Le Quotidien du 11 décembre 2020

Le Quotidien

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Action en reconnaissance de la faute inexcusable : irrecevabilité de l’employeur à contester la décision de prise en charge de l’accident au titre de la législation professionnelle

Réf. : Cass. civ. 2, 26 novembre 2020, n° 19-18.244, F-P+B+I (N° Lexbase : A178638N)

Lecture: 2 min

N5663BYE

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par Laïla Bedja

Le 08 Janvier 2021

► L’article R. 441-14 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6170IEA), dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009 (N° Lexbase : L5899IE9), régit exclusivement la procédure applicable à la prise en charge au titre de la législation professionnelle d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle ou d’une rechute ; il en résulte que si l'employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle, il n'est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation professionnelle.

Les faits et procédure. La victime, salariée d’une société, a déclaré une pathologie prise en charge sur le fondement du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles, après avis de la CRRMP, pas la caisse primaire d’assurance maladie, qui lui a attribué une rente calculée sur un taux d’IPP de 67 %.

La victime a saisi une juridiction de Sécurité sociale d’une action tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

La cour d’appel. Pour déclarer inopposable à l’employeur la décision de prise en charge de la maladie et débouter la caisse de son action récursoire, la cour d’appel (CA Rennes, 24 avril 2019, n° 17/04390 N° Lexbase : A6940Y9W), retient qu’en l’absence de caractérisation par la caisse de la pathologie du tableau n° 30 bis, et alors que la caisse ne soutient pas dans ses écritures que la décision de prise en charge du 16 avril 2012 avait acquis un caractère définitif à l'égard de l'employeur, il y a lieu de déclarer inopposable à celui-ci la décision de prise en charge de la pathologie déclarée par la victime au titre de la législation professionnelle. Elle ajoute que l'inopposabilité à l'employeur découlant de cette irrégularité de fond prive la caisse de tout recours récursoire en récupération sur l'employeur des compléments de rente et indemnités versés.

La caisse forma alors un pourvoi en cassation.

Cassation. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond.

L’arrêt est la confirmation de l’arrêt suivant : Cass. civ. 2, 5 novembre 2015, n° 13-28.373, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A7339NUD).

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : La procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle, La contestation de la décision de la caisse, in Droit de la protection sociale, Lexbase (N° Lexbase : E3092ETP).

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Avocats/Honoraires

[Brèves] Prescription de l’action en recouvrement des dépens : la notification par l’avocat du certificat de vérification constitue un acte interruptif

Réf. : Cass. civ. 2, 5 novembre 2020, n° 19-21.308, F-P+B+I (N° Lexbase : A521233G)

Lecture: 4 min

N5211BYN

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Décembre 2020

► La notification par l’avocat, partie poursuivante, du certificat de vérification des dépens constitue un acte interruptif de la prescription de son action en recouvrement des dépens (Cass. civ. 2, 5 novembre 2020, n° 19-21.308, F-P+B+I N° Lexbase : A521233G)

Faits et procédure. La cour d’appel de Montpellier avait rendu un arrêt le 11 avril 2013 prononçant la caducité de la déclaration d’appel émanant du défendeur et laissant les dépens à sa charge dans l’instance l’opposant à la société Furuno France, assistée par un avocat. Sur sa demande formée le 20 juillet 2017, l’avocat avait obtenu le 26 juillet suivant du secrétaire de la juridiction un certificat de vérification des dépens, qu’il avait notifié au défendeur par lettre recommandée avec avis de réception du 26 juillet 2017. Le défendeur invoquant la prescription de l’action en recouvrement des dépens, a contesté ce certificat devant le juge taxateur.

Enoncé du moyen. L’avocat fait grief à l’arrêt rendu par la cour d’appel (Montpellier, 27 juin 2019) de confirmer l’ordonnance constatant la prescription de l’action en recouvrement des dépens de l’avocat, alors « que le délai de prescription étant interrompu par la demande en justice, la notification du certificat de vérification des dépens, emportant acceptation par son auteur du compte vérifié, faite par lettre recommandée avec accusé de réception, interrompt le délai de prescription de l’action en recouvrement ; que le premier président qui, pour constater la prescription de l’action en recouvrement des dépens de l’avocat, a retenu que la notification du certificat de vérification, qui n’était pas une décision de justice et dont la notification ne valait ni acceptation ni reconnaissance par écrit de la dette, n’était pas susceptibles d’interrompre la prescription extinctive a violé les articles 2240 du Code civil (N° Lexbase : L7225IAT), 706 (N° Lexbase : L6911H74) et 718 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6861LET). »

Ordonnance du premier président. Pour dire acquise la prescription de l’action en recouvrement des dépens de l’avocat, l’ordonnance retient, par motifs substitués, qu’il convient de retenir le délai de droit commun de cinq ans de l’article 2224 du Code civil, le point de départ de ce délai étant nécessairement le 11 avril 2013, date de l’arrêt qui déclare caduc l’appel formé par le défendeur. Elle relève que l’avocat soutient qu’il a déposé sa requête aux fins de taxation le 20 juillet 2017 et notifié à celui-ci le certificat de vérification des dépens par lettre recommandée avec avis de réception du 28 juillet 2017 et qu’en conséquence la prescription de son action n’est pas acquise. La décision énonce que les causes d’interruption de la prescription sont limitativement énumérées par les articles 2240 et suivants du Code civil et que ni la demande de vérification des dépens, qui n’est pas une demande en justice, ni la notification du certificat de vérification ne sont susceptibles d’interrompre la prescription extinctive. L’ordonnance relève enfin que plus de cinq ans se sont écoulés entre l’arrêt du 11 avril 2013 et l’ordonnance rendue, sur recours, le 20 août 2018 et qu’aucun acte n’est venu interrompre la prescription de l’action en recouvrement de dépens.

