La lettre juridique n°780 du 18 avril 2019

La lettre juridique - Édition n°780

Terrorisme

[Jurisprudence] Bien juridique protégé par les incriminations terroristes et recevabilité des constitutions de partie civile

Réf. : Cass. crim., 12 mars 2019, n° 18-80.911, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0239Y4M)

Lecture: 9 min

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par Julie Alix, Professeur de droit pénal, Université de Lille, CRDP - ERADP

Le 24 Décembre 2019

 


Mots-clés : terrorisme • instruction • constitution de partie civile • personne morale • commune • recevabilité (non)

Résumé : la ville de Nice, personne morale, n’est pas recevable à se constituer partie civile dans le cadre de l’instruction ouverte des chefs d’infractions à la législation sur les armes, participation criminelle à un groupe terroriste, tentatives et complicité d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste : «une telle entreprise n’étant susceptible d’avoir directement porté atteinte, au-delà des victimes personnes physiques, qu’aux intérêts de la nation».


 

A la suite de l’attentat de Nice le 14 juillet 2016, une information fut ouverte des chefs d’infractions à la législation sur les armes, de participation criminelle à une association de terroristes, de complicité d’assassinat et de tentative d’assassinat. La ville de Nice se constitua partie civile à titre incident pour obtenir réparation des préjudices matériels (destruction de matériel urbain) et moral (atteinte à la réputation et à l’attractivité de la ville). Cette constitution, partiellement reçue par le juge d’instruction, fut, sur appel du parquet, déclarée irrecevable par la chambre de l’instruction. Irrecevabilité confirmée par un arrêt de rejet de la Chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 12 mars 2019.

L’arrêt, sans être complètement novateur, présente plusieurs intérêts, notamment celui de confirmer une interprétation de la lecture de l’article 2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9908IQZ) et de la conception de la victime pénale. Appliqué au contentieux terroriste, l’arrêt est porteur d’enseignements mais également d’interrogations.

1 - Une confirmation

L’arrêt confirme que la notion de victime pénale au sens de l’article 2 du Code de procédure pénale ne peut être comprise par référence à la seule conception civiliste de la victime -ce qui explique qu’une constitution de partie civile irrecevable devant le juge pénal peut être déclarée recevable devant le juge civil [1]- mais qu’elle doit l’être au regard des éléments constitutifs de l’infraction. Pour procéduraux que soient ses effets, la notion de victime pénale, «personne ayant personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction», est donc ancrée dans la substance même de l’infraction. Plus précisément, il existe une corrélation entre le bien juridique protégé [2] par l’infraction et le caractère direct du préjudice : n’est direct que le préjudice traduisant une atteinte à l’intérêt protégé par l’infraction. La conception n’est pas nouvelle : «Est considérée comme victime pénale la personne qui peut rapporter la preuve qu’elle a subi le préjudice que le législateur voulait éviter en prévoyant une telle infraction» [3]. A l’inverse, «lorsque le préjudice allégué par la partie civile ne correspond pas à l’intérêt protégé par l’incrimination, l’action civile est déclarée irrecevable» [4]. Telle est l’interprétation, classique donc, qui fut ici retenue.

Cette confirmation n’en est pas moins importante, à l’heure où la «triangulation» [5] du procès pénal confère à la victime une place sans cesse accrue [6], quoique souvent ambiguë et qui s’inscrit dans une logique compassionnelle ; à l’heure où l’accès au prétoire pénal est doté d’une signification symbolique majeure, celle de la reconnaissance de la «victime intime» [7]. Ces évolutions, confortées par la multiplication des droits d’accès collectifs à la justice pénale et la place accrue des associations de défense des victimes, s’inscrivent en porte-à-faux avec la nécessité de conserver à l’action civile devant le juge pénal un caractère accessoire, nécessairement limité à certaines infractions (les infractions «à victimes» [8]) et à certaines victimes (celles ayant personnellement subi l’atteinte réprimée par l’infraction).

2 - Des enseignements

Dans le contentieux terroriste, cette confirmation prend une signification plus importante encore, compte tenu de la multiplication des attentats ayant causé des victimes massives et la tentation, parfois dévoyée [9], d’obtenir une indemnisation devant le juge pénal. L’arrêt traduit une volonté de réserver le prétoire pénal aux plus directes des victimes des attentats. Le recours aux éléments constitutifs de l’infraction et au concept de bien juridique protégé par l’infraction constitue le support juridique d’une telle restriction. Dans le même sens, la Chambre criminelle avait également confirmé l’irrecevabilité de la constitution de partie civile des passants, «témoin[s] malheureux» des attentats du 13 novembre 2015, «comme d’autres personnes passant sur les voies publiques près des différents bars ou restaurants parisiens dont les clients ont été la cible des attaques perpétrées ce soir là», sans pour autant «se trouver dans la trajectoire des tirs terroristes»[10] -quand bien même ces personnes ont subi un stress post-traumatique. Si cette démarche de circonscription des constitutions de partie civile doit être approuvée dans son fondement et dans ses effets, elle n’en soulève pas moins la question de l’égalité des parties civiles individuelles et des parties civiles collectives, encouragées en matière terroriste. Les associations de défense des victimes d’actes de terrorisme sont en effet recevables à se constituer partie civile incidente par leur seule qualité, sous condition de délai (être déclarée depuis cinq ans à la date des faits) ou d’agrément [11].

Au-delà, l’arrêt constitue une pierre importante dans la conceptualisation des infractions terroristes et répond de façon inédite à certaines questions. Ainsi, la construction des infractions terroristes en forme de catégorie juridique pose la question de l’unité de la catégorie. Les infractions terroristes protègent-elles toutes le même bien juridique [12] ? L’enjeu est à la fois substantiel (examen de la nécessité de l’infraction au regard du bien juridique [13]) et procédural (unité ou pluralité du régime répressif). Sur ce point, l’arrêt du 12 mars 2019 est clair : la recevabilité de la constitution de partie civile ne doit s’examiner qu’au regard des infractions terroristes sur le fondement desquelles est ouverte l’instruction. Ces infractions, en l’espèce, les infractions à la législation sur les armes, la participation criminelle à un groupe terroriste et la tentative et complicité d’assassinat constituent, ensemble, une entreprise terroriste «n’étant susceptible d’avoir directement porté atteinte, au-delà des victimes personnes physiques, qu’aux intérêts de la nation». Pour la Chambre criminelle, les infractions terroristes doivent donc faire l’objet d’un examen individualisé du bien juridique protégé : les infractions terroristes ne protègent pas toutes et ensemble le(s) même(s) bien(s) juridique(s). En l’espèce, les infractions en cause ont en commun de protéger la vie et l’intégrité des personnes physiques. Une personne morale de droit public comme la ville de Nice n’est donc pas recevable à se constituer partie civile dès lors qu’elle ne peut avoir subi des préjudices de cette nature. Pour que sa constitution soit recevable, il faudrait que l’instruction soit, en outre, ouverte des chefs de destructions de biens publics en relation avec une entreprise terroriste -ce que permet le mécanisme de la constitution de partie civile principale et non incidente.

La Chambre criminelle précise en outre qu’au-delà des personnes physiques, les infractions terroristes en cause sont susceptibles d’avoir directement porté atteinte aux intérêts de la nation. C’est, d’une part et à la différence du Conseil constitutionnel [14], conférer une portée normative au plan du Code pénal qui incrimine les infractions terroristes au sein du livre IV du Code pénal. C’est, d’autre part, affirmer le caractère pluri-offensif, non seulement des incriminations terroristes les unes par rapport aux autres (toutes les infractions terroristes ne protègent pas le même bien juridique), mais encore de chaque infraction terroriste : ainsi, l’assassinat terroriste porte-t-il atteinte, à la fois à l’intégrité des personnes physiques et à la nation. Quelle est la portée de cette dernière affirmation ? D’un point de vue procédural, est-elle susceptible d’ouvrir la voie à de nouveaux types de constitutions de partie civile ou bien faut-il considérer que le ministère public est le représentant de la nation ? L’affirmation d’une telle atteinte rejaillit-elle sur la nature de l’infraction terroriste et sur ses liens avec l’infraction politique ?

On le voit, l’arrêt du 12 mars 2019 ouvre la voie à de nouvelles interrogations.

3 - Des interrogations

La principale d’entre elles concerne la détermination du bien juridique protégé par les infractions de prévention, qui deviennent prépondérantes dans la lutte contre le terrorisme [15]. Quel est le bien juridique protégé par les incriminations de financement du terrorisme, d’extraction de données issues de sites propagandistes, d’apologie du terrorisme ou des différentes formes de participation à un groupe terroriste ?

C’est finalement (re)poser la question des infractions d’intérêt général -qui répriment un comportement attentatoire à un intérêt exclusivement public et qui expriment des «besoins que les citoyens ne peuvent éprouver personnellement et qui les dépassent» [16]-. Toutes les infractions terroristes font-elles des victimes ? L’enjeu pourrait sembler purement théorique, mais il a une portée pratique importante : au-delà du contrôle de la nécessité de l’incrimination [17], il s’agit de savoir, lorsque l’auteur d’un attentat a été tué lors de l’attaque (ou pour y mettre fin) et que ne peuvent être poursuivis que des participants accessoires, si des victimes peuvent se constituer partie civile lorsque l’on ne peut imputer aux participants que les infractions de participation à un groupement et non une complicité d’assassinat [18]. Sur ce point, la Chambre criminelle laisse poindre une réponse, en insistant sur la «participation à des crimes d’atteintes aux personnes» : la participation à un groupe terroriste -tout comme les infractions à la législation sur les armes ?- porterait ainsi atteinte à l’intérêt qui serait altéré par la réalisation du but de l’entreprise (personnes/biens) et ne serait dès lors pas qualifiée d’infraction d’intérêt général malgré son caractère non lésionnaire. C’est ce que propose M. Detraz, jugeant «nécessaire d’assimiler […] au résultat légal la conséquence immédiate de fait qui en est l’une des variétés possibles» afin d’éviter que les infractions obstacles soient, par nature, dans l’impossibilité d’engendrer des victimes pénales.

La mobilisation du concept de bien juridique protégé pose une autre question sur le terrain procédural. Déjà, le Conseil constitutionnel a exclu les doubles prolongations de garde à vue lorsque l’infraction n’a pas pour objet la protection des personnes [19]. La Cour de cassation y ajoute des conséquences en matière de constitution de partie civile. A mesure que les incriminations terroristes se font préventives, on voit poindre une scission du régime de l’antiterrorisme [20]. Penser les incriminations terroristes par référence au bien juridique qu’elles protègent pourrait conduire à repenser le régime juridique applicable au terrorisme, à circonscrire le champ du dérogatoire en réintroduisant une exigence de nécessité des mesures de contrainte : c’est l’autre volet du principe de nécessité [21] qui pourrait se trouver réactivé.

 

[1] Pour des exemples, v. C. Ambroise-Castérot, Action civile, Rép. Pén., 2017, n° 126.

[2] Sur cette notion, v. M. Lacaze, Réflexion sur le concept du bien juridique protégé par le droit pénal, LGDJ, 2011, 558 p.

[3] Buisson et Guinchard, Procédure pénale, 2014, n° 1147.

[4] Desportes et Lazerges-Cousquer, Traité de procédure pénale, Economica, 2015, n° 1373. V. les réf. citées.

[5] Ch. Lazerges, Introduction, in La victime sur la scène pénale en Europe, C. Lazerges et G. Giudicelli-Delage (dir.), PUF, 2009 p. 17.

[6] En témoignent, au stade de l’exécution des peines, les droits de recours que confère l’article 707 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9874I34) à la victime.

[7] G. Giudicelli-Delage, Conclusion, in La victime sur la scène pénale en Europe, op. cit. p. 275.

[8] S. Detraz, La théorie des infractions d’intérêt général : moribonde ou assainie ?, Procédures, 2009, étude 10. Ce qui ouvre la question des infractions d’intérêt général : cf. infra.

[9] V. les récentes condamnations des «fausses victimes» des attentats du 13 novembre 2015, Fausses victimes du 13 novembre 2015 : le FGTI mobilisé contre la fraude, 9 avril 2019 [en ligne].

[10] Cass. crim., 11 avril 2018, n° 17-82.818, F-D (N° Lexbase : A1591XLI).

[11] C. pr. pén., art. 2-9 (N° Lexbase : L2567LBP). Il s’agit d’une extension ajoutée par la loi du 3 juin 2016 en réponse aux demandes des associations de victimes formées après les attentats du 13 novembre 2015 : M. Mercier, Rapport Sénat n° 491, 2015-2016.

[12] Sur la recherche du bien juridique protégé par les incriminations terroristes, v. J. Alix, Terrorisme et droit pénal. Etude critique des incriminations terroristes, Dalloz, 2010, §§ 536-583.

[13] V. R. Parizot, Pour un véritable principe de nécessité des incriminations, in Politique(s) criminelle(s). Mélanges en l’honneur de Christine Lazerges, Dalloz, 2014, p. 245 ; F. Rousseau, Le principe de nécessité. Aux frontières du droit de punir, RSC, 2015, p. 257.

