Le Quotidien du 22 janvier 2021 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Effets de l’autorité de la chose jugée attachée à la décision d’admission d’une créance au passif d’une société civile : limitation des recours des associés

Réf. : Cass. com., 20 janvier 2021, n° 19-13.539, F-P+I (N° Lexbase : A00034DH)

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[Brèves] Effets de l’autorité de la chose jugée attachée à la décision d’admission d’une créance au passif d’une société civile : limitation des recours des associés. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/64447440-breves-effets-de-lautorite-de-la-chose-jugee-attachee-a-la-decision-dadmission-dune-creance-au-passi
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par Vincent Téchené

le 27 Janvier 2021

► L’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision irrévocable d’admission d’une créance au passif de la liquidation d’une société civile s’impose à ses associés, de sorte que, s’il n’a pas présenté contre une telle décision la réclamation prévue par l’article R. 624-8 du Code de commerce (N° Lexbase : L0908HZN), dans le délai fixé par ce texte, l’associé d’une société civile en liquidation judiciaire est sans intérêt à former tierce-opposition à la décision antérieure condamnant la société au paiement de ladite créance et sur le fondement de laquelle celle-ci a été admise.

Faits et procédure. Une banque a consenti deux prêts à une SCI. Par un arrêt devenu irrévocable, la cour d’appel de Bourges a condamné la SCI à payer à la banque diverses sommes dues au titre de ces prêts. La SCI a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires et les créances déclarées par la banque, sur le fondement de l’arrêt de la cour d’appel, ont été admises par une ordonnance du juge-commissaire.

Assignés en paiement par la banque, les associés de la SCI, tenus en tant que tels des dettes de celles-ci à proportion de leur part dans le capital social, ont formé tierce-opposition à l’arrêt ayant condamné la SCI et demandé l’annulation des deux contrats de prêt et le rejet de la demande en paiement formée par la banque contre la SCI.

L’arrêt d’appel a déclaré recevable la tierce-opposition formée par les associés et a fait droit à leurs demandes. La banque a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. Énonçant le principe précité, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel.

Elle relève que pour déclarer recevable la tierce-opposition formée par les associés, l’arrêt d’appel a retenu que c’est en vain que la banque prétend qu’à défaut pour ceux-ci d’avoir exercé un recours contre l’état des créances dans le délai d’un mois à compter de sa publication au BODACC, la créance en litige a acquis l’autorité de la chose jugée à l’égard de tous, de sorte qu’ils seraient irrecevables à former toute nouvelle contestation portant sur l’existence, la nature ou le quantum de la créance ainsi admise définitivement. En effet pour les juges d’appel, l’admission définitive de la créance de la banque, dans le cadre et pour les besoins de la liquidation judiciaire de la SCI, n’interdisait nullement aux associés, qui n’étaient ni plus ni moins parties à cette procédure collective qu’à l’instance précédente devant cette cour, d’exercer devant un juge le recours effectif reconnu par le texte précité. Au demeurant, ajoute la cour, l’examen du bordereau de déclaration de créance montre que la banque n’a pas déclaré d’autre créance que celle résultant de l’arrêt de condamnation, qui était déjà définitive à la suite du rejet du pourvoi formé contre cet arrêt. Ainsi, les associés ont-ils un intérêt manifeste à voir rétracter le jugement, dès lors qu’ils sont poursuivis en paiement par la banque pour répondre des dettes sociales de la SCI à proportion de leurs parts dans le capital social, et doivent être déclarés recevables en leur tierce-opposition.

Pour la Haute juridiction, en statuant ainsi, alors que les associés ne contestaient pas ne pas avoir, en tant qu’intéressés au sens de l’article R. 624-8, alinéa 4, du Code de commerce, présenté contre l’état des créances dans le délai d’un mois à compter de sa publication au BODACC, la réclamation prévue par ce texte, lequel leur ouvrait un accès effectif au juge au sens de l’article 6 § 1 de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), de sorte que, faute d’intérêt, leur tierce-opposition à l’arrêt condamnant la SCI, n’était pas recevable, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Observations. La décision irrévocable d'admission de la créance a autorité de la chose jugée quant à son principe, son montant et sa nature (v. not., Cass. com., 03 mai 2011, n° 10-18.031, F-P+B N° Lexbase : A2481HQX – Cass. com., 1er mars 2005, n° 03-19.539, F-D N° Lexbase : A1058DHN). En ce qui concerne la portée de l'autorité de la chose jugée à l’égard des tiers garants et coobligés, la Cour de cassation a déjà retenu que l'admission par le juge-commissaire d'une créance au passif du débiteur acquiert, quant à son existence et à son montant, l'autorité de la chose jugée à l'égard de la caution, sauf contestation par celle-ci de l'état des créances déposé au greffe (Cass. com., 22 octobre 1996, n° 94-14.570 N° Lexbase : A2677AGA). Au demeurant, concernant les associés de SCI, la Cour de cassation a déjà pu retenir qu’une créance ayant été irrévocablement admise au passif d'une SCI, elle était ainsi définitivement consacrée dans son existence et son montant à l'égard des associés, sans que ceux-ci, tenus à l'égard des tiers indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social, puissent se prévaloir de la prescription éventuelle de la créance (Cass. com., 13 octobre 2015, n° 11-20.746, F-P+B N° Lexbase : A5815NTK).

Pour aller plus loin : v. Étude : La décision du juge-commissaire en matière de déclaration et de vérification des créances, Le caractère irrévocable de la décision d'amission à titre définitif de la créance, in Entreprises en difficulté, Lexbase (N° Lexbase : E0514EXC).

 

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