Réponse de la Cour. Il résulte de l’article 2241 que la demande en justice interrompt le délai de prescription et des articles 706 et 718 du Code de procédure civile que la notification, faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, par la partie poursuivante, du compte des dépens à l’adversaire, emporte acceptation par son auteur du compte vérifié. Il se déduit de la combinaison de ces dispositions que la notification par l’avocat, partie poursuivante, du certificat de vérification des dépens constitue un acte interruptif de la prescription de son action en recouvrement des dépens.

Cassation. La Cour estime, qu’en statuant comme il l’a fait, le premier président a violé les textes précités.

Pour aller plus loin : V. ETUDE : Les honoraires, émoluments, débours et modes de paiement des honoraires, « La prescription en matière d'honoraires de l'avocat », in La profession d’avocat, Lexbase (N° Lexbase : E37873RP).

 

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Baux commerciaux

[Brèves] Crise sanitaire et exigibilité des loyers du bail commercial : rejet de l'exception d'inexécution et de la force majeure

Réf. : T. com. Lyon, 17 novembre 2020, aff. n° 2020J00420 (N° Lexbase : A7075378)

Lecture: 1 min

N5575BY7

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par Julien Prigent

Le 02 Décembre 2020

► La demande de suspension totale ou partielle des loyers n’est pas fondée et les loyers sont dus en totalité, malgré la fermeture administrative du commerce, dès lors que l’exception d’inexécution n’est pas opposable au bailleur et que les conditions de la force majeure ne sont pas remplies, le locataire devant prendre l’initiative de négocier. 

Plus précisément, le tribunal de commerce a précisé que :

- l’exception d’inexécution n’est pas opposable au bailleur, la fermeture administrative n’étant pas en lien avec un manquement du bailleur qui aurait rendu le local inexploitable au regard de l’activité prévue au bail ;

- aucune des deux parties ne peut se prévaloir de la force majeure, les trois conditions cumulatives nécessaires n’étant pas réunies. Le locataire ne démontre pas, en effet, une insuffisance de trésorerie qui l’empêcherait d’exécuter son obligation de débiteur, à savoir le paiement du loyer. En outre, la mise en place d’un fonds de solidarité et de mesures pour reporter ou étaler le paiement des loyers pour une catégorie d’entreprises exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences de la propagation du covid-19, démontre que le législateur ne reconnait pas le caractère de force majeure à la pandémie ;

- les entreprises ne relevant pas de ce fond doivent donc, de leur propre initiative, négocier avec leur bailleur un aménagement pour le règlement des loyers.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L'obligation du locataire de payer le loyer du bail commercialL'exigibilité du loyer du bail commercial en période de crise sanitaire (Covid-19), in Baux commerciaux, Lexbase (N° Lexbase : E504834Q).

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Covid-19

[Brèves] Publication d’une ordonnance prolongeant, rétablissant ou adaptant diverses dispositions sociales pour faire face à l'épidémie de covid-19

Réf. : Ordonnance n° 2020-1553, du 9 décembre 2020, prolongeant, rétablissant ou adaptant diverses dispositions sociales pour faire face à l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L0352LZ3)

Lecture: 6 min

N5698BYP

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par Laïla Bedja

Le 20 Janvier 2021

► Dans le cadre de la crise sanitaire, une nouvelle ordonnance du 9 décembre 2020, publiée au Journal officiel du 10 décembre 2020, prolonge, rétablit ou adapte diverses dispositions sociales.

Suppression de la limitation d’un an de la garantie de financement perçue par les établissements de santé publics et privés

L’article 1er de la présente ordonnance modifie l’ordonnance n° 2020-309 du 25 mars 2020, relative à la garantie de financement des établissements de santé et aux régimes complémentaires obligatoires de Sécurité sociale (N° Lexbase : L5736LWD), afin d'étendre l'application de la garantie de financement perçue par les établissements de santé publics et privés en supprimant la limitation d'un an fixée par cette ordonnance. Cette ordonnance permet d’assurer aux établissements de santé, pendant la période de crise, une garantie minimale de recettes établie au regard des différents impacts de la crise sanitaire sur leur activité respective.

Adaptation temporaire des règles d’instruction des demandes et d’indemnisation des victimes par l’ONIAM et le FIVA

L'article 3 rétablit et modifie certaines dispositions de l'ordonnance n° 2020-311 du 25 mars 2020, relative à l'adaptation temporaire des règles d'instruction des demandes et d'indemnisation des victimes par l'Office national d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) et par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) (N° Lexbase : L5717LWN ; v. notre brève, Lexbase Droit privé, avril 2020, n° 820 N° Lexbase : N2916BYN). La période couverte par la prorogation des délais d'instruction devant l'ONIAM et le FIVA est ainsi fixée du 30 octobre jusqu'au 16 février 2021 et la durée de la prorogation est fixée uniformément à trois mois. S'agissant des délais concernés, et par cohérence avec les aménagements prévus pour les organismes, le délai de dépôt des demandes par les victimes est également prorogé.

