Le Quotidien du 24 février 2020 : Environnement

[Brèves] Loi du 10 février 2020, relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire : des avancées progressives

Réf. : Loi n° 2020-105 du 10 février 2020, relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (N° Lexbase : L8806LUP)

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par Stephanie Gandet, Avocat associé au Barreau de Lyon, spécialiste en droit de l’environnement, cabinet Green Law Avocat

le 19 Février 2020

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020, relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (N° Lexbase : L8806LUP), fait suite au lancement, en octobre 2017, de la concertation préparatoire à la feuille de route «économie circulaire», ainsi qu’à son achèvement avec l’accord trouvé en commission mixte paritaire le 8 janvier 2020.

I - Les mesures phares de la loi

 

La loi est dense et elle impactera plusieurs aspects de l’économie française. Les plus notables touchent la réduction du plastique, la gestion des déchets, la responsabilité des producteurs (REP) et le gaspillage alimentaire.

Elle prévoit ainsi dans son titre II un renforcement de l’information des consommateurs. L’article 13 de la loi indique que cette meilleure information sera traduite par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié permettant d’informer sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits, entre autres l’incorporation de matière recyclée, la durabilité, la compostabilité, la présence de substances dangereuses. Toutes ces informations seront visibles ou accessibles par le consommateur au moment de l’achat. L’entreprise mettant sur le marché des produits qui comportent des perturbateurs endocriniens doit mettre à la disposition du public un document permettant de les identifier.

Si l’une des mesures phares de cette loi est la création de l’indice de réparabilité qui permet d’informer le consommateur sur la capacité à réparer le produit concerné, se posera la question des critères objectifs qui détermineront un tel indice, et donc sa fiabilité.

La loi du 10 février 2020 vient également, par son titre I et III, donner une nouvelle dimension à la lutte contre le gaspillage en réduisant notamment le gaspillage alimentaire, d'ici 2025, de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective. Egalement, les produits de grande consommation vont se voir appliquer l’interdiction de destruction des invendus, qui sera renforcée de manière générale. Enfin, plusieurs dispositions touchent à la vente de produits sans emballage qui se voit définie et renforcée avec par exemple une tarification plus basse pour la personne qui achète une boisson dans un récipient réemployable plutôt qu’un gobelet jetable.

Le texte prévoit également de nouvelles mesures afin de lutter contre le plastique. Tout d’abord, la France doit tendre vers 100 % de plastique recyclé d'ici 2025 et se donne pour objectif d'atteindre la fin de la mise sur le marché d'emballages en plastique à usage unique d'ici à 2040. Plusieurs mesures d’interdiction rentreront progressivement en vigueur (par exemple au 1er janvier 2023 : la vaisselle jetable dans les fast-foods sera interdite pour les repas servis sur place ; au 1er janvier 2022, les sachets de thé en plastique, les emballages en plastique pour les fruits et légumes de moins de 1,5 kg et les jouets en plastique distribués gratuitement dans les fast-foods seront interdits ; les établissements recevant du public devront mettre à disposition une fontaine à eau ; expédier des journaux ou magazines sous emballage plastique sera interdit ; les étiquettes sur les fruits et légumes seront interdits).

Concernant le réemploi des emballages, un décret viendra définir la proportion minimale d’emballages réemployés à mettre sur le marché annuellement en France afin d’atteindre les objectifs prévus à l’article article L. 541-1 I) du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3168KGG). Egalement, d’ici le 1er janvier 2030, les producteurs, metteurs sur le marché ou importateurs responsables d’au moins 10 000 unités de produits sur le marché par an, ayant un chiffre d’affaires supérieur à dix millions d’euros, vont devoir justifier que les déchets découlant des produits qu’ils fabriquent, mettent sur le marché ou importent peuvent intégrer une filière de recyclage, sauf les produits qui pour des raisons techniques ne peuvent pas intégrer ces filières.

La loi du 10 février accorde enfin une place prépondérante à la réforme de la responsabilité des producteurs (REP). En effet, plusieurs nouvelles filières REP sont créées par exemple les emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les professionnels, les jouets, les produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment destinés aux ménages ou aux professionnels…etc. La création d'une filière pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment est l'une des mesures à souligner.

