Le Quotidien du 5 octobre 2023

Le Quotidien

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Indemnisation de la faute inexcusable : la rente AT/MP ne répare par les souffrances morales et physiques endurées

Réf. : Cass. civ. 2, 28 septembre 2023, n° 21-25.690, F-B N° Lexbase : A20531IU

Lecture: 2 min

N6980BZK

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par Laïla Bedja

Le 05 Octobre 2023

► La victime d'une faute inexcusable peut prétendre à la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées que la rente ou l'indemnité en capital n'ont pas pour objet d'indemniser.

Les faits et procédure. Une salariée a adressé une déclaration de maladie à la caisse primaire d’assurance maladie qui a pris en charge la pathologie au titre du tableau n° 30 Bis des maladies professionnelles. La victime est décédée des suites de sa maladie le 23 janvier 2017. L’ayant droit a saisi une juridiction chargée du contentieux de la Sécurité sociale d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

La cour d’appel. L'arrêt relève que la victime était consciente de sa perte totale d'autonomie jusqu'à son décès prématuré dont elle a redouté la survenue et ressentait un sentiment d'injustice en raison du lien entre la maladie et l'activité professionnelle. Il en déduit l'existence de souffrances morales. Il ajoute que la nature de la pathologie, particulièrement douloureuse, les soins chimiothérapiques, les hospitalisations subies, la dyspnée sévère et l'altération de l'état général de la victime justifient l'indemnisation accordée au titre des préjudices physiques (CA Riom, 15 novembre 2021, n° 19/01201 N° Lexbase : A17097CB).

Le pourvoi. L’employeur conteste l’arrêt de la cour d’appel et forme un pourvoi en cassation, selon le moyen que « qu'en l'absence de perte de gains professionnels ou d'incidence professionnelle la rente majorée versée par la CPAM à la victime d'une maladie professionnelle en application des articles L. 431-1 et L. 452-2 du Code de la sécurité sociale indemnise le déficit fonctionnel permanent », tel que la Cour de cassation jugeait en depuis 2019 (Cass. crim., 19 mai 2009, n° 08-86.050, F-P+F N° Lexbase : A0773EIH et 08-86.485 N° Lexbase : A0774EII ; Cass. civ. 2, 11 juin 2009, n° 08-17.581, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A0518EIZ, n° 07-21.768 N° Lexbase : A0512EIS et n° 08-16.089 N° Lexbase : A0516EIX).

La décision. S’appuyant sur les deux arrêts d’Assemblée plénière rendus le 20 janvier 2023 (Ass. plén., 20 janvier 2023, n° 20-23.673 N° Lexbase : A962688Z et 21-23.947 N° Lexbase : A962588Y), la Haute juridiction rejette le pourvoi. La Cour juge désormais que la rente ou l’indemnité en capital versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent. Elle valide ainsi l’arrêt de la cour d’appel qui a relevé des souffrances morales et des préjudices physiques.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : L’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles, La faute inexcusable, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E56114QU.

 

newsid:486980

Avocats/Procédure pénale

[Brèves] Incident RPVA : quand la chambre de l'instruction fait preuve d'un formalisme excessif

Réf. : Cass. crim., 5 septembre 2023, n° 23-83.758, F-D N° Lexbase : A24621GB

Lecture: 3 min

N6992BZY

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par Marie Le Guerroué

Le 04 Octobre 2023

► Dans une décision du 5 septembre 2023, la Chambre criminelle a considéré que la chambre de l'instruction, qui, alors qu’un incident de réseau faisait obstacle à la transmission des mémoires par le réseau RPVA utilisé pour la communication en matière pénale, a fait preuve d'un formalisme excessif en déclarant le mémoire transmis ensuite par télécopie par l’avocat irrecevable.

