Lexbase Social n°529 du 30 mai 2013 : Social général

[Evénement] Les évolutions du droit social en Chine - Compte-rendu de la réunion de la commission Chine du 24 avril 2013

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[Evénement] Les évolutions du droit social en Chine - Compte-rendu de la réunion de la commission Chine du 24 avril 2013. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/8221991-evenement-les-evolutions-du-droit-social-en-chine-compterendu-de-la-reunion-de-la-b-commission-chine
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par Grégory Singer, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale

le 30 Mai 2013

La commission Chine organisait, le 24 avril 2013, sous la responsabilité de Jacques Sagot, avocat à la cour, une réunion présentant les dernières évolutions du droit social en Chine où intervenait Jin Banggi, Professeur de l'Université Aix-Marseille et directeur de l'Institut de recherches Europe Asie. Présentes à cette occasion, les éditions juridiques Lexbase vous proposent de retrouver le compte-rendu de cette réunion. L'introduction de la notion de droit social en Chine est relativement récente, les travaux préparatoires du Code du travail ayant commencé dans les années 80. Auparavant, le droit social était partagé entre droit économique, droit civil et droit commercial. Désormais, le droit social fait partie des sept branches autonomes du droit : le droit constitutionnel, le droit administratif, le droit civil et commercial, le droit pénal, le droit économique, le droit procédural judiciaire et extra-judiciaire et donc le droit social.

L'introduction et le développement d'un droit social en Chine s'appuient sur des considérations économiques, politiques et sociales.

Economiques car la croissance chinoise s'appuie très largement sur son exportation. Mais depuis 2008, la croissance ne peut plus seulement s'appuyer sur celle-ci et doit développer sa consommation intérieure. Malheureusement, le manque de couverture sociale pour les chinois non-salariés et les salariés agricoles n'incitent pas à leur consommation, ces derniers préférant épargner. L'introduction d'une Sécurité sociale permet donc de développer cette consommation.

Le droit social a été également développé pour des raisons politiques. En effet, pour renforcer la légitimité du Parti communiste, ses dirigeants ont souhaité faire bénéficier les populations les plus pauvres de droits sociaux.

Il est cependant impossible pour le Gouvernement chinois d'assurer une protection sociale similaire à la France, souligne Jin Banggi, la Chine étant peuplé d'1 milliard 300 millions de personnes. "C'est une protection faible mais compréhensible" pour notre intervenant.

La législation est de plus en plus perfectionnée mais son application reste très préoccupante. Par exemple, la législation sur les congés payés annuels a été introduite en 1994 au sein du Code du travail mais il a fallu quatorze ans pour que le Gouvernement publie son règlement d'application. En 2001, seulement 48 % des salariés ont pu bénéficier des congés payés.

L'absence de cotisations par les entreprises individuelles est également un problème. Mais Jin Banggi indique cependant que la Chine assiste à une évolution encourageante voire révolutionnaire des hausses de ces cotisations. Chaque année, le Gouvernement constate une augmentation de 30 % de ses recettes fiscales.

L'extension de l'assurance vieillesse à la totalité de la population y compris les travailleurs agricoles est également révolutionnaire. Auparavant, l'assurance ne concernait que la population salariée urbaine.

Par cette extension, la Chine a adopté un modèle social européen (assurance vieillesse, maladie) mais l'introduction de mécanismes de contrôle de l'application des règles semble indispensable pour obtenir une véritable protection sociale.

I - La législation

Par le passage des entreprises publiques à des entreprises privées, le droit était marqué par une liberté de gestion des entreprises. L'élaboration du Code du travail en 1994 a été ainsi imprégnée par un esprit libéral : l'employeur pouvait donc avoir le droit de recruter, le droit de licencier, le droit de fixer le salaire alors que le salarié avait seulement le droit de démissionner.

Les textes de base ont fixé un cadre législatif pour le contrat de travail, le contrat collectif, les conditions de travail, les assurances sociales obligatoires (vieillesse, maladie, chômage, accident du travail, maternité).

Le non-respect du Code du travail par les employeurs chinois et étrangers provoque cependant de graves problèmes dans la pratique (absence de contrat de travail, période d'essai trop longue, durée du travail trop importante, non-paiement des heures supplémentaires, absence de cotisations) et a attiré l'attention du législateur. En 2005 a été publié un rapport sur l'application du Code du travail qui a soulevé :

- un taux très faible de signature de contrat de travail ;

- de nombreux contrats de courte durée ;

- une absence de respect du régime du salaire minimum ;

- de nombreuses heures non-payées ;

- un problème de règlement de cotisations sociales.

Le législateur a ainsi élaboré une nouvelle loi, le 27 juin 2007, sur les contrats de travail. Cette loi a été sujette à de nombreuses controverses soulevées par les députés représentant les entreprises. Par exemple, ce texte prévoyait qu'après dix ans d'ancienneté dans une même entreprise, le salarié devait obtenir obligatoirement un contrat à durée indéterminée. Le salarié ayant deux CDD successifs devait également obtenir un CDI.