Prolongation de certains droits sociaux

L'article 4 rétablit plusieurs dispositions des ordonnances n° 2020-312 du 25 mars 2020, relatives à la prolongation de droits sociaux (N° Lexbase : L5739LWH ; lire notre brève, Lexbase Social, avril 2020, n° 820 N° Lexbase : N2922BYU) et n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L7287LWS), afin d'assurer la continuité de l'accompagnement et la protection des personnes en situation de handicap et des personnes en situation de pauvreté, face aux conséquences de l'épidémie de covid-19. Il prévoit :

  • complémentaire santé solidaire (CSS) et aide médicale de l’État (AME) : prolongation de trois mois pour les aides arrivant à expiration entre le 30 octobre 2020 et le 16 février 2021 ;
  • bénéficiaires des décisions des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) : prolongation de l’accord sur les droits et prestations qui n'auraient pu être renouvelés à leur échéance, jusqu'à l'intervention de la décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ou du président du conseil départemental, et au maximum pour une durée de six mois ;
  • personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle : prolongation de six mois de leur engagement dans ce parcours et bénéfice de l’aide financière à l’insertion sociale et professionnelle (AFIS) ;
  • allocation d'éducation de l'enfant handicapé : maintien des droits pendant trois mois au-delà de la limite d’âge pour la personne qui a fait une demande d’allocation adulte handicapé (AAH) ;
  • affections de longue durée : exonération de participation au titre des ALD qui arriveraient à échéance entre le 30 octobre 2020 et le 1er avril 2020.

Concernant la télémédecine et la prise en charge à 100 % des actes de télésoin jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire en cours avec recours au tiers payant intégral favorisé, l’article 32 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021 prévoyant une telle prise en charge pour les actes de téléconsultation (actes médicaux), il n'est pas nécessaire de prévoir celle-ci dans la présente ordonnance.

CDAPH. L'article 5 modifie l'ordonnance n° 2020-312 du 25 mars 2020 pour rétablir certaines modalités simplifiées d'organisation permettant aux commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) de rendre ses avis ou décisions et pour alléger les conditions de recevabilité des recours administratifs déposés auprès de la maison départementale des personnes handicapées.

Recherches impliquant la personne humaine en lien avec la covid-19

L'article 6 modifie l'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 pour recentrer sur les projets identifiés comme prioritaires les dispositions permettant de déroger à la règle de tirage au sort pour la désignation du comité de protection des personnes, concernant les recherches impliquant la personne humaine associées au Sars-CoV-2. Cette mesure est nécessaire au vu de la forte augmentation du nombre de recherches impliquant la personne humaine associée à l'épidémie de Sars-CoV-2, pour permettre leur engagement dans les meilleurs délais après autorisation par l'ANSM et les comités de protection des personnes.

Aide aux acteurs de santé conventionnés dont l’activité est affectée

L'article 9 modifie l'ordonnance n° 2020-505 du 2 mai 2020, instituant une aide aux acteurs de santé conventionnés dont l'activité est particulièrement affectée par l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L8046LWW) afin de permettre d'indemniser les médecins libéraux concernés par les déprogrammations d'opérations dites « non urgentes », et subissant ainsi une baisse de leur activité. Cette extension couvrira dans un premier temps la période du 15 octobre au 30 novembre, la période proposée pouvant être étendue en fonction de l'évolution de la situation, et reprend les principes du dispositif d'indemnisation ouvert lors du premier confinement. Deux ajustements sont également apportés. D'une part, l'article remplace le plafond prévu par la règle de minimis des aides d'État (200 000 euros) par le plafond spécifiquement applicable dans la situation créée par l'état d'urgence sanitaire (800 000 euros) (Communication [2020/C 91 I/01] de la Commission européenne, relative à l'encadrement temporaire des mesures d'aide d'État visant à soutenir l'économie dans le contexte actuel de la flambée de covid-19). D'autre part, il autorise la communication à l'assurance maladie des données nécessaires au calcul du montant définitif de l'aide.

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Données personnelles

[Brèves] Cookies : sanction de 35 millions d’euros à l’encontre d’Amazon Europe Core

Réf. : CNIL, délibération n° SAN-2020-013, 7 décembre 2020 (N° Lexbase : X4444CMK)

Lecture: 7 min

N5700BYR

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 11 Décembre 2020

► Dans sa délibération en date du 7 décembre 2020, la formation restreinte de la CNIL a sanctionné la société Amazon Europe Core d’une amende de 35 millions d’euros pour avoir déposé des cookies publicitaires sur les ordinateurs d’utilisateurs à partir du site « amazon.fr » sans consentement préalable et sans information satisfaisante ; elle a également adopté une injonction sous astreinte afin que la société procède à une information des personnes conforme à l’article 82 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (N° Lexbase : L8794AGS) dans un délai de 3 mois à compter de la notification de la décision.

Contexte. Entre le 12 décembre 2019 et le 19 mai 2020, la CNIL a effectué plusieurs contrôles, notamment en ligne, concernant le site web « amazon.fr ». Ces vérifications ont permis de constater que lorsqu’un utilisateur se rendait sur ce site, des cookies étaient automatiquement déposés sur son ordinateur, sans action de sa part. Plusieurs de ces cookies poursuivaient un objectif publicitaire.

Les manquements à la loi Informatique et Libertés. La formation restreinte, organe de la CNIL chargé de prononcer les sanctions, a relevé deux violations à l’article 82 de la loi précitée :

  • Un dépôt de cookies sans recueillir le consentement de l’utilisateur

La formation restreinte a relevé que lorsqu’un internaute se rendait sur l’une des pages du site « amazon.fr », un grand nombre de cookies à vocation publicitaire était instantanément déposé sur son ordinateur, c’est-à-dire avant que celui-ci n’exécute la moindre action. Or, la formation restreinte a rappelé que ce type de cookies, non essentiels au service, ne pouvait être déposé qu’après que l’internaute a exprimé son consentement. Elle a considéré que le fait de déposer des cookies concomitamment à l’arrivée sur le site était une pratique qui, par nature, était incompatible avec un consentement préalable.