Faits et procédure. Le demandeur au pourvoi a été placé en détention provisoire, a interjeté appel de cette décision, et a été, ainsi que son avocat, convoqué pour une audience le 9 juin 2023. Un « rapport d'incident » a été établi par le Conseil national des barreaux, relevant, le 8 juin 2023, à 14 heures 10, une « perte d'accès aux juridictions civiles via e-barreau. Cet incident affecte l'accès pour l'ensemble des avocats ». L'origine a été identifiée à 15 heures 27 comme une coupure électrique ayant affecté les équipements réseaux, le retour à la normale ayant eu lieu le 9 juin 2023 au matin. Plusieurs mémoires, dont certains incomplètement reçus, ont été adressés à la chambre de l'instruction le 8 juin 2023.

Lors de l'audience, le conseil de l’intéressé a sollicité un report, pour permettre à la défense de transmettre un mémoire complet et en temps utile.

Ordonnance du JLD. Pour rejeter la demande de renvoi, déclarer les mémoires irrecevables, et confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, l'arrêt attaqué énonce notamment que le greffe de la chambre de l'instruction ne rencontrait pas de difficultés de réception des télécopies pendant l'ouverture du greffe et jusqu'au 8 juin 2023 inclus, qu'il n'est produit que certains justificatifs d'émission par télécopie des mémoires, et, enfin, qu'il appartient à la défense de s'organiser pour adresser les mémoires dans le délai légal.

Réponse de la Cour. Il se déduit de l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'Homme N° Lexbase : L7558AIR que si le droit de déposer un mémoire au soutien d'un recours peut être soumis à des conditions légales, les tribunaux doivent, en appliquant des règles de procédure, éviter un excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité de la procédure. Il résulte également de l’article préliminaire du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1305MAL que la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties.

Pour les juges, en se déterminant ainsi, alors que, d'une part, l'existence d'un incident de réseau, faisant obstacle à la transmission des mémoires par le réseau RPVA utilisé pour la communication en matière pénale, a été porté à la connaissance des avocats la veille de l'audience, à 14 h 10, soit moins de trois heures avant la fermeture du greffe, le retour à un fonctionnement normal n'ayant eu lieu que le jour de l'audience, privant ainsi les avocats de ce moyen légal de transmission de leurs mémoires, d'autre part, l'avocat de la personne mise en examen, ayant été informé à 17 h 04 de l'échec de l'envoi par télécopie de son mémoire adressé à 16 h 48, en raison de la saturation du réseau téléphonique, a immédiatement adressé une nouvelle télécopie à 17 h 05, la chambre de l'instruction, qui, compte tenu des circonstances précitées, a fait preuve d'un formalisme excessif en déclarant le mémoire transmis par cette dernière télécopie irrecevable, a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.

Cassation. La Cour casse et annule, par conséquent, l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles.

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Bancaire

[Brèves] Obligations liées à la LCB-FT et acte de concurrence déloyale

Réf. : Cass. com., 27 septembre 2023, n° 21-21.995, F-B N° Lexbase : A11521II

Lecture: 10 min

N6960BZS

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par Jérôme Lasserre Capdeville

Le 10 Octobre 2023

► Le respect par une entreprise des obligations imposées aux articles L. 561-1 et suivants du Code monétaire et financier pour lutter contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme engendre nécessairement pour elle des coûts supplémentaires. Il en résulte que le fait pour un concurrent de s’en affranchir confère à celui-ci un avantage concurrentiel indu, qui peut être constitutif d’une faute de concurrence déloyale.

Par une jurisprudence remarquée (Cass. com., 21 septembre 2022, n° 21-12.335, F-B N° Lexbase : A25258KQ, J. Lasserre Capdeville, Lexbase Affaires, septembre 2022 N° Lexbase : N2691BZP ; v. déjà, Cass. com., 28 avril 2004, n° 02-15.054, FS-P+B+I N° Lexbase : A9943DBU), la Cour de cassation a pu considérer que « les obligations de vigilance et de déclaration imposées aux organismes financiers en application des articles L. 561-5 N° Lexbase : L7211IC3 à L. 561-22 du Code monétaire et financier dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016 N° Lexbase : L4816LBY, ont pour seule finalité la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ». Dit plus simplement, il n’est pas possible d’engager la responsabilité civile du professionnel de la banque si ce dernier est à l’origine d’un manquement lié à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT).