[14] Cons. const., décision n° 2018-706 QPC, du 18 mai 2018 (N° Lexbase : A9687XMQ) qui dénie aux infractions d’apologie du terrorisme la qualité «d’actes de terrorisme», alors que ces infractions sont incriminées dans le chapitre premier du titre II du Livre IV du Code pénal intitulé «Des actes de terrorisme».

[15] J. Alix et O. Cahn, Mutations de l’antiterrorisme et émergence d’un droit répressif de la sécurité nationale, RSC, 2017 p. 845.

[16] S. Detraz, op. cit., n° 8.

[17] La question de l’offensivité aurait pu être un outil supplémentaire dans l’exercice du contrôle de la nécessité de l’incrimination de consultation des sites, ayant abouti à son abrogation ( Cons. const., décision n° 2016-611 QPC, du 10 février 2017 (N° Lexbase : A7723TBN) et Cons. const., décision n° 2017-682 QPC, du 15 décembre 2017 (N° Lexbase : A7105W7B).

[18] Ex. du procès Merah, où les deux protagonistes ont été condamnés en première instance pour infractions à la législation sur les armes et participation criminelle à un groupe terroriste : Cour d’assises de Paris, 2 novembre 2017.

[19] Cons. const., décision n° 2013-679 DC, du 4 décembre 2013, Loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière (N° Lexbase : A5483KQ7), consid. 76 et ses conséquences en matière de criminalité organisée non attentatoire aux personnes (C. pr. pén., art. 706-73-1 N° Lexbase : L2153LH9), puis d’apologie du terrorisme et d’extraction de données (C. pr. pén., art. 706-24-1 N° Lexbase : L4893K8Q).

[20] V. notamment le régime de l’apologie du terrorisme et des infractions «administrativo-pénales» de violation des interdictions administratives, exclues par exemple du champ d’application du FIJAIT : C. pr. pén., art. 706-25-4 (N° Lexbase : L1212LDA).

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Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Jurisprudence] Préjudice d’anxiété : un revirement attendu, beaucoup d’inconnues

Réf. : Ass. plén., 5 avril 2019, n° 18-17.442, P+B+R+I (N° Lexbase : A1652Y8P)

Lecture: 14 min

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par Christophe Willmann, Professeur à l’université de Rouen et Directeur scientifique de l’Encyclopédie «Droit de la protection sociale»

Le 17 Avril 2019

Préjudice d’anxiété • condition ; inscription de l’employeur sur une liste • abandon de cette condition • salarié • preuve • charge • employeur • jurisprudence «Air France»

 

Résumé

 

De nombreux salariés, qui ne remplissent pas les conditions prévues par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 (loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, de financement de la Sécurité sociale pour 1999 N° Lexbase : L5411AS9) modifiée ou dont l’employeur n’est pas inscrit sur la liste fixée par arrêté ministériel, ont pu être exposés à l’inhalation de poussières d’amiante dans des conditions de nature à compromettre gravement leur santé.

Il y a lieu d’admettre, en application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, que le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998.

Ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les textes.

Prive sa décision de base légale, la cour d’appel ayant retenu que ce préjudice résultant de l’inquiétude permanente, éprouvée face au risque de déclaration à tout moment de l’une des maladies mortelles liées à l’inhalation de fibres d’amiante, revêt comme tout préjudice moral un caractère intangible et personnel, voire subjectif. La cour d’appel s’est déterminée ainsi par des motifs insuffisants à caractériser le préjudice d’anxiété personnellement subi par M. X et résultant du risque élevé de développer une pathologie grave.

 

La Cour de cassation a rendu une décision attendue, opérant un impressionnant revirement de sa jurisprudence, en reconnaissant un droit à réparation du préjudice d’anxiété aux salariés, même si l’employeur n’est pas inscrit sur la liste fixée par arrêté ministériel. La Cour de cassation a admis que ces salariés ont pu être exposés à l’inhalation de poussières d’amiante dans des conditions de nature à compromettre gravement leur santé, sous-entendu : il était injuste de les priver d’une réparation du préjudice d’anxiété, au motif que leur employeur n’a pas été classé. La couverture médiatique et doctrinale [1] est à la hauteur de ce revirement.

Mais il serait tout à fait hasardeux et non fondé scientifiquement de limiter la portée de l’arrêt rapporté à la question de l’«exist-liste», c’est-à-dire la suppression de l’exigence d’avoir travaillé dans une entreprise inscrite sur une liste, pour bénéficier d’un droit à réparation du préjudice d’anxiété :

- l’Assemblée plénière a confirmé la jurisprudence «Air France», selon laquelle l’employeur peut s’exonérer de sa responsabilité en apportant la preuve qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Le salarié doit apporter la preuve du préjudice (arrêt rapporté) ; parallèlement, l’employeur doit apporter la preuve qu’il a pris toutes les mesures nécessaires (arrêt «Air France»). Les deux parties sont désormais en situation d’égalité sur le terrain probatoire ;

- enfin, l’Assemblée plénière confirme l’importance que les juges du fond doivent comprendre, de caractériser le préjudice d’anxiété personnellement subi par le salarié, et de ne pas s’en tenir à des considérations générales telles que «le préjudice subi par la victime revêt un caractère intangible et personnel, voire subjectif». L’enjeu est donc celui de l’appréciation du préjudice, et de son caractère subjectif (ressenti de la victime) ou objectif (c’est-à-dire, objectivable).

 

 

I - Droit à réparation de la victime : un revirement, des inconnues et incertitudes

 

 

A - Une certitude, l’«exist-liste»

 

 

La Cour de cassation (arrêt rapporté) décide donc de revenir sur sa jurisprudence antérieure, relative à la condition, pour les salariés, d’avoir travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel. L’Assemblée plénière a supprimé cette condition de classement sur une liste, expression de l’«exit-liste» (sic).

 

 

1 - Condition d’inscription sur une liste : appréciation judiciaire restrictive

 

 

Dès 2010 [2], la Cour de cassation a admis que les salariés se trouvent par le fait de l’employeur dans une situation d’inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante, dès lors qu’ils ont travaillé dans un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi de 1998 (et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel) pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante.

La jurisprudence était restrictive, en ce que la Cour de cassation réservait le préjudice d’anxiété aux seuls salariés d’entreprise nominativement inscrites dans les listes (préc.) :

- la solution a été reproduites, dans les mêmes termes, et selon la même formulation, à de nombreuses reprises, notamment en 2015 [3] ;

- la cour d’appel de Bordeaux a débouté des salariés et retraités de la Monnaie de Paris à Pessac, parce que cet établissement n’était pas classé dans la liste (préc.) [4] ;

- la Cour de cassation a refusé la réparation du préjudice d’anxiété à des salariés, même à titre subsidiaire s’ils n’ont pu obtenir réparation du préjudice d’anxiété faute d’avoir travaillé sur un site figurant sur la liste des établissements ouvrant droit à l’ACAATA [5] ;

- les salariés du syndicat des copropriétaires de la tour Montparnasse ne peuvent pas non plus prétendre à une indemnisation, faute d’avoir travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 [6] ;

- les mineurs de fond exposés au cours de leur activité professionnelle à des substances toxiques, certaines cancérigènes, parmi lesquelles l’amiante, ne peuvent pas prétendre à une réparation du préjudice d’anxiété, parce que, selon la cour d’appel de Metz [7], la condition du classement sur une liste n’est pas remplie ; 

- en dernier lieu, en 2018 [8], la Cour a maintenu sa solution, y compris sur le fondement d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

 

2 - Limites et critiques

 

Critiquée, cette jurisprudence était injuste, car elle aboutissait à un refus de prise en charge du préjudice d’anxiété à des salariés pourtant bien exposés à des poussières d’amiante :

- les salariés sous-traitants étaient alors exclus du bénéfice de l’indemnisation, les salariés ayant travaillé dans un établissement classé mais pour le compte d’un sous-traitant, ce alors même que ces derniers pouvaient, dans le même temps, selon la deuxième chambre civile, bénéficier du dispositif de préretraite [9].

- les salariés mis à disposition [10] ;

- les salariés ayant travaillé pour une entreprise de réparation et de construction navale, certes inscrite sur la liste, mais n’y ayant pas exercé l’un des métiers visés par cette même liste [11] ;

- enfin, les travailleurs éligibles à l’ACAATA dont l’établissement n’est pas listé [12]

 

3 - Nécessité d’une évolution de la jurisprudence/revirement

 

Ce revirement était attendu par la doctrine [13] et une partie des juridictions. La cour d’appel de Paris (CA Paris, Pôle 6, 8ème ch., 29 mars 2018, n° 13/12586) [14] avait plaidé pour un élargissement de la réparation du préjudice d’anxiété. En 2015, les juges du fond avaient également refusé de tenir compte de l’exigence de l’inscription sur une liste (Cass. soc3 mars 2015, n° 13-26.175, FP-P+B+R N° Lexbase : A9022NC7) et admis la réparation du préjudice d’anxiété, peu importe que l’employeur n’était pas mentionné à l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 : le salarié a été directement exposé à l’amiante de février 1970 à avril 1979 ; l’employeur n’a pas rapporté la preuve que toutes les mesures nécessaires ont été prises pour protéger de manière collective et individuelle, le personnel exposé aux poussières d’amiante.

Enfin, en 2012, une cour d’appel [15] avait reconnu que l’exposition à l’amiante a créé un préjudice d’anxiété, alors que le salarié n’a pas été bénéficiaire de la préretraite amiante ; pas plus, l’établissement n’a pas été classé parmi les établissements mentionnés par la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 (art. 41).

 

B - Les inconnues

 

L’arrêt rapporté résout une difficulté majeure, relative à la condition d’inscription sur une liste, pour l’entreprise ; mais en réglant cette difficulté, il en créé d’autres : incertitudes en droit de la preuve ; inconnue du régime de la prescription applicable ; enfin, incertitudes, là aussi, s’agissant de l’appréciation du préjudice à laquelle la Cour entend se livrer. La condition relative à l’âge reste sans doute le point le moins délicat.

 

1 - Condition d’âge

 

La Cour de cassation, depuis 2010, exige que le salarié remplisse les conditions d’adhésion à la préretraite amiante (prévues par l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et l’arrêté ministériel) pour bénéficier d’une réparation pour préjudice d’anxiété. En d’autres termes, deux conditions sont posées :

  • la première est de travailler ou d’avoir travaillé dans un des établissements et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du Travail, de la Sécurité sociale et du Budget, pendant la période où y étaient fabriqués des matériaux contenant de l’amiante ;
  • la seconde est d’avoir atteint un âge déterminé («avoir atteint l’âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans»).

 

Par l’arrêt rapporté, l’Assemblée plénière s’est prononcée, expressément, sur le retrait de la première condition, relative à l’inscription de l’entreprise employeur, sur une liste. Mais la Cour (arrêt rapporté) n’a pas utilisé la formule originelle, selon laquelle le salarié doit être éligible à la préretraite amiante (Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13-26.175, FP-P+B+R, préc.).

 

L’Assemblée plénière supprime expresso verbis la première condition (portant sur l’inscription de l’entreprise sur une liste) mais ne donne aucune indication sur la seconde (avoir atteint un âge déterminé). Une lecture stricte des termes de l’arrêt conduit à envisager l’hypothèse d’une volonté de la Cour d’opérer un revirement, s’agissant de la première condition, mais de maintenir sa jurisprudence, s’agissant de la seconde [16]. Le revirement n’est donc que partiel : l’Assemblée plénière ne revient pas sur la référence générale d’éligibilité, définie par l’adhésion à la préretraite amiante (prévues par l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et l’arrêté ministériel) pour bénéficier d’une réparation pour préjudice d’anxiété. Bref, si les salariés de toutes les entreprises peuvent désormais demander réparation du préjudice d’anxiété, indépendamment de leur inscription, acceptée ou refusée, sur une liste, encore faut-il qu’ils justifient d’une condition d’âge.

 

2 - Droit de la preuve

 

Jusqu’à l’arrêt rapporté : présomption d’exposition et de préjudice

 

Cette présomption jouait, du seul fait que l’entreprise était classée [17]. Elle a d’ailleurs été critiquée. La cour d’appel de Paris (arrêt préc.) a relevé que la jurisprudence retenue par la Cour de cassation a finalement débouché sur un régime «dérogatoires - au regard du caractère systématique de l’indemnisation de ce préjudice qui décharge les salariés concernés du fardeau de toute preuve». Finalement, en réalité, le salarié exposé à des poussières d’amiante et placé de ce fait en situation d’anxiété, bénéficiait d’un triple régime de présomption :

  • présomption d’exposition significative aux poussières d’amiante dans un établissement inscrit dans une liste ;
  • présomption de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité (du fait de l’inscription de l’entreprise sur la liste) ;
  • enfin, d’une présomption de dommage (l’anxiété) résultant de ce manquement [18].

 

Revirement de jurisprudence : la présomption ne joue plus.