  • Un défaut d’information des utilisateurs du site « amazon.fr »

Tout d’abord, la formation restreinte a relevé que dans le cas d’un internaute qui se rendait sur le site « amazon.fr », les informations fournies n’étaient ni claires ni complètes.

Elle a considéré que le bandeau d’information affiché par la société, en l’occurrence « En utilisant ce site, vous acceptez notre utilisation de cookies pour offrir et améliorer nos services. En savoir plus », ne contenait qu’une description générale et approximative des finalités de l’ensemble des cookies déposés. En particulier, elle a estimé qu’à la lecture de ce bandeau, l’utilisateur n’était pas à même de comprendre que les cookies déposés sur son ordinateur avaient pour principal objectif de lui afficher des publicités personnalisées. Elle a également relevé que le bandeau n’indiquait pas non plus à l’utilisateur qu’il a le droit de refuser ces cookies et les moyens dont il dispose à cette fin.

Ensuite, la formation restreinte a relevé que le manquement de la société à ses obligations était encore plus manifeste dans le cas des utilisateurs qui se rendaient sur le site « amazon.fr » après avoir cliqué sur une annonce publiée sur un autre site web. Elle a souligné que dans ce cas de figure, les mêmes cookies étaient déposés sans aucune information délivrée aux internautes.

La sanction prononcée par la formation restreinte. La formation restreinte condamne la société Amazon Europe Core à une amende de 35 millions d’euros, rendue publique. Le montant retenu, ainsi que la publicité de l’amende, se justifient par la gravité des manquements constatés.

Il a été tenu compte du fait que jusqu’à la refonte du site « amazon.fr », en septembre 2020, la société déposait des cookies sur les ordinateurs des internautes résidant en France sans leur fournir les informations dans des conditions conformes à l’article 82 de la loi Informatique et Libertés. Elle a relevé que, quel que soit le chemin emprunté par l’internaute se rendant sur le site, celui-ci était soit insuffisamment informé soit jamais informé du dépôt de cookies sur son ordinateur. La formation restreinte a considéré que dans le cas des utilisateurs accédant au site « amazon.fr » après avoir cliqué sur une annonce, le dépôt instantané de cookies, combiné à l’absence de toute information, portait particulièrement atteinte aux droits des internautes.

En outre, quand bien même l’activité principale de la société réside principalement dans la vente de biens de consommation, la personnalisation des annonces, rendue possible notamment grâce aux cookies, permet d’augmenter considérablement la visibilité de ses produits ailleurs sur le web. Enfin, compte tenu de la place centrale occupée par le site « amazon.fr » en matière de commerce en ligne, ce sont des millions de personnes résidant en France qui se rendent quotidiennement sur le site et qui voient des cookies être déposés sur leurs ordinateurs.

La formation restreinte a pris acte des récentes évolutions apportées au site « amazon.fr » et notamment le fait que plus aucun cookie ne soit désormais déposé avant que l’utilisateur n’ait donné son consentement. Elle a néanmoins considéré que le nouveau bandeau d’information déployé ne permettait toujours pas aux internautes résidant en France de comprendre que les cookies sont principalement utilisés pour leur afficher de la publicité personnalisée et que ces derniers n’étaient toujours pas clairement informés de leur possibilité de refuser ces cookies.

Dès lors, en complément de l’amende administrative, la formation restreinte a également adopté une injonction sous astreinte afin que la société procède à une information des personnes conforme à l’article 82 de la loi précitée dans un délai de 3 mois à compter de la notification de la décision. Dans le cas contraire, la société s’exposera au paiement d’une astreinte de 100 000 euros par jour de retard.

Une compétence de la CNIL. Dans sa délibération, la formation restreinte a rappelé que la CNIL est matériellement compétente pour contrôler et sanctionner les cookies déposés par les sociétés sur les ordinateurs des utilisateurs résidant en France. Elle a souligné ainsi que le mécanisme de coopération (mécanisme de « guichet unique ») prévu par le « RGPD » (Règlement n° 2016/679 du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I) n’avait pas vocation à s’appliquer dans cette procédure étant donné que les opérations liées à l’utilisation des cookies relèvent de la Directive « ePrivacy » (Directive (CE) n° 2002/58 du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques N° Lexbase : L6515A43), transposée à l’article 82 de la loi Informatique et Libertés.

Elle a considéré que la CNIL est également territorialement compétente en application de l’article 3 de la loi précitée car le recours à des cookies est effectué dans le « cadre des activités » de la société Amazon France qui constitue « l’établissement » sur le territoire français de la société Amazon Europe Core et y assure la promotion de leurs produits et services.

L’articulation de la sanction avec les travaux de la CNIL sur les cookies. Dans le cadre de son plan d’action sur le ciblage publicitaire et pour tenir compte de l’entrée en application du « RGPD », la CNIL a publié le 1er octobre 2020 ses lignes directrices modificatives (CNIL, délibération n° 2020-091, 17 septembre 2020 N° Lexbase : X0891CK9) ainsi qu’une recommandation (CNIL, délibération n° 2020-092, 17 septembre 2020 N° Lexbase : X0892CKA) portant sur l’usage de cookies et autres traceurs (CNIL, communiqué de presse , 1er octobre 2020 ; lire N° Lexbase : N4740BY9), la CNIL a demandé aux acteurs de se conformer aux règles ainsi clarifiées, en estimant que cette période d’adaptation ne devrait pas dépasser six mois.

