuve de la CJIPE : la première a été proposée par le vice-procureur de la République près le tribunal judicaire du Puy-en-Velay le vendredi 22 octobre 2021, acceptée le 22 novembre suivant par le Syndicat Mixte de Production et d’Adduction d’Eau (SYMPAE), puis validée par ordonnance du président dudit tribunal en date du 16 décembre de la même année N° Lexbase : L7375MAE. La personne morale était mise en cause pour le déversement, en mars 2021, de substances polluantes (permanganate de potassium) dans un ruisseau à partir de son usine de traitement d’eau potable, et ce, dans des proportions mortelles pour les invertébrés vivant dans ce cours d’eau – faits susceptibles de constituer un délit de pollution des eaux [3]. L’association agréée de protection du milieu aquatique (AAPMA) et la fédération départementale de la pêche de la Haute-Loire (FDPHL), groupements privés, se sont jointes à la procédure (il est question de « parties civiles », mais, en l’absence d’exercice de l’action publique, la qualification est inappropriée), faisant valoir des préjudices personnels, de même qu’un préjudice écologique, tous évalués par l’AAPMA. Voilà donc ce qui a donné lieu à la première CJIPE.

4. Le moins que l’on puisse dire est que les autorités répressives se sont bel et bien saisies de ce nouvel instrument (on n’ose parler d’une « arme ») de « traitement » des infractions environnementales. Et dire cela, ce n’est pas faire un compliment. Car à bien y regarder, cette première illustration pratique de la CJIPE n’est pas à son avantage.

Sur le principe même du recours à cette alternative aux poursuites, d’une part, on ne peut qu’être surpris. Il apparaît en effet dans la proposition du parquet que le déversement de 2021 faisait suite à un précédent accident, identique – à ceci près qu’il n’était question que du déversement accidentel de 50 000 litres de lait de chaux – seulement quelques mois auparavant (novembre 2020). Or les circulaires définissant la politique pénale environnementale [4] préconisent les poursuites en cas de comportements répétitifs (il n’est pas question, en l’occurrence, de récidive, mais elle est difficile à caractériser lorsqu’il n’y a pas de condamnation ou, a fortiori, pas de poursuites, lesquelles ne concernent que 24 % des faits dont le parquet est avisé en la matière [5]) ! Pas les alternatives aux poursuites, pourtant largement plébiscitées en droit pénal de l’environnement ! Par ailleurs, il est question en l’espèce d’une infraction dite autonome car ne dépendant pas de la violation d’une norme administrative ou d’une entrave ou résistance à l’action administrative en matière environnementale ; et d'une infraction matérielle, exigeant pour sa constitution une atteinte effective à l’environnement. En somme, des faits suffisamment graves d’un point de vue pénal pour que le parquet poursuive !

5. Mais peut-être les autorités répressives ne prennent-elles pas encore toute la mesure des enjeux écologiques. C’est en tous cas ce qu’amène à considérer le contenu même de cette première CJIPE, d’autre part. Voyons si le mécanisme tient ses promesses.

Quid de sa rapidité, pour commencer ? Les faits remontent au mois de mars 2021 ; la convention est validée en décembre 2021 ; la réparation du préjudice écologique et la régularisation de la situation de la personne morale doivent être assurées dans un délai de 6 mois, soit au mois de juin 2022, soit plus d’un an après les faits. Difficile de qualifier cela de rapide ; difficile aussi de soutenir qu’un procès pénal aurait apporté des solutions équivalentes plus promptement. Sans doute un référé pénal environnemental général – celui-là même que le législateur a rejeté comme choquant ou scandaleux lors de l’adoption de la même loi du 24 décembre 2020 ! – l’aurait pu, en revanche.

À défaut d’offrir une réponse rapide à la criminalité environnementale et au préjudice écologique, la première CJIPE conclue fait-elle, au moins, preuve de l’efficacité qui est supposée la caractériser, pour finir ? Pas vraiment. La personne morale est obligée : de payer une amende d’intérêt public d’un montant de 5 000 euros – alors que la peine encourue était de 375 000 euros d’amende ; de réparer le préjudice environnemental par le versement à la FDPHL d’une somme de 2 159 euros – là où il existe un consensus (juridiquement consacré dans le Code de l’environnement [6] et dans le Code civil) [7] en faveur de la réparation en nature, de la remise en état en particulier, de ce dommage et, a minima, d’une affectation des dommages et intérêts à sa réparation [8] ! ; et à la pose d’un portillon d’accès à la vanne du bassin de décantation permettant une intervention à toutes heures des services de secours pour tout programme de mise en conformité ! Les voilà les mille et les cents qui avaient été annoncés ! La voilà la dissuasion, la restauration des écosystèmes détruits ! La voilà la belle compliance, la responsabilisation de l’entreprise ! Il y a de quoi en être irrité… ou en rire… ou en pleurer, c’est selon… 

