Dans un arrêt du 16 février 2012, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) estime que la Cour de cassation n'a pas apporté une limitation excessive au droit d'accès des requérants à un tribunal, en jugeant que le moyen litigieux était nouveau (CEDH, 16 février 2012, req. 17814/10
N° Lexbase : A5820ICK). En l'espèce, une requête a été dirigée contre la France par la société T. qui a saisi la Cour le 16 mars 2010 en vertu de l'article 34 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (
N° Lexbase : L4769AQP). La requérante allègue qu'elle a été privée de son droit à un procès équitable, du fait de ce qu'un moyen de cassation déterminant a été, à tort, qualifié de nouveau par la Cour de cassation, et donc déclaré irrecevable (Cass. civ. 2, 17 septembre 2009, n° 08-20.478, F-D
N° Lexbase : A1079ELK). La Cour estime que le recours à la notion de "
moyen nouveau" justifierait davantage de motivation. En effet, un renforcement de cette dernière serait à même d'éclairer utilement les justiciables sur le sens de la décision, tout en aidant la Cour à jouer son rôle, dont elle a déjà rappelé qu'il se limite à vérifier la compatibilité avec la Convention des effets de pareille interprétation du droit interne. La Cour constate que la requérante a été assistée par un avocat durant toute la procédure interne et, notamment, devant la Cour de cassation, par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. Spécialisé dans cette procédure, ce dernier était parfaitement à même d'apprécier les conditions de recevabilité du pourvoi de la requérante. Or la notion de moyen nouveau mélangé de fait et de droit fait partie intégrante de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui y a fréquemment recours. En outre, lorsque la nouveauté du moyen n'est pas soulevée par le défendeur au pourvoi, il est de pratique courante que le rapporteur indique dans son rapport, lequel est communiqué aux parties, que l'irrecevabilité en raison de la nouveauté du moyen est susceptible d'être relevée par la Cour de cassation, ce qui permet précisément au demandeur au pourvoi de s'exprimer sur cette question. Or, en l'espèce, la société requérante ne soutient ni que ce rapport n'aurait pas été transmis à son avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, ni que ce document préparatoire aurait omis de mentionner que la seconde branche du moyen pourrait être considérée comme irrecevable en raison de sa nouveauté. Par conséquent, au vu de ce qui précède, "
la Cour considère qu'en jugeant que le moyen litigieux était nouveau, la Cour de cassation n'a ni commis une erreur manifeste d'appréciation, ni apporté une limitation excessive au droit d'accès des requérants à un tribunal". Par conséquent, il n'y a pas eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention (
N° Lexbase : L7558AIR).
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