Le Quotidien du 24 novembre 2021 : Fiscalité des entreprises

[Brèves] Sursis d’imposition de titres à une société contrôlée avec cession immédiate par celle-ci : appréciation distincte du but de chaque opération

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 5 novembre 2021, n° 437996, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A85557A4)

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par Marie-Claire Sgarra

le 23 Novembre 2021

Le Conseil d’État a, dans un arrêt du 5 novembre 2021, apporté des précisions sur l'octroi automatique d'un sursis d'imposition pour les plus-values résultant de certaines opérations qui ne dégagent pas de liquidités.

Les faits :

  • à l'issue d'une vérification de la comptabilité d’une société ayant pour activité la gestion d'immeubles et dont le requérant est le principal associé, l'administration fiscale a estimé que l'opération par laquelle le requérant avait apporté à cette société une partie des titres de la société Pharmacie Centrale qu'il détenait, avant que cette société ne procède au rachat de ses propres titres, avait eu pour unique but de permettre au requérant de bénéficier du sursis d'imposition prévu par l'article 150-0 B du CGI (N° Lexbase : L3216LC4) ;
  • l’administration a, par suite, remis en cause ce sursis d'imposition selon la procédure de répression des abus de droit ;
  • le TA de Nîmes a rejeté la demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’IR et de contributions sociales auxquelles a été assujetti le requérant ;
  • la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l’appel formé contre ce jugement (CAA Marseille, 21 novembre 2019, n° 18MA00444 N° Lexbase : A6638Z3A).

🔎 Principe. Les dispositions applicables au report d'imposition ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés (CGI, art. 150-0 B).

⚖️ Plusieurs précisions du CE

  • l'opération par laquelle des titres d'une société sont apportés par un contribuable à une société qu'il contrôle, puis sont immédiatement cédés par cette dernière, répond à l'objectif économique ainsi poursuivi par le législateur, lorsque le produit de cession fait l'objet d'un réinvestissement à caractère économique, à bref délai, par cette société ;
  • en revanche, en l'absence de réinvestissement à caractère économique, une telle opération doit, en principe, être regardée comme poursuivant un but exclusivement fiscal dans la mesure où elle conduit, en différant l'imposition de la plus-value, à minorer l'assiette de l'année au titre de laquelle l'impôt est normalement dû à raison de la situation et des activités réelles du contribuable ;
  • lorsque les titres d'une société sont apportés par un contribuable à plusieurs entreprises qu'il contrôle, le but de chaque opération d'apport doit être apprécié distinctement.

⚖️ Solution du CE

👉 La cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, au regard du seul apport réalisé au profit de la société G... Patrimoine, que le produit retiré par cette société du rachat des titres apportés, n'avait pas été réinvesti dans une activité économique.

👉 En jugeant qu'était sans incidence sur la qualification d'abus de droit qu'elle retenait, la circonstance que l'opération, envisagée dans sa globalité, avait eu pour objectif principal de scinder les actifs de la société Pharmacie Centrale et de permettre aux associés de cette société de retrouver leur autonomie grâce à la restructuration de leur patrimoine professionnel respectif, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

👉 En déduisant de l'ensemble des éléments ainsi relevés que l'opération d'apport réalisée au profit de la société G... Patrimoine, suivie du rachat des titres apportés, était constitutive d'un abus de droit, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.

💡 Sursis d’imposition et abus de droit, les différentes étapes jurisprudentielles

✔ Le Conseil d’État a appliqué l’abus de droit en matière de report d’imposition (CE 8° et 3° ssr., 8 octobre 2010, n° 301934, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3490GBU et CE 8° et 3° ssr., 8 octobre 2010, n° 313139, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3503GBD), et l’a ensuite étendu au sursis d’imposition (CE 9° et 10° ssr., 27 juillet 2012, n° 327295, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0694IR7).

✔ Plus tard, le Conseil d’État a refusé de transmettre une QPC au Conseil constitutionnel, relative au régime de sursis d'imposition automatique des plus-values d'échange de titres, tel qu'interprété par la jurisprudence en cas d'apport-cession de titres (CE 9° et 10° ch.-r., 22 septembre 2017, n° 412408, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7392WSL).

✔ Le CE a précisé ensuite que lorsqu’une opération d’apport-cession de titres est placée en sursis d’imposition avant le 14 novembre 2012, le réinvestissement du produit de la cession dans l’acquisition de titres appartenant au contribuable ne présente pas un caractère économique (CE 9° et 10° ch.-r., 10 juillet 2019, n° 411474, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6816ZIB).

✔ Dans une affaire de gain réalisé par un dirigeant à l’occasion de la vente d’actions qu’il avait acquises dans le cadre d’un management package, les juges ont qualifié un circuit juridique d’« artificiel » alors que tous les maillons de la chaîne avaient de la substance (CE 9° et 10° ch.-r., 12 février 2020, n° 421444, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A34993EC).

Lire en ce sens, les conclusions du Rapporteur public, A. Iljic, Lexbase Fiscal, mars 2020, n° 817 (N° Lexbase : N2601BYY).

✔ Dernièrement, enfin, le CE a jugé dans le cadre d’une opération d’apport-cession que le nantissement de sommes en vue de couvrir une garantie de passif ne caractérise pas un réinvestissement (CE 3° et 8° ch.-r., 28 mai 2021, n° 442711, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A48694TI).

Lire en ce sens, les conclusions du Rapporteur public, R. Victor, Lexbase Fiscal, juillet 2021, n° 871 (N° Lexbase : N8091BYC).

 

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