Le Quotidien du 7 décembre 2022 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Responsabilité du liquidateur qui a omis de demander le remboursement d'un crédit de TVA

Réf. : Cass. com., 23 novembre 2022, n° 21-13.613, F-B N° Lexbase : A10618UT

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par Vincent Téchené

le 06 Décembre 2022

► Le liquidateur d'une société commet une faute engageant sa responsabilité personnelle en omettant de demander le remboursement d'un crédit de TVA afférent à des opérations postérieures au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire.

Fais et procédure. Une société commerciale a été mise en redressement judiciaire le 4 mai 2004, puis en liquidation judiciaire le 10 mai 2005. La procédure a été étendue à sa filiale, une SCI. Une société, en la personne de l’un de ses membres, a été successivement désignée mandataire judiciaire puis liquidateur.

La clôture de la liquidation judiciaire pour extinction du passif a été prononcée le 21 janvier 2015. Le compte rendu de fin de mission du liquidateur a été déposé et notifié aux débitrices le 3 mars 2015.

Le 6 octobre 2015, un liquidateur amiable des deux sociétés a été désigné, lequel a demandé à l'administration fiscale, le 26 janvier 2016, un remboursement de crédit de TVA pour le compte de la société commerciale afférent aux dépenses engagées après le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire pendant la période 2006-2012. La demande a été déclarée irrecevable par l'administration fiscale pour cause de prescription le 8 juillet suivant.

Considérant que le liquidateur judiciaire avait commis une faute engageant sa responsabilité personnelle en omettant d'entreprendre les formalités permettant d'obtenir le remboursement du crédit de TVA, les débitrices l'ont assigné en paiement de dommages et intérêts.

Déboutées de leurs demandes (CA Paris, 5-9, 10 décembre 2020, n° 19/07895 N° Lexbase : A488139N), elles ont formé un pourvoi en cassation.

Décision. Aux termes d’un arrêt particulièrement motivé, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles 1382, devenu 1240, du Code civil N° Lexbase : L0950KZ9 et  271 du Code général des impôts N° Lexbase : L5710MAQ.

Après avoir rappelé la teneur de chacun de ces deux textes, la Haute juridiction relève que la CJCE a dit pour droit (CJCE, 3 mars 2005, aff. C-32/03 N° Lexbase : A1773DH7), d'une part, que selon les termes de l'article 4 § 1 de la « sixième Directive » (Directive n° 77/388/CEE, du 17 mai 1977 N° Lexbase : L9279AU9), la notion d'assujetti est définie en relation avec celle d'activité économique et que c'est l'existence d'une telle activité qui justifie la qualification d'assujetti qui se voit reconnaître, par la « sixième Directive », le droit à déduction. Elle a dit pour droit, d'autre part, que les coûts des opérations réalisées par une société assujettie pendant la période de liquidation de son activité doivent être considérés comme inhérents à l'activité économique, de sorte que le droit à déduction doit lui être reconnu si ces opérations présentent un lien direct et immédiat avec l'activité, pour autant que sa mise en œuvre ne donne pas lieu à des situations frauduleuses ou abusives, et que toute autre interprétation reviendrait à procéder à une distinction arbitraire entre, d'un côté, les dépenses effectuées pour les besoins d'une entreprise avant l'exploitation effective de celle-ci et celles réalisées au cours de ladite exploitation, et, de l'autre, les dépenses effectuées pour mettre fin à cette exploitation.

Par ailleurs, comme le rappelle la Cour de cassation, l'administration fiscale considère qu'une entreprise qui a cessé son activité commerciale mais qui continue de supporter des dépenses afférentes à cette activité est considérée comme un assujetti et peut déduire la TVA sur les montants acquittés, pour autant qu'il existe un lien direct et immédiat entre les paiements effectués et l'activité commerciale et dès lors que l'absence d'intention frauduleuse ou abusive est établie et qu'il en est ainsi notamment de la TVA ayant grevé les honoraires des mandataires liquidateurs (BOI-TVA-DED-50-20-20 N° Lexbase : X7924AL3).

Or, pour retenir que le liquidateur n'avait commis aucune faute en ne demandant pas le remboursement d'un crédit de TVA afférent aux opérations postérieures au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, l'arrêt d’appel a retenu en substance que la société débitrice avait perdu la qualité d’assujetti (qui lui aurait ouvert droit au remboursement d'un crédit de TVA) au jour du jugement prononçant sa liquidation judiciaire et que la TVA relative aux factures acquittées au cours de la période de liquidation ne pouvait donc plus être récupérée.

La Haute juridiction casse l’arrêt d’appel. Elle retient que la société débitrice n'avait pas perdu sa qualité d'assujettie du seul fait de sa cessation d'activité, et qu'elle pouvait déduire la TVA grevant les dépenses engagées pour mettre fin à son exploitation après le jugement d'ouverture de sa liquidation judiciaire, en obtenant, à la demande de son liquidateur, le remboursement du crédit de TVA ainsi généré, pour autant qu'il existait un lien direct et immédiat entre les paiements effectués et l'activité commerciale ou qu'ils aient été exposés pour mettre fin à l'exploitation et dès lors que l'absence d'intention frauduleuse ou abusive était établie. Par conséquent, la cour d'appel a violé les textes visés.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les règles propres à l'organe spécifique à la liquidation judiciaire : le liquidateur, Les principaux domaines de la responsabilité du liquidateur, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E9542ETL.

 

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