À cette occasion, elle avait néanmoins précisé qu’elle continuerait à contrôler pleinement le respect des autres obligations qui n’ont fait l’objet d’aucune modification et le cas échéant, d’adopter des mesures correctrices pour protéger la vie privée des internautes. 

Les obligations dont la CNIL sanctionne aujourd’hui le non-respect par la société Amazon Europe Core préexistaient au « RGPD » et ne font donc pas partie de celles qui ont été clarifiées par les nouvelles lignes directrices et la recommandation du 1er octobre.

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Droit international privé

[Brèves] Exequatur d’un jugement de divorce étranger et respect de l’ordre public international français : précisions intéressantes

Réf. : Cass. civ. 1, 2 décembre 2020, n° 18-20.691, FS-P (N° Lexbase : A9547384)

Lecture: 6 min

N5692BYH

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 10 Décembre 2020

► Une décision rendue par une juridiction étrangère qui, par application de sa loi nationale, refuse de donner effet à un contrat de mariage reçu en France, n'est pas en soi contraire à l'ordre public international français de fond et ne peut être écartée que si elle consacre de manière concrète, au cas d'espèce, une situation incompatible avec les principes du droit français considérés comme essentiels ;
► si le principe d'égalité des parents dans l'exercice de l'autorité parentale relève de l'ordre public international français, la circonstance qu'une décision étrangère réserve à l'un des parents le soin de prendre seul certaines décisions relatives aux enfants, ne peut constituer un motif de non-reconnaissance qu'autant qu'elle heurte de manière concrète les principes essentiels du droit français.

Les faits. En l’espèce, un homme, de nationalité française, et une femme, de nationalité russe et américaine, s’étaient mariés à Paris le 28 mai 1991 sous le régime de la séparation de biens, suivant contrat de mariage reçu par notaire le 21 mai. Ils s’étaient installés aux Etats-Unis où étaient nés leurs deux enfants.

La mère avait, le 8 novembre 2001, saisi la Supreme Court de l'Etat de New York d'une requête en divorce. Par « Decision and Order » du 28 juin 2002, un premier juge avait rejeté la demande du père tendant à voir dire le contrat de mariage français valide et exécutoire et écarté l'application de ce contrat. Un deuxième juge avait ensuite rendu une « Trial Decision » le 3 octobre 2003, puis un « Judgement of Divorce » le 9 janvier 2004, lequel avait prononcé le divorce aux torts du mari, confié la garde des enfants mineurs à la mère, avec un droit de visite et d'hébergement au profit du père, en précisant que la mère devrait consulter le père sur toutes les décisions significatives concernant les enfants mais qu'elle aurait le pouvoir de décision finale, fixé les modalités de contribution du père à l'entretien et l'éducation des enfants, alloué à l'épouse une pension alimentaire mensuelle pendant sept ans et statué sur la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux. Sur ce dernier point, le jugement avait été partiellement réformé par une décision de la cour d'appel de l'Etat de New York du 3 mai 2005, qui avait notamment dit que l'intégralité du solde du produit de la vente de l'appartement new-yorkais devait revenir à l’ex-époux.

Par acte du 9 février 2005, l’ex-épouse avait saisi le tribunal de grande instance de Paris d'une demande d'exequatur des décisions américaines des 3 octobre 2003 et 9 janvier 2004 en leurs seules dispositions relatives aux pensions alimentaires.

A titre reconventionnel, l’ex-époux avait demandé que soit déclaré inopposable en France le jugement du 28 juin 2002 ; il faisait grief à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 3 avril 2018 (CA Paris, Pôle 1, 1ère ch., 3 avril 2018, n° 16/24795 N° Lexbase : A0118XKL) de déclarer ce jugement opposable, soutenant qu’il était contraire à l’ordre public international français, et ce sur trois points en particulier.

  • Procédure suivie à l’étranger/exigence d’impartialité du juge et ordre public international

Le requérant invoquait, d’abord, la contrariété l'ordre public international français, en ce que la procédure suivie à l'étranger violait les exigences de l'article 6, § 1, de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), notamment l'exigence d'impartialité du juge. Il n’obtiendra pas gain de cause devant la Cour suprême qui approuve la décision des juges d’appel en ce qu’elle faisait ressortir, d'une part, que l'appréciation portée par le juge sur les affirmations de l’ex-époux ne révélait aucun parti pris hostile, d'autre part, que les mesures prises étaient fondées sur des éléments objectifs tirés de la situation personnelle des parties, enfin, que l'exercice par le requérant des voies de recours ouvertes contre ces décisions lui avait permis de faire entendre sa cause devant une autre juridiction dont l'impartialité n'était pas discutée, ce qui était de nature à exclure toute atteinte à ses droits ; la cour d'appel en avait exactement déduit l'absence de violation de l'ordre public international de procédure.

  • Refus de donner effet à un contrat de mariage reçu en France et ordre public international

La contrariété à l’ordre public international français était ensuite soulevée en ce que le jugement étranger refusait de donner effet au contrat de mariage reçu en France ; le requérant soutenait qu’un jugement étranger qui écarté, sans aucune raison, un acte authentique français, reçu par un officier public français au nom de la République française était nécessairement contraire à l'ordre public international français.