Cette solution n’est cependant pas sans limite, comme en témoigne l’arrêt sélectionné.

Faits et procédure. En l’espèce, la société C. avait assigné la société M., ayant comme activité la distribution en France de cartes bancaires prépayées, devant le président d'un tribunal de commerce sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1497H49 aux fins de lui enjoindre de déposer et de lui communiquer des pièces.

Invoquant l’existence d’une concurrence déloyale de la société C., du fait du non-respect par celle-ci de la réglementation bancaire, et soutenant que cette mesure lui permettrait, au cours d’une instance éventuelle, de chiffrer son préjudice, la société M. avait reconventionnellement sollicité, sur le fondement du même texte, la communication de pièces comptables et administratives de cette société.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 1er juillet 2021, n° 20/11649 N° Lexbase : A11994Y3) avait été amenée à se prononcer, dans cette affaire, par une décision du 1er juillet 2021. La société C. avait cependant formé un pourvoi en cassation contre cette dernière.

Décision. La Cour de cassation devait alors se prononcer sur plusieurs questions.

En premier lieu, la société C. faisait grief à la cour d’appel d’avoir révoqué l’ordonnance de clôture du 19 avril 2021 et d’avoir prononcé la clôture à l’audience avant ouverture des débats et de l’avoir condamnée sous astreinte à communiquer à la société M. une situation comptable certifiée conforme par le commissaire aux comptes pour la période du 1er janvier 2020 au 31 juillet 2020 ou en cas d'impossibilité au 31 mars 2020, ainsi que le bilan, les comptes de résultat et la liasse fiscale de l'exercice clos le 31 décembre 2019 certifiés conformes par le commissaire aux comptes.

Cependant, pour la société C. le juge ne statue que sur les dernières conclusions déposées. Or, en l’espèce, la société C. avait notifié des conclusions récapitulatives n° 2 le 18 mai 2021, soit avant la clôture de l'instruction fixée au 20 mai 2021, contenant de nouveaux moyens relatifs à l'absence de motif légitime de solliciter une mesure d'instruction in futurum.

Dès lors, en statuant sur le fondement des premières conclusions récapitulatives de la société C. en date du 14 avril 2021, la cour d'appel aurait violé l'article 954 du Code de procédure N° Lexbase : L7253LED.

La Cour de cassation ne partage pas ce moyen. Elle commence par rappeler que selon les articles 455 N° Lexbase : L6565H7B et 954 du Code de procédure civile, le juge, qui n’expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, doit viser les dernières conclusions déposées avec leur date, sauf à ce qu’il résulte des motifs de sa décision qu’il les a prises en considération.

Elle note ensuite que la cour d’appel avait constaté, en réponse à l’argumentation nouvelle soutenue par la société C. dans ses conclusions du 18 mai 2021, que si le courrier du 26 juin 2020 produit par la société M. ne permettait pas de juger que la société C. avait effectivement méconnu la réglementation en matière monétaire et bancaire et en avait tiré un avantage concurrentiel illicite, il permettait néanmoins à la société concurrente M. d'invoquer l’existence d'un intérêt légitime à obtenir des mesures d’instruction pour faire chiffrer les éventuels effets comptables d'une concurrence déloyale pouvant être générée par le non-respect des textes réglementaires.

La Haute juridiction estime alors que les motifs de l’arrêt de la cour d'appel faisaient ressortir qu’elle avait pris en considération les dernières conclusions déposées par la société C. en dépit du visa erroné de ses conclusions antérieures. Elle avait donc légalement justifié sa décision.