La loi modifie l’article L. 541-4-4 du Code de l’environnement en prévoyant que «dans le cadre d'un chantier de réhabilitation ou de démolition de bâtiment, si un tri des matériaux, équipements ou produits de construction est effectué par un opérateur qui a la faculté de contrôler les produits et équipements pouvant être réemployés, les produits et équipements destinés au réemploi ne prennent pas le statut de déchet», outre d’autres dispositions relatives au statut de déchet.

Enfin, les éco-organismes devront prévoir dans leur cahier des charges les objectifs de réduction de la mise sur le marché d'emballages, notamment d'emballages plastiques à usage unique. La non-atteinte de ces objectifs est sanctionnée.

 

II - Une entrée en vigueur des textes à différentes échéances

 

Si plusieurs avancées sont à saluer, les délais de mise en œuvre apparaissent toutefois longs, et s’expliquent par la nécessité de modifier en profondeur certaines filières et pratiques de secteurs économiques.

Ainsi, plusieurs articles ont une entrée en vigueur différée. Parmi les plus importants :

- l’indice de durabilité des produits sera communiqué par les producteurs ou importateurs aux vendeurs et à toute personne qui en fait la demande à compter du 1er janvier 2024 ;

- les publicités et catalogues visant à faire de la promotion commerciale à l’attention des consommateurs sont imprimés sur du papier recyclé ou issu de forêts gérées durablement, à partir du 1er janvier 2023 ;

- les emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les professionnels font partis de la filière REP à compter du 1er janvier 2025 (toutefois, pour les professionnels ayant une activité de restauration, ces dispositions s’appliquent à compter du 1er janvier 2021) ;

- les produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment destinés aux ménages ou aux professionnels feront partis de la filière REP à compter du 1er janvier 2022 ;

La France se donne pour objectif d'atteindre un taux de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique pour boisson de 77 % en 2025 et de 90 % en 2029 ;

A compter du 1er janvier 2025, tout producteur ou détenteur de déchets met en place un tri des déchets à la source et, lorsque les déchets ne sont pas traités sur place, une collecte séparée de ses déchets, notamment du papier, des métaux, des plastiques, du verre, du bois et des textiles ;

Concernant le plastique à usage unique, il est mis fin à la mise à disposition, à compter du 1er janvier 2020, pour les gobelets, verres et assiettes jetables de cuisine pour la table. A compter du 1er janvier 2021, il est mis fin, entre autres, aux pailles et piques à steak. Également, à compter du 1er janvier 2022, l’Etat n’achète plus de plastique à usage unique pour ses évènements ou sur les lieux de travail.

 

III - La nécessité de parution de plusieurs décrets d’application

 

Plusieurs dispositions prévues par la loi n° 2020-105 vont devoir être précisées ultérieurement par un décret d’application. C’est le cas :

- pour les qualités et caractéristiques environnementales des produits (article 13 de la loi), un décret viendra préciser notamment la définition de ces termes, les produits concernés, les modalités d’information des consommateurs ;
- idem pour les perturbateurs endocriniens.

- d’un décret viendra préciser les modalités d’application de l’indice de réparabilité et de durabilité ;

- d’un label national «anti-gaspillage alimentaire» et ses modalités d’application seront fixées par décret ;

- de tout produit de consommation courante peut être vendu en vrac, selon l’article 41 de la loi, sans entrée en vigueur différée (toutefois, certains produits, pour des raisons de santé publique, ne peuvent faire l’objet d’une vente sans emballage, ces exceptions étant fixées par décret) ;

- d’un décret qui fixera les modalités de l’interdiction de l’impression et distribution systématique des tickets de caisse ;

- des modalités de mise en place et de gestion de la consigne qui seront définies par décret en Conseil d’Etat ;

Les modalités d’application de l’article voulant pour les sites de production, de manipulation et de transport de granulés de plastiques industriels qu’ils soient dotés d'équipements et de procédures permettant de prévenir les pertes et les fuites de granulés dans l'environnement seront également prévues par décret.

Enfin, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le devenir des déchets exportés à l'étranger par la France.

Cette loi présente donc certaines avancées, que certains jugeront trop timides, avec une entrée en vigueur encore trop lointaine mais indéniablement, l’information des consommateurs peut constituer l’un des leviers de réforme plus rapide de filières qui auront tout intérêt à s’adapter à leurs nouvelles attentes.

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