L’argument est écarté par la Haute juridiction rétorquant qu’une décision rendue par une juridiction étrangère qui, par application de sa loi nationale, refuse de donner effet à un contrat de mariage reçu en France, n'est pas en soi contraire à l'ordre public international français de fond et ne peut être écartée que si elle consacre de manière concrète, au cas d'espèce, une situation incompatible avec les principes du droit français considérés comme essentiels, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, ainsi que l’avait valablement apprécié la cour d’appel.

  • Absence d’égalité des parents dans l'exercice de l'autorité parentale et ordre public international

C’est enfin au regard du principe d'égalité des parents dans l'exercice de l'autorité parentale, que le requérant invoquait l’absence de conformité à l'ordre public international français. Là encore, il n’obtiendra pas gain de cause. La Cour suprême énonce alors, comme énoncé plus haut, que si le principe d'égalité des parents dans l'exercice de l'autorité parentale relève de l'ordre public international français, la circonstance qu'une décision étrangère réserve à l'un des parents le soin de prendre seul certaines décisions relatives aux enfants, ne peut constituer un motif de non-reconnaissance qu'autant qu'elle heurte de manière concrète les principes essentiels du droit français.

Tel n’était pas non plus le cas en l’espèce, ainsi qu’il ressortait des constatations et énonciations de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris qui, ayant avait fait ressortir que les mesures relatives aux enfants avaient été arrêtées par référence à leur intérêt supérieur et que les droits du père n'étaient pas méconnus, celui-ci devant, dans tous les cas, être consulté avant toute décision, avait exactement retenu que les décisions américaines, en l'absence de violation de l'ordre public international, devaient être reconnues dans l'ordre juridique français.

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Électoral

[Brèves] Impossibilité pour le président d’un bureau de vote de refuser la mise à disposition aux électeurs des bulletins qui ont été remis au maire

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 30 novembre 2020, n° 441891, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A295638Y)

Lecture: 2 min

N5677BYW

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par Yann Le Foll

Le 09 Décembre 2020

► Le président d’un bureau de vote ne peut refuser la mise à disposition aux électeurs des bulletins qui ont été remis au maire (CE 3° et 8° ch.-r., 30 novembre 2020, n° 441891, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A295638Y).

Faits. Les présidents de chacun des deux bureaux de vote de la commune ont, le 15 mars 2020, quelques minutes avant l'ouverture du scrutin pour l'élection des conseillers municipaux à huit heures, refusé d'accepter les bulletins de vote d’une des listes au motif que leur format, qui était de 105 x 148 millimètres, ne respectait pas le format de 148 x 210 millimètres requis par l'article R. 30 du Code électoral (N° Lexbase : L7236LYN) pour les listes de cinq à trente et un noms.

Position du CE. Toutefois, il résulte de l'instruction que ces bulletins n'ont pas été remis directement aux présidents des bureaux de vote le jour du scrutin, au titre de ce que prévoit le troisième alinéa de l'article R. 55 du Code électoral (N° Lexbase : L8147I7U), mais qu'ils avaient été remis au maire de la commune deux jours avant le scrutin, le 13 mars 2020, conformément à ce que prévoit le deuxième alinéa du même article, sans que le maire ne les refuse.

Dans ces conditions les présidents des deux bureaux de vote de la commune ne tenaient ni de l'article R. 55, ni d'aucune autre disposition du Code électoral le pouvoir de refuser de les mettre à la disposition des électeurs. De manière générale, la Haute juridiction estime que, si la méconnaissance des règles relatives à la taille des bulletins constitue bien sûr une irrégularité, une telle irrégularité « ne conduit à l’invalidation des bulletins non-conformes que dans le cas où elle résulte d’une manœuvre ou porte atteinte à la sincérité du scrutin, en raison notamment d’une atteinte au secret du vote » (CE, 29 juillet 2002, n° 239718 N° Lexbase : A9960B8E ; CE, 28 novembre 2009, n° 318238 N° Lexbase : A4551EB8).

Pour aller plus loin : Les bulletins de vote, in Droit électoral (N° Lexbase : E1876A8Y).

 

newsid:475677

Droit financier

[Brèves] Actifs numériques : renforcement de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT)

Réf. : Ordonnance n° 2020-1544, du 9 décembre 2020, renforçant le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme applicable aux actifs numériques (N° Lexbase : L0353LZ4)

Lecture: 3 min

N5697BYN

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par Vincent Téchené

Le 16 Décembre 2020

► Prise sur le fondement de l'article 203 de la loi « PACTE » (loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 N° Lexbase : L3415LQK), l’ordonnance n° 2020-1544 du 9 décembre 2020, publiée au Journal officiel du 10 décembre 2020, vise à mettre en conformité le cadre réglementaire national relatif aux actifs numériques avec les recommandations du Groupe d'Action Financière (GAFI) en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT) et à renforcer les mesures de lutte contre l'anonymat dans les transactions en actifs numériques.

L'article 1er de l'ordonnance étend aux services d'échanges dits « crypto-to-crypto » et aux plateformes de négociation d'actifs numériques l'obligation de s'enregistrer auprès de l'Autorité des marchés financiers, sans contrôle préalable du dispositif LCB-FT de ces services. Cet article limite le contrôle préalable auquel seront soumis ces services à la vérification de l'honorabilité et de la compétence des dirigeants et de leurs bénéficiaires effectifs. Il maintient un contrôle préalable pour les services qui y étaient déjà soumis (services de conservation d'actifs numériques pour le compte de tiers, service dits « crypto-to-fiat ») mais le recentre sur les obligations clefs en matière de LCB-FT pour en alléger la procédure. Il confirme en outre, pour les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) étrangers exerçant en France sous le régime de la libre prestation de services, l'obligation déjà introduite par la loi « PACTE » de s'enregistrer auprès de l'AMF dans les mêmes conditions et délais que les PSAN français.