 

C’est l’une des conséquences de l’arrêt rapporté : puisque la Cour de cassation supprime la condition relative au classement des entreprises sur une liste (en application de l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998), la présomption qu’elle faisait jouer automatiquement, du fait de cette inscription sur une liste, ne joue plus. Le salarié ne peut donc plus se prévaloir d’une présomption d’exposition et de préjudice associées au classement de l’entreprise.

Il devra apporter la preuve du préjudice, du comportement fautif de l’employeur et du lien de causalité. Le Premier avocat général [19] suggère, comme pistes de réflexion :

  • le salarié devra apporter la preuve d’une exposition aux poussières d’amiante «importante en durée et en intensité» ;
  • le salarié devra apporter la preuve de la réalité de son préjudice, l’anxiété, à partir d’éléments subjectifs (son ressenti) ou objectifs (retenue par l’avocat général) [20].

 

3 - Prescription

 

Jusqu’à présent, la Cour de cassation [21] admettait que le préjudice d’anxiété naît à la date à laquelle les salariés ont connaissance de l’arrêté ministériel d’inscription de l’établissement sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre de l’ACAATA. Puisque la Cour de cassation supprime la condition relation à l’inscription de l’entreprise à laquelle appartenait/appartient le salarié, sur une liste (établissements mentionnés à l’article 41 de la loi de 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel), quelles conséquences tirer, en termes de décompte de la prescription ?

 

La Cour de cassation (arrêt rapporté) est donc revenue sur la solution retenue en 2014, selon laquelle le point de départ du délai n’est pas la date de la rupture du contrat de travail des salariés, mais la date à partir de laquelle les salariés, bénéficiaires de l’ACAATA, ont eu connaissance du risque à l’origine de l’anxiété, c’est-à-dire, à compter de l’arrêté ministériel ayant inscrit l’activité de réparation et de construction navale de la société sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre de ce régime légal spécifique [22].

 

L’Assemblée plénière fait donc référence au droit commun de la preuve, qui sera établie par tous moyens. Le premier avocat général [23] propose :

- pour les salariés dont l’entreprise appartient à une liste, de maintenir la solution en vigueur auparavant par la jurisprudence ;

- pour les salariés ne pouvant se prévaloir d’un contrat de travail, ou pour lesquels l’employeur n’était pas listé, d’«établir par tous moyens la date à laquelle il a eu conscience de cette exposition et de ses dangers, à charge pour l’employeur de démontrer avoir donné à une date plus ancienne au salarié une information précise et personnelle sur cette exposition».

 

4 - Appréciation du préjudice

 

En l’espèce, la Cour (arrêt rapporté) décide de censurer l’arrêt rendu par les juges du fond, dont la décision est dépourvue de base légale, la cour d’appel ayant retenu que ce préjudice résultant de l’inquiétude permanente, éprouvée face au risque de déclaration à tout moment de l’une des maladies mortelles liées à l’inhalation de fibres d’amiante, revêt comme tout préjudice moral un caractère intangible et personnel, voire subjectif. La cour d’appel s’est déterminée ainsi par des motifs insuffisants à caractériser le préjudice d’anxiété personnellement subi par le salarié et résultant du risque élevé de développer une pathologie grave.

 

5 - Coût financier

 

Ce dernier point avait été soulevé par la doctrine, en son temps [24]. Il explicite, à lui seul, les conditions restrictives posées par la Chambre sociale de la Cour de cassation :

  • inscription de l’entreprise sur la liste, à défaut de quoi la prise en charge du préjudice d’anxiété est refusée ;
  • limitation du droit de la réparation à la seule exposition à l’amiante, à l’exclusion des autres facteurs de toxicité ;
  • exigence d’un contrat de travail liant le salarié à son employeur, à l’exclusion de tout autre lien juridique (…).

 

Mais l’Assemblée plénière n’a pas été sensible à cet argument financier, d’une part, pour une question purement juridique de faiblesse technique de la jurisprudence élaborée jusqu’alors par la Chambre sociale, qui avait lié le sort de la réparation (préjudice d’anxiété) à un dispositif (l’ACAATA, préretraite amiante) qui lui est totalement étranger ; d’autre part, pour une question de principe, l’égalité de traitement entre les victimes exposées à l’amiante, dont le sort dépendait du statut de leur employeur (inscrit, ou non, sur la liste).

 

Dans un arbitrage coût financier/principe juridiques (discrimination), l’analyse proposée par l’avocat général [25] a prévalu.

 

 

II - Obligation de sécurité de l’employeur

 

 

L’arrêt rapporté introduit une totale rupture avec sa jurisprudence antérieure, en élargissant considérablement le champ d’application des entreprises susceptibles d’indemniser leurs salariés, exposés à de l’amiante, et souffrant de ce fait d’un préjudice d’anxiété ; de même, le constat d’un revirement de jurisprudence, portant sur l’abandon de la condition d’inscription sur une liste, ouvrant au bénéfice des salariés une présomption d’exposition et de préjudice, signifie que les salariés doivent désormais apporter la preuve de la réalité de leur préjudice, ainsi que son lien de causalité : parallèlement, la Cour admet que l’employeur, lui aussi, apporte la preuve qu’il pris toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

 

A - Nouveau périmètre de l’obligation d’indemnisation des salariés exposés

 

1 - Une certitude

 

La nouveauté (arrêt rapporté) tient à la rédaction même de l’arrêt, «en application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, que le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998». En d’autres termes, la Cour de cassation (arrêt rapporté) élargit le périmètre des employeurs susceptibles d’être débiteurs d’une obligation de réparation, dès lors qu’ils ont exposé des salariés à des matériaux contenant de l’amiante, qu’ils soient ou pas inscrits sur la liste. Hier, le champ d’application du droit de la réparation du préjudice d’anxiété était donc extrêmement restreint. Aujourd’hui, depuis l’arrêt rapporté, il est au contraire extrêmement large, car toutes les entreprises ont vocation à être condamnées.

 

2 - Une incertitude : les transferts de contrats de travail

 

La Cour de cassation s’était prononcée, en 2017 [26], sur la question du transfert d’entreprise, et avait décidé que l’identification de la société sur laquelle va peser la charge de l’indemnisation est fonction de la date du transfert, intervenu avant ou après l’arrêté d’inscription du site sur la liste des établissements classés ACAATA. En l’espèce, le transfert des contrats de travail à la société B. était intervenu le 1er juillet 1988, soit antérieurement à l’arrêté ministériel d’inscription de l’établissement sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre de l’ACAATA, de sorte que ce préjudice ne constituait pas une créance due à la date de la modification de la situation juridique de l’employeur. Le nouvel employeur, condamné à indemniser les salariés transférés au titre du préjudice d’anxiété, ne pouvait demander aucun remboursement à l’ancien employeur.

 

Mais dans la mesure où la Cour de cassation autorise l’indemnisation du préjudice d’anxiété aux salariés, même dans l’hypothèse où l’entreprise n’est pas classée (liste des établissements ayant fabriqué des matériaux contenant de l’amiante et ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante), se pose nécessairement la question de la pertinence de cette jurisprudence, qui s’appuie expressément sur la date d’inscription sur la liste.

En 2018 [27], la même solution a été retenue : le transfert des contrats de travail à la société cessionnaire était intervenu le 1er janvier 2007, soit antérieurement à l’arrêté ministériel d’inscription de l’établissement sur la liste de ceux permettant la mise en œuvre de l’ACAATA du 28 avril 2010, de sorte que ce préjudice ne constituait pas une créance due à la date de la modification de la situation juridique de l’employeur.

 

B - Confirmation de la jurisprudence «Air France»

 

Avec sa jurisprudence «Air France» [28], la Cour de cassation ouvre aux employeurs la possibilité de s’exonérer de leur responsabilité, en apportant la preuve qu’ils ont mis en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (actions de prévention des risques professionnels ; actions d’information et de formation ; mise en place d’une organisation et de moyens adaptés : visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail).

 

La Cour de cassation a confié aux juges du fond la mission d’appréciation des éléments de fait et de preuve qui leur sont soumis, d’évaluer le comportement de l’employeur, notamment la pertinence des mesures de prévention et de sécurité prises et leur adéquation au risque connu ou qu’il aurait dû connaître.

 

Cette possibilité ouverte aux employeurs d’apporter la preuve qu’ils ont mis en œuvre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité paraît cohérente, d’un double point de vue cohérente, d’une part, avec l’abandon de la présomption attachée à l’inscription d’une entreprise sur la liste, permettant automatiquement de ce fait au salarié de prétendre à réparation du préjudice d’anxiété. La Cour de cassation (arrêt rapporté), abandonnant cette condition, remet le salarié en situation de droit commun de la responsabilité civile (charge de la preuve du dommage, lien de causalité, préjudice). Donner aux employeurs la possibilité d’apporter la preuve qu’ils ont rempli leur mission de garantie de la sécurité permet donc, par symétrie, de mettre les parties en situation d’égalité. D’autre part, elle est cohérente également avec l’évolution de l’obligation de sécurité, qui, de résultat, est (re)devenue une obligation de moyens. Cette évolution, appelée de ses vœux par la doctrine et les certains magistrats eux-mêmes (Jean-Yves Frouin) [29]. La Cour de cassation (arrêt rapporté) a consacré ces réflexions en abandonnant le caractère d’obligation de sécurité de résultat («[…] il y a lieu d’admettre, en application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur […]»). 

 

Décision

 

Ass. plén., 5 avril 2019, n° 18-17.442, P+B+R+I (N° Lexbase : A1652Y8P)

 

Textes concernés : C. trav., art. L. 4121-1 (N° Lexbase : L8043LGY), réd. antérieure à l’ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 ; L. 4121-2 (N° Lexbase : L6801K9R) ; C. civ., art. 1147 (N° Lexbase : L1248ABT), réd. antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

 

Lien base : (N° Lexbase : E0814E9Z).

 

 

[1] M. Bacache, note dans la chronique «Responsabilité civile», JCP éd. G, n° 15, 15 avril 2019, doctr. 407 ; JCP éd. S, n° 15, 16 avril 2019, act. 158 ; C. Courcol-Bouchard, Premier avocat général, Avis (site internet de la Cour de cassation) ; C. Vieillard, Rapport du conseiller-rapporteur, (site internet Cour de cassation) ; M. Keim-Bagot, La cohérence retrouvée du préjudice d’anxiété, SSL, n° 1857, 15 avril 2019 ; F. Quinquis, La prévention des risques au cœur du préjudice d’anxiété, SSL, n° 1857, 15 avril 2019 ; Préjudice d’anxiété : le revirement de jurisprudence décrypté par J. Frangie-Moukanas, LSQ, n° 17796, 12 avril 2019 ; J. Frangié-Moukanas, Deux régimes juridiques pour le préjudice d’anxiété, SSL, n° 1857, 15 avril 2019.

[2] Cass. soc., 11 mai 2010, n° 09-42.241, FP-P+B+R (N° Lexbase : A1745EXW), Bull. civ. V, n° 106 ; Cour de cassation, Rapport annuel 2010, p. 318 ; D. 2010, 2048, note C. Bernard, 2011, 37, obs. O. Gout, et 2012, 910, obs. P. Lokiec ; RTD civ., 2010, 564, obs. P. Jourdain ; SSL, n° 1459, supplément du 20 septembre 2010 ; Avis de J. Duplat, Sur les préjudices économique et d’anxiété des salariés bénéficiaires de l’ACAATA, SSL, n° 1459, supplément 20 septembre 2010 ; LSQ, n° 15611 du 17 mai 2010 ; P. Stoffel-Munck, JCP éd. G, n° 41, 11 octobre 2010, doct. 1015.

[3] Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13-26.175, FP-P+B+R (N° Lexbase : A9022NC7) ; P. Jourdain, Préjudice d’anxiété, d’étranges disparités, RTD civ., 2015, p. 393 ;  JCP éd. S, 2015, 1106, note D. Asquinazi-Bailleux ; JCP éd. E, 2015, 1257, note J. Colonna et V. Renaux-Personnic ; RTD civ., 2015, p. 393, obs. P. Jourdain ; Dr. soc., 2015, p. 360, note M. Keim-Bagot ; nos obs., Préjudice d’anxiété : tout n’est pas réparable, tous ne peuvent être indemnisés, Lexbase, éd. soc., n° 605, 19 mars 2015 (N° Lexbase : N6461BUT).

[4] LSQ, L’actualité, n° 17576, section acteurs, débats, événements, 25 mai 2018.

[5] Cass. soc., 26 avril 2017, n° 15-19.037, FS-P+B (N° Lexbase : A2706WBT) ; Cass. soc., 21 septembre 2017, n° 16-15.130, FS-P+B (N° Lexbase : A7612WSQ).

[6] Cass. soc., 21 septembre 2017, n° 16-15.130, FS-P+B, préc. ; H. Groutel, Responsabilité civile et assurances n° 12, décembre 2017, comm. 311 ; X. Aumeran, Obligation de sécurité de l’employeur et préjudice moral des travailleurs de l’amiante, JCP éd. S, n° 46, 21 novembre 2017, 1372.

[7] CA Metz, 7 juillet 2017, n° 16/02938 (N° Lexbase : A6689WN3), JCP éd. G, n° 48, 27 novembre 2017, 1267, Zoom par Y. Gasser. 

