Le Quotidien du 14 avril 2020 : Covid-19

[Brèves] Prorogation de plein droit de la détention provisoire pendant la crise sanitaire : les recours rejetés par le Conseil d’État

Réf. : CE référé, 3 avril 2020, deux arrêts, n° 439877 (N° Lexbase : A66303KR) et n° 439894 (N° Lexbase : A66273KN)

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[Brèves] Prorogation de plein droit de la détention provisoire pendant la crise sanitaire : les recours rejetés par le Conseil d’État. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/57621122-breves-prorogation-de-plein-droit-de-la-detention-provisoire-pendant-la-crise-sanitaire-les-recours-
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par June Perot

le 22 Avril 2020

► Le Conseil d’État a rejeté les recours formés par plusieurs syndicats et associations contre la prorogation de plein droit de la détention provisoire, prévue par l’ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 (N° Lexbase : L5740LWI), validant ainsi son allongement automatique sans débats ni intervention du juge judiciaire (CE référé, 3 avril 2020, deux arrêts, n° 439877 N° Lexbase : A66303KR et n° 439894 N° Lexbase : A66273KN).

Contexte. Afin de lutter contre la propagation du covid-19, la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 (N° Lexbase : L5506LWT) a introduit de nombreuses dispositions, notamment pénales, et a habilité le Gouvernement à adapter, pendant la période actuelle et par voie d’ordonnance, la procédure pénale. L’idée affichée par l’ordonnance du 25 mars 2020 ? permettre « la continuité de l’activité des juridictions pénales essentielle au maintien de l’ordre public ». Ainsi, l’article 16 de l’ordonnance proroge, de plein droit, les délais maximums de détention provisoire ou d’assignation à résidence sous surveillance électronique.

Problématique. Une circulaire du 26 mars 2020 (N° Lexbase : L6081LW7) indique que ces dispositions ont une incidence immédiate sur tous les mandats de dépôt et débats de prolongation, quand bien même les durées totales de détention provisoire prévues par le Code de procédure pénale ne seraient pas atteintes pendant la période d’urgence sanitaire. Cela emporte comme conséquence qu’un « détenu placé en détention provisoire pour une affaire criminelle au mois de février 2020 serait privé de débat contradictoire devant un juge jusqu’en août 2021, au lieu de février 2021 » (Lettre de l’AFMI à Madame la ministre de la Justice, 6 avril 2020, site AFMI). On comprend donc que les termes de la circulaire semblent aller au-delà de ce que prévoit littéralement l’ordonnance du 25 mars 2020.

Recours. Ces divergences d’interprétation ont donc conduit différents syndicats et associations à saisir le Conseil d’État, en référé, afin de faire suspendre l’exécution de la circulaire du 26 mars 2020, mais également suspendre l’exécution de l’article 16 de l’ordonnance du 25 mars 2020.

Décision. Le Conseil d’État observe que l’article 11, d, de la loi du 23 mars 2020 a habilité le Gouvernement à adapter les règles relatives au déroulement et à la durée des détentions provisoires, tout en fixant certains seuils, repris par l’ordonnance. Le Conseil retient que l’ordonnance s'est bornée à allonger ces délais, sans apporter d'autre modification aux règles du Code de procédure pénale qui régissent le placement et le maintien en détention provisoire. Elle a précisé que ces prolongations ne s'appliquent qu'une seule fois au cours de chaque procédure et a rappelé qu'elles s'entendent sans préjudice de la possibilité pour la juridiction compétente d'ordonner à tout moment, d'office, sur demande du ministère public ou sur demande de l'intéressé, la mainlevée de la mesure.

Ainsi, en adoptant de telles mesures et en retenant des allongements de deux, trois ou six mois, dans les limites imparties par la loi d'habilitation, l'ordonnance contestée ne peut être regardée, eu égard à l'évolution de l'épidémie, à la situation sanitaire et aux conséquences des mesures prises pour lutter contre la propagation du covid-19 sur le fonctionnement des juridictions, sur l'action des auxiliaires de justice et sur l'activité des administrations, en particulier des services de police et de l'administration pénitentiaire, comme d'ailleurs sur l'ensemble de la société française, comme portant une atteinte manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées par les requérants.

Le juge administratif considère donc que les demandes ne sont pas fondées et les rejette, sans audience contradictoire ni instruction publique…

Inquiets, les magistrats instructeurs ont adressé une lettre au ministre de la Justice, invoquant une insécurité juridique et appelant la ministre à indiquer clairement que seules les détentions provisoires non prolongeables en temps ordinaire, et arrivant à expiration pendant la période de confinement, sont prorogées de plein droit de deux, trois ou six mois.

« S’agissant des détentions provisoires prolongeables, tous les débats de prolongation des mandats de dépôt pourraient être maintenus pendant la période du confinement. L’article 19 de l’ordonnance, qui prévoit qu’ils puissent se tenir par visioconférence ou par écrit, trouverait ainsi naturellement son application. Ces solutions permettraient de préserver le droit des justiciables en détention provisoire d’accéder à un juge, dans le respect des principes fondamentaux de la procédure pénale, notamment du principe du contradictoire, tout en respectant les impératifs sanitaires liés à la pandémie du Covid 19 ».

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