En deuxième lieu, la société C. faisait grief au même arrêt de l’avoir condamnée sous astreinte à communiquer à la société M. une situation comptable certifiée conforme par le commissaire aux comptes pour la période du 1er janvier 2020 au 31 juillet 2020, ou en cas d’impossibilité au 31 mars 2020, ainsi que le bilan et les comptes de résultat et la liasse fiscale de l'exercice clos le 31 décembre 2019, certifiés conformes par le commissaire aux comptes.

La société considérait ainsi que le juge ne peut ordonner une mesure d'instruction in futurum si l'action au fond envisagée par le demandeur ne présente aucune chance de succès. Or, tel était le cas, selon elle, de l’action en concurrence déloyale envisagée par le demandeur en raison de la méconnaissance par le défendeur de ses obligations en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, cette action étant vouée à l'échec dans la mesure où la violation de ces obligations, à la supposer avérée, n’est pas susceptible de donner lieu à une indemnisation au profit d’un tiers.

Elle estimait alors qu’en ordonnant pourtant une mesure d'instruction in futurum destinée à permettre à la société M. d’établir avant tout procès la preuve des effets comptables d’une concurrence déloyale fondée sur la violation par la société C. de la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, la cour d'appel aurait violé l'article 145 du Code de procédure civile.

Ici encore, le moyen ne convainc pas la Cour de cassation. Selon elle, et c’est l’apport de son arrêt, le respect par une entreprise des obligations imposées aux articles L. 561-1 N° Lexbase : L7095ICR et suivants du Code monétaire et financier pour lutter contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme engendre nécessairement pour elle des coûts supplémentaires. Il en résulte alors que « le fait pour un concurrent de s’en affranchir confère à celui-ci un avantage concurrentiel indu, qui peut être constitutif d'une faute de concurrence déloyale ».

Cette solution retient inévitablement l’attention. Elle témoigne du fait que le non-respect des dispositions liées à la LCB-FT peut, par l’intermédiaire de la concurrence déloyale, donner lieu à des sanctions de nature civile.

Il s’agit, à notre connaissance, du premier tempérament à la règle générale excluant toute action civile en présence de tels manquements. Cette évolution en annonce-t-elle d’autres ? On peut légitimement se le demander.

En dernier lieu, la société C. faisait un grief comparable à l'arrêt, alors que le juge ne peut, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, ordonner au défendeur la communication d’un document qu'il ne détient pas et qu'aucun texte normatif ne l'oblige à établir.

Or, en l’occurrence, le juge des référés avait condamné la société C. à adresser à la société M. une situation comptable certifiée conforme par le commissaire aux comptes sur la période du 1er janvier 2020 au 31 juillet 2020 ou en cas d'impossibilité au 31 mars 2020. Pourtant, cette même société C. faisait valoir ne pas disposer d’un tel document, aucun texte normatif ne lui faisant obligation de tenir une comptabilité sur une période autre qu'annuelle. Toutefois, pour confirmer l’ordonnance querellée de ce chef, la cour d'appel avait énoncé qu’il n'existait aucun obstacle matériel ou juridique qui empêcherait la société C. de faire certifier des comptes trimestriels ou semestriels par son commissaire aux comptes.

Dès lors, en statuant ainsi, la cour d’appel aurait violé l'article 145 du Code de procédure civile.

Cet ultime moyen se révèle cependant utile.

La Cour de cassation commence par indiquer qu’il résulte de la combinaison des articles 10 N° Lexbase : L1124H4E, 11 N° Lexbase : L1126H4H et 145 du Code de procédure civile qu'il peut être ordonné, sur requête ou en référé, la production de pièces détenues par une partie.