[8] Cass. soc., 5 avril 2018, n° 16-19.002, F-D (N° Lexbase : A4620XKC), JCP éd. E, n° 17, 26 avril 2018, act. 316 : le préjudice moral résultant pour un salarié du risque de développer une maladie induite par son exposition à l’amiante est constitué par le seul préjudice d’anxiété dont l’indemnisation, qui n’est ouverte qu’au salarié qui a travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités lamiante ou des matériaux contenant de l’amiante, répare l’ensemble des troubles psychologiques résultant de la connaissance d’un tel risque.

[9] Cass. civ. 2, 7 juillet 2016, n° 15-20.627, F-D (N° Lexbase : A9925RWI) et Cass. civ. 2, 15 juin 2017, n° 16-20.511, F-D (N° Lexbase : A2210WIP) ; Cass. soc., 11 janvier 2017, n° 15-50.080, FS-P+B (N° Lexbase : A0723S8B).

[10] Cass. soc., 22 juin 2016, n° 14-28.175, FS-P+B (N° Lexbase : A2671RUH) : JCP éd. S, 2016, 1333, note D. Asquinazi-Bailleux ; Gaz. pal. 11 octobre 2016, p. 57, obs. J. Bourdoiseau.

[11] Cass. soc., 25 mars 2015, n° 13-21.716, FS-P+B (N° Lexbase : A6608NEH), Bull. civ. V, n° 63

[12]  Cass. soc., 15 décembre 2015, n° 14-22.441, FS-P+B (N° Lexbase : A8522NZN) : JCP éd. S, 2016, 1052, note D. Asquinazi-Bailleux ; JCP éd. E, 2016, 1580, obs. J. Colonna ; Resp. civ. et assur., 2016, comm. 79, note C. Corgas-Bernard.

[13] Not., D. Asquinazi-Bailleux (not. Le préjudice d’anxiété des mineurs de charbon de Lorraine : la cour d’appel de Metz refuse de le réparer, JCP éd. S, n° 37, 19 septembre 2017, 1285 ; ou JCP éd. S, n° 7, 21 février 2017, 1054) ; X. Aumeran (bibl. préc.) ; O. Cachard et J.-M. Gasser (La protection du salarié contre l’exposition aux champs électromagnétiques, JCP éd. S, n° 46, 21 novembre 2017, 1367) ; P. Jourdain (RTD civ., 2015, p. 393) ; F. Champeaux (bibl. préc.) ; A. Guégan-Lécuyer, Le curieux destin du préjudice spécifique d’anxiété des salariés exposés à l’amiante causé par le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, Revue des contrats, 1er septembre 2015, n° 03, p. 473; M. Keim-Bagot (bibl. préc., not. Préjudice d’anxiété : l’impossible réparation hors liste ACAATA ?, Les cahiers sociaux n° 299, août-sept. 2017, p. 2-3 ; Préjudice d’anxiété : la Cour de cassation referme la boîte de Pandore, Dr. soc., 2015, p. 360) ; ou nos obs. (bibl. préc., not. Préjudice d’anxiété : tout n’est pas réparable, tous ne peuvent être indemnisés, Cass. soc., 3 mars 2015, quatre arrêts, Lexbase, éd. soc., préc.).

[14] CA Paris, Pôle 6, 8ème ch., 29 mars 2018, n° 13/12586, SSL, n° 1810, 9 avril 2018 : «il importe peu que ce préjudice ait été qualifié d’«anxiété» par la Cour de cassation, dès lors que ce qualificatif n’emporte en lui-même aucun effet juridique, les termes de «préjudice d’anxiété» étant d’ailleurs retenus et employés dans des situations où la victime invoque l’inhalation de substances nocives autres que l’amiante ; qu’au-delà des mots, qui ne peuvent suffire à créer ou écarter un préjudice, c’est la description de ce préjudice, sa réalité et son imputabilité à la société EDF qui, selon le droit commun de la responsabilité, doivent déterminer l’appréciation par la cour de l’indemnisation requise par l’appelant […] les dispositions et le régime général de la responsabilité demeurent, en effet, applicables aux salariés exposés à l’amiante, travaillant pour des entreprises «non listées […] comme les salariés des entreprises «listées», les salariés qui ont travaillé pour la société EDF et ont été exposés à l’inhalation de poussières d’amiante sont en mesure d’éprouver, eux aussi, l’inquiétude permanente de voir se déclarer à tout moment l’une des graves maladies liées à cette inhalation».

[15] CA Versailles, 1er février 2012, n° 10/04410 (N° Lexbase : A8520IB8).

[16] En ce sens, voir la note explicative relative à l’arrêt n° 643 du 5 avril 2019 - Assemblée plénière (site internet Cour de cassation), précisant «Par le présent arrêt, l’Assemblée plénière, sans revenir sur le régime applicable aux travailleurs relevant des dispositions de l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 […]».

[17] M. Bacache, Préjudice d’anxiété et exposition à l’amiante, JCP éd. G, 2016, doct., 117.

[18] C. Courcol-Bouchard, Premier avocat général, Avis, préc., p. 10-11.

[19] C. Courcol-Bouchard, Premier avocat général, Avis, préc., p. 14.

[20] «La seule preuve d’une exposition importante aux poussières d’amiante pourrait permettre de présumer l’anxiété de celui qui s’en prévaut», C. Courcol-Bouchard, Premier avocat général, Avis, préc., p. 16.

[21] Cass. soc., 2 juillet 2014, n° 12-29.788, FS-P+B (N° Lexbase : A2718MTT), Bull. civ. V, n° 160 ; Rapport du Conseiller, 5 avril 2019, site internet de la Cour de cassation, préc., p. 13-14 ; D. Asquinazi-Bailleux, JCP éd. S, n° 44, 2014, 1415. La solution a été confirmée à de nombreuses reprises, not. Cass. soc., 5 avril 2018, n° 17-10.402, préc..

[22] Cass. soc., 19 novembre 2014, n° 13-19.263, FS-P+B (N° Lexbase : A9287M3D), note sous arrêt par B. Aldigé, avocat général à la Cour de cassation, JCP éd. G, n° 52, 22 décembre 2014, 1342 ; note sous arrêt par F. Bousez, JCP éd. G, n° 52, 22 décembre 2014, 1343 ; JCP éd. E, n° 51-52, 18 décembre 2014, 1664.

[23] C. Courcol-Bouchard, Premier avocat général, Avis, préc., p. 17.

[24] M. Keim-Bagot, Préjudice d’anxiété : sortir de l’impasse, Les Cahiers sociaux, 1er mai 2018, n° 307, p. 13 ; M. Keim-Bagot, Préjudice d’anxiété : la Cour de cassation referme la boîte de Pandore, Dr. soc. 2015, p. 360.

[25] C. Courcol-Bouchard, Premier avocat général, Avis, préc., p. 13.

[26] Cass. soc., 22 novembre 2017, n° 16-20.666, FS-P+B (N° Lexbase : A5815W3R), JSL, n° 447, 9 février 2018 ; JCP éd. S, 2018, 1042, note D. Asquinazi-Bailleux.

[27] Cass. soc., 5 avril 2018, n° 17-10.402, F-D (N° Lexbase : A4384XKL), JCP éd. E, n° 17, 26 avril 2018, act. 317.

[28] Cass. soc., 25 novembre 2015, n° 14-24.444, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A7767NXX) ; JCP éd. S, 2016, 1011, étude M. Babin ; commentaire de la décision du 25 novembre 2015 au Rapport annuel de la Cour de cassation, p. 166.

[29] J.-Y. Frouin, LSQ, L’actualité, n° 17423, 11 octobre 2017 ; C. Vieillard, rapport du conseiller-rapporteur, préc., p. 55.

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Affaires

[Brèves] Adoption définitive de la loi «PACTE» et saisine du Conseil constitutionnel

Réf. : Projet de loi, relatif à la croissance et la transformation des entreprises adopté le 11 avril 2019

Lecture: 2 min

N8580BX3

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par Vincent Téchené

Le 17 Avril 2019

Le 11 avril 2019, l’Assemblée nationale a définitivement adopté la loi «PACTE», texte, qui après d’âpres débats parlementaires, comporte à l’heure actuelle 221 articles représentant pas moins de 408 pages. Cette loi «fourre-tout» touche de très nombreux domaines du droit, tout particulièrement le droit des affaires (notamment le droit des sociétés, le droit des entreprises en difficulté, le droit bancaire et financier, le droit commercial, le droit de la propriété intellectuelle…), le droit fiscal et le droit social (cf. projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, texte définitif). Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 avril 2019 ; la publication au Journal officiel devrait donc intervenir dans le courant de la deuxième quinzaine au mois de mai après être passé sous les fourches caudines des Sages de la rue de Montpensier.

 

Le texte actuel comporte des mesures emblématiques, notamment :

- la création d’une plateforme en ligne pour la création des entreprises qui remplacera les sept réseaux de centres de formalités ;

- la création d’un registre général dématérialisé centralisant les informations des entreprises ;

- l’habilitation des services de presse en ligne à publier les annonces légales et judiciaires et l’instauration d’une tarification au forfait ;

- la suppression de l'obligation d'un compte bancaire dédié à l'activité professionnelle pour les microentreprises les plus modestes ;

- la suppression d’une obligation de stage de préparation à l’installation pour les entreprises artisanales ;

- la modification des seuils d’effectifs (regroupés sur trois niveaux, 11, 50, 250 salariés) et l’harmonisation du mode de calcul sur celui du Code de la Sécurité sociale ;

- l’harmonisation et le relèvement des seuils de certification des comptes par les commissaires aux comptes ;

- l’augmentation du taux minimal des avances versées par l'Etat aux PME titulaires de marchés public de l'Etat ;

- l’habilitation à réformer par ordonnance en profondeur le droit des sûretés ;

- accroître les possibilités de recourir au rétablissement personnel et à la liquidation judiciaire simplifiée ;

- l’ouverture du PEA-PME aux titres émis dans le cadre du financement participatif et la création du PEA jeunes ;

- en matière d’assurance-vie, la modernisation des fonds Euro-croissance et l’obligation de présenter au moins une unité de compte investissement socialement responsable (ISR), solidaire ou verte ;

- la simplification des règles encadrant l’épargne-retraite, la portabilité des produits d’épargne-retraite et la modification de la fiscalité y afférente ;

- la création d’une demande provisoire de brevet, d’une nouvelle procédure d’opposition devant l’INPI et d'un examen a priori du critère d’inventivité des brevets ;

- l’assouplissement du régime des fonds communs de placement à risques ;

- la mise en place d’un encadrement des ICO ;

- la réforme de l’épargne salariale, avec notamment la suppression du forfait social ;

- la réforme des actions de préférence ;

- l’introduction dans le droit des sociétés de la notion d'intérêt social de l'entreprise, la reconnaissance de la possibilité aux sociétés qui le souhaitent de se doter d’une raison d’être dans leurs statuts et la création d'un statut de société à mission ;

- le renforcement des administrateurs salariés dans les conseils ;

- la réforme de la Caisse des dépôts et consignation ;

- la création des fonds de pérennité ;

- l’instauration d’un régime de partage des plus-values de cession de titres avec les salariés de société.

 

Lexbase Hebdo - édition affaires consacrera un numéro spécial courant mai aux principales dispositions de la loi  «PACTE»  après sa publication au Journal officiel. 

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Baux commerciaux

[Brèves] La garantie solidaire du cédant : ordre public et application dans le temps de l’article L. 145-16-2 du Code de commerce issu de la loi «Pinel»

Réf. : Cass. civ. 3, 11 avril 2019, n° 18-16.121, FS-P+B+I (N° Lexbase : A8978Y8Z)

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N8561BXD

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par Julien Prigent

Le 17 Avril 2019

► L’article L. 145-16-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L1932I4C), issu de la loi «Pinel» (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 N° Lexbase : L4967I3D), qui revêt un caractère d’ordre public, ne répond pas à un motif impérieux d’intérêt général justifiant son application immédiate et la garantie solidaire, dont ce texte limite la durée à trois ans, ne constitue pas un effet légal du contrat mais demeure régie par la volonté des parties ;

► il n’est donc pas immédiatement applicable.

 

Tels sont les enseignements d’un arrêt de la Cour de cassation du 11 avril 2019 (Cass. civ. 3, 11 avril 2019, n° 18-16.121, FS-P+B+I N° Lexbase : A8978Y8Z).

 

En l’espèce, le locataire commercial de différents sites industriels avait fait apport partiel de branches de son activité exercée sur ces sites à différentes sociétés constituées à cet effet. Le 28 décembre 2012, le bailleur des sites a assigné ès qualités le mandataire liquidateur des sociétés bénéficiaires des apports, ainsi que le locataire initial, les premières en paiement des loyers et charges dus et la dernière en garantie solidaire. Le bail stipulait, en effet, que le preneur resterait garant solidairement avec son cessionnaire du paiement des loyers et des charges jusqu’à l’expiration de la durée restant à courir du bail à compter de la date de cession.