Les articles 2 et 3 procèdent à des mesures de coordination.

L'article 4 étend aux services d'échange d'actifs numériques contre d'autres actifs numériques et aux plateformes de négociation d'actifs numériques l'obligation de respecter les mesures LCB-FT prévues par le Code monétaire et financier. Il ouvre aux PSAN la possibilité de recourir à des tiers pour la mise en œuvre de leurs obligations de vigilance à l'entrée en relation d'affaire et de procéder eux-mêmes, pour des tiers, à ces mêmes obligations. Il pose l'interdiction pour les PSAN de tenir des comptes anonymes. Il ouvre enfin aux PSAN appartenant à des groupes la possibilité d'informer les entités de ce groupe des déclarations de soupçon qu'ils ont réalisées et confirme la possibilité pour les entreprises-mères de bénéficier des échanges d'informations intragroupes relatifs aux déclarations de soupçon.

L'article 5 procède à une mesure de coordination.

Les articles 6 à 11 contiennent les dispositions d'extension de ces nouvelles exigences aux territoires d'outre-mer.

L'article 12 prévoit que les services d'échange d'actifs numériques contre d'autres actifs numériques et les plateformes de négociation d'actifs numériques disposent d'un délai de six mois après adoption de l'ordonnance pour s'enregistrer auprès de l'AMF. Cet article prévoit également que le nouveau périmètre du contrôle préalable obligatoire des procédures internes en matière de LCB-FT s'applique aux demandes d'enregistrement présentées auprès de l'Autorité des marchés financiers à compter de la publication de l’ordonnance ainsi qu'aux demandes en cours d'examen.

L'article 13 étend ces modalités d'entrée en vigueur en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

newsid:475697

Pénal

[A la une] Procès des « écoutes » : « un chemin de croix, mais si c’était le prix à payer pour que la vérité chemine, je suis prêt à l’accepter »

Lecture: 8 min

N5701BYS

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par Adélaïde Léon

Le 11 Décembre 2020

► « Cette affaire a été pour moi un chemin de croix... mais si c'était le prix à payer pour que la vérité chemine, je suis prêt à l'accepter. J'ai encore confiance dans la justice de ce pays ». Tels ont été les mots prononcés par Nicolas Sarkozy à l’issue de cette dernière journée d’audience qui a vu se succéder Me Dominique Allegrini, le Bâtonnier Paul-Albert Iweins et Me Hervé Témime.

C’est Me Allegrini, avocat de Gilbert Azibert qui prend en premier la parole. Il débute sa plaidoirie par un hommage au travail de « bénédictins » accompli par les cabinets de la défense et notamment par le jeune barreau.

Après avoir souligné le caractère extraordinaire de cette procédure « cet ovni judiciaire […] un appareil curieux », Me Allegrini annonce qu’il entame une « critique absolue, sans réserve, même si exprimée avec respect, de ce dossier qui est la parfaite illustration de tout ce qu’il ne faut pas faire dans une procédure pénale ». Il évoque rapidement l’intervention de Jean-François Bohnert, Procureur national financier, jugeant qu’il n’est pas certain que celle-ci « aura rendu les services attendus ». L’avocat s’appliquera ensuite à relever et dénoncer « une accumulation de bizarreries procédurales » qu’il n’avait jamais rencontrée. Il s’attaque notamment à l’enquête préliminaire menée dans ce dossier.

« La justice frappe du glaive au lieu d’utiliser le scalpel et après on s’étonne qu’il y ait des hémorragies. »

Après avoir évoqués les dysfonctionnements des investigations menées, Me Allegrini aborde le fond et débute par une phrase qui résume fidèlement l’esprit de sa plaidoirie : « Je n’ai pas compris l’enfermement dont on a fait preuve tout au long de cette procédure. À considérer que lorsqu’on ne prouve rien c’est la manifestation qu’il y a quelque chose. Quand on a des doutes… c’est qu’on a des certitudes ».

Il énumère et déconstruit les accusations formulées à l’adresse de son client. Cohérent avec l’ensemble de la défense, il explique qu’on a voulu voir dans des actes anodins l’accomplissement d’infractions réalisées en connaissance de cause, à l’exemple de la prétendue infiltration de Gilbert Azibert à la Cour de cassation : « ce dossier a révélé une chose. Nicolas Sarkozy est client. Thierry Herzog l’aide. Thierry Herzog est lui-même confronté au langage particulier de la Cour de cassation et il a besoin d’un traducteur en la personne de Gilbert Azibert. Et au travers de cette contamination auriculaire, on a vu là dedans des délinquants chevronnés ».

Comme Me Laffont la veille, Me Allegrini souligne, à maintes reprises, l’absence de preuve de l’accusation : « je n’ai pas compris l’arithmétique des réquisitions. Un doute plus un doute plus un doute, ça fait un faisceau d’indices … Entre ça et les bateaux mouches, je suis content d’être venu à Paris ! ».

Pour conclure, il ne se contente pas de demander la relaxe de son client, il exhorte le tribunal à fustiger les comportements ahurissants constatés dans ce dossier.

Après une suspension qui laissera place à des compliments entre confrères à l’endroit de Me Allegrini, l’audience reprend avec la plaidoirie de Me Iweins pour la défense de Thierry Herzog.

