Si la présomption d'intention de nuire, résultant des imputations diffamatoires elles-mêmes, peut être combattue et éventuellement détruite, par la preuve de l'existence de faits justificatifs suffisants, de nature à faire admettre la bonne foi, c'est à la personne poursuivie, et à elle seule, qu'incombe cette preuve devant la juridiction de jugement. Tel est le principe affirmé par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, dans une décision du 11 avril 2012 (Cass. crim., 11 avril 2012, n° 11-86.331, F-P+B
N° Lexbase : A0784IMY). En l'espèce, à la suite de l'envoi aux élus de la communauté d'agglomération dénommée Territoire de la Côte ouest d'une lettre anonyme mettant en cause le comportement professionnel de M. D., directeur général des services techniques de la communauté, et de la publication dans un journal de certains passages de cette missive, assortie d'un commentaire, M. D. et le "Territoire de la Côte ouest" ont porté plainte et se sont constitués parties civiles auprès du juge d'instruction de Saint-Denis de la Réunion. M. M., directeur de publication du journal, a été mis en examen. Les auteurs de la lettre litigieuse n'ont pas été identifiés. Au terme de l'information, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu, dont les parties civiles ont relevé appel. Pour dire n'y avoir lieu à suivre sur la plainte avec constitution de partie civile déposée par M. D., du chef de diffamation publique envers un fonctionnaire, à la suite de la publication de l'article du journal, retenu comme diffamatoire en ce qu'il reprenait certaines assertions de la lettre anonyme le mettant en cause, la chambre de l'instruction déclare que cet article n'a fait que relayer le contenu d'une lettre adressée à 97 élus, et nécessairement rapportée par d'autres moyens que la presse parmi la population, que le journaliste a pris soin d'indiquer dans son article qu'il reprenait le contenu d'une lettre anonyme, qu'il n'a cité que certains passages dont le contenu n'excède pas les limites acceptables de la liberté d'expression, qu'il s'est abstenu de prendre position, et, qu'ainsi, la diffusion de l'information, relative à l'envoi de cette lettre, reste dans le cadre de la libre expression et du droit à l'information. Saisie d'un pourvoi, la Chambre criminelle de la Cour de cassation censure la décision des juges du fond, au visa des articles 29, 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881, sur la liberté de la presse (
N° Lexbase : L7589AIW).
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