Le cédant reprochait aux juges du fond (CA Paris, Pôle 5, 3ème ch., 7 février 2018, n° 16/07034 N° Lexbase : A9487XCD) de déclarer inapplicable la limitation de garantie prévue par l’article L. 145-16-2 du Code de commerce, selon lequel «si la cession du bail commercial s'accompagne d'une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, celui-ci ne peut l'invoquer que durant trois ans à compter de la cession dudit bail».

 

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi en apportant les deux précisions précitées (cf. l’Ouvrage «baux commerciaux» N° Lexbase : E3877AXU).

newsid:468561

Durée du travail

[Brèves] Calcul de la durée moyenne hebdomadaire de travail : possibilité de prévoir des périodes de référence qui commencent et se terminent à des dates calendaires fixes

Réf. : CJUE, 11 avril 2019, aff. C-254/18 (N° Lexbase : A8885Y8L)

Lecture: 2 min

N8541BXM

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par Charlotte Moronval

Le 17 Avril 2019

► Une réglementation nationale peut prévoir, aux fins du calcul de la durée moyenne hebdomadaire de travail, des périodes de référence qui commencent et se terminent à des dates calendaires fixes, pourvu qu’elle comporte des mécanismes permettant d’assurer que la durée moyenne maximale hebdomadaire de travail de 48 heures est respectée au cours de chaque période de six mois à cheval sur deux périodes de référence fixes successives.

 

Telle est la solution apportée par la CJUE dans un arrêt du 11 avril 2019 (CJUE, 11 avril 2019, aff. C-254/18 N° Lexbase : A8885Y8L).

 

En l’espèce, un litige oppose le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure aux autorités françaises au sujet de la période de référence utilisée pour calculer la durée moyenne hebdomadaire de travail des fonctionnaires actifs des services de la police nationale.

 

Le décret français (n° 2002-1279 du 23 octobre 2002, portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables aux personnels de la police nationale N° Lexbase : L4497A83) applicable à ces fonctionnaires prévoit que la durée hebdomadaire de travail pour chaque période de sept jours, heures supplémentaires comprises, ne peut pas excéder 48 heures en moyenne sur une période d’un semestre de l’année civile.

 

Le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure a introduit une requête auprès du Conseil d’Etat afin de demander l’annulation de cette disposition. Il fait valoir qu’en retenant, pour le calcul de la durée moyenne hebdomadaire de travail, une période de référence exprimée en semestres de l’année civile (période de référence fixe) et non une période de référence de six mois dont le début et la fin se modifieraient au fil de l’écoulement du temps (période de référence glissante), la disposition précitée méconnaîtrait les règles posées par la Directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 (N° Lexbase : L5806DLM), concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, notamment la dérogation en vertu de laquelle les Etats membres peuvent étendre la période de référence jusqu’à six mois.

 

Le Conseil d’Etat (CE 5° et 6° ch.-r., 4 avril 2018, n° 409340, inédit N° Lexbase : A1076XK3) demande à la Cour de justice si les dispositions de la Directive s’opposent à la réglementation française qui prévoit, aux fins du calcul de la durée moyenne hebdomadaire de travail, des périodes de référence qui commencent et se terminent à des dates calendaires fixes et non des périodes de référence définies de manière glissante.

 

En énonçant la solution précitée, la Cour répond à la question préjudicielle posée (sur La durée maximale hebdomadaire, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E0334ETK).

newsid:468541

Environnement

[Brèves] Pas d’abrogation de l'autorisation de création d'une installation nucléaire si les conditions légales de fonctionnement de l'installation sont remplies

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 11 avril 2019, n° 413548, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0476Y9I)

Lecture: 2 min

N8560BXC

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par Yann Le Foll

Le 17 Avril 2019

Il incombe à l'autorité administrative investie du pouvoir de police des installations nucléaires de base de vérifier si les conditions légales permettant le fonctionnement de l'installation sont toujours remplies ;

 

 Si elles ne le sont plus, il lui incombe alors de modifier l'autorisation de l'installation nucléaire de base en cause pour fixer les dispositions ou obligations complémentaires que requiert la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L2677KZ8) et, lorsque ces modifications ne sont pas de nature à prévenir ou à limiter de manière suffisante les risques graves qu'elle présente pour ces même intérêts, d'abroger l'autorisation.

 

Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 11 avril 2019 (CE 5° et 6° ch.-r., 11 avril 2019, n° 413548, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0476Y9I).

 

En l’espèce, si diverses anomalies techniques, tenant notamment à la construction du radier et à la fabrication du "liner" de l'enceinte de confinement, ont été relevées par l'Autorité de sûreté nucléaire au cours de la construction du réacteur "Flamanville 3", elles ont été corrigées par l'exploitant de manière jugée satisfaisante par cette autorité.

 

De même, il ne résulte pas de l'instruction que les anomalies décelées dans la composition de l'acier utilisé dans certaines parties de la cuve de ce réacteur interdiraient toute mise en service future de l'installation dans des conditions de sécurité satisfaisantes, ainsi que cela ressort, notamment, de l'avis rendu par l'Autorité de sûreté nucléaire le 10 octobre 2017, concluant à l'absence de remise en cause de la future mise en service et utilisation de l'installation du seul fait de ces anomalies sous réserve que, le moment venu, lors de l'autorisation de mise en service, des conditions appropriées de contrôle et d'utilisation de l'installation soient précisées.

 

Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que la situation financière d'EDF, dont l'endettement financier net était évalué à 33 milliards d'euros au 31 décembre 2017, caractériserait une incapacité de l'exploitant à mener à bien son projet, y compris en ce qui concerne la prise en charge des futures dépenses de démantèlement de l'installation.

 

Dès lors, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la société EDF ne disposerait plus des capacités techniques et financières nécessaires pour conduire le projet de création de l'installation de "Flamanville 3" dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 du Code de l'environnement et que les conditions mises au maintien de l'autorisation de création de cette installation ne seraient plus remplies. 

newsid:468560

Filiation

[Brèves] GPA : le tout premier avis consultatif de la CEDH, sur la question de la filiation de la mère d’intention d’un enfant né de GPA à l’étranger !

Réf. : CEDH, 10 avril 2019, avis n° P16-2018-001 (N° Lexbase : A7859Y8L)

Lecture: 7 min

N8537BXH

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 17 Avril 2019

► Pour le cas d’un enfant né à l’étranger par gestation pour autrui (GPA) et issu des gamètes du père d’intention et d’une tierce donneuse et alors que le lien de filiation entre l’enfant et le père d’intention a été reconnu en droit interne :

1° le droit au respect de la vie privée de l’enfant, au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, requiert que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance d’un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention, désignée dans l’acte de naissance légalement établi à l’étranger comme étant la «mère légale» ;

2° le droit au respect de la vie privée de l’enfant ne requiert pas que cette reconnaissance se fasse par la transcription sur les registres de l’état civil de l’acte de naissance légalement établi à l’étranger ; elle peut se faire par une autre voie, telle l’adoption de l’enfant par la mère d’intention.

 

C’est en ces termes que s’est prononcée la CEDH, dans son premier avis consultatif très attendu, et dont il ressort ainsi, en résumé, que les Etats n’ont pas l’obligation de procéder à la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né d’une GPA à l’étranger pour établir son lien de filiation avec la mère d’intention, l’adoption pouvant être une modalité de reconnaissance de ce lien (CEDH, 10 avril 2019, avis n° P16-2018-001 N° Lexbase : A7859Y8L ; cf. l’Ouvrage "La filiation", La gestation ou maternité pour autrui N° Lexbase : E4415EY8).

 

  • Contexte

 

Pour rappel, l’Assemblée plénière avait saisi la CEDH à titre consultatif, après avoir décidé de surseoir à statuer dans ses deux décisions en date du 5 octobre 2018 (Ass. Plén., 5 octobre 2018, 2 arrêts, n° 10-19.053 N° Lexbase : A8390X8A et n° 12-30.138 N° Lexbase : A8073YAA, P+B+R+I), alors qu’elle avait elle-même été saisie, par la Cour de réexamen des décisions civiles, de deux demandes de réexamen de pourvois en cassation posant la question de la transcription d’actes de naissance établis à l’étranger pour des enfants nés de mères porteuses à la suite de la conclusion avérée ou suspectée d’une convention de GPA (Cass. réexamen, 16 février 2018, deux arrêts, n° 17 RDH 001 N° Lexbase : A7746XDA et n° 17 RDH 002 N° Lexbase : A7747XDB ; lire le commentaire d’Adeline Gouttenoire, Les premières décisions de réexamen en matière civile rendues en matière de GPA, Lexbase, éd. priv., n° 734, 2018 N° Lexbase : N3123BXX).

On rappellera, par ailleurs, que dans deux arrêts rendus le 20 mars 2019 (Cass. civ. 1, 20 mars 2019, deux arrêts, n° 18-14.751 N° Lexbase : A3779Y4Q et n° 18-11.815 N° Lexbase : A3778Y4P, FS-P+B+I), la première chambre civile de la Cour de cassation a également décidé de surseoir à statuer, en attendant l’avis de la CEDH et l’arrêt de l’Assemblée plénière sur la question de la maternité d’intention, à propos de la transcription, sur les registres de l’état civil, des actes de naissance étrangers d’enfants conçus par assistance médicale à la procréation (et non à l’issue d’une convention de gestation pour autrui) ; elle a en effet estimé que, si la question posée n’était pas identique, elle présentait, cependant, un lien suffisamment étroit avec la question de la «maternité d’intention» soumise à la Cour européenne des droits de l’Homme pour justifier qu’il soit sursis à statuer dans l’attente de son avis et de l’arrêt de l’Assemblée plénière à intervenir.

 

  • Questions soumises à la CEDH

 

Les questions posées par la Cour de cassation dans sa demande d’avis consultatif étaient ainsi formulées :

 

1) en refusant de transcrire sur les registres de l’état civil l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger à l’issue d’une gestation pour autrui, en ce qu’il désigne comme étant sa «mère légale» la «mère d’intention», alors que la transcription de l’acte a été admise en tant qu’il désigne le «père d’intention», père biologique de l’enfant, un Etat-partie excède-t-il la marge d’appréciation dont il dispose au regard de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L4798AQR) ? A cet égard, y a-t-il lieu de distinguer selon que l’enfant est conçu ou non avec les gamètes de la «mère d’intention» ?

 

2) dans l’hypothèse d’une réponse positive à l’une des deux questions précédentes, la possibilité pour la mère d’intention d’adopter l’enfant de son conjoint, père biologique, ce qui constitue un mode d’établissement de la filiation à son égard, permet-elle de respecter les exigences de l’article 8 de la Convention ?

 

  • Avis de la CEDH

 

Sur le premier point, la Cour se réfère au principe essentiel selon lequel, chaque fois qu’est en cause la situation d’un enfant, doit primer l’intérêt supérieur de l’enfant.

Elle relève que l’absence de reconnaissance d’un lien de filiation entre un enfant né d’une GPA pratiquée à l’étranger et la mère d’intention a des conséquences négatives sur plusieurs aspects du droit de l’enfant au respect de la vie privée. Elle est consciente de ce que, dans le contexte de la GPA, l’intérêt supérieur de l’enfant ne se résume pas au respect de ces aspects de son droit à la vie privée. Il inclut d’autres éléments fondamentaux, qui ne plaident pas nécessairement en faveur de la reconnaissance d’un lien de filiation avec la mère d’intention, tels que la protection contre les risques d’abus que comporte la GPA et la possibilité de connaître ses origines. Au vu des conséquences négatives sur le droit de l’enfant au respect de la vie privée et du fait que l’intérêt supérieur de l’enfant comprend aussi l’identification en droit des personnes qui ont la responsabilité de l’élever, de satisfaire à ses besoins et d’assurer son bien-être, ainsi que la possibilité de vivre et d’évoluer dans un milieu stable, la Cour considère toutefois que l’impossibilité générale et absolue d’obtenir la reconnaissance du lien entre un enfant né d’une GPA pratiquée à l’étranger et la mère d’intention n’est pas conciliable avec l’intérêt supérieur de l’enfant, qui exige pour le moins un examen de chaque situation au regard des circonstances particulières qui la caractérise.

Dans l’arrêt «Mennesson» en cause, la Cour a rappelé que l’étendue de la marge d’appréciation dont disposent les Etats varie selon les circonstances. Ainsi, notamment lorsque comme en la matière il n’y a pas consensus au sein des Etats membres du Conseil de l’Europe, et lorsque l’affaire soulève des questions morales ou éthiques délicates, la marge d’appréciation est large. La Cour a toutefois rappelé dans cet arrêt que lorsque comme en l’espèce également s’agissant de la filiation, un aspect particulièrement important de l’identité d’un individu se trouve en jeu, la marge laissée à l’Etat est d’ordinaire restreinte. Elle en a déduit qu’il convenait d’atténuer la marge d’appréciation dont disposait l’Etat défendeur. Vu les exigences de l’intérêt supérieur de l’enfant et la réduction de la marge d’appréciation, la Cour est d’avis que, dans une situation telle que visée par la Cour de cassation dans ses questions, le droit au respect de la vie privée d’un enfant né à l’étranger à l’issue d’une GPA, requiert que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance d’un lien de filiation entre cet enfant et la mère d’intention, désignée dans l’acte de naissance légalement établi à l’étranger comme étant la «mère légale».