6. Ne reste peut-être, en fin de compte, que la bonne administration de la justice. Et encore ! Il faudrait pour cela la confondre avec le désencombrement des juridictions pénales et la célérité. Mais la protection de l’environnement encombre-t-elle tant que cela ces juridictions ? La justice pénale environnementale est-elle vraiment administrée lorsqu’elle est ainsi évincée ? À supposer qu’elle le soit, peut-on encore considérer qu’une telle administration de la justice est « bonne » ? On peut ne pas en être convaincu. Sans doute les magistrats se sont ici épargné un travail qui leur aura paru peut-être ennuyeux, probablement moins important que « les atteintes aux personnes et aux biens ». Mais en usant – qui plus est, de la sorte ! – d’un instrument, certes, à leur disposition mais qu’ils n’ont aucune obligation d’employer, ils nous paraissent avoir tourné le dos à l’Histoire.

Et l’on en revient, constamment, à l’urgent besoin de formation des magistrats aux enjeux environnementaux !

 

[1] Loi n° 2020-1672, du 24 décembre 2020, relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée N° Lexbase : L2698LZX : J. Lagoutte, Joyeux Noël ? Regard sur la Loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée, Dr. pén., 2021, Étude n° 5.

[2] Op. cit. Adde  Sanctions pénales du code de l’environnement et CJIPE : à qui mieux mieux, RJA, juin 2021, p. 99.

[3] C. env. art. L. 216-6 N° Lexbase : L7875K9K.

[4] Circ. DACG, NOR : JUSD1509851C, du 21-04-2015, relative aux orientations de politique pénale en matière d'atteintes à l'environnement N° Lexbase : L5145I83 ; Circ. DACG, n° 2021-02, du 11 mai 2021, visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale N° Lexbase : L9181L4S.

[5] M. Bouhoute et M. Diakhaté,  Le traitement du contentieux de l’environnement par la justice pénale entre 2015 et 2019, Infostat Justice 2021, n° 182.

[6] C. env., art. L. 162-8 et s N° Lexbase : L2152IBC.

[7] C. civ., art. 1249 N° Lexbase : L7610K9Q.

[8] Cela fera peut-être déchanter une doctrine civiliste plutôt favorable à la CJIPE. V. M. Hautereau-Boutonnet, La loi relative au parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée, D., 2021, p. 176 ;  Quel avenir pour la réparation du préjudice écologique ?, RJA, juin 2021, p. 139.

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Droit pénal du travail

[Brèves] Précisions sur l’organisation du travail en détention

Réf. : Circulaire du 18 juillet 2022, relative à l'organisation du travail en détention

Lecture: 9 min

N2442BZH

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/86647802-edition-du-09082022#article-482442
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par Lisa Poinsot

Le 12 Septembre 2022

► Publiée le 28 juillet 2022 au Bulletin officiel du ministère de la Justice, la circulaire, du 18 juillet 2022, relative à l’organisation du travail en détention tend à apporter davantage de précisions quant au rapprochement des conditions de travail en détention aux conditions de droit commun dans une perspective d’insertion des détenus à leur sortie.

Contexte juridique. Dans le cadre d’une réforme du travail pénitentiaire, la loi n° 2021-1729, du 22 décembre 2021, pour la confiance dans l’institution judiciaire N° Lexbase : L3146MAR, a pour objectif de rendre attractif l’emploi en détention et de renforcer les chances de réinsertion des personnes détenues par la mise en place du contrat d’emploi pénitentiaire, d’une procédure de recrutement et de certains droits sociaux.

Le décret n° 2022-655, du 25 avril 2022, relatif au travail des personnes détenues et modifiant le Code pénitentiaire N° Lexbase : Z536152A a alors apporté plusieurs précisions.

Pour aller plus loin : lire L. Poinsot, Réforme du travail pénitentiaire, ce qui change au 1er mai 2022, Lexbase Social, mai 2022, n° 904 N° Lexbase : N1378BZ3.

→ Voici les précisions apportées par la circulaire du 18 juillet 2022.

