Le Quotidien du 23 mars 2020 : Bancaire

[Brèves] Encore l’année « lombarde »… la Cour de cassation précise l'état du droit

Réf. : Cass. civ. 1, 11 mars 2020, n° 19-10.875, F-P+B (N° Lexbase : A75773IH)

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par Jérôme Lasserre Capdeville

le 17 Mars 2020

► La mention, dans l’offre de prêt, d’un taux conventionnel calculé sur la base d’une année autre que l’année civile, est sanctionnée exclusivement par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l’article L. 312-33 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3106DAB), lorsque l’inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale.

Tel est l’enseignement d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 11 mars 2020 (Cass. civ. 1, 11 mars 2020, n° 19-10.875, F-P+B N° Lexbase : A75773IH).

Contexte. Le recours à une année de 360 jours, pour calculer le taux conventionnel d’un prêt, c’est-à-dire l’application de l’année « lombarde », suscite encore et toujours des discussions devant la Cour de cassation. On se souvient que, par une décision remarquée du 27 novembre 2019, la Haute juridiction était venue déclarer que l’emprunteur « doit, pour obtenir l’annulation de la stipulation d’intérêts, démontrer […] que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d’un montant supérieur à la décimale prévue à l’article R. 313-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L3654IPZ) » (Cass. civ. 1, 27 novembre 2019, n° 18-19.097, F-P+B+I N° Lexbase : A3629Z48 ; Lexbase éd. affaires, 2020, n° 616, obs. J. Lasserre-Capdeville N° Lexbase : N1409BYT et n° 619, obs. M. Correia N° Lexbase : N1750BYH). Ce nouvel arrêt vient alors préciser l’état du droit applicable lorsque la solution précitée est amenée à se rencontrer.

L’affaire. Le 6 février 2014, une banque X avait consenti à M. L. et Mme B. trois prêts immobiliers. Cependant, reprochant à la banque d’avoir calculé les intérêts des prêts sur la base d’une année de trois-cent-soixante jours, les emprunteurs l’avaient assignée en annulation des stipulations de l’intérêt conventionnel et substitution de l’intérêt légal. La cour d’appel de Chambéry (CA Chambéry, 13 septembre 2018, n° 17/01284 N° Lexbase : A4661X4E) avait, par une décision du 13 septembre 2018, annulé les stipulations de l’intérêt conventionnel et ordonné la substitution de l’intérêt légal.

Les moyens. La banque avait alors formé un pourvoi en cassation. Elle y rappelait que la déchéance du droit aux intérêts, dans la proportion fixée discrétionnairement par les juges du fond, est la seule sanction encourue dans le cas où la clause se référant à l’année de 365 jours figure dans l’offre de prêt telle qu’acceptée par l’emprunteur, ce qui était le cas en l’espèce pour les trois crédits litigieux. Or, pour prononcer la nullité des stipulations d’intérêt et la substitution du taux légal aux taux conventionnels, la cour d’appel avait retenu que la déchéance du droit aux intérêts concernait seulement l’erreur affectant le TEG. Dès lors, pour le moyen, en statuant ainsi, la cour d’appel aurait violé, par refus d’application, les anciens articles L. 312-8 (N° Lexbase : L7512IZA) et L. 312-33 du Code de la consommation.

La décision. La Cour de cassation donne raison à la banque en se fondant sur ces mêmes articles, dans leur version applicable au moment des faits. Selon elle, il résulte de ces textes que « la mention, dans l’offre de prêt, d’un taux conventionnel calculé sur la base d’une année autre que l’année civile, est sanctionnée exclusivement par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l’article L. 312-33 du même code, lorsque l’inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale ».
Or, après avoir relevé que l’offre de prêt méconnaissait la règle imposant de calculer le taux d’intérêt conventionnel sur la base de l’année civile, la cour d’appel de Chambéry avait annulé la clause stipulant l’intérêt conventionnel et ordonné la substitution de l’intérêt légal. Dès lors, pour la Cour de cassation, les juges du fond n’avaient pas tiré les conséquences légales de leurs constatations et violé les textes précités.

Précisions. Par cette nouvelle décision, la Haute juridiction cherche à mettre un terme définitif à son ancienne jurisprudence (Cass. civ. 1, 19 juin 2013, n° 12-16.651, FS-P+B+I N° Lexbase : A2042KH4 ; v. Lexbase éd. affaires, 2013, n° 346, obs. A. Bordenave N° Lexbase : N7951BTN) qui retenait, à l’inverse, la déchéance du droit aux intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel lorsque le prêteur avait calculé le taux conventionnel en recourant à une année de 360 jours. Il n’en va plus ainsi désormais.
Cette extension donnée au champ d’application de la déchéance du droit aux intérêts fait néanmoins songer à une solution retenue, récemment, en matière d’omission du taux de période (Cass. civ., 5 février 2020, n° 19-11.939, FS-P+B+I N° Lexbase : A37993D3 ; v. Lexbase éd. affaires, 2020, n° 624, obs ; J Lasserre-Capdeville N° Lexbase : N2195BYX et n° 626, obs. G. Biardeaud N° Lexbase : N2400BYK).
La nouvelle sanction est, dans tous les cas, plus favorable au prêteur que l’ancienne. En effet, la déchéance du droit aux intérêts envisagée peut jouer « en totalité ou dans la proportion fixée par le juge ». Ce dernier aura ainsi un pouvoir de modulation, logiquement apprécié par le banquier fautif. A l’opposé, avec la nullité de la clause prévoyant le taux conventionnel et sa substitution par le taux légal, le prêteur se voit opposer une sanction échappant à toute limitation de la part du juge. La disparition de cette dernière solution devrait par conséquent être appréciée par les banques.

 

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