 

Sur le second point, il est dans l’intérêt de l’enfant né d’une GPA pratiquée à l’étranger, conçu avec les gamètes d’une tierce donneuse, que la durée de l’incertitude dans laquelle l’enfant se trouve quant à sa filiation à l’égard de la mère d’intention soit aussi brève que possible. On ne saurait toutefois en déduire que les Etats-parties soient tenus d’opter pour la transcription des actes de naissance légalement établis à l’étranger. La Cour constate en effet qu’il n’y a pas consensus européen sur cette question et observe que l’identité de l’individu est moins directement en jeu lorsqu’il s’agit des moyens à mettre en oeuvre pour reconnaître la filiation. Elle estime donc que le choix des moyens pour permettre la reconnaissance du lien enfant-parents d’intention tombe dans la marge d’appréciation des Etats. La Cour considère en outre que l’article 8 de la Convention n’impose pas d’obligation générale pour les Etats de reconnaître ab initio  un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention. Ce que requiert l’intérêt supérieur de l’enfant c’est que le lien, légalement établi à l’étranger, puisse être reconnu au plus tard lorsqu’il s’est concrétisé. Il n’appartient pas à la Cour mais aux autorités nationales d’évaluer, à la lumière des circonstances particulières de l’espèce, si et quand ce lien s’est concrétisé. On ne saurait déduire de l’intérêt supérieur de l’enfant que la reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention impose aux Etats de procéder à la transcription de l’acte de naissance étranger en ce qu’il désigne la mère d’intention comme étant la mère légale. D’autres voies peuvent servir convenablement cet intérêt supérieur, dont l’adoption qui, s’agissant de la reconnaissance de ce lien, produit des effets de même nature que la transcription de l’acte de naissance étranger. Il importe cependant que les modalités prévues par le droit interne garantissent l’effectivité et la célérité de leur mise en oeuvre, conformément à l’intérêt supérieur de l’enfant.

newsid:468537

Fiscalité des particuliers

[Brèves] Conformité à la Constitution de l’imposition au nom du donataire de la plus-value en report d’imposition

Réf. : Cons. const., décision n° 2019-775 QPC, du 12 avril 2019 (N° Lexbase : A9161Y8S)

Lecture: 2 min

N8547BXT

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par Marie-Claire Sgarra

Le 17 Avril 2019

Les dispositions de l’article 150-0 B ter, II du Code général des impôts (N° Lexbase : L9353LHU), dans leur rédaction issue de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012, de finances rectificative pour 2012 (N° Lexbase : L7971IUR), sont conformes à la Constitution.

 

Telle est la solution retenue par le Conseil constitutionnel dans une décision du 12 avril 2019 (Cons. const., décision n° 2019-775 QPC, du 12 avril 2019 N° Lexbase : A9161Y8S).

 

Pour rappel ces dispositions prévoient que le donataire de titres grevés d’une plus-value en report est taxable sur cette plus-value si les titres ainsi reçus sont cédés dans un délai de 18 mois suivant la donation. Pour le Conseil d’Etat (CE 8° et 3° ch.-r., 6 février 2019, n° 425447, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3273YW7), le moyen tiré de ce que les dispositions litigieuses portent atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques, en ce qu’«elles prévoient de mettre à la charge du donataire des valeurs mobilières une imposition supplémentaire qui est sans lien avec la situation de ce dernier mais est liée à l’enrichissement du donateur».

 

Les dispositions contestées s'inscrivent dans un mécanisme de report d'imposition qui vise à favoriser les restructurations d'entreprises susceptibles d'intervenir par échanges de titres, en évitant que le contribuable soit contraint de vendre une partie des titres qu'il a reçus lors de l'échange pour acquitter la plus-value qu'il a réalisée, à cette occasion, sur les titres apportés. Au moment de la donation des titres reçus en échange de l'apport, le donataire mentionne, dans la proportion des titres transmis, le montant de la plus-value en report dans la déclaration de revenus. Ainsi, lorsqu'il accepte la donation, le donataire a une connaissance exacte du montant et des modalités de l'imposition des plus-values placées en report qui grève les titres qu'il reçoit. Il n'est mis fin au report de l'imposition de ces plus-values que lorsque le donataire cède les titres qui lui ont été donnés ou lorsque la société bénéficiaire, qu'il contrôle, cède les titres apportés.

 

Aux vues de ces éléments, le Conseil constitutionnel juge que le législateur s’est fondé sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l’objet de la loi et n’a pas méconnu l’exigence de prise en compte des capacités contributives (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X5213APR).

newsid:468547

Fiscalité du patrimoine

[Jurisprudence] Abus de droit, donation déguisée, vente à vil prix

Réf. : CA de Paris, 18 mars 2019, n° 17/02187 (N° Lexbase : A1156Y4L)

Lecture: 7 min

N8553BX3

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par Franck Laffaille, Professeur de droit public, Faculté de droit (CERAP) - Université de Paris XIII (Sorbonne/Paris/Cité), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition fiscale

Le 17 Avril 2019

Fictivité, dissimulation, donation indirecte, intention libérale, avantage sans contrepartie, vente à vil prix, abus de droit. Voici les quelques notions au centre du raisonnement de la cour d’appel de Paris lorsqu’elle se prononce sur la présente espèce.

Les actes de cessions de parts au prix d’1 euro -entre les membres d’une même famille, au sein d’un groupe familial- méritent d’être requalifiés en mutations à titre gratuit, à savoir une donation déguisée.

 

A la suite de 16 actes de cession, l’un des membres fait l’acquisition -auprès de ses deux frères et de son père- de 600 parts de la société A, de 900 parts de la société B, de 710 parts de la société P, de 960 parts de la société E, de 24 000 parts de S et enfin de 200 parts de W. Telles sont les cessions réalisées au prix de 1 euro. Selon la cour d’appel de Paris, c’est à bon droit que l’administration fiscale a mis en œuvre la procédure de l’abus de droit et opéré un redressement. Le juge d’appel confirme la décision du tribunal de grande instance de Paris.

 

Nous sommes en présence d’un groupe de sociétés (solderie de prêt-à-porter) dont Monsieur Y est le dirigeant ; des cessions de parts sociales sont effectuées en sa faveur (entre les membres de la famille, à la suite du décès de son père). L’administration estime que les cessions de parts sociales doivent être assimilées à des donations eu égard à la disproportion manifeste entre leur valeur vénale réelle et la valeur déclarée. Il est fait application de l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L9266LNI) : «Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.  En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. Les avis rendus font l'objet d'un rapport annuel qui est rendu public». Il est fait citation intégrale de cet article L. 64 du Livre des procédures fiscales notamment parce qu’il mentionne le rôle joué (éventuellement) par le comité de l'abus de droit fiscal.

 

Or, le contribuable -en désaccord avec le raisonnement tenu par l’administration- a saisi le comité de l'abus de droit fiscal ; selon ce dernier, les faits ne caractérisent pas une donation déguisée mais une donation indirecte, ce qui renvoie à des qualifications juridiques distinctes (séance du comité en date du 14 juin 2012). L’administration fiscale maintient sa position et opère redressement sur le fondement de l’article 777 du Code général des impôts (N° Lexbase : L4680I7H) : «Les droits de mutation à titre gratuit sont fixés aux taux indiqués dans les tableaux ci-après, pour la part nette revenant à chaque ayant droit […] Tarif des droits applicables en ligne directe […] Tarif des droits applicables entre époux et entre partenaires liés par un pacte civil de solidarité […] Tarif des droits applicables en ligne collatérale et entre non-parents». Il est procédé à une requalification des actes de cession en mutations à titre gratuit en vertu des articles 750 ter[1] (N° Lexbase : L9528IQX) et 784[2] (N° Lexbase : L2944LCZ) du Code général des impôts. Quant à l’évaluation des parts  -puisqu’il faut bien ensuite procéder à une telle opération- l’administration s’appuie sur la combinaison de la méthode mathématique et de productivité (cf. par ex. CAA de Nancy 18 octobre 2012, n° 11NC01065 N° Lexbase : A0542IXD) : «l'administration a évalué la valeur vénale unitaire des parts de la société Conforma acquise par la société requérante en recourant à une méthode combinant la valeur mathématique de la société Conforma affectée d'un coefficient de quatre et sa valeur de productivité affectée d'un coefficient de un, puis en appliquant à la moyenne ainsi obtenue un abattement de 20 % pour tenir compte de l'absence de liquidité de ces parts»). Le contribuable saisit le juge, demandant l’annulation de la procédure d’abus de droit fiscal et l’annulation de la majoration de 80 %. Il conteste la régularité de la procédure en ce que le fondement du redressement -à savoir la requalification des opérations litigieuses en donations déguisées- résultait du constat de l’absence de prix. Il récuse le raisonnement de l’administration qui soutient que l’absence de paiement du prix de cession des titres conduit à la fictivité des opérations réalisées.

 

Le tribunal de grande instance a commis une erreur de droit (toujours selon le requérant) en ce qu’il aurait dû tirer -du constat du règlement effectif du prix- une absence de simulation ; il argue de plus que la question du vil prix n’est pas le fondement du redressement, tout comme elle n’a pas été l’objet du débat devant le comité de l’abus de droit fiscal ; il soutient enfin que l’administration n’a pas rapporté la preuve de la constitution d’un abus de droit, alors même que la charge probatoire lui incombe en vertu de l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales.

 

La cour d’appel de Paris ne fait pas droit aux prétentions du requérant et ne censure pas le jugement du tribunal de grande instance de Paris. Partant du principe que les cessions de parts ont eu pour objectif de restructurer le capital du groupe familial -deux jours avant le décès du père du requérant- en réunissant toutes les parts dans le patrimoine de ce dernier. Quant au prix -1 euro- il a été fixé par les vendeurs «en toute connaissance de cause sans contrepartie matérielle» ; en cela, les cédants ont consenti «un avantage sans contrepartie» au profit de Monsieur Y. Une «intention libérale» est survenue envers lui. Les conventions conclues entre les membres du groupe familial possèdent -selon le juge- un évident caractère de gratuité ; il suffit de s’arrêter -pour s’en convaincre- sur l’évaluation des titres. Symbolique, la valeur des titres s’avère «sans aucun rapport avec la valeur réelle du bien» ; nous sommes en présence d’une «vente à vil prix».

 

Si un doute venait à surgir dans l’esprit de la cour d’appel de Paris, il est rapidement et définitivement écarté sur le fondement même des déclarations du requérant devant le comité de l’abus de droit fiscal : n’a-t-il pas fait mention d’une étude évaluant à plus de 750 000 euros la totalité des parts cédées ? Pour ces différentes raisons, l’administration était fondée à rétablir le véritable caractère de l’opération réalisée entre les divers membres du groupe familial. L’administration est réputée avoir apporté la preuve de la fictivité des ventes réalisées. La qualification juridique initialement retenue par le contribuable était «erronée». Elle était plus qu’erronée à dire vrai puisque cette qualification juridique était synonyme de dissimulation, les ventes masquant des donations de parts sociale. Pour conclure cette note, il convient de revenir sur l’avis du comité de l’abus de droit fiscal, en son avis du 14 juin 2012 mentionné en amont. Pour le comité, nul doute que le prix symbolique découle de la volonté assumée des vendeurs ; nul doute que cela n’est pas justifié par la situation économique des sociétés concernées ou une contrepartie matérielle. Avantage sans contrepartie il y a eu, avec une intention libérale à l’égard de l’un des membres du groupe.

 

Cependant, le comité n’adhère pas à la position de l’administration -reprise ultérieurement par le juge- sur un point. Après avoir rappelé que «la donation indirecte et la donation déguisée relèvent de qualifications juridiques distinctes», le comité ajoute : «en l’espèce, ni le prix, ni son paiement effectif ne sont entachés de simulation par fictivité». Pour cette raison, le comité conclut à l’absence de simulation dans les actes litigieux ; c’est à mauvais droit que l’administration a mis en œuvre la procédure de l’abus de droit fiscal. La cour d’appel de Paris n’a pas été convaincue par l’avis du comité. Deux éléments apparaissent avoir été décisifs, deux éléments qui viennent invalider la thèse en défense du contribuable : l’existence d’une vente à vil prix, la connaissance par le contribuable de la valeur réelle des titres. Il est ici question de raisonnabilité et de crédibilité : comment regarder crédible la position du contribuable dans la mesure où il ne pouvait -raisonnablement- ignorer la valeur réelle des titres en raison de son rôle au sein de la société ?