Il débute en abordant la question des écoutes et des perquisitions chez les avocats « Le secret n’est pas fait pour cacher des turpitudes ni permettre aux avocats d’avoir un sanctuaire. Nous approuvons la jurisprudence qui lève ce secret, dans des hypothèses bien précises : lorsque le contenu intrinsèque de l’écoute permet de relever la participation de l’avocat à une infraction ».

Il interpelle le tribunal « vous n’avez pas pu ne pas ressentir un malaise lorsque les écoutes étaient projetées […] Le malaise vient de ce que sont des brèves d’écoutes, des extraits sur lesquels on a bâti un soupçon qui sera une accusation, puis des réquisitions dont nous avons considéré qu’elles n’apportaient aucune démonstration ».

Il dénonce ensuite, un par un, les postulats de l’accusation, « des fantasmes vides de preuves ».

Me Iweins est grave mais il n’hésitera pas à hausser le ton lorsqu’il évoque une erreur de date dans l’une des diapositives projetées par le ministère public au cours de l’audience. Face à la réaction du procureur, l’avocat rétorque, mi-moqueur, mi-agacé : « ne faites pas cette tête je vous ai demandé les slides vous avez refusé. Si vous doutez de ce que je dis, je demande à ce qu’on repasse les slides » [rires dans la salle].

L’avocat conclut « je souhaite que cette audience ait permis, aux uns et aux autres, de voir que le fait de se rétrécir dans un raisonnement n’est pas une bonne chose » et demande la relaxe de son client : « vous permettrez à Thierry Herzog de continuer à appartenir à ce barreau, à la profession d’avocat à laquelle il a consacré sa vie. Vous lui rendrez sa vie, sa liberté et son honneur ».

Nouvelle suspension d’audience puis c’est au tour de Me Hervé Témime, toujours pour la défense de Thierry Herzog, de prendre la parole.

Le ton est donné dès le début de la plaidoirie « le parquet s’est livré à un réquisitoire impitoyable, faussement rigoureux. Un réquisitoire totalement déconnecté de l’audience, de la réalité, de la vie et profondément injuste. Ce n’est, bien sûr [silence] qu’un réquisitoire. ».

Il mentionne lui aussi la visite « surprise » du procureur national financier dont il estime « qu’elle a affaibli l’accusation ». Il rappelle les adjectifs par lesquels celui-ci a qualifié son parquet : « sincérité, rigueur, prudence et délicatesse » et lance à l’adresse des deux procureurs présents « C’est sans doute la raison pour laquelle vous n’avez pas une seule fois en 5 heures de réquisitoire, prononcé le mot preuve. […] Pour rester fidèle à cette haute exigence ! Alors que c’est le seul qui aurait dû guider votre démonstration. C’est aussi pourquoi vous avez été si mesurés dans vos propos et dans vos demandes ».

Il rappelle au tribunal qu’il le sait indépendant et impartial : « il n’a de service, ni de compte à rendre à personne. Ni au parquet, ni au juge d’instruction, ni aux enquêteurs, ni aux avocats, ni aux prévenus, ni à l’opinion ».

Par la suite, Me Témime aborde les « dérives de l’accusation » « qui a manqué de modération, de recul, de capacité d’autocritique ». Il développe en détail sa demande d’écarter les moyens de preuve dont le tribunal dispose et donne sa vision de ce qu’est le rapport entre un avocat et son client « a fortiori quand le client est un ami ».

L’avocat de Thierry Herzog dit sa consternation sur la manière dont se sont déroulées les investigations et notamment les écoutes des conversations entre Thierry Herzog et Nicolas Sarkozy, un avocat et son client et, plus encore, deux avocats. Il témoigne de son attachement au secret professionnel lié à sa fonction, dont il affirme qu’il n’assure pour autant d’impunité à personne. Mais il n’y a, selon lui, « pas de vraie justice sans vraie défense, sans défense forte pouvant exercer ses droits. Il n’y a pas de défense sans secret professionnel ».

En raillant les indices prétendus de l’accusation avec une ironie non dissimulée, il démonte les écoutes et les perquisitions sur lesquelles se fonde l’accusation et fustige, lui aussi la « débauche d’investigations » évoquée par Me Laffont la veille.

Tout au long de sa plaidoirie, Me Témime s’appliquera à démontrer que, malgré une enquête préliminaire et une instruction, aussi longues que fournies, l’accusation n’a, en réalité, pas le moindre commencement de preuve.

« Vous n’avez pas un post-it, une annotation, un témoignage, pas la moindre preuve. Et voilà pourtant ce qu’on a fait. C’est d’arriver à rien. Non pas zéro mais un chiffre négatif. »

Me Témime conclut : « si vous maniez simplement, naturellement, les règles de droit et d’une bonne justice vous relaxerez Thierry Herzog sans aucune hésitation et ce sera juste ».

La présidente donne ensuite la parole aux prévenus. Gilbert Azibert déclare n’avoir rien à ajouter, Thierry Herzog remercie les avocats et Nicolas Sarkozy, quant à lui, déclare : « cette affaire a été pour moi un chemin de croix mais si c’était le prix à payer pour que la vérité chemine je suis prêt à l’accepter. Je vous ai dit la vérité pendant ces trois semaines. Comme je l’ai dit en garde à vue. Comme je l’ai dit tout au long de l’instruction. J’ai encore confiance en la justice de mon pays ».

Délibéré le lundi 1er mars 2021 à 13 heures 30.

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