Elle note ensuite que pour enjoindre à la société C. de communiquer à la société M., sous astreinte, une situation comptable certifiée conforme par le commissaire aux comptes pour la période du 1er janvier 2020 au 31 juillet 2020, ou en cas d'impossibilité au 31 mars 2020, la cour d’appel avait relevé qu’il n’existait aucun obstacle matériel ou juridique empêchant la société C. de produire les documents comptables réclamés, même ceux non approuvés par une assemblée générale au demeurant tenue depuis l’introduction de l'instance, et de faire certifier des comptes trimestriels ou semestriels par le commissaire aux comptes.

Dès lors, en se déterminant ainsi sans constater que la société C. détenait les pièces qu’elle lui ordonnait de produire, la cour d'appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

La Cour de cassation casse et annule, par conséquent, la décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence mais seulement en ce que, confirmant l'ordonnance, elle avait enjoint, sous astreinte, à la société C. de communiquer à la société M. une situation comptable certifiée conforme par le commissaire aux comptes.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : Les devoirs généraux des établissements de crédit, Les obligations intéressant la LCB-FT, in Droit bancaire (dir. J. Lasserre Capdeville), Lexbase N° Lexbase : E95993P9.

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newsid:486960

Contrats administratifs

[Brèves] Avis de l'ART relatif à un avenant à une concession autoroutière : pas de recours possible !

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 27 septembre 2023, n° 470331, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A29301ID

Lecture: 2 min

N6985BZQ

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par Yann Le Foll

Le 04 Octobre 2023

► L’avis de l'Autorité de régulation des transports (ART) estimant que l'avenant à une concession autoroutière aurait dû recueillir son avis et exprimé des doutes quant à sa légalité est une décision insusceptible de recours.

Faits. Une société autoroutière demande l'annulation pour excès de pouvoir d'un avis par lequel l’ART a, d'une part, estimé que l'avenant à un contrat de concession d'autoroute conclu entre l'État et cette même société et le décret l'approuvant étaient illégaux faute qu'ait été recueilli au préalable son avis et, d'autre part, exprimé des doutes sur la légalité de certaines stipulations de cet avenant. L’ART a publié l'avis sur son site internet, diffusé un communiqué de presse s'y rapportant, également publié sur son site internet, et l'a commenté sur plusieurs réseaux sociaux.

Position CE. La position prise par l'ART sur la portée exacte de l'obligation, faite au Gouvernement, de la consulter, en vertu de l'article L. 122-8 du Code de la voirie routière N° Lexbase : L5968LRH, ne peut être regardée comme ayant par elle-même un effet notable sur l'autorité chargée de mettre en œuvre cet article.

La société requérante soutient que l'avis rendu sur l'avenant litigieux en ce qu'il conclut à l'illégalité de cet avenant en raison de l'absence de consultation de l'ART et à l'existence de doutes sérieux sur la légalité de certaines de ses stipulations emporterait des effets notables, en particulier en ce qu'il affecterait sa situation ou celle d'autres sociétés concessionnaires d'autoroutes. Toutefois, elle ne produit à l'appui de ces allégations que des articles de presse faisant état de la position de l'ART, ne fournissant notamment aucun élément sur la dégradation actuelle ou probable de sa situation financière.

La seule circonstance qu'un recours contentieux ait été introduit contre le décret et cet avenant est insusceptible à elle seule de constituer un effet notable (pour rappel, est susceptible d’avoir un tel effet sur les droits ou la situation d'autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre un document qui a un caractère impératif ou présente le caractère de ligne directrice, CE, 12 juin 2020, n° 418142, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A55233NU).

Décision. Par suite, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de cet avis sont irrecevables.

À ce sujet. A. Bron, Droit souple : de nouveaux horizons contentieux, Lexbase Public n° 667, 2022 N° Lexbase : N1490BZ9.

newsid:486985

Douanes

[Brèves] Fouille d’un véhicule par des douaniers en l’absence du propriétaire : l’irrégularité de la procédure n’est pas automatique !

