Réf. : Cass. crim., 29 septembre 2020, n° 20-82.509 (N° Lexbase : A41423WC)
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par Adélaïde Léon
le 28 Octobre 2020
► La nature criminelle des infractions de faux et complicité de faux en écriture publique, tenant à la qualité de personne dépositaire de l’autorité publique, doit être notifiée à la personne mise en examen dès le début de sa garde à vue ;
Le défaut de notification de cette qualification porte nécessairement atteinte aux intérêts des personnes concernées dès lors que leurs auditions n’ont pas été enregistrées, comme elles auraient dû l’être en application de l’article 64-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8170ISE).
Rappel des faits. À la suite du contrôle de cinq plaintes suspectes, dont l’une déposée par un officier de police, le procureur de la République a ordonné une enquête préliminaire du chef de faux en écriture publique par personne dépositaire de l’autorité publique. À l’issue de cette enquête, une information judiciaire a été ouverte, par le procureur de la République, contre personne non dénommée des chefs de faux en écriture publique, escroqueries et complicité d’escroqueries. La saisine du juge d’instruction a été étendue à de nouveaux faits par plusieurs réquisitoires supplétifs pris des mêmes chefs.
Sur commission rogatoire du juge d’instruction, deux personnes, dont l’officier de police, ont été placées en garde à vue des chefs délictuels, pour le premier, de faux en écriture publique, escroqueries et complicité et, pour la seconde, d’escroqueries et complicité, complicité de faux en écriture publique.
À l’issue de cette garde à vue, l’officier de police a été mis en examen du chef criminel de faux en écriture publique par dépositaire de l’autorité publique et des chefs délictuels d’escroqueries et complicité d’escroquerie, le second prévenu du chef criminel de complicité de faux en écriture publique par dépositaire de l’autorité publique ainsi que des chefs d’escroqueries et complicité.
Le premier a saisi la chambre de l’instruction d’une requête tendant à voir annuler les procès-verbaux de sa garde à vue et les actes de procédure subséquents. Par la suite, le second a déposé un mémoire sollicitant également que soit prononcé la nullité des procès-verbaux de sa garde à vue.
Décision de la chambre de l’instruction. La chambre de l’instruction a écarté le moyen de nullité des deux requérants au motif que s’il ressortait de l’étude de la procédure que le ministère public avait pu envisager de retenir une qualification criminelle, il résultait des réquisitoires introductifs et supplétifs qu’il avait finalement choisi, en opportunité, une qualification délictuelle. Les intéressés avaient donc été placés en garde à vue pour des faits de nature délictuelle et leur audition n’avait dès lors pas à faire l’objet d’un enregistrement audiovisuel. Ce n’est qu’au stade de la mise en examen des intéressés que le juge d’instruction avait restitué aux faits dont il était saisi la qualification criminelle.
Moyens du pourvoi. Les deux mis en examen ont formé un pourvoi estimant que la qualification criminelle de l’infraction de faux en écriture publique par un dépositaire de l’autorité publique aurait dû leur être notifiée dès le début de la garde à vue. Selon les intéressés, il appartenait à la chambre de l’instruction de rechercher si la qualité de dépositaire de l’autorité publique de l’officier de police, qui était connue depuis le début de la procédure et justifiait à elle seule la qualification criminelle des infractions de faux et complicité de faux en écriture publique, n’aurait pas dû imposer l’enregistrement audiovisuel des auditions.
Décision de la Cour. La Chambre criminelle casse l’arrêt de la chambre de l’instruction au visa de l’article 63-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4971K8M). Elle rappelle que toute personne placée en garde à vue doit immédiatement être informée de la qualification de l’infraction qu’elle est soupçonnée avoir commise ou tenté de commettre. Elle note qu’en l’espèce, la circonstance aggravante, tenant à la qualité de personne dépositaire de l’autorité publique, agissant dans l’exercice de ses fonctions, et justifiant la qualification criminelle, était établie. Dès lors, il appartenait au juge d’instruction, sous le contrôle duquel était placée la mesure de garde à vue et qui a mis en examen les intéressés, de leur faire notifier la qualification criminelle de l’infraction retenue.
La Haute juridiction affirme que le défaut de notification de cette qualification criminelle a nécessairement porté atteinte aux intérêts des mis en examen dès lors que leurs auditions n’ont pas fait l’objet d’un enregistrement audiovisuel comme le prévoit l’article 64-1 du Code de procédure pénale en matière criminelle.
Pour aller plus loin : C. Lanta de Bérard, ÉTUDE : La garde à vue et les auditions, Le placement en garde à vue, in Procédure pénale (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E46233C9) |
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