Le travail peut être, notamment, effectué :

  • au service général, où les détenus participent à l’entretien et au fonctionnement de la prison ;
  • au sein d’ateliers de concession, où les détenus travaillent pour le compte d’entreprises extérieures qui installent un atelier en détention ;
  • au sein d’ateliers de la régie industrielle des établissements pénitentiaires, gérés par l’ATIGIP/SEP ;
  • au sein de structures d’insertion par l’activité économique, prenant la forme d’entreprise d’insertion ou d’ateliers et chantiers d’insertion implantés en détention ;
  • au sein d’entreprise adaptée implantée en détention pour les personnes détenues handicapées ;
  • par des actions de formation par apprentissage dans l’établissement pénitentiaire pour les personnes détenues âgées de plus de 29 ans révolus afin d’obtenir une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou un titre à finalité professionnelle ;
  • sur le domaine pénitentiaire ou aux abords immédiats, sur autorisation du chef de l’établissement pénitentiaire ;
  • sous le régime du placement extérieur sous surveillance, ce qui suppose l’existence d’un contrat de travail pour les personnes détenues placées à l’extérieur et accomplissant un travail pour le compte d’une administration, d’une collectivité publique, d’une personne physique ou morale.

Pour mettre en place les nouvelles structures encadrant une activité de travail en détention, il est important de préparer la phase d’implantation par l’organisation d’une visite immersive des ateliers pénitentiaires afin de mieux appréhender son fonctionnement, ses potentialités et ses contraintes. En outre, un contrat d’implantation doit être signé entre les entreprises souhaitant employer des détenus et le chef d’établissement pénitentiaire. Ce contrat est conclu pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction (annexes 1 à 3). Ce contrat peut être résilié unilatéralement pour faute du titulaire par l’administration pénitentiaire, ou par le donneur d’ordre à échéance du contrat ou pour impossibilité d’en poursuivre l’exécution. Le non-renouvellement du contrat d’implantation est soumis à l’envoi d’une lettre recommandée avec avis de réception au chef d’établissement pénitentiaire au moins trois mois avant la date prévue de sa tacite reconduction.

Conditions de travail :

  • mise en place de la journée continue de travail sur la matinée de 7 heures ou 7 heures 30 à 13 heures ou 13 heures 30 ;
  • suspension de l’affectation (annexe 13) en raison soit du bon ordre et de la sécurité de l’établissement, la suspension totale ou partielle de l’activité, le déroulement d’une procédure disciplinaire  ;
  • affichage du règlement spécifique de chaque atelier sur les lieux de travail (annexe 12).

Accès au travail des personnes détenues :

  • une demande écrite de classement au travail de la part de la personne détenue ;
  • un classement au travail par le chef de l'établissement pénitentiaire conformément à l'avis de la commission pluridisciplinaire unique (le classement s'apparente désormais à une autorisation à travailler) et une orientation vers un ou plusieurs régimes de travail ;
  • une inscription sur liste d'attente et une démarche active de candidature par la personne détenue, soit par un formulaire préétabli, soit par une candidature écrite sous forme libre, soit par une candidature accompagnée d’une éventuelle lettre de motivation et d’un CV soit par d’autres modalités de candidature proposées par l’établissement (les listes des postes disponibles sont communiquées par voie d’affichage ou par d’autres moyens) ;
  • un ou plusieurs entretiens professionnels entre cette dernière et des donneurs d'ordre ;
  • la signature d'un contrat d'emploi pénitentiaire et l'affectation sur un poste de travail.

Critères d’orientation vers un régime de travail :

  • vers le service général : la compatibilité du profil pénal et comportemental avec les postes habituellement proposés au service général, la situation de précarité de la personne détenue, le souhait exprimé, l'expérience professionnelle sur un secteur professionnel correspondant aux besoins du service, le lien avec le projet professionnel, le degré d'autonomie ;
  • vers un régime de production : le souhait exprimé par la personne détenue, l'expérience professionnelle et la capacité à s'adapter à un environnement professionnel, le savoir-faire et savoir-être adaptés aux besoins des donneurs d'ordre, la capacité à travailler dans un collectif, le lien avec le projet professionnel ;
  • vers un travail au sein d’une structure d’insertion par l’activité économique : le souhait exprimé par la personne détenue, le reliquat de peine compris entre quatre et trenre-six mois, l'éloignement de l'emploi et difficultés sociales particulières, la nationalité française ou autorisation à travailler en France ;
  • vers un travail au sein d’une entreprise adaptée : le souhait exprimé par la personne détenue, le cas échéant, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) ou la demande d'instruction en cours (minimum 55 % de TH dans les entreprises adaptées), l'éloignement de l'emploi et difficultés sociales particulières, la nationalité française ou autorisation à travailler en France, aucune condition de reliquat de peine n'est exigée ni expérience professionnelle particulière ;
  • vers le régime de l’apprentissage : les critères de production, la volonté d'alterner travail et formation, être âgé de 16 à 29 ans révolus ou disposer d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), être titulaire d'un passeport ou d'une carte d'identité en cours de validité justifiant de la qualité de citoyen français ou européen ou disposer d'un titre de séjour en cours de validité.