Réf. : Cass. crim., 27 septembre 2023, n° 23-80.314, FS-B N° Lexbase : A11411I4

Lecture: 3 min

N6978BZH

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par Marie-Claire Sgarra

Le 18 Octobre 2023

La fouille d’un véhicule réalisée par des douaniers, sans la présence du propriétaire du véhicule n’entraine pas automatiquement la nullité de la procédure. Le propriétaire du véhicule doit démontrer que cette irrégularité a porté atteinte à l'authentification des recherches et découvertes pour que la nullité de la procédure soit encourue.

Les faits. Dans le cadre d'une mission de contrôle, des douaniers ont découvert sur une aire d'autoroute un véhicule Renault Clio vide de tout occupant dans lequel étaient visibles des billets de banque enveloppés dans du papier cellophane, ainsi qu'une housse noire de forme allongée, fermée. Leurs chiens dressés à la recherche de stupéfiants ayant de plus marqué ce véhicule, ils ont procédé à sa fouille, après le bris de l'une de ses vitres, et découvert 3 000 euros en espèces, trois grammes de résine de cannabis et un sac contenant de nombreuses armes.

Procédure. Les investigations ont conduit à la mise en examen du propriétaire du véhicule fouillé qui a été placé en détention provisoire. Ce dernier a sollicité l'annulation de la fouille du véhicule et de l'ensemble des actes subséquents, outre sa remise en liberté.

En cause d’appel. La cour rejette la demande d’annulation de la fouille du véhicule. Les agents des douanes ayant compétence pour procéder à une fouille et l'irrégularité relative aux conditions dans lesquelles ils y ont procédé n'étant pas d'ordre public, il n'y a lieu de prononcer la nullité de la procédure que s'il est résulté de cette irrégularité une atteinte aux intérêts du propriétaire du véhicule.

Solution de la Chambre criminelle

  • D'une part, il résulte des articles 171 N° Lexbase : L3540AZ7 et 802 N° Lexbase : L4265AZY du Code de procédure pénale que, hors les cas de nullité d'ordre public, l'inobservation des formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité doit entraîner la nullité de la procédure lorsqu'il en est résulté une atteinte aux intérêts de la partie concernée.
  • D'autre part, il résulte des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et 60 du Code des douanes N° Lexbase : L2261MIL que, si les agents des douanes sont compétents pour procéder à la visite d'un véhicule stationné sur la voie publique ou dans un lieu accessible au public, ils sont tenus de procéder à cette visite en présence de son occupant à défaut de garantie posée par la loi visant à s'assurer de l'authentification des recherches et découvertes effectuées. La méconnaissance de cette exigence, susceptible d'avoir entraîné une atteinte à la protection de l'authentification des recherches et découvertes effectuées lors d'une fouille, n'est pas exclue du champ d'application de l'article 802 du code de procédure pénale.

Or, en l’espèce, le propriétaire du véhicule n'a pas contesté la présence dans son véhicule des objets découverts et n’a pas démontré que l'irrégularité de la visite lui a causé un grief particulier. Par suite, son pourvoi est rejeté.

newsid:486978

Droit des biens

[Brèves] Indivision : détention exclusive des clés par un indivisaire = paiement d’une indemnité d’occupation

Réf. : Cass. civ. 1, 20 septembre 2023, n° 21-23.877, F-D N° Lexbase : A75311HE

Lecture: 2 min

N7006BZI

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 04 Octobre 2023

► La jouissance privative d'un immeuble indivis résulte de l'impossibilité de droit ou de fait pour les coïndivisaires d'user de la chose ; la détention des clés, en ce qu'elle permettait à son détenteur d'avoir seul la libre disposition d'un bien indivis, est constitutive d'une jouissance privative et exclusive.

