Le Quotidien du 21 janvier 2022 : Durée du travail

[Brèves] Régime probatoire des heures supplémentaires d’un salarié non soumis à l’horaire collectif de travail

Réf. : Cass. soc., 5 janvier 2022, n° 20-16.172, F-D N° Lexbase : A83117HB

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[Brèves] Régime probatoire des heures supplémentaires d’un salarié non soumis à l’horaire collectif de travail. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/77415416-breves-regime-probatoire-des-heures-supplementaires-dun-salarie-non-soumis-a-lhoraire-collectif-de-t
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par Lisa Poinsot

le 20 Janvier 2022

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2, alinéa 1er N° Lexbase : L8718LGY et L. 3171-1 du Code du travail N° Lexbase : L6973K97 ; après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Faits et procédure. Un salarié est embauché à compter du 16 mars 2012 en qualité de directeur soumis à un forfait de durée de travail de 218 jours par an moyennant une rémunération mensuelle brute de 6 250 euros. Il est par la suite licencié pour faute grave. Contestant cette rupture, il saisit la juridiction prud’homale pour obtenir le paiement d’heures supplémentaires. La cour d’appel (CA Rennes, 12 février 2020, n° 17/03085 N° Lexbase : A65203E9) rejette sa demande. « Pour débouter le salarié de sa demande, la cour d’appel retient qu'il communique :

  • des feuilles d'enregistrement de ses heures de travail faisant apparaître une amplitude de 9 heures par jour et sur une base de 45 heures, sans toutefois faire mention du début et de la fin de la journée de travail ni préciser l'amplitude des pauses déjeuner ;
  • un tableau récapitulant les heures de transmission de certains mails en début de journée et en fin de journée de travail ;
  • deux témoignages.

La cour retient ensuite que ces témoignages ne sont pas suffisamment circonstanciés et ne permettent pas d'étayer suffisamment les décomptes fournis par le salarié et que le tableau relatif aux heures de transmission des mails n'est pas suffisamment fiable pour établir la durée de travail effectif et continu du salarié durant les périodes considérées. Elle ajoute que le caractère systématique d'une amplitude horaire de 9 heures de travail par jour, soit 45 heures par semaine, n'est pas justifié par le salarié qui ne fournit aucun élément précis sur l'activité réalisée et que l'employeur relève à juste titre des discordances sur les tableaux d'enregistrement de son temps de travail et la feuille de temps de nature à établir l'existence des jours de RTT auxquels le salarié a eu droit dans le cadre du forfait annulé et qu'il a omis de déduire sur le document. Elle conclut que le salarié ne fournit pas les éléments suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre.

Le salarié forme un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la règle susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure l’analyse retenue par la cour d’appel. En statuant comme elle l’a fait, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du Code du travail N° Lexbase : L0783H9U.

Pour aller plus loin : le salarié doit apporter des éléments factuels, pouvant être établis unilatéralement par ses soins mais revêtant un minimum de précision afin que l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail accomplies puisse y répondre. Ces éléments peuvent être : le décompte des heures, des relevés de temps quotidiens, un tableau ou encore des fiches de saisie informatique enregistrées sur l’intranet de l’employeur contenant le décompte journalier des heures travaillées. En l’espèce, le salarié a versé aux débats des feuilles d’enregistrement de ses heures de travail, un tableau récapitulant les heures de transmission de certains mails en début de journée et en fin de journée de travail, et deux témoignages.

Il est de l’obligation de l’employeur d’établir les documents nécessaires au décompte de la durée du travail pour les salariés non soumis à l’horaire collectif. Ces documents doivent être tenus à la disposition de l’inspection du travail.

  • v. également Cass. soc., 18 mars 2020, n° 18-10.919 N° Lexbase : A48333K9 et Cass. soc., 12 janvier 2022, n° 19-25.428 N° Lexbase : A51307IT : un tableau informatif ne détaillant pas les horaires réalisés jour après jours et se contente de faire état de la réalisation chaque semaine de 15 heures supplémentaires, sans explication, ne peut constituer un élément de preuve suffisamment précis.
  • lire aussi S. Tournaux, Assouplissement du régime probatoire des heures supplémentaires, Lexbase Social, avril 2020, n°820 N° Lexbase : N2914BYL.
  • v. ÉTUDE : Les heures supplémentaires, La charge de la preuve des heures supplémentaires, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0355ETC.

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