Le droit d'alerte, que le comité d'entreprise tire de l'article L. 2323-78, alinéa 1er, du Code du travail (
N° Lexbase : L2935H9L), n'est pas un droit discrétionnaire, et est soumis au contrôle du juge auquel il appartient d'apprécier la pertinence des éléments retenus par le comité d'entreprise, indépendamment de l'abus de droit. Rappelant ce principe la cour d'appel de Versailles a jugé, le 19 mai 2011, que s'agissant d'une activité périphérique représentant 1,73 % du chiffre d'affaires et 1,29 % des effectifs, le droit d'alerte économique était justifié dès lors que l'importance de cette activité sur l'évolution de l'entreprise, eu égard aux performances des concurrents dans ce secteur, risque de lui faire perdre à terme des marchés, que ladite activité est déficitaire malgré la réorganisation effectuée en 2007 et que la direction n'a pas donné de réponses aux questions posées (CA Versailles, 1ère ch., 1ère sect., 19 mai 2011 n° 09/09771
N° Lexbase : A2141HS4 ; cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté"
N° Lexbase : E9824ABH). Aussi, les conditions du déclenchement du droit d'alerte étaient-elles réunies, les faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise étant objectivement établis. Les faits de l'espèce concernaient le
leader mondial de l'évaluation de conformité et de certification appliqués aux domaines de la qualité, de la santé, de la sécurité, de l'environnement et de la responsabilité sociale. Souhaitant développer son offre de formation externe dont les résultats n'étaient pas satisfaisants, la société a annoncé un projet de réorganisation de ce service. Cette réorganisation n'ayant pas permis de redresser la situation, le comité d'entreprise avait déclenché une procédure d'alerte deux ans après. La cour d'appel, pour juger l'alerte justifiée, relève, notamment que :
- si l'activité formation ne représente qu'une petite partie de son chiffre d'affaires et ne concerne qu'environ 80 salariés sur plus de 6 000, il s'agit d'une activité importante pour le devenir de l'entreprise dans la mesure où les entreprises concurrentes ont développé avec succès cette activité, de sorte qu'à terme, si la société ne parvient pas à redresser son activité formation externe, le risque de perte de parts de marché est bien réel ;
- de nombreuses réunions du comité d'entreprise ont été consacrées aux difficultés de l'activité formation externe qui, malgré la réorganisation mise en place après avis défavorable du comité d'entreprise, se sont sans cesse aggravées, le comité d'entreprise ayant envisagé d'exercer son droit d'alerte à plusieurs reprises, de sorte qu'il ne peut lui être fait grief d'avoir agi avec précipitation ;
- les résultats financiers de l'activité formation externe ont été mauvais et le déficit n'a cessé de croître, de sorte que la réorganisation mise en place en juillet 2007 n'a pas permis de redresser l'activité formation externe.
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