L’arrêt mérite d’être relevé en ce qu’il opère un rappel utile, d’une part, de la définition du caractère privatif de l’occupation d’un bien indivis (« la jouissance privative d'un immeuble indivis résulte de l'impossibilité de droit ou de fait pour les coïndivisaires d'user de la chose »), entraînant la redevabilité d’une indemnité d’occupation, sur le fondement de l’article 815-9, alinéa 2, du Code civil N° Lexbase : L9938HNE, et d’autre part, de la caractérisation d’une jouissance privative résultant de la détention des clés (Cass. civ. 1, 31 mars 2016, n° 15-10.748, F-P+B  N° Lexbase : A1458RBM ; Cass. civ. 1, 22 juin 2016, n° 15-20.766, F-D N° Lexbase : A2672RUI).  

En l’espèce, pour rejeter la demande du coindivisaire en paiement d'une indemnité d'occupation pour la maison d'habitation, la cour d’appel avait retenu que l'absence de relocation de ce bien à compter du mois de juin 2015 n'impliquait pas que l’autre co-indivisaire avait fait un usage privatif des lieux après le congé donné par le locataire et qu'il ne pouvait être redevable d'une indemnité d'occupation au seul motif que les clés lui auraient été restituées par le locataire.

L’arrêt est censuré par la Cour régulatrice. On relèvera donc le caractère automatique de la règle. Peu importe l’occupation effective du bien : dès lors qu’un indivisaire est l’unique détenteur des clés, il est redevable d’une indemnité.

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Licenciement

[Brèves] Licenciement d’un père après la naissance de son enfant : interprétation de la notion d’impossibilité de maintenir le contrat de travail

Réf. : Cass. soc., 27 septembre 2023, n° 21-22.937, FS-B N° Lexbase : A11461IB

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N7004BZG

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par Charlotte Moronval

Le 05 Octobre 2023

► Justifie légalement sa décision la cour d'appel qui, après avoir relevé que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, déclare nul le licenciement du salarié intervenu pendant les 10 semaines suivant la naissance de son enfant.

Faits et procédure. Un salarié responsable commercial est licencié quelques jours après la naissance de son enfant.

Il saisit la juridiction prud’homale, estimant que son licenciement est nul car intervenant pendant la période de protection prévue par l’article L. 1225-4-1 du Code du travail N° Lexbase : L7159K9Z.

Rappel. Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant les dix semaines suivant la naissance de son enfant. Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'arrivée de l'enfant.

La cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 11 juin 2021, n° 19/09618 N° Lexbase : A83694UI) juge que le licenciement du salarié est nul, l’employeur ne justifiant ni d’une faute grave ni d'une impossibilité de maintien du contrat de travail dans la lettre de licenciement.

L’employeur forme un pourvoi en cassation.

La solution. La Cour de cassation, en approuvant la cour d'appel, a affirmé que les griefs formulés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas l'impossibilité de maintenir le contrat de travail. Le licenciement était donc nul.

Pour aller plus loin : 

  • la période de protection après la période de l’enfant est une période durant laquelle les employeurs doivent agir avec précaution. Ils doivent notamment faire attention à la rédaction des motifs dans la lettre de licenciement, la seule mention de « l’impossibilité de maintenir le contrat » ne pouvant suffire.  
  • v. ÉTUDE : Les congés de maternité et d’adoption, La notion d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0613034.

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Procédure pénale

[Brèves] Instruction : le simple témoin ne peut être assisté lors d’une confrontation et son avocat ne peut se voir communiquer la procédure

Réf. : Cass. crim., 4 octobre 2023, n° 23-81.287, F-B N° Lexbase : A03671KS

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N7014BZS

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par Adélaïde Léon

Le 18 Octobre 2023

► C’est à tort qu’une chambre de l’instruction écarte l’annulation du procès-verbal d’une confrontation au cours de laquelle les deux témoins étaient assistés d’un avocat et avant laquelle la procédure avait été communiquée à l’un de ces deux conseils. D’une part, l’assistance d’un témoin par un avocat lors de son audition constitue une irrégularité touchant aux conditions d’administration de la preuve, laquelle fait nécessairement grief. D’autre part, l’accès au dossier de la procédure par l’avocat d’un témoin constitue une violation du secret de l’instruction.