Le CEP, la formalisation de la relation de travail (annexes 7 à 11) :

  • contrat à durée déterminée (pour remplacement d’une autre personne détenue, accroissement temporaire de l’activité de travail concernée ou poste à caractère saisonnier) ou indéterminée, choisi par le donneur d’ordre ;
  • limitation de la durée de la période d’essai à un jour par semaine (pour un CEP d’une durée de six mois au plus, la période d’essai dure au maximum deux semaines calendaires ; pour un CEP d’une durée de plus de six mois ou indéterminée, la période d’essai est d'un mois calendaire maximum). La période d’essai débute le premier jour de la prise de poste du détenu et peut prendre fin de manière anticipée à tout moment par le donneur d’ordre et le détenu tout en respectant un délai de prévenance d’au moins 24 heures ;
  • respect de seuils minimums de rémunération en fonction du régime de travail, chacun étant indexé sur le SMIC. Sera déployé un système d’information en charge de la gestion de la paye des personnes détenues (OCTAVE) ;
  • respect du droit au repos et à la limitation de la durée du travail quotidienne hebdomadaire ;
  • encadrement des absences en dehors des heures de travail pour responsabiliser le détenu au regard de son emploi du temps.

Tout comme un contrat de travail, le CEP peut être suspendu en cas d’incapacité temporaire de travail pour raison médicale. Ce contrat peut par ailleurs être rompu d’un commun accord ou à l’initiative de la personne détenue, ou encore en raison de la fin de détention ou du transfert définitif du détenu. À l’instar de la rupture d’un contrat de travail, la résiliation du CEP peut avoir pour motif l’insuffisance professionnelle, pour motif économique ou en cas de force majeure.

Droits et protection du travailleur détenu :

  • droits sociaux : bénéfice de l’assurance chômage, de l’assurance vieillesse, de l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, l’assurance accidents du travail et maladie professionnelle ;
  • droits à la formation ;
  • protection contre le harcèlement et la discrimination ;
  • protection pour sa santé et sa sécurité (médecine du travail, inspection du travail).

Recours : tout litige lié au CEP (refus de classement, d’affectation, de fin d’affectation ou de déclassement) relève de la compétence de la juridiction administrative.

⚠️ Périodes transitoires :

  • 1er mai 2022 au 1er mai 2023 : les contrats de concession et contrats d'implantation signés antérieurement au 1er mai 2022 restent en vigueur, au plus tard jusqu'au 1er mai 2023 dans leur version en vigueur antérieure au décret n° 2022-655, du 25 avril 2022. Durant cette période, les chefs d'établissements pénitentiaires doivent proposer aux titulaires une mise à jour de leur relation contractuelle, en leur soumettant un projet de contrat d'implantation ;
  • 1er mai au 31 décembre 2022 : les actes d'engagement signés avant l'entrée en vigueur de la loi peuvent se poursuivre dans le respect de l'article 33 de la loi pénitentiaire, de sa déclinaison réglementaire applicable jusqu'au 1er mai 2022 et de la note DAP du 24 janvier 2021 relative à l'actualisation de la rémunération des personnes détenues et des prélèvements sociaux pour l'année 2022. Les personnes détenues déjà classées avant le 1er mai 2022 et ne bénéficiant pas encore de poste de travail intègrent automatiquement la liste d'attente.

Prochaines étapes :

  • 4e trimestre 2022 : publication de l’ordonnance relative aux droits sociaux des travailleurs détenus ;
  • 1er janvier 2023 : fin de la transformation des actes d’engagements en CEP – toutes les relations de travail pénitentiaire auront la forme d’un CEP.

Pour aller plus loin : v. L. Isidro et Th. Pasquier, Projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire » : une ébauche de statut pour les détenus travailleurs, Lexbase Social, juin 2021, n° 868 N° Lexbase : N7832BYQ.

 

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