Etait aussi instauré un régime de la période d'essai. Pour un contrat durant moins d'un an, la période d'essai ne peut pas dépasser un mois. Elle ne doit pas être supérieure à une durée de deux mois pour un contrat de moins de trois ans. Enfin, pour les contrats supérieurs à trois ans, la période d'essai est fixée à six mois. Une seule période d'essai est prévue pour le salarié et doit être incluse dans le contrat de travail.

Un régime de la clause de non-concurrences est également introduit dans le Code du travail (durée de la clause, rémunération, espace géographique d'application)

II - Les assurances sociales

La loi du 28 octobre 2010 organisant un cadre général de protection sociale, dont le travail de préparation a commencé en 1993, a été difficile à mettre en oeuvre. Elle énonce un cadre général, un objectif final et une mise en place progressive.

Le cadre général prévoit l'application de la loi à l'ensemble de la population sans distinction : urbaine, rurale, salariale et non-salariale.

La loi énonce également un cadre général de protection pour les trois systèmes distincts d'assurance vieillesse et d'assurance maladie : un système pour les salariés urbains, un autre pour les non-salariés urbains et un dernier pour la population rurale.

Il ne s'agit pas d'une mutualisation nationale mais d'une mutualisation régionale, municipale. Chaque province a son propre fonds qui varie malheureusement en fonction de sa richesse. Il est important de préciser qu'une province moyenne comporte environ 70 millions d'habitants, soit l'équivalent de la population française.

L'objectif final du Gouvernement est le souhait d'une mutualisation nationale.

La loi de 2010 a également instauré un nouveau dispositif social. Chaque assuré dispose désormais d'un numéro de Sécurité sociale et d'une carte unique. Est également prévue la possibilité de transférer le dossier social, transfert très important en cas de mobilité entre province.

Depuis le 15 novembre 2011, les salariés étrangers ont l'obligation d'adhérer aux assurances sociales chinoises. Des conventions bilatérales (par exemple, avec la Corée du Sud ou l'Allemagne) peuvent être signées afin d'éviter la double cotisation. La France a débuté les négociations avec la Chine sur cette question.

  • L'assurance vieillesse

Comme énoncé précédemment, l'assurance vieillesse comprend trois systèmes distincts. Mais au coeur même de ces systèmes, des sous-distinctions existent. La catégorie des salariés urbains est, par exemple, composée des salariés des entreprises, des fonctionnaires (dont le système est pris en charge complètement par l'Etat) et du personnel des établissements publics (université, recherche).

Pour les salariés des entreprises, les cotisations patronales sont fixées à 20 % du total des salaires et les cotisations salariales à 8 %. Les cotisations patronales sont reversées vers un fonds commun et les cotisations salariales vont vers un compte personnel propre au salarié.

La pension de retraite versée aux salariés est issue des deux fonds.

Il est à noter que les fonctionnaires ont une pension 2,1 fois plus importante que celle des salariés.

Depuis 2012, il y a une couverture totale de la population rurale. Pour les régions les plus développées, 50 % de la pension provient d'une subvention nationale tandis que pour les régions les moins développées, l'ensemble de la pension provient de cette même subvention du Gouvernement central.

  • L'assurance maladie

A l'instar de l'assurance vieillesse, il existe les trois systèmes distincts. Pour les salariés des entreprises, les cotisations patronales sont fixées entre 6 % et 8 %, les cotisations sociales à 2 % versées également sur deux fonds différents. Une partie de la population rurale bénéficie également d'une assurance maladie.

Le remboursement des soins et des médicaments dépend du plafond fixé par chaque province. Le taux de remboursement varie également en fonction du niveau de l'hôpital ou du centre de santé.

III - La difficile application de la loi

Jin Banggi souligne qu'un grand nombre d'entreprises privées ne signe pas de contrat de travail. Il n'existe malheureusement pas de contrôle spécifique. Ce contrôle n'est effectué qu'en présence d'un litige devant les juridictions. L'absence de signature d'un contrat entraîne l'absence de versement des cotisations sociales.

Ce problème n'existe pas seulement pour les entreprises chinoises mais touchent également les entreprises étrangères.

Jin Banggi précise, enfin, qu'il n'existe pas de tribunaux du travail en Chine. En 2007 a été publiée une loi, portant sur la médiation et l'arbitrage en droit du travail. Ces étapes sont obligatoires avant la saisine du tribunal, la sentence arbitrale pouvant même, dans certains cas, être définitive et ne pas être contestable. Il est à souligner que les commissions de médiation sont constituées au sein même des entreprises. Les commissions arbitrales sont présentes au niveau des municipalités et des districts. Les commissions sont tripartites (représentant de l'employeur, représentant du syndicat et représentant de l'administration du travail).

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