Rappel de la procédure. Une femme a porté plainte pour des faits de viol et d’agression sexuelle commis à son encontre par son père lorsqu’elle était enfant et adolescente.

Lors de l’information ouverte des chefs de viol et agression sexuelle aggravés le père de la plaignante a été placé sous le statut de témoin assisté.

Au cours de cette procédure, le juge d’instruction a procédé à une confrontation entre la partie civile, son père et deux témoins (la mère et la sœur de la partie civile).

Ces deux témoins étaient assistées d’un avocat, dont l’un a eu communication de la procédure avant la confrontation.

À la fin de l’acte, l’avocat de la partie civile a contesté cette dernière communication du dossier d’instruction au conseil d’une des témoins.

Le juge d’instruction a lui-même saisi la chambre de l’instruction afin qu’il soit statué sur la nullité éventuelle de cette confrontation.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a écarté l’annulation du procès-verbal de la confrontation en estimant que l’irrégularité constituée par la présence des avocats des témoins et à communication du dossier à l’un d’entre eux n’a pas fait grief à la partie civile et n’a pas porté atteinte au secret de l’instruction.

La partie civile a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction.

Moyens du pourvoi. Il était fait grief à la chambre de l’instruction d’avoir :

  • Exigé la preuve d’un grief alors qu’en application du Code de procédure pénale, seuls les parties et le témoin assisté peuvent être assistés d’un avocat lors des confrontations et leurs avocats recevoir communication du dossier de procédure, à l’exclusion du témoin et de son avocat ;
  • Écarté la violation du secret de l’instruction alors que celui-ci interdit que le juge d’instruction puisse communiquer le dossier de la procédure au témoin, tiers à la procédure, ou à son avocat ;
  • Exigé la preuve d’un grief alors que chacune des irrégularités, et a fortiori leur cumul, faisait nécessairement grief à la partie civile ;
  • Considéré que les observations émises par l’avocat de la partie civile à la clôture de la confrontation laissaient présumer l’absence de tout grief et estimé qu’il y avait lieu de présumer qu’aucune entrave n’avait été apportée à l’exercice des droits de la partie civile et considéré ;
  • Écarté tout grief au motif que le procès-verbal de confrontation ne faisait aucune mention d’une intervention de l’avocat ayant eu accès à la procédure et irrégulièrement présent.

Décision. La Chambre criminelle affirme qu’il se déduit des articles 11 N° Lexbase : L1309MAQ, 101 N° Lexbase : L3434AZ9, 102 N° Lexbase : L1003DYS, 113-3 N° Lexbase : L3174I3X et 114 N° Lexbase : L2767KGL du Code de procédure pénale que :

  • seuls les mis en examen, les parties civiles et les témoins assistés peuvent être assistés, lorsqu’ils sont entendus par le juge d’instruction, par un avocat qui peut accéder au dossier de la procédure ;
  • un témoin ne peut en revanche bénéficier d’une telle assistance.

La Cour de cassation précise que l’assistance d’un témoin par un avocat lors de son audition constitue une irrégularité touchant aux conditions d’administration de la preuve, laquelle fait nécessairement grief.

L’accès au dossier de la procédure par l’avocat d’un témoin constitue quant à lui une violation du secret de l’instruction.

En l’espèce, les témoins étaient tous deux assistés d’un avocat pendant la confrontation et l’un de ces deux conseils a eu accès au dossier de la procédure.

Dès lors, c’est à tort que la chambre de l’instruction a écarté l’annulation du procès-verbal de confrontation.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : Les actes de l’instruction, Les auditions de témoins (C. proc. pén., art. 101 et s.), in Procédure pénale (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E87583AM.

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