 

Comment regarder -raisonnablement crédible- la position de l’acquéreur au regard de l'avantage qui lui est accordé du fait d'une cession à un prix symbolique ? La décision de la Cour d’appel de Paris vient rappeler que la -classique- stratégie de la donation déguisée ne fonctionne guère lorsqu’elle est fondée sur une situation caricaturale. Quand la fictivité juridique apparaît évidente, le juge s’aligne sur la position de l’administration utilisant la procédure de l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales. La césure -entre la forme et le fond, entre le contenant et le contenu- apparaît à ce point évidente que la thèse de la pure libéralité s’impose avec force. L’acte à titre onéreux ne l’est qu’en apparence. Et la théorie de l’abus de droit fiscal est là pour nous rappeler -ou plutôt l’administration nous rappelle via la théorie de l’abus de droit fiscal- que les apparences importent significativement en droit fiscal. Surtout quand un acte juridique jure avec la réalité économique dont il est censé être le support normatif.

 

 

[1]«Sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit :

1° Les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France, et notamment les fonds publics, parts d'intérêts, biens ou droits composant un trust défini à l'article 792-0 bis (N° Lexbase : L6036LMI) et produits qui y sont capitalisés, créances et généralement toutes les valeurs mobilières françaises ou étrangères de quelque nature qu'elles soient, lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B (N° Lexbase : L1010HLY) ;

2° Les biens meubles et immeubles, que ces derniers soient possédés directement ou indirectement, situés en France, et notamment les fonds publics français, parts d'intérêts, biens ou droits composant un trust défini à l'article 792-0 bis et produits qui y sont capitalisés, créances et valeurs mobilières françaises, lorsque le donateur ou le défunt n'a pas son domicile fiscal en France au sens de l'article précité.

Pour l'application du premier alinéa, tout immeuble ou droit immobilier est réputé possédé indirectement lorsqu'il appartient à des personnes morales ou des organismes dont le donateur ou le défunt, seul ou conjointement avec son conjoint, leurs ascendants ou descendants ou leurs frères et soeurs, détient plus de la moitié des actions, parts ou droits, directement ou par l'intermédiaire d'une chaîne de participations, au sens de l'article 990 D (N° Lexbase : L5483H9X), quel que soit le nombre de personnes morales ou d'organismes interposés. La valeur des immeubles ou droits immobiliers possédés indirectement est déterminée par la proportion de la valeur de ces biens ou des actions, parts ou droits représentatifs de tels biens dans l'actif total des organismes ou personnes morales dont le donateur ou le défunt détient directement les actions, parts ou droits.

Sont considérées comme françaises les créances sur un débiteur qui est établi en France ou qui y a son domicile fiscal au sens du même article ainsi que les valeurs mobilières émises par l'Etat français, une personne morale de droit public française ou une société qui a en France son siège social statutaire ou le siège de sa direction effective, et ce quelle que soit la composition de son actif.

Sont également considérées comme françaises les actions et parts de sociétés ou personnes morales non cotées en bourse dont le siège est situé hors de France et dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits immobiliers situés sur le territoire français, et ce à proportion de la valeur de ces biens par rapport à l'actif total de la société.

Pour l'application des deuxième et quatrième alinéas, les immeubles situés sur le territoire français, affectés par une personne morale, un organisme ou une société à sa propre exploitation industrielle, commerciale, agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale ne sont pas pris en considération.

3° Les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France, et notamment les fonds publics, parts d'intérêts, biens ou droits composant un trust défini à l'article 792-0 bis et produits qui y sont capitalisés, créances et généralement toutes les valeurs mobilières françaises ou étrangères de quelque nature qu'elles soient, reçus par l'héritier, le donataire, le légataire ou le bénéficiaire d'un trust défini au même article 792-0 bis qui a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 B. Toutefois, cette disposition ne s'applique que lorsque l'héritier, le donataire ou le bénéficiaire d'un trust a eu son domicile fiscal en France pendant au moins six années au cours des dix dernières années précédant celle au cours de laquelle il reçoit les biens».

[2]«Les parties sont tenues de faire connaître, dans tout acte constatant une transmission entre vifs à titre gratuit et dans toute déclaration de succession, s'il existe ou non des donations antérieures consenties à un titre et sous une forme quelconque par le donateur ou le défunt aux donataires, héritiers ou légataires et, dans l'affirmative, le montant de ces donations ainsi que, le cas échéant, les noms, qualités et résidences des officiers ministériels qui ont reçu les actes de donation, et la date de l'enregistrement de ces actes.

La perception est effectuée en ajoutant à la valeur des biens compris dans la donation ou la déclaration de succession celle des biens qui ont fait l'objet de donations antérieures, à l'exception de celles passées depuis plus de quinze ans, et, lorsqu'il y a lieu à application d'un tarif progressif, en considérant ceux de ces biens dont la transmission n'a pas encore été assujettie au droit de mutation à titre gratuit comme inclus dans les tranches les plus élevées de l'actif imposable.

Pour le calcul des abattements et réductions édictés par les articles 779 (N° Lexbase : L6869IZG), 790 B (N° Lexbase : L9408ITM), 790 D (N° Lexbase : L9407ITL), 790 E (N° Lexbase : L9406ITK) et 790 F (N° Lexbase : L9405ITIil est tenu compte des abattements et des réductions effectués sur les donations antérieures visées au deuxième alinéa consenties par la même personne».

newsid:468553

Procédure civile

[Brèves] Diligences accomplies à l’occasion des opérations d’expertise : pas d’interruption du délai de péremption !

Réf. : Cass. civ. 2, 11 avril 2019, n° 18-14.223, F-P+B+I (N° Lexbase : A8975Y8W)

Lecture: 2 min

N8540BXL

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par Aziber Seïd Algadi

Le 17 Avril 2019

► L’instance en référé prenant fin avec la désignation de l’expert et l’instance au fond n’étant pas la continuation de l’instance en référé, les diligences accomplies à l’occasion des opérations d’expertise, dès lors qu’elles ne font pas partie de l’instance au fond, ne sont pas susceptibles d’interrompre le délai de péremption.

 

Telle est la solution retenue par un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 11 avril 2019 (Cass. civ. 2, 11 avril 2019, n° 18-14.223, F-P+B+I N° Lexbase : A8975Y8W).

 

En l’espèce, se plaignant de désordres affectant des biens immobiliers acquis en l’état futur d’achèvement, les acquéreurs ont, en 2010, assigné une société devant le juge des référés à fin de désignation d’un expert, puis, devant le tribunal de grande instance, en réparation du préjudice susceptible de résulter de ces désordres, les instances ayant été jointes.

 

Dans les deux instances, la société a appelé en garantie l’architecte, d’autres sociétés et son assureur. Après rejet de la demande par le juge des référés, l’expertise a été ordonnée par la cour d’appel. L’expert ayant déposé son rapport et les demandeurs ayant conclu au fond, la péremption de l’instance principale et de l’instance en garantie a été soulevée.

 

Pour constater la péremption de l’instance à l’égard de toutes les parties, la cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 18 janvier 2018, n° 17/09800 N° Lexbase : A7480XAB) a retenu qu’il existe un lien de dépendance direct et nécessaire entre l’instance en référé et l’instance au fond puisque le rapport de l’expert sur les désordres invoqués est une pièce technique incontournable qui a pour but de permettre au juge du fond de statuer sur les demandes des parties, mais que l’assistance, par les demandeurs aux opérations d’expertise, ainsi que la lettre adressée le 28 novembre 2011 par leur conseil à l’expert, ne constituent pas des diligences interruptives du délai de péremption qui a couru du 7 octobre 2011 jusqu’au 7 octobre 2013.

 

A tort. Après avoir énoncé le principe susvisé, la Cour de cassation censure l’arrêt ainsi rendu, sous le visa de l’article 386 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2277H44 ; cf. l’Ouvrage «Procédure civile», La péremption d'instance N° Lexbase : E1365EU4).

newsid:468540

Social général

[Brèves] Adoption du projet de loi "Pacte" en lecture définitive par l’Assemblée nationale : les mesures qui intéressent le droit social

Réf. : Projet de loi, relatif à la croissance et la transformation des entreprises adopté le 11 avril 2019

Lecture: 5 min

N8583BX8

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par Blanche Chaumet

Le 17 Avril 2019

Adoptée en lecture définitive par l’Assemblée nationale le 11 avril 2019 par 147 voix pour, 50 contre et 8 abstentions, le projet de loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi «Pacte» impacte différents aspects du droit du travail [1]. Il faudra attendre que le Conseil constitutionnel se prononce sur ces dispositions pour savoir si elles entreront bien en vigueur, les Sages ayant été saisis le 16 avril 2019 par plus de soixante députés, en application de l'article 61 alinéa 2 de la Constitution (N° Lexbase : L0890AHG).

 

♦ Seuils d’effectifs (article 11)

 

Les seuils d’effectifs étant trop nombreux aujourd’hui, sont un frein à l'emploi puisque 199 obligations sont réparties sur 49 seuils pour les PME. Cela engendre des modes de calcul multiples avec des spécificités propres à chaque législation.

Le projet de loi «Pacte» a pour objectif d’alléger et simplifier les obligations liées aux seuils d’effectifs.

⇒ Les seuils seront regroupés sur trois niveaux, 11, 50, 250 salariés : le seuil de 20 salariés sera supprimé à l’exception du seuil d’obligation d’emploi de travailleurs handicapés (OETH) qui ne sera pas concerné par la mesure. Dans un souci de stabilité juridique, les seuils d’effectifs issus de la réforme du Code du travail ne sont pas concernés par ces dispositions. Les seuils de 10, 25, 100, 150, 200 salariés seront supprimés.

⇒ Le mode de calcul des effectifs sera harmonisé  sur celui du Code de la Sécurité sociale, plus favorable aux entreprises.

⇒ Les obligations seront effectives uniquement lorsque le seuil sera franchi pendant cinq années civiles consécutives : si l’effectif de l’entreprise diminue et revient à un niveau inférieur au seuil, le seuil devra à nouveau être atteint durant cinq années consécutives pour générer l’obligation.

 

♦ Travail de nuit (article 19)

 

En marge des mesures adoptées, le texte assouplit le travail de nuit dans les commerces de détail alimentaire. Jusqu’à présent, était considérées comme du travail de nuit les heures comprises entre 21h et 6h du matin, soit une durée de 9 heures. Avec la présente loi, la fourchette est réduite à 7 heures avec une période incompressible entre minuit et 5 h du matin.

Cette possibilité est conditionnée à la conclusion d’un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche prévoyant les contreparties dont bénéficient les salariés entre 21 heures et le début de la période de travail de nuit.

 

♦ Epargne-retraite (article 71)

 

La loi vient également réformer l’épargne retraite avec une volonté de simplification des règles.

⇒ Toutes les règles relatives à l’âge et aux modalités de déblocage de l’épargne retraite, à l’information des épargnants sur leurs droits, ainsi qu’à la gestion financière de ces encours seront partagées par trois produits :

- un produit individuel succédant au PERP/Madelin (avec le maintien d’un régime fiscal adapté pour les travailleurs non-salariés) ;

- deux produits collectifs (un produit universel comme le PERCO, et un produit qui peut être ciblé sur certaines catégories de salariés).

- une portabilité de tous les produits d’épargne retraite.

⇒ L’épargne accumulée sera intégralement portable d'un produit à l'autre, afin de faciliter la mobilité de chacun. La retraite supplémentaire sera ainsi mieux adaptée aux parcours professionnels contemporains. Le transfert sera gratuit si le produit a été détenu pendant cinq ans. Dans le cas contraire, les frais de transfert ne pourront excéder 3 % de l’encours.

⇒ la fiscalité sera harmonisée et attractive. En effet, la possibilité de déduire de l’assiette de l’impôt sur le revenu les versements volontaires des épargnants sera généralisée à l’ensemble des produits de retraite supplémentaire et cette déduction se fera dans la limite des plafonds existants.

 

♦ Epargne salariale (articles 155 à 161)

 

Seuls 16 % des salariés des entreprises de moins de 50 salariés sont couverts par au moins un dispositif d’épargne salariale. S'agissant de l'intéressement, c'est le cas de seulement 20 % des salariés des entreprises de 50 à 99 salariés et de 35 % des salariés des entreprises de 100 à 249 salariés.

Pour rappel, initialement prévue dans les dispositions du projet de loi «Pacte», la suppression du forfait social destinée à favoriser l’épargne salariale, a été insérée dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour permettre son entrée en vigueur dès le 1er Janvier 2019 (sur les sommes versées au titre de l'intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés, ainsi que sur l’ensemble des versements d’épargne salariale -intéressement, participation et abondement de l’employeur sur un plan d’épargne salariale- pour les entreprises de moins de 50 salariés).

 

Le projet de loi «Pacte» prévoit également de son côté plusieurs mesures :

⇒ Des accords d'intéressement et de participation «clé en mains». Ainsi, des accords-types négociés au niveau de la branche et adaptés au secteur d’activité, faciliteront le déploiement de ces dispositifs dans les PME. Ces modèles simplifiés d'accords seront mis en ligne sur le site du ministère du Travail. Les PME qui ne disposent pas de services juridiques spécialisés pourront opter pour l'application directe de l'accord-type négocié au niveau de la branche.

Les branches devront négocier des accords-types d’intéressement et/ou de participation ainsi que la mise en place de plans d’épargne interentreprises.

