Une entente visant à évincer un concurrent est contraire aux règles de concurrence même si celui-ci opère de façon illégale sur le marché. En effet, les règles de concurrence visent à protéger non seulement ce concurrent mais également la structure du marché, et partant, la concurrence en tant que telle. Tel est le principe énoncé par la CJUE dans un arrêt du 7 février 2013 (CJUE, 7 février 2013, aff. C-68/12
N° Lexbase : A4536I77). En l'espèce, l'Autorité de la concurrence de la Slovaquie a constaté que trois banques slovaques avaient violé les règles de concurrence de l'Union en décidant de résilier de manière coordonnée les contrats concernant les comptes courants d'une entreprise tchèque et de ne plus conclure de nouveaux contrats avec cette société qui fournissait des services consistant en des opérations de change scriptural. L'une des banques sanctionnée soutenait qu' elle ne pouvait avoir enfreint les règles de concurrence, dès lors que l'entreprise tchèque ne pouvait être considérée comme son concurrent, dans la mesure où elle ne disposait pas de l'autorisation requise par le droit slovaque pour exercer son activité et qu'elle opérait ainsi illégalement sur le marché slovaque. Dans son arrêt rendu sur question préjudicielle, la Cour rappelle que, lorsqu'un accord a pour objet de restreindre, d'empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence, il n'est plus nécessaire de prendre en considération ses effets concrets sur la concurrence afin d'établir son caractère illégal. La Cour précise également que les règles de concurrence de l'Union visent à protéger non pas uniquement les intérêts des concurrents ou des consommateurs, mais aussi la structure du marché et, ce faisant, la concurrence en tant que telle. En l'espèce, la Cour constate que l'entente en cause avait spécifiquement pour objet de restreindre le jeu de la concurrence. Par conséquent, le fait que l'entreprise tchèque opérait sur le marché slovaque de façon prétendument illégale est sans incidence pour déterminer si les conditions d'une infraction aux règles de concurrence sont réunies. Par ailleurs, la CJUE souligne qu'il appartient aux autorités publiques -et non aux entreprises ou aux associations d'entreprises privées- d'assurer le respect des règles de concurrence. En outre, la Cour relève que la banque slovaque, en l'espèce, ne saurait s'exonérer de sa responsabilité de l'entente au motif que son employé ayant participé à la réunion durant laquelle l'accord anticoncurrentiel a été conclu, n'avait pas reçu de mandat. Dans ce contexte, la Cour rappelle en effet que la participation à des ententes illégales constitue le plus souvent une activité clandestine non soumise à des règles formelles. Il est donc rare qu'un représentant d'une entreprise participe à une réunion en étant muni d'un mandat pour commettre une infraction.
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