La lettre juridique n°850 du 14 janvier 2021 : Transport

[Brèves] Indemnisation forfaitaire en cas de retard important ou d’annulation d’un vol : exclusion des enfants en bas âge sans billet d’avion

Réf. : Cass. civ. 1, 6 janvier 2021, n° 19-19.940, F-P (N° Lexbase : A89774B4)

Lecture: 5 min

N6034BY7

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Indemnisation forfaitaire en cas de retard important ou d’annulation d’un vol : exclusion des enfants en bas âge sans billet d’avion. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/64018529-breves-indemnisation-forfaitaire-en-cas-de-retard-important-ou-dannulation-dun-vol-exclusion-des-enf
Copier

par Vincent Téchené

le 13 Janvier 2021

► L'article 3 § 3 du Règlement n° 261/2004 (N° Lexbase : L0330DYU) exclut du champ d'application les passagers qui voyagent gratuitement, de sorte que l’enfant âgé de moins de deux ans, qui a voyagé sans billet d'avion sur les genoux de ses parents, ne peut pas bénéficier de l'indemnisation forfaitaire réclamée au transporteur aérien.

Faits et procédure. Un couple qui disposait d’une réservation délivrée par un transporteur aérien pour eux-mêmes et leurs trois enfants mineurs, sur le vol, sont parvenus à destination avec un retard de 22 heures 28 à la suite de l'annulation de ce vol. Sur le fondement du Règlement n° 261/2004 du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers, ils ont obtenu du transporteur aérien le versement d'une indemnité de 400 euros pour chacun d'eux et deux des enfants. Le transporteur aérien ayant refusé le versement de cette indemnité pour leur autre enfant en raison de son jeune âge et de ses conditions de voyage, ils l'ont assigné en paiement de cette indemnité et de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Le tribunal d’instance d'Ivry-sur-Seine ayant rejeté leur demande, ils ont formé un pourvoi en cassation.

Décision. Pour approuver la solution retenue par le tribunal, la Cour de cassation nous livre un arrêt tout particulièrement argumenté, dans lequel elle s’appuie sur le texte, son économie et son objectif, mais dans lequel elle convoque également un avis du CSE et la jurisprudence d’un autre État membre.

Elle rappelle, d’abord, que l’article 3 § 3 du Règlement n° 261/2004 dispose : « Le présent Règlement ne s'applique pas aux passagers qui voyagent gratuitement ou à un tarif réduit non directement ou indirectement accessible au public. Toutefois, il s'applique aux passagers en possession d'un billet émis par un transporteur aérien ou un organisateur de voyages dans le cadre d'un programme de fidélisation ou d'autres programmes commerciaux. » Ainsi, pour la Haute juridiction, il ressort du libellé de la première phrase de ce paragraphe que le membre de phrase « non directement ou indirectement accessible au public » se rapporte exclusivement aux termes « tarif réduit ». Elle relève par ailleurs que cette analyse se vérifie dans d'autres versions linguistiques de ce règlement, telles que les versions en langues allemande, anglaise, italienne et espagnole. Ainsi, il s'ensuit que l'article 3 § 3 du Règlement exclut du champ d'application de celui-ci les passagers qui voyagent à titre gratuit, même si cette gratuité est prévue dans une offre accessible au public.

La Cour ajoute que cette interprétation est corroborée par l'économie et l'objectif de ce Règlement, visant à renforcer les droits des passagers conférés par le Règlement n° 295/91 du 4 février 1991l, établissant des règles communes relatives à un système de compensation pour refus d'embarquement dans les transports aériens réguliers (N° Lexbase : L6431AUQ). Ainsi, alors que le Règlement n° 295/91 ne couvrait que les hypothèses de refus d'embarquement, le Règlement n° 261/2004 prévoit des droits particuliers en faveur des personnes à mobilité réduite (article 11), la reconnaissance d'un droit des passagers à l'information (article 14), le droit au remboursement en cas de déclassement (article 10, paragraphe 2), ainsi qu'un éventail de mesures différenciées en cas de refus d'embarquement de passagers contre leur volonté, d'annulation de leur vol et de vol retardé.

Cependant, il reprend à l'article 3 § 3 la restriction énoncée à l'article 7 du Règlement n° 295/91, aux termes duquel : « Le transporteur aérien n'est pas tenu au paiement d'une compensation de refus d'embarquement lorsque le passager voyage gratuitement ou à des tarifs non disponibles directement ou indirectement au public ».

La Cour ajoute que le maintien de cette exclusion du champ d'application du Règlement n° 261/2004 a également été relevé dans l'avis du Comité économique et social sur la « proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles communes en matière d'indemnisation des passagers aériens et d'assistance en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol ».

Enfin, cette interprétation de l'article 3 § 3 du Règlement n° 261/2004 a été retenue par une cour suprême d'un autre État membre (Cour fédérale d'Allemagne – Bundesgerichtshof – dans l'arrêt du 17 mars 2015 X ZR 35/14).

En outre, si cet article énonce à la deuxième phrase du paragraphe 3 que l'exclusion ne s'applique pas aux passagers en possession d'un billet émis dans le cadre d'un programme commercial, cette disposition ne concerne pas un très jeune enfant qui voyage sans billet sur les genoux de ses parents.

Elle en conclut que, en retenant que l'article 3 § 3 du Règlement n° 261/2004 exclut du champ d'application les passagers qui voyagent o gratuitement et que l'enfant en cause, âgée de moins de deux ans, qui a voyagé sans billet d'avion sur les genoux de ses parents, ne pouvait bénéficier de l'indemnisation forfaitaire réclamée au transporteur aérien, le tribunal a fait une application exacte de cette disposition.

Par ailleurs, elle énonce qu’en l'absence de doute raisonnable quant à l'interprétation de ladite disposition du droit de l'Union européenne, il n'y a pas lieu de saisir la CJUE d'une question préjudicielle.

newsid:476034

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.