⇒ Le conjoint du chef d’entreprise lié par un PACS, et qui dispose du statut de conjoint collaborateur ou associé, pourra bénéficier de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale comme c’est le cas aujourd’hui dans le cadre d’un mariage.

⇒ L’obligation de disposer d’un Plan d’épargne employé (PEE) pour mettre en place un plan d’épargne retraite collectif (PERCO) sera levée afin de faciliter ces produits d’épargne longue dans les entreprises qui le souhaitent.

⇒ Une meilleure information des salariés sur leur épargne salariale permettra de simplifier l’accès au dispositif d’épargne salariale et leur meilleure compréhension par les bénéficiaires.

 

♦ Actionnariat salarié (articles 162 à 168)

 

• Dans les sociétés à capitaux publics

 

Afin de développer l’actionnariat salarié dans les entreprises à participation publique plusieurs mesures sont prévues :

⇒ Les offres réservées aux salariés seront désormais obligatoires dans le cadre de cessions de participations, par l'Etat, dans des entreprises non cotées, et de cessions par l'Etat, dans des entreprises cotées, en gré à gré. Elles restent obligatoires dans le cas de cessions, par l’Etat, de participations dans des entreprises cotées sur les marchés financiers.

 

• Dans les entreprises privées

 

Aujourd’hui, l’employeur ne peut pas alimenter le plan d’épargne entreprise (PEE) du salarié avec des actions de l’entreprise de manière unilatérale. Le salarié doit également effectuer un versement.

⇒ La réforme prévoit un forfait social réduit pour l’abondement employeur dans l’actionnariat salarié. Pour toutes les entreprises de plus de 50 salariés, le forfait social sera abaissé à un taux de 10 % pour les abondements de l’employeur, lorsque le salarié investira dans les produits d’actionnariat salarié.

⇒ L’employeur pourra abonder unilatéralement un support d’investissement en actionnariat salarié dans un plan d’épargne entreprise (PEE). L’obligation pour un employé d’effectuer un versement sera supprimée.

⇒ L’actionnariat salarié dans les sociétés par actions simplifiées (SAS) sera simplifié.

 

♦ Administrateurs salariés (articles 184 à 192)

 

Après avoir fait le constat que les salariés n’étaient pas assez représentés dans les conseils d'administration, le législateur a prévu de renforcer la présence des administrateurs salariés dans les conseils d’administration et l'étendre aux mutuelles, unions et fédérations. La réforme prévoit à cet égard plusieurs mesures :

⇒ passer de 1 à 2 administrateurs salariés pour les conseils comptant plus de 8 administrateurs non-salariés ;

⇒ modifier le Code de la mutualité pour que les mutuelles, unions et fédérations qui emploient plus de 1 000 salariés, soient tenues de compter des représentants des salariés dans leurs conseils d'administration, selon le même mode de calcul que les entreprises.

 

[1] Brève réalisée à partir du portail de l'Economie, des Finances, de l'Action et des Comptes publics, v. La loi «PACTE» adoptée par le Parlement, sur le site du Gouvernenent.

 

 

 

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Sociétés

[Le point sur...] Levée de fonds rapide de start-up : attention au clé en main !

Lecture: 6 min

N8616BXE

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par Wyssam Mansour, Avocat à la cour, LPA-CGR Avocats

Le 17 Avril 2019

La vie d’une start-up, qui plus est en phase d’amorçage, nécessite de la souplesse. L’une des étapes de son évolution est, sauf exception, la levée de fonds. La première d’entre elles (le pré-seed ou le seed) a souvent lieu par l’investissement de personnes physiques «business angels». Lorsqu’à l’issue d’échanges sur le projet, les fondateurs tombent d’accord avec un investisseur, la rapidité du processus est alors essentielle.

 

A cette fin, la pratique a souvent recours, et les fondateurs en ayant vent en sont demandeurs, au BSA (bon de souscription autonome) dit «AIR» (accord d’investissement rapide), instrument clé en main conçu par l’incubateur TheFamily -s’inspirant de l’outre-Atlantique «Simple Agreement for Future Equity» d’Ycombinator- permettant d’obtenir un financement rapide en repoussant à plus tard certaines phases requises lors d’un investissement classique en capital, notamment la question de valorisation de la société et les discussions relatives au pacte d’associés. Cet instrument a l’avantage d’être clé en mains, désormais réputé sur le marché et disponible en open source. Il ne va toutefois pas sans poser certains inconvénients et n’est par ailleurs pas exclusif.

I - Le BSA AIR

 

A - Le mécanisme

 

Le BSA AIR fonctionne en substance de la façon suivante. La société, par l’intermédiaire de la collectivité de ses associés, émet un bon de souscription unique à un prix de souscription égal au montant de l’investissement. L’investissement est ainsi réalisé mais aucune action n’est émise et l’investisseur n’est pas encore associé de la société.

 

Le BSA AIR donnera à son titulaire le droit de souscrire, à la valeur nominale, un nombre d’actions qui sera déterminé conformément à une formule, fonction de l’intervention d’un évènement ultérieur (par exemple un nouveau tour de financement, une opération entraînant un changement de contrôle de la société, une fusion ou une introduction en bourse).

 

Cet évènement ultérieur permet d’établir une valorisation de la société, toutefois encadrée par une valorisation plancher (floor) et une valorisation plafond (cap) établies dans le contrat d’émission de BSA AIR. Cette valorisation permettra d’établir un prix par action, à partir duquel sera déterminé le nombre d’actions auquel donnera droit l’exercice du BSA AIR, selon la formule suivante :

(Montant de l’investissement) / (Prix par Action – Valeur Nominale)

 

Les discussions relatives aux droits et obligations respectives des fondateurs et des investisseurs consistent en un cours résumé des principales stipulations qui figureront dans un pacte d’associés dont la rédaction est reportée à plus tard.

 

B - Les problématiques

 

Toutefois, ce mécanisme pose plusieurs problématiques pour les fondateurs comme pour les investisseurs.

 

  • La protection des porteurs de valeurs mobilières

 

Dès l’émission du BSA AIR, les fondateurs devront veiller à ce que la société se conforme aux dispositions des articles L. 228-98 (N° Lexbase : L8952I3X) et suivants du Code de commerce relatifs à la protection des porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital, désormais applicables. Le respect de ces dispositions, sanctionnées par la nullité des délibérations prises en violation [1], peut être assez contre-intuitif par rapport à un recours au BSA AIR motivé par un souci de rapidité et l’absence de «besoin de négocier une documentation juridique fastidieuse».

 

  • L’enjeu de la valorisation

 

Il est à première vue confortable d’être en mesure d’éviter de se poser cette question et de se reposer sur l’évènement ultérieur. Toutefois, s’interroger sur la valorisation plancher et surtout sur la valorisation plafond réintroduit cette discussion, qui n’est dès pas nécessairement plus simple ou rapide. En outre, contrairement à ce que mentionne TheFamily [2], la valorisation plafond ne protège pas les fondateurs du risque de dilution mais l’investisseur face à une valorisation trop élevée de la société. Ainsi, en cas de réussite du projet, les fondateurs se verront appliquer un plafond auquel s’ajoutera une décote de 20 %. L’exercice du BSA AIR peut également être source d’incompréhensions pour l’investisseur, qui pourrait être surpris de devoir à nouveau reverser du nominal alors qu’il aura souscrit un BSA à un prix égal au montant total de l’investissement attendu.

 

  • Les droits et obligations respectives des fondateurs et de l’investisseur

 

Quand bien même l’investisseur ne serait pas encore associé de la société, il a d’ores et déjà procédé à un investissement qu’il n’est plus en mesure de remettre en cause et il est légitime qu’il bénéficie d’un droit de regard portant sur l’utilisation de son investissement ou les transferts de titres, au-delà des «simples» règles du Code de commerce relatives à la protection des porteurs de VMDAC ou de l’ajustement de valorisation attaché au BSA AIR. Ce dernier est-il cessible ? Est-ce que le porteur bénéficie d’un droit de préemption ou de sortie conjointe en cas de transfert de titres ? Qu’en est-il en cas de départ des fondateurs dans l’intervalle ? Il est bien entendu possible de traiter ces quelques questions -parmi d’autres- lors de l’émission du BSA AIR. Cela revient toutefois à entrer dans ces considérations que le recours au BSA AIR avait précisément pour objectif de retarder.

 

II - Des mécanismes alternatifs d’investissements rapides

 

Alternativement au BSA AIR, le recours aux mécanismes traditionnels permettent, au cas par cas, de procéder à une levée de fonds rapide et de répondre à une éventuelle problématique de valorisation à affiner. Ces mécanismes nécessitent bien entendu de l’anticipation et du conseil.

 

  • En cas de pluralité d’associés : anticiper par la délégation

 

Dans cette hypothèse, la nécessité d’obtenir une décision collective des associés -avec toutes les contraintes que cela implique- peut être chronophage. Cela peut être anticipé par la délégation au président, par les associés de la société, de leur compétence pour décider d’une augmentation de capital. Les associés doivent fixer la durée de cette délégation qui sera au maximum de dix-huit ou vingt-six mois, selon le cas, et peuvent décider de supprimer le droit préférentiel de souscription des associés, au profit de catégories de personnes, laissant le soin au président de désigner précisément le ou les bénéficiaire(s) de cette suppression. Sur la base de cette délégation, le président peut décider seul et sans attendre, de procéder à une augmentation de capital par signature d’un procès-verbal de décision du président, signature d’un bulletin de souscription et versement des fonds par l’investisseur.

 

  • Passer par la CARPA

 

Lorsqu’une augmentation de capital classique est décidée par la collectivité des associés, ou par le président sur délégation de compétence de l’assemblée générale comme évoqué ci-dessus, l’une des formalités chronophages est la contrainte de dépôt des fonds correspondants aux souscriptions des actions nouvelles auprès d’un établissement de crédit [3]. En effets, les processus internes des banques et leurs diverses contraintes règlementaires entraînent souvent des délais pour la création du compte spécial dans un premier temps, puis au stade de la libération des fonds dans un second temps. Le recours à la CARPA (Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats) permet d’accélérer substantiellement la procédure. Pour créer un compte, la CARPA aura besoin d’un extrait Kbis de la société et du texte des résolutions détaillant l’opération. Cette création peut intervenir dans la journée si le conseil en fait la demande. Une fois les fonds versés, la CARPA demandera la copie du bulletin de souscription signé et celle de la carte d’identité du souscripteur personne physique ou de l’extrait Kbis du souscripteur personne morale. Une nouvelle fois, la libération peut alors intervenir dans des délais très courts. Le recours à la CARPA permet en outre une fluidité des échanges entre le conseil, en charge de la documentation, et le dépositaire des fonds, et décharge le dirigeant du travail d’intermédiaire.

 

  • Anticiper l’arrivée des investisseurs

 

Il est de plus en plus fréquent que des fondateurs avertis, anticipant l’arrivée prochaine d’investisseurs business angels en seed ou pré-seed concluent un pacte d’associés prévoyant, outre leurs obligations en tant que fondateurs, les droits et obligations usuels d’investisseurs en cas de transferts de titres (les sempiternels préemption, droits et obligations de sortie conjointe et non-dilution) et sur la gouvernance, quand bien même aucun investisseur ne serait alors signataire de ce pacte. Ces droits et obligations seraient, dans un premier temps, inactives jusqu’au jour où le premier investisseur adhérera au pacte en qualité de premier membre du «Groupe Investisseur».

 

  • Lorsque l’investisseur est un associé de la société : recours préalable au compte courant

 

Lorsque l’investisseur est d’ores et déjà associé de la société, ledit investisseur peut alors procéder, dans un premier temps, à l’apport en compte courant de ladite somme, avec pour seul formalisme la signature d’une convention d’avance en compte courant, stipulant éventuellement un intérêt, mais surtout précisant que le remboursement des fonds versés interviendra par compensation avec la créance de libération d’actions à émettre à l’occasion d’une prochaine augmentation de capital, laquelle nécessitera le respect du formalisme prévu par l’article L. 225-146 du Code de commerce (N° Lexbase : L6017AIP), notamment un certificat du commissaire au compte ou d’un notaire confirmant la libération des actions par compensation.

 

  • L’ajustement de valorisation

 

Dans le cadre de la mise en œuvre d’une augmentation de capital classique et de doute quant à la valorisation liée à la rapidité du processus d’investissement, il demeure possible pour l’investisseur et les fondateurs de convenir contractuellement d’un mécanisme de ratchet contractuel simple et abordable par lequel les fondateurs s’engageraient à céder des actions à l’investisseur, à la valeur nominale, pour compenser une éventuelle baisse de valorisation qui résulterait d’un nouveau tour de financement. 

 

 

[1] C. com., art. L. 228-104 (N° Lexbase : L8347GQ9).

[2] Cf. site internet TheFamily.

[3] C. com., art. L. 225-5 (N° Lexbase : L5876AIH) et R. 225-6 (N° Lexbase : L0169IDM) applicables sur renvoi des articles L. 225-144 (N° Lexbase : L6015AIM) et R. 225-129 (N° Lexbase : L0264HZS).

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