La lettre juridique n°873 du 15 juillet 2021 : Propriété intellectuelle

[Brèves] Marque sonore présentée en format audio : première décision du Tribunal de l’Union européenne

Réf. : Trib. UE, 7 juillet 2021, aff. T-668/19 (N° Lexbase : A48064YN)

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par Vincent Téchené

le 13 Juillet 2021

► Un fichier audio contenant le son qui se produit à l’ouverture d’une canette de boisson, suivi d’un silence et d’un pétillement, ne peut pas être enregistré en tant que marque pour différentes boissons et pour des conteneurs pour transport et entrepôt en métal, dans la mesure où il ne présente pas un caractère distinctif.

Faits et procédure. Une société a introduit une demande d’enregistrement d’un signe sonore en tant que marque de l’Union européenne auprès de l’EUIPO. Ce signe, présenté par le biais d’un fichier audio, rappelle le son qui se produit à l’ouverture d’une canette de boisson, suivi d’un silence d’environ une seconde et d’un pétillement d’environ neuf secondes. L’enregistrement a été demandé pour différentes boissons ainsi que pour des conteneurs pour transport et entrepôt en métal. L’EUIPO a rejeté cette demande d’enregistrement au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif. Le déposant a formé un recours contre le Tribunal de l’Union européenne.

Décision. Le Tribunal de l’Union européenne rejette le recours, se prononçant, pour la première fois, sur l’enregistrement d’une marque sonore présentée en format audio. Il apporte des précisions quant aux critères d’appréciation du caractère distinctif des marques sonores et à la perception de ces marques en général par les consommateurs.

Tout d’abord, le Tribunal rappelle que les critères d’appréciation du caractère distinctif des marques sonores ne diffèrent pas de ceux applicables aux autres catégories de marques et qu’un signe sonore doit posséder une certaine prégnance permettant au consommateur visé de le percevoir en tant que marque et non pas comme un élément de nature fonctionnelle ou un indicateur sans caractéristique intrinsèque propre (v. not. Trib. UE, 13 septembre 2016, aff. T-408/15 N° Lexbase : A6013RZQ). Ainsi, le consommateur des produits ou des services en cause doit pouvoir, par la seule perception de la marque, sans qu’elle soit combinée à d’autres éléments tels que, notamment, des éléments verbaux ou figuratifs, voire une autre marque, faire le lien avec leur origine commerciale.

Ensuite, dans la mesure où l’EUIPO a appliqué par analogie la jurisprudence selon laquelle seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur n’est pas dépourvue de caractère distinctif (v. not. CJUE, 7 octobre 2004, aff. C-136/02 P, point 31 N° Lexbase : A6238DDE), le Tribunal souligne que cette jurisprudence a été développée par rapport aux marques tridimensionnelles consistant en la forme du produit lui-même ou de son emballage, alors qu’il existe une norme ou des habitudes du secteur concernant cette forme. Or, dans un tel cas, le consommateur concerné qui est accoutumé à voir une ou des formes correspondant à la norme ou aux habitudes du secteur ne percevra pas la marque tridimensionnelle comme une indication de l’origine commerciale des produits si sa forme est identique ou similaire à la ou aux formes habituelles. Le Tribunal juge que cette jurisprudence relative aux marques tridimensionnelles ne saurait, en principe, être appliquée aux marques sonores. Toutefois, bien que l’EUIPO ait appliqué, à tort, cette jurisprudence, le Tribunal constate que cette erreur n’est pas de nature à vicier le raisonnement exposé dans la décision attaquée qui se fonde également sur un autre motif.

S’agissant de cet autre motif, tiré de la perception de la marque demandée par le public pertinent comme étant un élément fonctionnel des produits en cause, le Tribunal observe, d’une part, que le son émis lors de l’ouverture d’une canette sera effectivement considéré, eu égard au type de produits, comme un élément purement technique et fonctionnel. D’autre part, le public pertinent associe immédiatement le son du pétillement des bulles à des boissons. En outre, le Tribunal relève que les éléments sonores et le silence d’environ une seconde, pris dans leur ensemble, ne possèdent aucune caractéristique intrinsèque leur permettant d’être perçus par ce public comme étant une indication de l’origine commerciale des produits. Ces éléments ne sont pas assez prégnants pour se distinguer des sons comparables dans le domaine des boissons.

Partant, le Tribunal confirme les conclusions de l’EUIPO quant à l’absence de caractère distinctif de la marque demandée.

Enfin, le Tribunal réfute le constat de l’EUIPO selon lequel il serait inhabituel sur les marchés des boissons et de leurs emballages de ne signaler l’origine commerciale d’un produit qu’à l’aide de sons au motif que ces produits sont silencieux jusqu’à ce qu’ils soient consommés. En effet, le Tribunal relève que la plupart des produits sont silencieux en eux-mêmes et ne produisent un son qu’au moment de leur consommation. Ainsi, le simple fait qu’un son ne puisse retentir que lors de la consommation ne signifie pas que l’usage de sons pour signaler l’origine commerciale d’un produit sur un marché déterminé serait encore inhabituel. Le Tribunal explique cependant qu’une éventuelle erreur de l’EUIPO à cet égard n’entraîne pas l’annulation de la décision attaquée car elle n’aurait pas eu d’influence déterminante sur le dispositif de cette décision.

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